Team Rocket X-Squad de Malak

Imperatus ouvrit difficilement les yeux, et sa première surprise fut de se découvrir en vie. Enfin, elle présumait qu'elle l'était, car elle doutait qu'il y ait un plafond en transparacier qui donnait sur une mer d'étoiles dans le Royaume des Esprits. Et puis elle avait drôlement mal aussi, sur tout le corps. Normalement, la douleur physique devait disparaître quand on était réduit à l'état d'âme...

- Re-bienvenue parmi nous, amie Pokemon.

Imperatus tourna la tête pour voir la silhouette frêle et voûtée de Nuelfa à son chevet, au dessus d'elle. Un rapide coup d’œil aux alentours lui apprit qu'elles se trouvaient dans son laboratoire, et qu'Imperatus était allongée sur son espèce de grande table d'opération avec de multiples outils lumineux de toutes sortes.

- Vous m'avez... ressuscité avec la science primordiale ? demanda bêtement Imperatus.

- La science ne ressuscite pas, objecta Nuelfa. Seuls les dieux ont ce pouvoir. Nous réparons juste les corps. Mais non, vous n'êtes pas revenue d'entre les morts. Les rayons que j'ai fait tirer sur vous ne pouvaient pas être mortels pour une porteuse de Solerios comme vous. Ils vous ont bien endommagé, cela étant, et pour cela je vous présente mes excuses.

- Erend est au courant de cela ? Parce que j'avais l'impression qu'il avait bien décidé de mon exécution...

- Il fallait donner le change devant le jeune Julian, se justifia Nuelfa. Mais maintenant qu'il a quitté Atlantis, vous pouvez à nouveau circuler librement.

- Quitter Atlantis ? répéta Imperatus.

- Oui, il est retourné sur Terre grâce à Ecleus et Triseïdon. Parfaitement selon le plan de Lord Igeus.

- Je ne comprends rien... Erend jouait la comédie quand il a parlé de son projet de se servir d'Atlantis pour tenir tous les pays du globe en otage ?

- Oh non, il était sérieux. Mais si son Requiem de l'Innocence arrive à son terme, il n'aura pas besoin d'aller jusque là. Il m'a autorisé à vous en révéler la teneur une fois que vous seriez réveillée.

Imperatus se redressa sur la table, difficilement et non sans douleur. Les points d'impacts laissés par les lasers sur son corps étaient encore visibles.

- Vous connaissez ce fameux plan alors que moi non ? s'indigna-t-elle.

- Lord Igeus m'en a fait part pendant que je réparais son corps autant que je le pouvais, hier, avoua Nuelfa. Il était obligé de m'en informer en premier, sans quoi je ne l'aurai pas autorisé à se servir d'Atlantis comme il le souhaitait.

- Donc... vous êtes d'accord avec lui ?

- J'ai jugé son projet pertinent pour l'avenir de la planète. Il a jugé que le Requiem de l'Innocence était le dernier espoir de l'humanité. S'il venait à échouer, il n'aurait d'autre choix que de s'en tenir à son plan de paix éternelle par la peur du canon d'Atlantis. Je vais vous le révéler, mais il faut que vous sachiez une chose : une fois que vous serez mise au courant, vous n'aurez que deux choix : suivre le plan... ou périr. Lord Igeus se refuse à ce que quiconque mette le Requiem de l'Innocence en péril. Même vous.

Imperatus ricana doucement, ses espoirs vite douchés. Elle avait cru un moment qu'Erend n'avait fait que jouer la comédie, mais s'il était prêt à la tuer elle pour son projet fumeux, quel qu'il soit, c'était bien que son cœur s'était obscurci à un point qu'elle ne pourrait jamais le ramener comme avant.

- J'en jugerai de moi-même, répondit-elle. Je ne vais pas marchander mes valeurs contre ma vie, à l'inverse de lui.

- Il est à craindre que le Requiem de l'Innocence ne vous convienne pas. Il vous affectera grandement, et pas en bien. Vous avez le choix de rester dans l'ignorance. On vous renverra sur Terre dès qu'on le pourra, et vous n'aurez donc pas à choisir entre suivre Lord Igeus ou mourir.

