Concours de fanfics de Noël 2008 : création de Noctali64

Neige éternelle.

Les vents se déchaînaient, nappant le sol boueux d'un mince tissu de neige.
Il faisait froid, mais d'un de ces froid qui a bercé notre enfance, ce froid que l'on chasse vite, en se blottissant au coin du feu où le sapin majestueux attend d'être couverts de cadeaux soigneusement emballés et entourés d'un ruban rouge.
On imaginait aisément une multitude d'enfants émerveillés, se pressant à la fenêtre pour admirer la neige et les paysages recouverts d'un blanc crémeux et immaculé.
Cette douce vision eût suffit à mettre de bonne humeur n'importe qui, et à lui faire oublier ses tracas, le temps de la nuit de Noël.
N'importe qui, exceptée une personne.

C'était ce jour là que Charles Franway avait choisi pour exécuter l'opération qu'il attendait depuis des années.
Bien sur, le fait que la nuit idéale lui ait parut être celle du 25 décembre était parfaitement anodin, et il ne voyait dans la fête de Noël qu'une occasion de plus de perdre du temps en balivernes, et de dépenser de l'argent que l'on aurait mieux fait d'économiser. Non, il avait bien mieux à faire, se disait-il en plantant avec puissance sa lourde canne dans la neige de la forêt Etergelle.
Il s'autorisa un petit sourire. Quelle chance il avait eu, il y a quelques années, lorsque ce vieux karateka alcoolique – d'où disait il qu'il venait, déjà ? Irisia, peut être. – lui avait vendu cette ancienne carte.
En la plaçant près du feu, il avait réussi à faire apparaître des caractères à première vue incompréhensibles, datant probablement des civilisations antiques qui vivaient autrefois vers Autequia, un lieu inhabité, à présent.
A force de longues recherches, il avait réussi à comprendre qu'elles indiquaient la position du pokemon légendaire Artikodin, qui n'apparaissait à Etergelle que les nuits où sévissaient de puissantes tempêtes de neige.
Franway était déterminé à le capturer, et ce pokemon ferait sa renommée. Enfin, son nom serait connu dans le monde entier, et ses études reconnues !

L'homme s'arrêta un instant et l'image très ancienne d'un enfant se forma dans sa tête. On pouvait lire dans ses yeux bleus une innocence et une joie indescriptibles. Il jetait à de multiples reprises un œil impatient à l'horloge, attendant que les douze coups de minuit sonnent et que le père Noël arrive enfin.
Pourtant, il n'était que dix heures lorsqu'il entendit la vieille sonnerie de la maison retentir. Sa mère alla ouvrir. Deux hommes en noir se trouvaient là, l'air visiblement embarrassés.

Franway chassa cette pensée. Le passé était le passé, on ne pouvait plus y remédier.
Il ne devait pas se laisser émouvoir, quelques heures avant son but ultime. Après avoir capturé l'oiseau de glace, il pourrait l'étudier, et ses recherches sur les Pokemon deviendraient vite renommées dans le monde entier. Tous ces savants arrogants qui l'avaient méprisés, bientôt ils le supplieraient pour assister à ses conférences.
Franway lança sa Poke Ball. Elle tournoya un instant en l'air avant de laisser s'évaporer un fin nuage rouge, qui se matérialisa immédiatement en un pokemon au pelage bleu ciel.
- Tiens toi prêt, Givrali.
Le pokemon laissa échapper un miaulement cristallin.

Après une longue marche dans la foret, les deux compagnons se rendirent compte qu'ils avaient beau marcher, la grotte indiquée par une croix rouge sur la carte n'apparaissait toujours pas.
Franway grogna. Il était pourtant certain de toucher au but.
Il aperçu alors une imposante roche entièrement recouverte de glace. Son bleu givré lui donnait une texture lisse et brillante.
Elle lui rappela immédiatement celle qu'il avait trouvée près de Frimapic, lors d'un de ses nombreux voyages. C'était à son contact que son jeune Evoli était devenu le Pokemon poudreuse qui le suivait à présent partout.
Franway lança un regard presque amical au Givrali, avant de reprendre son air dédaigneux habituel. Bah, ces Pokemon n'était que des instruments d'étude, rien de plus.

