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Team Rocket X-Squad de Malak



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Informations

» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 14/02/2019 à 09:56
» Dernière mise à jour le 28/02/2019 à 01:39

» Mots-clés :   Action   Fantastique   Organisation criminelle   Présence d'armes   Présence de Pokémon inventés

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PUTAIN 8 ANS !
Attention, ce chapitre ne fait pas partie de la fic, c'est juste une intervention de l'auteur à l'intention de ses lecteurs pour féter les 8 ans de X-Squad, posté le 14 février 2019.




En l'an de grâce 2011, le 14 février, Malak, un obscur auteur de Pokébip qui avait alors une série de fics en cours, décide d'en poster une autre. Une fic sur la Team Rocket, qui n'aurait normalement pas du dépasser les 30 chapitres, et dont le nom original était Team Rocket Chronicles. Aujourd'hui, huit ans plus tard, jours pour jours, la fic en question est toujours en cours, règne sur le Panthéon, propose 370 chapitres sans les films, et obtient presque 200,000 vues. Le premier surpris de tout cela n'est bien sûr autre que Malak lui-même.

En ce jour anniversaire de ma fic, je voulais donc marquer le coup par ce petit mot d'auteur bonus. Je comptais l'effacer quelque temps après, mais c'était avant de prendre connaissance de la petite surprise de Deadlier et de cinq auteurs complices ( voir plus bas ). C'est totalement improvisé, à l'instant où j'écris ces lignes, je ne sais même pas de quoi je vais parler. Pourquoi ne pas commencer par le commencement ? Ce qui s'est passé en 2011, comment cette fic est née et comment elle a rapidement bifurqué de ce qu'elle aurait dû être ? Attention les gens, Malak se livre.

Alors... il faut savoir déjà qu'à l'époque, Pokébip n'était pas le site principal où je publiais mes fics. Je les écrivais principalement pour un obscur forum, aujourd'hui disparu depuis un bail, un forum Pokemon d'une trentaine de membres, où l'on se partageait les liens d'épisodes VF de l'animé Pokemon, à l'époque de l'arc Diamant et Perle ( ce qui était totalement illégal, évidement, mais j'étais jeune :p ). On se faisait aussi des combats stratégiques, et on discutait de tout et de rien, entre poteaux. Je me souviens encore de leurs pseudos : Ludicolove, avec qui j'ai partagé nombre de combats sur Diamant et Perle et pleins de discussions sur les mangas/animé. Tilan, lui c'était plus sur la littérature. Evolii, qui m'a fait le superbe wallpaper de l'arc 3 de X-S. Abala, avec qui j'écrivais des fics là-bas, et qui en a aussi posté une ici sur Bip. Et pleins d'autres. Certains sont même aujourd'hui les membres de Pokemon Fansub, qui s'occupent de sous-titrer les derniers épisodes sortis.

Que de bonheur fut ces temps là ! J'étais sur ce forum depuis 2007, et c'est à l'époque que j'ai commencé à écrire des fics, avec ma première série, les Enfants de Sparda. Je suis, à force de fidélité, devenu modérateur de ce forum, puis finalement son administrateur, sous le pseudo de Caedusparda. C'est donc en début 2011, alors que j'étais en train d'écrire le tome 3 des Enfants de Sparda ( qui n'ai jamais parut sur Bip au passage ), que je voulais un peu me changer les idées avec une nouvelle fic, et que donc X-Squad est née, d'abord sur le forum en question, puis quelque temps après ici.

Je crois que j'ai eu l'idée de cette fic en regardant des images un jour sur DeviantArt. Je suis tombé sur de magnifiques fan-art de Méchas Pokemon, ceux d'Arceus et de Darkrai, en l’occurrence. Et c'est là que je me suis dit que ça serait sympa d'écrire une fic avec pour méchants de tels robots. Et qui disait robot disait forcément Team Rocket. Il faut dire que j'avais déjà écris sur elle dans les Enfants de Sparda, et ça me plaisait bien, surtout quand il s'agissait d'inventer son fonctionnement, ses hauts dirigeants et ses origines. Mais je ne pouvais évidement pas le faire avec les Rockets existants, il me fallait de nouveaux héros, jeunes et ne tombant pas dans le ridicule classique des Rockets bêtes et méchants des jeux ou de l'animé. D'où la naissance de la fratrie Crust, et au delà, de la X-Squad.

Il va de soi que quand j'ai commencé la fic, je n'avais aucune idée de qui j'allais mettre dedans plus tard, en dehors des trois Crust, de Tuno et de Zeff. Mais j'avais dans l'idée de faire un truc à la One Piece, une équipe qui s’agrandit au fur et à mesure de l'histoire, si toutefois l'histoire durait assez longtemps, ce qui n'était pas dit à l'époque. Je rappelle que cette fic n'était qu'une fic secondaire que j'écrivais durant mon temps libre pour me changer les idées après les Enfants de Sparda.

Au début, je n'avais aucun projet de caser des êtres fantastiques comme les Mélénis. Ce devait juste être une fic basée sur la technologie et la science. Mercutio devait avoir des pouvoirs, oui, mais je voyais ça comme une espèce de projet secret de la Team Rocket, un humain amélioré, ce genre de truc. L'idée des Mélénis est venue progressivement au cours de l'arc 2, arc dont je n'avais absolument pas prévu la taille et qu'il m'a fallu diviser. C'est d'ailleurs à cette époque que la popularité de X-Squad s'est largement accrue, ce qui m'a encouragé à voir grand et à prévoir bien plus large. Quelques lecteurs/commentateurs qui aujourd'hui encore sont là sur Pokébip se sont manifestés lors des arcs Vriff : Torrak, Deadlier, Kazumari ( qui avait un autre pseudo à l'époque ), Bleu d'Azur, et tant d'autres que je remercie pour leur engouement à l'époque, et encore aujourd'hui s'ils continuent à me suivre.

C'est à partir de là que j'ai progressivement fait passer Pokébip en prioritaire par rapport à mon ancien forum, car j'avais bien plus de lecteurs ici. Et c'est donc vers la fin de l'arc 3 que j'ai commencé à vouloir écrire d'autres fics du même univers que X-Squad, la première ayant été les Gardiens de l'Harmonie. Naturellement, tout ce travail m'a fait abandonner les Enfants de Sparda, qui ne m'inspirait plus, et qui était truffé de défauts. Je compte bien sûr un jour le réécrire, pour l'intégrer à mon univers actuel.

Ainsi donc, huit ans ont passé. Je ne les aies pas vu filer. Sans doute un truc qu'on dit quand on se fait vieux soi-même. J'ignore jusqu'à quand X-Squad continuera, si je parviendrai à la finir, ou si le site ou carrément la saga Pokémon disparaîtra avant. Ce qui est sûr c'est que cette fic m'aura apporté énormément, tout comme vous chers lecteurs. Je vous dis à bientôt, sans doute en fin d'année pour une reprise de X-Squad.

PS : Ayez la curiosité d'aller lire le numéro du Journal des Fics qui sortira en fin de mois, vous y entendrez sans doute parler de moi cette fois-ci^^


EDIT : Voici le lien de l'interview de votre serviteur sur X-Squad, sorti donc dans le numéro de Février du Journal des fics : https://www.pokebip.com/page/journal_fanfics/2019/fevrier/interview



EDIT2 : Ce mot de l'auteur aurait dû s'arrêter là, mais voilà qu'à deux heures du mat ce matin, je découvre dans ma boite MP cinq textes écris par des confrères auteurs pour fêter l'anniversaire de ma fic, une surprise odieusement montée dans mon dos par l'infâme Deadlier. Je me vois donc dans l'obligation de remercier chaleureusement Flageolaid, groudonvert, Torrak, louglaciale1, ainsi que mon ancienne subordonnée aujourd'hui patronne Cyrlight pour leurs participations, et de poster ici donc leurs textes, savants mélanges de leurs humours/univers respectifs et du mien. Merci les gens, vous avez réussi à surprendre le Malak !