- Cessez de tourner autour du pot ! J'ai quitté la FAL et la place de conseillère d'Eryl pour revenir auprès de lui. Je l'ai soutenu toute ma vie. Il n'est pas seulement mon dresseur et mon maître ; il est celui qui m'a façonné. Continuer à le suivre et à croire en lui, ou mourir si ce n'est plus le cas, ça me convient.

Nuelfa hocha la tête, et d'une voix douce, elle lui expliqua le sens du Requiem de l'Innocence, et ce qu'Erend allait devoir faire. Quand elle eut fini, Imperatus était encore plus horrifiée que quand il avait déclaré vouloir atomiser toute la région Unys pour faire un exemple.

- Il ne peut pas... faire ça, balbutia-t-elle. C'est totalement absurde !

- En effet, mais personne ne le saura à part nous, répliqua Nuelfa. Ce sera le plus grand mensonge de l'histoire de l'humanité, uniquement dans le but de la sauver.


***


- Horrorscor a échoué. Cet imbécile s'est fait dévorer par sa propre création.

Tels étaient les mots du Seigneur Diavil, Maître du Chaos, à son tout nouvel Agent, Lord Vrakdale, le Maître des Cauchemars. Les deux se parlaient depuis le Monde des Rêves, cette dimension spirituelle à laquelle Vrakdale pouvait accéder grâce à ses pouvoirs de Darkrai pour se nourrir des rêves des autres et aspirer au passage leur énergie vitale. Mais tout puissant qu'il fut dans ce domaine, Aedan Vrakdale n'avait aucune emprise sur les rêves de Diavil. Le Pokemon du Chaos l'avait invité dedans, mais il ne pouvait rien y faire. Il ne contrôlait rien. Les visions chaotique des rêves de Diavil se succédaient devant lui sans qu'ils puisse y tirer une quelconque puissance. En fait, il n'avait pas vraiment essayé. Il avait l'impression que s'il aspirait l'énergie de ce rêve de chaos généralisée, de destructions sans fin et d'anarchie mondiale, son esprit lui-même serait anéanti.

- Et cela... est une bonne chose pour nous, ou une mauvaise ? se hasarda de demander Vrakdale.

- Les deux. Elle présente un risque, mais aussi une opportunité.

Vrakdale attendit que Diavil précise sa pensée. Depuis quelques jours seulement qu'il avait juré allégeance au Maître du Chaos, il avait vite appris à faire preuve de patience quand il parlait avec lui. La règle, quand on servait le Chaos, était qu'il n'y avait pas de règle, juste celles du Seigneur Diavil.

Juste après leur première communication, quand Diavil était venu de lui-même rencontrer Vrakdale via le Monde des Rêves, le Maître des Cauchemars s'était méfié. Diavil s'était présenter comme étant le frère d'Horrorscor, et Vrakdale n'avait aucune sympathie pour les serviteurs de la Corruption. Mais Diavil lui avait révélé ses buts. Il lui avait fait part de sa vision, du monde qu'il souhaitait, et surtout, des pouvoirs qu'il possédait pour y parvenir.

Vrakdale avait eu une révélation. Comme si ce qu'il avait toujours recherché s'était incarné en la vision du Seigneur Diavil. Jusqu'à présent, il n'avait fait que noyer son chagrin et son désespoir dans une rage aveugle. Il avait élaboré des discours pour ses disciples Réprouvés, il avait théorisé l'avènement d'une anarchie mondiale, de la destruction de l'ordre établi... mais tout ceci ne cachait qu'en fait qu'un simple désir de destruction et d'auto-destruction. Il avait juste voulu provoquer le plus de désordres et d'atrocités jusqu'à qu'il se fasse tuer.

Mais le vrai Chaos, ce n'était pas cela. Le Seigneur Diavil le lui avait montré. Le Chaos était bien plus complexe que les seuls désordre et destruction. Et surtout, le Chaos avait un but, autre que celui d'une pure et simple vengeance envers le monde entier. Et c'était ce qui avait manqué à Vrakdale : un but. Il en avait été privé depuis la mort d'Ujianie. Il vivait comme un mort-vivant, sans objectif. Sa vie n'avait aucun sens, et il n'en avait recherché aucun.