Une heure passa. Franway s'arrêta quelques minutes et souffla. Bien que n'ayant que quarante-cinq ans, il était souvent pris de grandes fatigues et peinait à réaliser de trop gros efforts. Il caressa le pommeau de sa canne. Une très jolie sculpture représentant une tête de Feunard. Il l'avait achetée d'occasion, au marché de Poivressel.
C'est alors qu'il lui sembla entendre un léger tressaillement. Il se retourna, mais ne remarqua rien. Givrali semblait également avoir entendu quelque chose, et jetait un regard anxieux aux alentours.
C'est à ce moment précis qu'une créature noire s'élança sur Franway. Il eut le temps de sentir son haleine chaude et fétide avant qu'elle retombe, gelée. L'homme repris ses esprits et contempla le Grahyèna qui avait failli avoir sa peau. Givrali avait utilisé son laser glace à temps. Il lança un regard reconnaissant au Pokemon, mêlé d'une certaine angoisse : il commençait à fatiguer et cette forêt semblait parsemée de nombreux dangers.
Une heure plus tard, Franway compris qu'il ne pourrait avancer plus longtemps. Le froid commençait à le gagner et les lourds pas qu'il devait faire pour avancer dans cette épaisse couche de neige ne faisaient que l'épuiser.
Il jeta un regard désespéré autour de lui et se rendit rapidement compte qu'il n'avait aucune idée du chemin à emprunter pour regagner la ville. A perte de vue ne s'étendaient que des sapins blanchis et usés par la neige.
Il marcha encore quelques instants puis sentit qu'il perdait ses forces et s'affala par terre.
Sa tête s'enfonçait lentement dans la douce poudreuse. Il ne ressentait plus rien ... Givrali poussa un cri plaintif puis les paupières de l'homme se fermèrent lourdement.

Ces hommes en noir, que venaient ils faire ... Pourquoi allaient il frapper à sa porte un soir de Noël ? Et pourquoi Papa n'était il pas encore revenu ?
L'enfant entendit sa mère pousser un petit sanglot puis elle referma la porte. Elle s'assit sur le canapé et fondit en larmes.
Quelques jours plus tard, par un temps pluvieux, sa famille se réunissait autour d'une pierre sobre et noire. Un prêtre parlait. L'enfant ne l'écoutait pas. Il scrutait la pierre tombale sur laquelle était inscrite en lettres blanches le nom de son père.
L'enfant porta sa main à sa poche. Il en sortit une petite boule de cristal. A l'intérieur, se trouvait un Père Noël descendant joyeusement la cheminée d'une humble maison. De la neige tombait lorsqu'on retournait l'objet.
L'enfant la serra dans son petit poing et la lança de toutes ses forces. Il l'entendit se briser quelques mètres plus loin.

Franway reprenait conscience. Depuis cette journée, il était devenu un homme horrible, il s'en rendait compte. Sa mère avait la santé trop fragile pour s'occuper de lui et ne s'était pas rendu compte des changements qui avaient opérés sur l'enfant. Toujours à l'écart, il maudissait le monde entier et se réfugiait dans les rêves d'un futur brillant où tout le monde reconnaîtrait son génie et où son père pourrait être fier de lui.
Il distingua alors une forme inconnue près de lui. A la couleur de la créature, il crut reconnaître Givrali, mais constata rapidement qu'il se trouvait face à l'oiseau légendaire. Il apercevait distinctement Artikodin.
Franway eut un ultime geste de violence et tenta de donner l'ordre d'attaquer à Givrali, mais son bras retomba lourdement sur le sol.
L'oiseau le regardait avec bienveillance et on pouvait même lire dans ses yeux un certain amusement. Givrali, au départ effrayé, semblait à présent contempler l'oiseau avec bienveillance.
Artikodin bougea légèrement la tête et fit comprendre à Franway qu'il pouvait monter sur son dos. L'homme se leva péniblement, rappela Givrali et s'assit à califourchon sur le plumage azur du pokemon.
Artikodin s'éleva alors dans le ciel, laissant traîner un fin nuage multicolore qui s'évapora en frôlant le sol.
Franway put admirer la beauté de la ville vue d'en haut. Elle semblait plus vivante et plus joyeuse que jamais en ce soir de Noël.
C'est alors qu'il entendit une voix grave et chaleureuse s'élever derrière lui. Franway se retourna, et aperçu un homme entièrement vêtu en rouge et blanc, et portant avec bienveillance une grosse barbe blanche.
Trainé par des rennes à la majesté inimitable, le personnage esquissai un grand sourire, franc et réconfortant. Ce sourire ... Franway le reconnaissait. C'était celui de son père.
- Joyeux Noël ! cria l'homme barbu en disparaissant dans les nuages.