Flageolaid



« Eh merde ! »

Les vieux cons s'accordent au moins sur ce point, ce n'est pas beau d'entendre une jeune fille qui jure. Peut-être pouvait-on excuser au moins celle-ci : être élevée avec trois grands frères laissait vraisemblablement quelques séquelles.

Âgée d'une quinzaine d'années, Lymnesine Hesperides présentait deux caractéristiques physiques notables. La première, structurelle, se divisait en trente-huit grains de beauté répartis uniquement sur la moitié droite de son visage. La seconde, conjoncturelle, était de porter un pyjama tout en errant dans les couloirs d'une base de la Team Rocket.

Ce choix vestimentaire discutable venait du fait que l'adolescente ne se trouvait pas matériellement ici, mais dans son lit en train de dormir. Comme tous les mages de Rivustel, Lymnesine disposait de la faculté de voir en rêve, le passé, le présent ou le futur, de sa réalité ou de n'importe quelle autre formant ce joyeux bazar que l'on nomme communément Multivers. Mais à la différence du magicien lambda qui ne faisait ce genre de songes qu'une à deux fois par mois, la jeune fille pouvait cumuler jusqu'à quatre rêves pré/post-monitoires par nuit. Cela compensait son niveau abyssal dans toutes les autres disciplines magiques.

Lymnesine – ou Lymnie pour les intimes – en était à son troisième rêve de la nuit et, contrairement à ce qu'exigeait son plan génial, n'avait toujours pas réussi à obtenir par ce biais le sujet de l'examen final de magie qui l'attendait le lendemain. Puisque réviser ne lui servait à rien au vu de ses lacunes, elle avait tablé sur cette tricherie non sanctionnée par le règlement pour assurer sa réussite scolaire. En vain. D'où le juron exclamé à voix haute. De toute façon, personne ne pouvait la voir, ni l'entendre.

N'ayant rien de mieux à faire, Lymnie se mit arpenter les couloirs sinistres du repaire de la Team Rocket en chantonnant. Elle finit bientôt par apercevoir un jeune homme de son âge qui avançait d'un pas décidé. Il avait le visage fin, le nez retroussé et un air roublard. Pour ce qui est de la couleur des yeux et des cheveux, on laissera aux lecteurs le soin de relire le premier chapitre de [i*]Team Rocket X-Squad[/i*]. Ceci est un chapitre bonus de hipster, on y méprise les détails évidents.

Faute de mieux, Lymnie se mit à suivre cet adolescent qui, selon elle, avait une tête à s'appeler Theoderich, mais qui en réalité se nommait Mercutio. Quelle ne fut pas sa surprise lorsque ce dernier disparut à travers un miroir. Le fait de n'être qu'une projection astrale ne rendait pas la jeune fille intangible pour autant. Aussi sentit-elle un peu jalouse de ce type capable de traverser la matière. Mais, après coup de poing de frustration dans le miroir, il s'avéra que celui-ci n'était qu'un hologramme et qu'il y avait derrière une plate-forme élévatrice qui amorça une longue descente.

Profitons de l'ennui propre à toute attente dans un ascenseur pour revenir sur le choix, avisé ou non, de placer un hologramme au niveau d'un miroir. L'aspect technique n'est pas insurmontable. Une dizaine de caméras numériques de très haute définition, plus tout autant de capteurs de lumière et de mouvement, ainsi qu'un serveur pour calculer précisément l'image à reproduire par holographie et une alimentation électrique de secours font largement l'affaire. Non, ce qui posait problème dans le cas présent, c'était la personne chargée de l'entretien des locaux.

Car le miroir en question se trouvait au milieu d'une dizaine d'autres, alignés sur un mur. Plus précisément, il s'agissait du troisième en partant de la gauche. Or, les autres miroirs étaient bien réels et nécessitaient un petit coup de produit à vitre de temps en temps. Le nettoyage ne pouvait donc se faire que de nuit, car sinon le sbire de base passant par là aurait fini par demander pourquoi un des miroirs n'était jamais nettoyé, ce qui aurait entraîné moult rumeurs.

Mais surtout, il fallait que le technicien de surface soit spécifiquement con, pour ne pas se poser de question quant à la directive de ne jamais, et en aucun cas, astiquer ce fameux miroir. Et du débile de cet acabit, ça devient difficile à trouver ! Prenez n'importe quel idiot de votre entourage, il n'aurait pas passé la première nuit sans céder à la tentation de toucher la troisième glace en partant de la gauche. C'est pourquoi, une fois par semaine, sur les coups de deux heures du matin, le général Tender se dirigeait à pas de Lougaroc au quatrième étage, avec son chiffon et son pschitt-pschitt, pour se coller à cette tâche ingrate.



Arrivé au QG de l'équipe X-Squad, Mercutio se dirigea naturellement vers les vestiaires, Lymnesine toujours sur ses talons. Le jeune homme s'approcha du casier à son nom et en tira un uniforme argenté marqué d'un R rouge, qu'il considérait déjà comme une seconde peau alors qu'il n'avait rejoint l'unité X-Squad que trois jours plus tôt. Il se dévêtit intégralement pour enfiler sa nouvelle tenue préférée, sans se douter qu'on l'épiait.

Lymnie ne put retenir un ricanement en voyant l'adolescent complètement nu, ce genre de ricanement qui signifiait : « Si j'étais un mec, je serais mieux membrée que ça ! », entendant par là qu'elle posséderait un organe mieux profilé. C'est typiquement masculin de se limiter qu'à la taille du machin. Bref, qu'importe la nature réelle de sa raillerie, le « Hé hé ! » immature et bien sonore qu'elle émit traversa les couches dimensionnelles pour atteindre directement les oreilles de Mercutio.

« Qui est là ? s'écria-t-il en se relevant d'un coup, la main gauche plaquée devant sa virilité.

Seules trois catégories d'individus pouvaient ressentir la présence de projections astrales. Certains sages connectés spirituellement à une puissance cosmique transcendantales, type gnome vert ridé au phrasé atypique, formaient la première de ces catégories. Les individus capables de briser le quatrième mur étaient également capables de voir Lymnie, ainsi que les Pokémon de type Spectre.

À cela s'ajoutait apparemment une quatrième catégorie : les mâles blessés dans leur orgueil. Ce ne serait pas la dernière fois de la semaine que l'adolescente se ferait remarquer pour une histoire de zob, au moins celle-ci n'impliquait pas une allusion douteuse au tiers [i*]Never Used[/i*].

« Je sais qu'il y a quelqu'un, montrez-vous ! »

Lymnesine guetta l'extérieur de la pièce, mais non il n'y avait personne. Le jeune Rocket devait s'imaginer des voix, conclut-elle en haussant les épaules. Mercutio enfila son uniforme à toute vitesse, en bombardant le vestiaire d'œillades inquisitrices à la recherche d'un éventuel voyeur. Puis il sortit tel un dément, Poké Ball à la main, prêt à démembrer n'importe qui le fixant d'un air lubrique.

Il finit par tomber nez-à-nez avec le commandant Tuno qui dirigeait son unité, un homme à la mâchoire carrée et aux sourcils épais. Tuno leva les yeux du rapport qu'il lisait avec attention pour lancer un regard interrogatif à l'adolescent. Était-ce lui qui avait ricané ? En raison de la considération qu'il portait déjà à son supérieur, Mercutio décida de lui accorder le bénéfice du doute.