Il avait une petite armée à ses ordres, dont de nombreux méta-humains, comme Lilwen, Althéï, ou encore les Sygmus. Lui-même était devenu un être bien au-delà de l'humanité. Il était un Sygmus parfait et amélioré, partageant l'ADN d'un Pokemon Fabuleux surpuissant, et possédait le Gantelet des Ombres, un artefact décuplant ses pouvoirs obscurs. Et qu'avait-il fait de tout cela ? De vulgaires attentats sur Doublonville et Veframia. Il avait tué des civils. Des dizaines de milliers, des millions même, mais juste des civils, des gens innocents et surtout insignifiants. Et en s'abaissant à tuer des gens insignifiants, on en devenait un nous-même. Pour que naisse le véritable Chaos, il fallait s'en prendre à des cibles importantes.

Vrakdale avait appris cela de Diavil, et plusieurs autres choses. Le Pokemon lui avait offert une vision et un but pour lesquels sa mort aurait un sens. Il s'était donc incliné devant lui, en lui offrant le service des Réprouvés. Et Diavil avait fait de lui un véritable Agent du Chaos, ses plus proches serviteurs dispersés aux quatre coins du globe. Et il lui avait donné le pouvoir qui allait avec...

- La Corruption généralisée telle que la souhaitait Horrorscor était une absurdité, reprit enfin Diavil, mais elle aurait, indirectement, servi le Chaos. Après tout, de la Fatalité vient la Corruption, de la Corruption naît le Chaos, du Chaos s'échappent les Ténèbres. Et même si je n'ai aucune sympathie particulière pour Horrorscor, je ne pouvais pas m'en prendre à lui sous peine de risquer la colère de notre créateur, Asmoth. Je l'ai donc laissé mené sa croisade. Mais il ne contrôle plus rien, désormais. Cette Lyre Sybel qui l'a dévoré, elle se fiche de la Corruption. Elle ne souhaite que la destruction, la fin de toute vie. La preuve : elle a avec elle ce chien fou de Wrathan, dont le cerveau bouillant ne sais pas réfléchir plus loin que ce qu'il pourrait détruire aujourd'hui. Nous ne pouvons laisser cela se faire. Le Chaos ne pourra jamais naître dans un monde stérile.

Vrakdale s'inclina mais garda le silence. Ça ne l'aurait pas dérangé, il y a encore quelques jours, que toute vie disparaisse. Il aurait juste aimé le faire lui-même, et surtout, faire souffrir les autres le plus possible avant, en particulier des gens comme Igeus, Julian, ou les dirigeants de la FAL. Ces puissants et ces comploteurs, qui faisaient trinquer les gens du commun au seul bénéfice de leurs plans fumeux pour détenir toujours plus de pouvoir ! Oui, ça aurait été bien que ces gens-là disparaissent. Que tout disparaisse !

Mais désormais, il voyait plus loin que ça. Désormais, il était un serviteur du Chaos. Il ne s'agissait plus de détruire, mais de créer. Car le Chaos, lui avait dit Diavil, était un outil pour concevoir un monde meilleur, un monde où les gens seraient libres des chaînes de l'ordre, de la morale et de la loi. Où ils pourraient atteindre leur plein potentiel, et forger le monde parfait tel qu'il aurait dû l'être, si seulement l'humain n'avait pas eu la folle idée de vouloir entraver son prochain...

- Quels sont vos ordres alors, Seigneur Diavil ? demanda le Maître des Cauchemars.

- Stopper Lyre Sybel, par tous les moyens. Et si Arceus s'en mêle, nous ne serons pas les seuls. Prépare tes Réprouvés, Nightmare. Pour plonger ce monde dans le Chaos, nous allons d'abord devoir aider à le sauver...