« Bonjour commandant. Vous n'avez pas entendu un ricanement à l'instant ? Je crois que nous ne sommes pas seuls.
– Le système de surveillance ne détecte pourtant que deux formes de vie, répondit Tuno après un bref coup d'œil à l'un des nombreux écrans présents dans la pièce. Et non, je n'ai rien entendu. Est-ce vous allez bien ?
– Oui, c'est rien, fit le jeune homme non sans une pointe d'agacement. Tiens, qu'est-ce que vous lisez ? Enfin une vraie mission ?
– Il s'agit d'un rapport sur les populations de Classican de la région. Vous le savez peut-être, le Boss est très attaché à cette espèce. »

Lymnesine ne put retenir un soupir. En huit mille sept cents quinze rêves, elle avait entendu parler cinq mille trois cents quarante-huit fois de la Team Rocket et deux mille huit cents nonante-cinq fois de Giovanni. En outre, le Boss était apparu dans pas moins de mille quatre cents soixante-sept songes, soit presque dix-sept pourcents des rêves de Lymnie depuis l'âge de cinq ans, ce qui faisait du Boss, selon la perception de l'adolescente, le type le plus collant, ennuyeux, banal et prévisible de l'univers. Et accessoirement, il s'agissait du deuxième pire criminel en liberté, le premier étant Remigio Toreno, son mentor, toujours actif malgré ses septante ans passés.

« Vous faites une fixation sur les Pokémon de type Vol ? ironisa Mercutio. D'abord Lakmécygne, et maintenant Classican ?
– C'est une façon de voir les choses. Selon ce rapport, la population de Classican serait en chute libre depuis deux ans. J'aimerais que vous arpentiez les environs de la base avec vos sœurs pour compter le nombre de nids et de spécimens. Les dresseurs d'aujourd'hui parcourent beaucoup moins les routes qu'avant, ils en oublient l'essentiel sur le dressage de Pokémon. Voyez cette mission comme un instant d'introspection sur ce qui fait de vous un dresseur. Vous verrez que ces moments sont rares dans notre quotidien.
– À vos ordres commandant ! »

Que dire d'autre quand un supérieur charismatique se propose de vous donner une leçon de vie en prenant une voix posée et chaleureuse ?



Quarante minutes plus tard, Mercutio se retrouvait en train d'arpenter les bois environnants la base en compagnie de ses deux sœurs, Siena et Galatea. Tous les trois étaient ce que l'on appelle communément dans le jargon des """"triplés"""", c'est-à-dire des individus qui, hormis le fait d'être nés le même jour et, a priori, de la même mère, ne présentent absolument aucun autre point commun à tous les trois. Siena possédait un front haut et un nez minuscule, tandis que Galatea avait des joues rondes, des lèvres pulpeuses et un regard de braise.

Lymnesine marchait à côté de Mercutio. Au premier coup d'œil, eux deux non plus ne se ressemblaient pas des masses. Normal compte tenu de leurs liens de parenté inexistants. Pourtant, bien qu'ils fussent quasiment l'opposé l'un de l'autre en termes de style, d'aspiration morale ou d'objectifs, le hasard voulait qu'ils débutassent tous deux la première d'une longue série de péripéties au cours de la semaine, en affrontant un méchant très méchant qui n'hésitait pas à tuer ses sbires. Oups, spoilers !

« Ils sont encore loin ces nids de Classican ? se plaignit Galatea de sa voix grave et suave.
– Je croyais tu étais prête à tout pour le commandant Tuno ? la railla Mercutio.
– T'es pas cool avec ta frangine, mecton, intervint Lymnesine. C'est vrai qu'elle est relou sur les bords, mais fais un effort, aussi.
– Nous devons examiner vingt-sept nids, répartis sur une zone de dix kilomètres carrés, annonça Siena aprè relecture du rapport confié par le commandant.
– Autant ?! s'exclama sa sœur.
– T'inquiète, on aura fini avant midi, la rassura Lymnie. »

Que personne ne puisse la voir, ni l'entendre n'empêchait pas la magicienne en pyjama de participer activement à la conversation des triplés Crust. D'une part, parce que n'importe qui avec une personnalité farfelue aurait fait pareil, d'autre part car Lymnie n'avait aucun ami humain.

En effet, ses seuls amis se limitaient à un Kicklee parlant une langue incompréhensible, un Galeking poète, voire un tantinet précieux, et un Fouinar argenté, millénaire, bourré de vices, ennemi des bonnes mœurs, accro au pognon. Parmi ses camarades de classe, personne ne l'appréciait, aussi la jeune fille se rattrapait-elle ici avec ces sympathiques triplés parfaitement incapables de toute interaction avec elle. Ce qui n'était pas nécessairement un mal.

Le trio/quatuor arriva bientôt à proximité d'un nid soigneusement dressé sous les frondaisons d'un arbre magnifique. Le bec lustré d'un Classican jaillit bientôt des ombres. Ce Pokémon faisait la taille d'un Corboss et possédait un plumage noir et blanc évoquant un costume-cravate. Il était connu pour ne s'approcher que des individus distingués, c'est pourquoi on envoya Galetea l'approcher. Sa beauté naturelle – quoique pour parvenir à ce résultat sans maquillage, chirurgie esthétique et Photoshop, on flirte avec le surnaturel – en faisait la plus à même de s'approcher du Classican. Insérer un [i*]fakemon[/i*], c'est fait.

Soudain, un Donphan surgit d'un fourré, roulé en boule. Propulsé à toute allure par son mouvement giratoire, il fonça droit sur Mercutio. Siena intervint et dévia la course du pachyderme d'un double coup de pied latéral. Le Donphan perdit de la vitesse, mais revint à la charge après un drift approximatif. La jeune Rocket n'hésita pas un instant, elle se dressa sur sa route, empoigna une des défenses de la créature et, en basculant tout son poids plume en arrière, réussit à envoyer le Donphan percuter un chêne centenaire. Si l'arbre ne résista pas au choc, le Pokémon non plus.

« Alors elle, c'est ma go ! s'exclama Lymnesine, charmée par tant de témérité. Oh merde, après huit ans passés dans une école pour fille, je me rends compte seulement maintenant que je suis bi ! Comment je vais annoncer ça à mes parents ? Et je connais même pas le nom de mon premier crush ! Galutio, Mercatea, elle s'appelle comment votre frangine ? Fais chier, vous m'entendez pas !
– Hé, hé, hé, qu'avons-nous là ? »

Deux sbires de la Team Rocket sortirent à leur tour de derrière les fourrés, un sourire désagréable sur les lèvres. Le premier avoisinait le mètre quatre-vingt, il avait un nez aquilin et une mèche retombant devant les yeux qui, en d'autres circonstances, aurait activé mode "prédatrice sexuelle" de Galatea. L'autre en revanche était plutôt passable, franchement quatre virgule cinq sur dix, guère plus. Ils n'étaient pas plus beaucoup plus vieux que les triplés Crust, ils avaient simplement l'âge de rejoindre les rangs de l'organisation criminelle.

« Diantre, la garce a fort amoché mon fidèle Donphan ! s'exclama le Rocket à la mèche.
– Genre, depuis quand ça se bat contre des Pokémon à mains nues, sérieux ? ajouta l'autre.
– Vous êtes qui, vous deux ? les interrogea Mercutio. Et pourquoi vous nous avez attaqué ? Nous sommes de la Team Rocket, nous aussi.
– Genre on l'ignore grave... Je suis Britt et voici Kato, les best des sbires !
– Tu parles ! Vous avez failli blesser les Classican ! Le Boss est très attaché à cette espèce.
– Encore eût-il fallu que nous le sussions, rétorqua Kato.
– Du verbe savoir, hein, pas du verbe sucer, se sentit obligée de préciser Lymnesine. »

Après quelques instants à les observer, Mercutio se rappela les avoir battu deux ou trois fois en combat Pokémon. Tant de sbires le défiaient chaque jour en salle d'entraînement, ce n'était pas facile de tous les mémoriser.

« Que voulez-vous ? demanda Siena.
– Genre, abusé, on a appris au jour d'aujourd'hui que le commandant Tuno vous avez recruté, répondit Britt. Lol, sérieusement, des tocards comme vous ? Et pourquoi pas nous plutôt ?
– Ainsi, pour prouver notre vaillance au meneur de votre escadrille, nous vous défions séance tenante ! Deux contre deux, un Pokémon chacun !
– Ça me va ! rétorquèrent en chœur Mercutio et Galatea, brandissant leurs Poké Balls.
– Genre, ils croivent grave pouvoir nous battre !
– C'est nul les combats de dresseurs, maugréa Lymnie. D'abord, il y en a un qui donne un ordre, puis un autre, puis le premier, puis le second et ça enchaîne. Attaque, défense, riposte, esquive... comme si les Pokémon étaient trop cons pour réfléchir par eux-mêmes ! »

À Rivustel, les Pokémon savaient parler et faisaient partie intégrante de la société. Les rares personnes à les enfermer dans l'équivalent local des Poké Balls étaient les magiciens, à la suite d'un contrat très strict rarement à l'avantage de ces derniers. Mais surtout, à Rivustel, quand venait l'heure de se battre, chacun sortait son épée ou ses plus puissants sortilèges. Aussi les du-du-du-du-du-du-du-du-duels de monstres n'intéressaient absolument pas Lymnesine.

Toutefois un élément attira immédiatement son attention. Lorsque Mercutio lança sa Poké Ball et que Mortali apparut, la magicienne bondit littéralement vers la créature afin de l'examiner sous tous les angles, avec le regard avide d'un individu louche qui se demande comment il va se débrouiller pour repartir avec le gros lot, au nez et à la barbe de tout le monde.

« Ooooh, je le veux !!! »

Pourtant Lymnie n'était pas du genre [i*]emo dark[/i*], mais elle trouvait l'évolition fort sympathique avec son corps vaporeux ondulant tel une flamme, son plastron d'os et ses grands yeux rouges expressifs. Il ne restait à la jeune mage qu'à trouver un moyen de le ramener dans sa dimension. Lymnesine ne s'inquiétait pas trop à ce sujet. Si à l'âge de onze ans, elle avait failli détruire l'univers tout entier sans le vouloir, par inadvertance, à l'insu de son plein gré, capturer un Pokémon d'une réalité parallèle ne devait pas poser de problème. C'est beau l'optimisme !

Que Britt possédât un Galopa n'étonna pas Lymnesine outre mesure. Kato et Galatea envoyèrent respectivement un Tutankafer et un Pyroli. Avec un type Feu et un type Spectre de chaque côté, le match promettait d'être... chiant. Toutefois la présence de Lymnesine sur le champ de bataille apportait une touche de fun, dans la mesure où Mortali et Tutankafer pouvaient la voir et l'entendre. Tandis que les dresseurs aboyaient leurs ordres, les deux fantômes hésitèrent à passer à l'action, ne tenant pas à blesser cette fille en pyjama présente sur le terrain.

« Que se passe-t-il, Mortali ? Utilise Ball'Ombre !
– Que diable survient-il ? Tutankafer, use donc de Ball'Ombre ! »

Chiant, en effet. Finalement les deux Pokémon s'attaquèrent l'un l'autre avec la même attaque. Sans surprise, les sphères d'énergie spectrale se neutralisèrent à l'impact. Pas mieux de l'autre côté puisque Galopa et Pyroli possédaient tous les deux la "capacité spéciale" Torche. Et oui, puisqu'on se base sur un début de fic écrit en 2011, autant respecter les spécificités de l'époque. Heureusement que Galatea n'a pas sorti son Kirlia !

Habitués à combattre ensemble, les Crust optèrent sans un mot, ni un regard, sur une stratégie défensive/offensive FC-25 en rotation croix/triangle avec un rythme feinte/soutien de 3.2, afin de mettre très rapidement K.O. le plus faible des Pokémon adverses. Le commandant Penan ne déconnait pas quand il leur avait appris à adapter des tactiques de guerre en combat Pokémon.

Pourtant, Lymnesine empêchait Mortali de se donner à fond. L'adolescente tentait de caresser sa fourrure fantomatique pour se faire une idée de comment c'était au toucher, ce qui crispait l'évolition au plus haut point. Heureusement, il arrivait parfois que la jeune mage se retournât d'un bond, poings dressés, pour le défendre des attaques de Tutankafer. Et là, c'était au tour du sarcophage hanté de se crisper, ce qui lui valu d'encaisser une Ball'Ombre et deux Morsure(s). La cible prioritaire des attaques des évolitions restait pourtant le Pokémon de Britt.

« Genre, Galopa quoi ! Rebond ! »

Malgré une attaque Rebond piffée dans la bataille, le Galopa ne put se défaire de l'attaque en tenaille ultra vénère de ses adversaires. S'il n'y avait pas eu Lymnie pour mettre son grain de sel dans la bataille, le cheval de feu se serait fait allumer, incendier, griller, carboniser, calciner en moins de temps qu'il n'en faut pour épeler "acide désoxyribonucléique" à l'envers. Restons quand même un minimum réaliste.

« Genre, aaaaaah ! s'exclama Britt. Mais aaaaaaaah, quoi ! Mon Pokémon ! Vous l'avez bolossé, bande de brutes !
– Tu te demandais comment des "tocards" comme nous avaient pu être choisis par le si sexy commandant Tuno ? s'écria Galatea en brandissant un index minutieusement manucuré en direction du sbire Rocket. Voilà ta réponse !
– Du calme, vous n'avez pas encore fini votre combat, tempéra sa sœur.
– Ce n'est qu'une question de secondes, répliqua Mercutio.
– Malédiction ! Me voilà seul contre deux ! rugit Kato dans un geste théâtral. »

Lymnesine se tourna alors vers le Tutankafer en lui tendant un clou. Inutile de se demander d'où elle le sortait. Elle lui lança un regard à la fois strict et indulgent qui disait « Tu l'as entendu comme moi, il a dit Malédiction. » accompagné d'un sourire gêné. La mort dans l'âme – c'est le cas de le dire ! – le Pokémon Cercueil saisit le clou et en apposa la pointe au centre de son sarcophage en le maintenant à l'aide d'une de ses mains fantomatiques.

Ses grands yeux rouges maléfiques embués de larmes, Tutankafer adressa un regard plein de reproches à son dresseur. Puis il abattit une première fois son poing d'ombre contre le clou, ce qui lui arracha un couinement de désespoir. Galatea se mordit la lèvre inférieure et baissa les yeux. Le poing retomba une nouvelle fois, le clou s'enfonça davantage. Au second couinement, Siena déglutit avec difficulté. Au troisième coup, le clou pénétra entièrement dans le corps du Pokémon qui s'écroula à terre. Après un bref moment de silence, Mercutio soupira :

« Ce n'est pas ma façon de gagner préférée...
– Genre, grave quoi.
– Ha ha, personne ne me remarque, c'est le moment de voler Mortali ! déclara une Lymnesine euphorique. Ça passe ou ça casse ! »

Ceux qui connaissent le personnage ne se feront pas d'illusions : ça casse. La jeune mage forma une boule de magie dorée de la taille d'un petit pois entre ses mains. Il ne s'agissait pas d'un sort offensif, mais d'une Magic Ball, une sorte de micro-univers de poche dans lesquels les magiciens de Rivustel transportaient leurs Pokémon. Lymnesine lança la Magic Ball en direction de Mortali. La sphère de lumière toucha le spectre et... il ne se passa rien.