***


Aussi stupide et parano que cela puisse paraître, depuis qu'Arceus leur avait dit que leur oncle maléfique Asmoth se trouvait avec eux sur le vaisseau, Mercutio ne pouvait s’empêcher de se méfier de tout le monde. Tout le monde, à part sa sœur. Le Flux gémellaire qu'ils partageaient ne pouvait pas se tromper.

Ils avaient quitté le pont précipitamment, prétextant leur exaspération aux disputes sur le sort de Siena. C'était surtout qu'ils ne pouvaient pas feindre l'indifférence plus longtemps. Il y avait en effet de grandes chances qu'Asmoth soient sur le pont avec eux. Durant leur conversation avec Arceus via le Flux, Galatea avait fait part de ses soupçons qu'elle avait sur le Général Tender.

Au début, Mercutio avait trouvé ça totalement stupide. Tender ? Le brave vieux général qui les avait toujours protégé et soutenu ? Le père de Siena, accablé par les tragédies successives de sa famille ? Mais pourtant, selon Crenden et D-Zoroark, il était celui qui cochait le plus de cases sur leur liste des suspects. Mercutio n'accordait qu'une confiance des plus limités en ces deux-là, mais apparemment, avant sa mort, Natael avait aussi abondé dans ce sens.

Natael... Mercutio n'arrivait pas à se faire à sa mort. Quand Galatea lui avait annoncé, il venait juste de perdre Eryl, il sortait d'un combat contre Igeus, et il sentait la présence du Marquis des Ombres approcher. Autant dire que même s'il avait bien compris les mots de sa sœur, ces derniers n'avaient pas vraiment pénétré son cerveau. Mais maintenant, le deuil s'ajoutait au deuil. Mercutio n'avait pas connu d'homme plus gentil et plus intelligent que lui. Toujours peureux, toujours en retrait, mais toujours à faire de son mieux pour les enfants de sa vieille amie Livédia.

- Qui est au courant que tu as ramené Crenden et D-Zoroark ? demanda Mercutio à voix basse alors qu'ils traversaient la coursive principale du croiseur.

- Juste Morgane. Je l'ai laissé les surveiller à l'infirmerie, et empêcher quiconque d'entrer. Vu qu'elle peut brouiller les pensées avec ses pouvoirs psychiques, et que je ne me suis pas absentée trop longtemps, ça devrait aller...

Mercutio n'avait jamais trop pu sentir cette femme au visage impénétrable et aux paroles qui l'étaient encore plus, mais Galatea lui avait assuré lui faire confiance.

- Asmoth doit forcément savoir que Crenden et D-Zoroark sont ici. Tu as mis ta copine Morgane en danger en lui demandant de les surveiller.

- C'est une G-Man, lui rappela Galatea. Ou du moins, elle en a les pouvoirs. Le Flux est inefficace face à eux. Même Asmoth ne pourrait rien lui faire.

- Je pense qu'un mec comme Asmoth a mille et un moyens de s'en prendre à une G-Man non entraîné sans se servir directement du Flux contre elle, soupira Mercutio.

- Qu'est-ce que je pouvais faire d'autre ? Si j'avais demandé à un seul membre de l'équipage, Tender aurait été averti dans la minute qui suit. Morgane était la seule en qui j'avais confiance.

- Tu aurais dû rester toi-même. Je m'en serai sorti seul face au Marquis. Reinheit était en route.

- Ça, je n'en savais rien. Je venais de sentir la mort d'Eryl et ton intense désarroi. Tu ne peux pas me reprocher d'être venue. Et de toute façon, si Asmoth était décidé à se débarrasser de Crenden et D-Zoroark au point de balancer sa couverture, tu penses vraiment que j'aurai pu faire quoi que ce soit pour l'arrêter ?

C'était là tout le problème. Asmoth était le premier des Mélénis Noirs. Il avait reçu le Flux d'Arceus lui-même en des temps immémoriaux, et détenait sur lui un savoir et une maîtrise que les jumeaux ne pourraient jamais égaler de leur vivant. C'était un adversaire bien au-delà de leurs capacités. Arceus ne le leur avait pas caché, d'ailleurs. Il leur avait bien demandé de ne pas engager le combat contre Asmoth si jamais il le perçait à jour, et de le laisser faire. Mais les jumeaux, avec le ressentiment qu'ils avaient contre cet oncle maléfique, n'étaient pas sûrs de pouvoir se retenir s'ils l'avaient devant eux.