« De kwâa ?! »

La frustration fut telle que l'adolescente se réveilla. D'un geste rageur, elle jeta son oreiller à l'autre bout de la pièce, croisa les bras sur sa poitrine et fit la moue. Non seulement elle n'avait pas eu le prénom de son crush, ni réussi à capturer Mortali, mais en plus les rayons du soleil filtraient à travers ses persiennes, ce qui signifiait qu'elle n'aurait pas de quatrième chance de connaître à l'avance le sujet de son examen.

Comme à son habitude, Lymnie sortit son carnet pour y noter le contenu de ses songes. Quand on arrive à rêver si souvent du passé et du futur, c'est plutôt utile. Elle y décrivit son premier rêve sur un plombier qui saute au-dessus de Vortente carnivores planqués dans des tuyaux verts pour finalement s'entendre dire par un Trompignon en surpoids que la princesse est dans un autre château avec pléthore de détails. Puis elle entama le récit de l'invention de la sauce cocktail, survenue dans son deuxième rêve.

Puisque l'occasion nous est donnée, profitons de ces dernières lignes pour méditer sur des sujets profonds. Certaines choses ne sont pas faites pour se mélanger. Le ketchup et la mayonnaise, par exemple. Surtout le ketchup et la mayonnaise, à vrai dire. Cela donne de la sauce cocktail et c'est dégueulasse. C'est un peu comme écrire un cross over entre une gigantesque fresque épique teintée de contre-culture populaire et une parodie subtilement lourdingue qui s'évertue à déconstruire, non sans maladresse, ladite contre-culture populaire. Le résultat serait indubitablement mauvais. La preuve ici.

Quand vint le moment de décrire le contenu de son dernier rêve de la nuit, il ne restait plus beaucoup de temps avant de descendre prendre le petit-déjeuner. Lymnie songea à la compagnie fort agréable des triplés Crust avec un léger sourire. Puis elle se contenta de ces quelques mots : "Epic fail sur la capture".









groudonvert


Sang Royal – chapitre spécial

- Ea, Tempête Verte ! s’exclama Eryl.

Le petit écureuil vert, bien plus fort qu’il n’en avait l’air, projeta un véritable ouragan de feuille sur le Luxray. Celui-ci appartenait à Tanguy, le Champion de Rivamar, qu’elle affrontait pour son dernier badge à Sinnoh. Le lion électrique s’écroula, K.O. Il n’avait rien pu faire face à l’étrange Pokémon. Il s’agissait à l’origine d’un combat 3vs3, la jeune fille s’était également servie de son Feunard et de son Sidérella, tous les deux tombés K.O. contre les précédents Pokémon du Champion.

Alors que le spécialiste des Types Électrique rappelait son Pokémon, Ea, bien que quelque peu épuisé, sauta dans les bras de sa maîtresse, fou de joie. Elle caressa la tête de son Pokémon pour le féliciter et s’approcha de son ex-adversaire pour lui serrer la main et recevoir son Badge Phare.

- Félicitations Eryl ! lança Tanguy, dont les cheveux blonds grisonnaient. Je suis épaté du niveau de ton Pokémon.
- Merci Tanguy, déclara-t-elle, heureuse de sa victoire.
- Je te remets donc le Badge Phare ! annonça-t-il, content pour elle.

À une époque, il avait sombré dans la dépression parce qu’il se pensait trop puissant. Mais depuis longtemps maintenant, les rares Dresseurs qui l’affrontaient possédaient un niveau bien supérieur au sien. Beaucoup d’entre eux se servaient de lui comme dernier entraînement avant leur combat ultime. Ça ne le dérangeait pas, bien au contraire, il était ravi d’affronter des adversaires dignes de ce nom.

Depuis six ans, Rivamar était devenu un lieu très prisé par les Dresseurs du monde entier. Non loin de là se dressaient les Sources Adieux menant à la Grotte Retour permettant d’accéder à l’Ultime Arène. Beaucoup de Dresseurs effectuaient leur dernière halte dans cette ville avant de s’y rendre. Ils espéraient en général récolter des informations sur le Champion ou s’entraîner encore un peu à l’Arène de la ville. Mais aucune de ces deux actions ne se révélaient vraiment utiles…

- Que vas-tu faire maintenant ? questionna le Champion d’Arène.
- D’abord me reposer au Centre Pokémon et ensuite me rendre à la Ligue Pokémon, répondit-elle joyeusement.
- Au vu de ton niveau actuel, tu n’en feras qu’une bouchée, ajouta-t-il, amusé. Profite de Rivamar, cette ville cache plus qu’une Faculté, une statue de Goinfrex et quelques spécialités locales.

Après l’avoir remercié une nouvelle fois, Eryl le quitta. Arrivée le soir précédent et son combat étant agendé le matin même, elle n’avait pas visité la ville. Quand elle s’était rendue à l’arène, elle s’était aperçue que sa taille réelle ne correspondait pas du tout à la carte de Sinnoh qu’elle possédait.

Contente d’elle et de sa victoire facile sur le Champion, elle retourna donc au Centre Pokémon… en bus. La rudesse de l’hiver ne lui donnait guère envie de patauger dans la neige. Celle-ci recouvrait toute la ville ainsi que les trottoirs. Si les rues étaient déneigées et salées, personne ne se préoccupait des piétons dans cette ville.

Le bus avançait lentement. En regardant à l’extérieur, elle s’aperçut que de nombreuses personnes assistaient ou effectuaient des combats Pokémon, malgré la neige et le froid. Eryl les trouvait bien courageux, bien qu’elle fût habillée d’une tenue d’hiver, elle n’éprouvait pas l’envie de se battre dans ces conditions météorologiques.

Après plus d’une demi-heure en transport public, elle finit par entrer dans le Centre Pokémon. Elle tomba des nues en voyant Tanguy à l’accueil en train de remettre ses Pokémon à l’Infirmière Joëlle.

- C’est pas possible, comment avez-vous fait ? s’exclama-t-elle alors qu’elle le rejoignait, incrédule.

Il éclata de rire avant de répondre en souriant :

- Je mets moins de temps à pieds qu’en bus, à cause des détours et des arrêts. Et surtout, je préfère marcher.

Même en plein hiver, le champion, qui ne semblait plus vraiment de première jeunesse, avait rejoint le Centre Pokémon à pieds. Ne connaissant pas la ville, elle avait préféré le bus, mais ça ne la surprenait pas qu’il pût s’y promener facilement. Eryl confia Ea et ses autres Pokémon à l’infirmière avant de poursuivre la conversation :

- Comment vont vos Pokémon ? Ils se remettent bien ?
- Une bonne nuit de sommeil et ils se porteront comme un charme, l’informa la femme aux cheveux roses.
- Tu vois Eryl ? Pas besoin de t’inquiéter, mais ton attention me touche, c’est très gentil.

Elle le remercia et s’intéressa à l’état de santé des siens. L’Infirmière Joëlle l’informa qu’il leur faudrait se reposer quelques heures avant de refaire un autre combat, mais qu’elle pourrait les récupérer très vite. La technologie pour soigner les Pokémon s’était grandement améliorée après toutes ces années.

Ils s’étaient éloignés du comptoir quand, soudain, un jeune homme entra en trombe dans le Centre Pokémon. Il les poussa violemment pour qu’il pût accéder rapidement à l’infirmière. Eryl tomba sur les fesses et se releva quelques instants plus tard en grimaçant.

- Dites donc, faites un peu attention, lança Tanguy, énervé.
- Tout va bien, je n’me suis pas fait mal, répondit-elle calmement.
- Mais quand même, quel manque de respect !

Un Dresseur pressé qui en bousculait d’autres dans un Centre Pokémon ? Ça pouvait parfaitement s’expliquer. Ses Pokémon pouvaient être blessés ou alors juste fatigués après un très long périple. En observant le jeune homme, elle constata qu’il semblait épuisé d’une course effrénée. La première option lui paraissait dès lors plus probable.

- Qu’est-ce qu’il lui arrive ? s’interrogea-t-elle à haute voix.
- Il a probablement dû affronter Clara, supposa-t-il sans prendre le temps de réfléchir.
- Clara ? Qui est-ce ?

Le Champion la regarda, surpris. Bien qu’elle n’eût pris ses fonctions que depuis peu, il s’étonnait qu’Eryl ne connût pas son existence ainsi que celle de l’Ultime Arène. Malgré tout, Clara était très célèbre dans le Monde Pokémon, elle lui avait même parlé d’une interview avec un journaliste américain.

- Il s’agit de notre vedette locale, si on peut l’appeler de cette façon. Mais pour être plus précis, c’est la Championne Ultime.
- La Championne Ultime ? répéta-t-elle, intriguée. C’est pas Cynthia le Maître de la Ligue de Sinnoh ?
- C’est bien elle, confirma-t-il. Mais Clara a un titre supérieur aux Maîtres. Pour t’expliquer simplement…

Sans entrer dans tous les détails techniques, il lui expliqua que le système politique du Monde Pokémon offrait à une époque l’entrée au Parlement toute personne capable de vaincre le Conseil 4 de sa Région. Si à une époque ce concept paraissait logique du fait du peu de Dresseurs effectuant leur voyage initiatique, ce procédé s’était considérablement développé dans les deux dernières décennies, entraînant une arrivée massive de Dresseurs inexpérimentés politiquement et inapte à diriger le pays entier. Et ils étaient élus à vie.

Les Régions avaient plus ou moins réussi à endiguer ce phénomène à une époque en se créant leur propre parlement élu, mais toujours chapeauté par une instance supérieure. Seulement, de nombreuses personnes très influentes avaient fini par donner toujours plus de pouvoirs au Parlement Pokémon et au gouvernement central réduisant ainsi considérablement les pouvoirs des Régions.

Mais sept ans auparavant, une nouvelle loi passa la rampe du parlement – à une très faible majorité. Elle indiquait que pour y accéder, il ne suffisait plus de vaincre le Conseil 4, il fallait également obtenir un nouveau Badge, bien plus difficile à obtenir contre l’Ultime Champion. Après six ans d’activité, Clara en était la troisième en poste et elle était re-dou-table – Tanguy avait accentué ce mot de cette manière.

- C’est intéressant, murmura-t-elle. Je ne pensais pas ce monde aussi différent.
- Ce… « monde » ?

Elle n’eut pas l’occasion de répondre, l’Infirmière Joëlle l’appela pour l’informer qu’elle pouvait reprendre ses Pokémon, elle lui recommanda toutefois qu’ils se reposassent. L’autre Dresseur était parti s’assoir au bar. Elle remit ses Poké Ball à sa ceinture, mais garda celle d’Ea en main. Mais avant qu’elle n’exécutât son geste pour appeler son Pokémon, la porte du Centre Pokémon s’ouvrit à nouveau et une jeune adolescente proche de l’âge adulte entra. Eryl la détailla du regard : elle avait les cheveux bruns en carré court et les yeux verts. Elle portait un ample manteau d’hiver vert, mais ni gants, ni bonnet, ni écharpe. Elle affichait un visage confiant. Elle remit sa Poké Ball à sa ceinture avant de murmurer au Champion Électrique :

- Dites Tanguy, cette fille vient affronter Clara ou vous ?

Le Champion jeta un œil à la nouvelle arrivante et éclata de rire. Toutes les personnes présentes dans le Centre Pokémon se tournèrent vers eux surpris. Gênée, la jeune fille ne savait pas quoi faire. L’adolescente vint se planter devant eux et observa le Champion un instant :

- Salut Tanguy ! J’espère que tu n’te moques pas de moi, lança-t-elle avec un grand sourire amusé.

Il s’esclaffa en répondant que ce n’était pas le cas, puis il fit les présentations :

- Eryl, je te présente Clara Galano, l’Ultime Championne.

Confuse, elle tendit la main à l’adolescente qui la serra sans hésiter avec un grand sourire.

- Ravie de te rencontrer, lui dit-elle gentiment. Tu es là pour un match contre Tanguy ?
- Déjà fait, elle m’a battu sans problèmes, soupira ce dernier.
- Bah n’t’en fais pas. Les jeunes de nos jours sont plus ceux d’ta génération.

Eryl les regarda tour à tour, on aurait dit de vieux amis. Pourtant leur différence d’âge la frappait. Ils ne devaient pas beaucoup se connaître, mais ça ne leur empêchait pas de se parler familièrement.

- Est-ce que vous accepteriez de faire un combat contre moi ? demanda-t-elle.
- Je préfère qu’on me tutoie, j’n’ai que dix-sept, s’exclama la jeune Championne avec une pointe de colère dans la voix.

Surprise de sa réaction, Eryl ne répondit pas tout de suite, cette Clara l’impressionnait, si juste en haussant le ton elle pouvait lui donner ce genre de réaction, que se passerait-il si elle se mettait vraiment en colère ? Eryl préféra ne pas y penser. Son interlocutrice se radoucit et répondit alors à sa question :

- En temps normal, il te faudrait avoir battu le Conseil des 4 pour m’affronter, mais vu que tu as affronté Tanguy…
- Elle m’a battu facilement, Clara, intervint le concerné. Que dirais-tu d’un combat amical, plutôt qu’un match officiel ?

Elle réfléchit quelques minutes et haussa les épaules avant d’accepter la proposition.

- Si tu veux, on peut faire ça à l’arène, ajouta-t-elle.
- Excellente idée ! s’exclama-t-elle.

C’est à ce moment-là, qu’elle appela Ea à ses côtés pour le présenter à Clara. L’écureuil vert sauta alors sur son épaule, il avait repris des forces, mais elle se doutait qu’il ne pourrait pas participer au combat. Le combat contre Tanguy l’avait épuisé. Elle scruta le visage de la jeune Championne pour connaître sa réaction face à ce Pokémon inconnu avant de parler :

- Clara, je te présente…
- Ea… murmura-t-elle. C-c’est… c’est impossible.

Eryl sursauta. Elle ne s’attendait pas à ce qu’elle le reconnût. La surprise et l’incrédulité se lisait sur le visage des deux jeunes filles. Tanguy sembla tout aussi étonné qu’elle sût de quel Pokémon il s’agissait.

- Ce Pokémon m’a donné bien du fil à retordre, brisa-t-il ainsi le silence.
- Je veux bien te croire… Mais où l’as-tu trouvé ? Je croyais qu’ils étaient…

Elle ne termina pas sa phrase. Eryl sentit qu’Ea allait dire quelque chose, alors elle lui mit la main devant la bouche pour qu’il se tût. Clara était certes une grande Dresseur, mais cela n’expliquait pas comment elle connaissait ce Pokémon. Ne sachant pas si elle pouvait lui faire confiance, elle décida de rappeler son Pokémon.