Asmoth avait tué Natael à distance parce que ce dernier s'approchait trop de son identité au sein de la Team Rocket. Et comme c'était vraisemblablement Asmoth qui avait manipulé la Team pour concevoir Diox-BOT, les jumeaux le considéraient également comme le meurtrier de leur mère. Autant dire qu'ils avaient bien l'intention de le faire payer. Pas pour ces histoires de Mélénis Noir ou d’Élu de la Lumière, non. Juste pour eux.

Mais encore fallait-il le démasquer. Même Arceus n'avait pas su leur dire qui il était sur le vaisseau, ni où il se trouvait. Asmoth dissimulait son Flux à dessin. Arceus pouvait seulement sentir sa présence de façon ténue. Il aurait pu le trouver si on lui avait mis en ligne tous les humains du Giovanni devant lui, mais convoquer l'ensemble de l'équipage n'aurait pas manqué de lui mettre la puce à l'oreille, et il aurait fuit, ou pire, il aurait déclenché une catastrophe.

- J'ignore pourquoi Asmoth se cache parmi vous, avait avoué Arceus. Et pour être honnête, je m'en moque. Tant qu'il n'utilise pas ses pouvoirs quasi-divins de façon inconsidéré, il peut vaquer à ses plans obscurs comme il l'a toujours fait. Je vous ai prévenu uniquement par considération pour votre père. Mais je ne veux pas d'un conflit avec lui, surtout pas maintenant.

Il leur avait en gros demandé de ne pas trop fouiller, de se concentrer sur la menace de Lyre. Mais les jumeaux ne pouvaient pas laisser couler comme si de rien n'était, surtout si Asmoth était le Général Tender et s'était payé leur tête durant toutes ces années. Mercutio ne voulait toujours pas y croire. Il voulait trouver une preuve pour discréditer cette théorie. Et ça passait d'abord par interroger longuement Crenden. À l'inverse de D-Zoroark, dont les pensées étaient imperceptibles, ce dernier était humain, et donc facilement ouvert à l'inquisition mentale du Flux.

Mais il se passa quelque chose durant leur trajet jusqu'à l'infirmerie. L'alarme du vaisseau se mit à retentir partout, annonçant une intrusion, au même moment où un choc palpable se propagea dans l'armature de l'appareil. Tendus comme ils étaient, les jumeaux pensèrent immédiatement à Asmoth. On l'avait trouvé. Et il passait à l'attaque.

Pour élargir leur zone dans laquelle ils pouvaient ressentir les présences via le Flux, ils se donnèrent la main et s'ouvrirent à leur lien gémellaire. Les yeux fermés, immobiles, ils pouvaient discerner quasiment tout le monde dans l'enceinte du Giovanni. Il y avait bien une nouvelle présence qui détonnait par son aspect. Les jumeaux ne mirent pas longtemps à reconnaître la signature du Vifacier, l'un des trois métaux légendaires. La présence du métal était si forte qu'elle éclipsait celle de son porteur.

- C'est quelqu'un qui est en Revêtarme ? interrogea Mercutio.

- Je ne suis pas sûre, répondit Galatea. Mais c'est bien la signature des Dieux Guerriers. Et comme Excalord est avec le commandant et Hafodes avec le roi Alroy sur le Justice d'Erubin, alors...

- Igeus, conclut Mercutio en crachant son nom comme une malédiction.

À l'heure actuelle, entre lui et Asmoth, il n'aurait su dire lequel il haïssait le plus. Cet enfoiré avait-il osé attaquer le croiseur de la Team Rocket, avec tous ses membres à bord, dont la X-Squad ? Était-il devenu fou à ce point ?

- Qu'est-ce qu'on fait du coup ? hésita Galatea.

Mercutio était déchiré. L'envie de faire demi-tour pour aller anéantir le meurtrier d'Eryl bouillonnait dans toutes les pores de son corps. Mais il se força à ravaler sa haine et à réfléchir posément.

- On continue, fit-il enfin. Si le vaisseau est attaqué, c'est bon pour nous. Tout le monde sera occupé et on pourra enquêter comme on veut. On fait confiance aux autres. Si Igeus est seul, ils l'auront.

Galatea hocha la tête. Ils continuèrent à s'éloigner du centre de commande tandis que tous ceux qu'ils croisaient s'y engouffrés. Quand ils arrivèrent à l'infirmerie, celle-ci était quasiment vide. Ils embrouillèrent l'esprit des médecins et des blessés présents pour pouvoir passer sans se faire remarquer. Puis arrivés devant la porte fermée de la chambre où Galatea avait laissé Morgane avec ses deux captifs, ils s'arrêtèrent. Ils ne sentirent rien en provenance de l'intérieur. Morgane, c'était normal ; ils ne pouvaient pas sentir un G-Man avec le Flux. D-Zoroark, ça l'était aussi, dans une moindre mesure : le Sombracier, plus il était pur, plus il repoussait le Flux. Par contre, Crenden, ça ce n'était pas normal.

Ils se positionnèrent d'une part et d'autre de l'entrée, comme durant leurs entraînements militaires avec leur père adoptif, l'ancien commandant Penan. Pas besoin de signe ou de regard pour se synchroniser, ils faisaient tout mentalement. Leur Flux prêt à être utilisé à la seconde, ils entamèrent un décompte mental de trois avant d'ouvrir la porte et se précipiter dans la chambre. Sauf qu'à un, la radio de Mercutio s'activa, ce qui le fit sursauter et jurer.

- Ici Feurning, fit la voix de Zeff. Vous êtes où ?

- Là où on aurait aimé ne pas être dérangé juste à ce moment, grommela Mercutio en réponse.

- Juste pour signaler : l'intrus se trouve être l'Empereur Julian en personne. Il est carrément venu depuis Atlantis avec une armure-fusion d'Ecleus et de Triseïdon. Il dit avoir quitté Igeus et demande l'asile de la FAL.

Malgré la situation, Mercutio enregistra l'information avec soulagement. Si son neveu n'était plus sous l'emprise d'Igeus, ça lui ferait un souci en moins à régler quand il s'occuperait de son cas.

- C'est une bonne chose, dit-il simplement.

- Ouais, à ceci prêt qu'il est tombé sur sa maman adoré qu'il pensait morte. On l'amène sur le pont pour écouter ce qu'il a à dire.

- On arrive... dès qu'on peut.

Il coupa la transmission, et revint à sa sœur. Si Galatea avait elle aussi été soulagée par l'arrivée de Julian, elle avait retrouvé bien vite sa concentration. Se passant de compte à rebours cette fois, ils ouvrirent la porte et entrèrent dans la chambre en même temps. Et ils trébuchèrent tous les deux en se prenant les pieds dans le corps allongé juste devant. Les jumeaux blêmirent en constatant qu'il s'agissait de la championne Psy.

- Morgane ! s'écria Galatea.

Elle bondit vers elle et se mit à chercher des signes vitaux avec ses doigts. Sur un humain normal, elle aurait bien sûr pu savoir s'il vivait ou non sans le toucher, et le guérir au besoin. Mais sur un G-Man potentiel, c'était hélas impossible. Galatea soupira de soulagement quand elle sentit le pouls de son amie. Morgane n'avait pas de blessures apparentes, mais était pâle comme la mort.

Pendant que Galatea continuait à l'examiner sans même penser à vérifier la pièce, Mercutio lui leva le regard. Et se figea, un grand froid parcourant son corps. Il se mit une main sur la bouche, ravalant un haut-le-cœur. Il y avait des morceaux humains dispersés un peu partout dans un véritable patchwork de sang et de boyaux.

C'était le corps de Natael, que Galatea avait laissé ici, désormais totalement démembré. Et ce n'était pas le seul. D-Zoroark avait connu le même sort, réduit à l'état de monceaux de Sombracier. Quant à Crenden, il avait disparu.