- Comment connais-tu son existence ? demanda-t-elle, en croisant les bras.

Clara contempla un instant l’épaule d’Eryl où se trouvait encore Ea quelques instants auparavant. Puis elle secoua la tête pour reprendre ses esprits. Prenant le temps de choisir ses mots, elle lui expliqua :

- Par mon père… Il possède une collection incroyable de photos de Pokémon légendaires et de Pokémon rares en tout genre. Par contre, je n’sais pas d’où il les tient, désolée.

Son explication ne convainquit guère Eryl, mais ne sachant pas qui était le père de Clara, elle devrait s’en contenter.

- Ne t’en fais pas, Clara n’a pas l’âme d’une collectionneuse effrénée et ce n’est certainement pas une voleuse. Elle a beaucoup de défauts…

Celle-ci le foudroya du regard n’appréciant visiblement pas la remarque. Faisant mine de ne pas y faire attention, il termina quand même sa phrase :

- Mais tu peux lui faire confiance. C’est une Grande Championne.

Elle acquiesça. Qu’est-ce que ça lui changeait au fond qu’elle connût son existence ? Après tout, elle se promenait fréquemment avec lui sur son épaule, au final ça ne changeait pas grand-chose. Par mesure de sécurité, elle préféra toutefois ne pas le ressortir en sa présence.

*_*_*_*_*_*_*_*_*
Eryl se sentait toute petite dans cette gigantesque arène, bien plus grande que celle de Tanguy – qui les avait quittées, trop occupé pour assister au match. Le plafond était haut et semblait posséder un système d’ouverture pour les combats aériens. À sa droite se tenaient des gradins en grand nombre permettant à plusieurs centaines de personnes d’assister aux matches, mais ils étaient vides. Un ascenseur se trouvait au fond menant probablement aux appartements de la Championne. Derrière elle se trouvait la grande porte donnant sur le hall d’entrée, abritant notamment le bureau de la secrétaire. Celle-ci semblait absente aujourd’hui, seules Clara, face à elle, et elle-même se trouvaient dans le bâtiment.

L’arène ultime ressemblait vu de l’extérieur à un gigantesque château blanc. L’édifice était bâti au milieu de nulle part, aucune âme qui vive ne semblait vivre ici à des lieues à la ronde. Bien que de nombreux Pokémon semblassent apprécier les environs. Pour y accéder, il fallait parcourir un chemin dans la Grotte Retour.

- J’te propose un 1vs1, lui lança Clara.
- D’accord, ça me va.

Clara lui avait appris qu’elle avait mené elle aussi un combat contre un Dresseur le matin même. D’une certaine manière, elles avaient l’une comme l’autre des Pokémon épuisés. Mais même si c’était un combat amical, elle irait à fond. Son seul Pokémon qui n’avait pas combattu Tanguy était son Tortank – pour des raisons évidentes. Elle l’envoya alors sur le terrain. Un Draco apparut en face de la jeune Championne.

Surprise, elle contempla son adversaire. Pourquoi avait-elle fait appel à un Pokémon non complètement évolué ? La jugeait-elle trop faible pour l’affronter avec un Pokémon digne de ce nom ? Voulant mettre toutes les chances de son côté, elle fit Méga-Évoluer son Pokémon.

- Je vois, tu veux y aller à fond, murmura-t-elle. Une Méga-Évolution n’est pas donnée à tout le monde, je t’ai peut-être sous-estimée.

Eryl la remercia du compliment. Clara passa alors sa main dans poche et sortit un Bracelet gris-noir avec une sorte d’éclair au milieu. Il s’agissait d’un Super Bracelet Z. Clara lui sourit et lui indiqua qu’elle pouvait commencer.

- Tortank, Laser-Glace ! ordonna-t-elle.

Un rayon gelé sortit de sa bouche et des trois canons du Pokémon. Ils n’en formèrent qu’un plus grand avant de se projeter sur le Dragon. Elle remarqua alors que la perle de son cou brilla en orange avant qu’un Lance-Flammes ne sortît de sa bouche. Les deux attaques se percutèrent, Draco avait l’avantage du type, mais le Laser-Glace était plus puissant. Surpris, le serpent bleu s’envola pour esquiver l’attaque qui s’abattit sur le mur, mais sans aucun effet. Eryl félicita son Pokémon, une démonstration de force dès le départ, c’était excellent.

- Ne te réjouis pas trop vite, le combat n’fait que commencer Eryl ! lança son adversaire. Dracocharge !
- Mur de Fer ! ordonna-t-elle.

Alors que le Draco s’entourait d’éclat bleu et blanc, Tortank créa une véritable muraille d’acier devant lui. Le Dragon le percuta dans un grand gong sonore. Il recula désorientée et se secoua la tête pour reprendre ses esprits. La tortue géante en profita pour l’attaquer avec un Poing-Glace, mais le Dragon le bloqua de sa Queue de Fer. Tortank avait beau y mettre toute sa force, il ne parvint pas à passer outre l’attaque de son adversaire.

- Sa queue est aussi résistante que l’acier, murmura Eryl, impressionnée.
- En effet, de plus une attaque de Type Glace contre une autre de Type Acier sera beaucoup moins efficace, l’informa-t-elle.
- Blizzard ! répliqua-t-elle.

Alors qu’une puissante bourrasque de neige s’apprêtait à sortir des canons du Tortank qui maintenait son attaque précédente, Draco tourna sur lui-même, lui faisant perdre l’équilibre. Il se fit alors faucher les jambes par une Draco-Queue. L’attaque Blizzard fut lancée sur le sol, gelant ainsi complètement le terrain. Son Pokémon se releva péniblement et tituba sur la glace un instant avant de retrouver un équilibre précaire.

- Elle est forte… Elle sait que Tortank est un Pokémon plutôt lent et que la Glace va lui faire perdre l’équilibre, murmura-t-elle pour elle-même.

Mais son Pokémon était plus fort à distance que le sien. Si elle voulait l’attaquer, elle n’aurait pas le choix que de frapper au corps à corps où elle avait l’avantage. Du moins, tant qu’elle ne se servait pas d’attaques électriques. Soudain d’une autre Draco-Queue, Draco tenta de frapper son Pokémon par surprise sous sa carapace. L’attaque resta sans aucun effet, à sa grande surprise.

- Ton Pokémon est rapide, remarqua-t-elle.
- Et ton Pokémon ferait mieux de suivre un régime, répliqua son adversaire, agacée.

Le Pokémon de la Championne revint à ses côtés. Ses yeux lançaient des éclairs, il paraissait énervé. À son grand étonnement, Eryl avait l’avantage dans ce combat. Son adversaire avait tenté de projeter son Tortank en l’air, mais il n’y était pas arrivé. Était-ce dû au poids de son Pokémon ou à autre chose ? Elle l’ignorait.

- Dracochoc ! s’écria Clara.
- Tortank, la même chose.

Les deux Pokémon crachèrent en même temps une boule bleue. Lorsqu’elles entrèrent en contact, l’attaque de la Tortue pulvérisa celle de son adversaire avant de poursuivre sa route vers le Dragon. Il esquiva facilement, mais son visage se durcit, il semblait particulièrement furieux qu’aucune de ses attaques ne portassent ses fruits.

Ses deux adversaires se regardèrent un instant. Clara acquiesça à leur conversation muette et l’instant d’après son Draco disparut. Sa rapidité impressionnante soulevait la poussière et brisait la glace au sol. Il tournoya autour de son Tortank. Son Pokémon tenta de lancer un Laser Glace autour de lui, mais son adversaire était trop rapide pour qu’il pût le toucher.

- Dracochoc !

De puissance plus faible, certes, mais tout en tournoyant le Dragon bleu cracha un nombre impressionnant de boule bleue dirigée sur son Pokémon.

- Abri ! lança-t-elle en réponse.

Une bulle de protection bleu-vert se créa immédiatement autour de Tortank. Les attaques percutèrent le dôme sans effet durant un certain temps, mais Draco continuait à en cracher. Ils finirent par le fissurer jusqu’à complètement l’exploser en morceau. Le Pokémon Carapace se prit toutes les attaques restantes en pleine face. Il tituba un instant, son adversaire en profita alors pour le frapper d’une très violente Queue de Fer au crâne. Il baissa la tête et son canon prit le coup, Draco fit un looping pour tenter de le frapper au menton, mais son adversaire se protégea alors avec son canon de la main gauche.

Tortank le percuta alors avec son Coud’Krâne dans le ventre, alors que celui-ci était exposé. Son adversaire en eut le souffle coupé et s’effondra au sol. Les deux se regardèrent en chien de faïence. Ils commençaient à fatiguer, mais la colère se lisait de plus en plus sur le visage du Draco adverse. Aurait-elle une chance de gagner ? Malgré la rapidité extraordinaire de son adversaire, il avait beaucoup de mal à lui infliger des dégâts significatifs. En plus sa vitesse semblait l’épuiser.

- Tiens bon Tortank, on va finir par l’épuiser complètement.

Clara restait parfaitement calme, bien que ce ne semblât pas le cas de son Pokémon. Celui-ci était revenu auprès de son Dresseur et gardait son regard hargneux de tout à l’heure. Ces deux-là n’en avaient pas encore terminé, elle en était certaine.

- Je t’ai sous-estimé, murmura la Championne. Je ne pensais pas que tu m’donnerais autant de fil à retordre. Je vais devoir me donner à fonds, alors.

D’un coup de doigt, elle envoya une minuscule gemme à son Pokémon qui l’attrapa avec sa bouche. Eryl pensa qu’il devait s’agir d’un Cristal Z. Elle en eut la confirmation lorsqu’elle vit son adversaire prendre la pose caractéristique. Elle ordonna alors à son Pokémon d’utiliser Mur de Fer et Abri pour augmenter ses chances d’y résister. De manière hésitante, Clara recréa alors les positions de l’Attaque Z de type Dragon.

Draco souffla fort et un énorme Dragon bleu-violet ailé sortit de sa bouche. La créature s’envola rapidement, percuta le Mur de Fer de son Pokémon et explosa au contact de l’Abri. Les Attaques Z ne pouvaient pas faire de mal aux Dresseurs, contrairement aux classiques. Seul le Pokémon visé en subissait les dégâts. Heureusement d’ailleurs, de telles explosions de puissance se seraient avérées trop dangereuses autrement.

Lorsque l’explosion prit fin, Tortank se tenait debout devant elle. Il semblait un peu plus épuisé que tout à l’heure, mais sa combinaison défensive l’avait protégé de la majeure partie du Chaos Draconique. Quoique son attaque échouât, Clara souriait à pleines dents, bien que mentalement un peu épuisée.

- Je vois, parla-t-elle tout doucement. On dirait que je n’ai pas le choix… La défense de ton Pokémon est plutôt impressionnante j’dois dire.
- Ton Draco n’est pas en reste, la complimenta-t-elle en retour. Tu devrais le faire évoluer…

Eryl pensait alors que Clara allait lui concéder la victoire. Ses propos, ses compliments, son sourire, tout indiquait pour elle qu’elle allait laisser tomber, il ne s’agissait que d’un combat amical après tout. Mais la jeune fille se trompait, la Championne gardait encore une attaque en réserve, bien plus redoutable que le Chaos Draconique de tout à l’heure.

- Draco, vas-y. Montre-lui ton véritable niveau.

De manière surprenante, une aura jaune-bleu entoura Draco, comme s’il s’apprêtait à lancer une seconde Attaque Z. Mais c’était impossible. On ne pouvait normalement en lancer qu’une seule par combat ! La fatigue mentale engendrée pour le Dresseur rendait impossible toute seconde tentative. Tortank recréa alors un Mur de Fer pour se protéger et prépara une nouvelle attaque Abri.

- C’est inutile, Eryl. Ton Pokémon n’a aucune chance d’encaisser ma prochaine attaque.

Tel un ressort, Draco s’enroula sur lui-même. L’aura prit de plus en plus de place et commença à l’envelopper complètement. Il disparut et le gigantesque Dragon bleu-violet de tout à l’heure apparut à sa place. D’un battement d’aile, une gigantesque bourrasque se leva et percuta le Mur de Fer, le fissurant complètement avant qu’il n’explosât en morceaux.

Au même moment, il s’élança à une vitesse surnaturelle. L’Abri se dissipa à son tour, sous la force de l’impact. Au lieu d’exploser, le Dragon percuta son adversaire et l’envoya valser dans les airs dans un cri de douleur. Il avait tenté de se protéger avec ses canons, mais ils étaient désormais tordus. Le coup avait été d’une telle violence que sa carapace commençait à se briser et du sang en sortait. Il tomba alors au sol, définitivement K.O.

Le Dragon bleu-violet disparut peu de temps avant de toucher le mur et Draco réapparut à sa place. Son corps était parcouru d’électricité bleue, il respirait difficilement et semblait souffrir rien qu’en se maintenant en l’air. L’épuisement se lisait sur son visage, mais toute trace de colère avait disparu. Elles rappelèrent leur Pokémon. Eryl n’en croyait pas ses yeux, ce Draco était bien plus fort qu’il n’en avait l’air.

- C’est incroyable ! s’exclama Eryl. Ta dernière attaque était tellement plus puissante que le Chaos Draconique !
- Dix fois plus, annonça-t-elle avec un rictus amusé. C’est une attaque en deux temps, le souffle provoqué par l’élancement du Pokémon vers sa cible est tellement puissant qu’il brise toute défense avant que le coup ne soit réellement porté. Aucun Pokémon ne peut encaisser une telle attaque.
- Mais enfin, qui es-tu vraiment ? lança-t-elle interloquée.
- Je suis la Grande Championne, répondit Clara avec un grand sourire.

Bien que cela eût été un combat amical, Clara ne l’avait pas ménagée et n’avait clairement pas retenu ses coups. On ne pouvait pas se permettre de la sous-estimer, la rapidité et la puissance de son Draco n’avaient pas d’égal.

- Tu veux un coup de main pour nettoyer tout ça ? demanda Eryl.
- Non, ça va aller. Tu ferais mieux d’aller rapidement au Centre Pokémon pour soigner ton Tortank. Je t’y retrouverai un peu plus tard.

La salle était jonchée de morceaux de glace – suite au Blizzard de son Pokémon – et une flaque de sang frais se trouvait à l’endroit où se tenait son Pokémon tout à l’heure. Elle salua Clara qui avait déjà sorti un chiffon de sa poche pour commencer à nettoyer le sang. Elle la quitta et partit en courant vers le Centre Pokémon. Son Tortank était blessé et il devait se faire soigner au plus vite.

*_*_*_*_*_*_*_*_*
En sortant de la Grotte Retour avec Ea à nouveau sur son épaule, Eryl eut la surprise de trouver un paysage d’été. Alors qu’il y avait de la neige partout quelques heures plus tôt. En regardant mieux l’endroit où elle se trouvait, elle se rendit compte qu’elle ne se trouvait plus à Sinnoh non plus, mais à la sortie de la Grotte Sombre à côté de Lavanville.

- Finalement Ea, nous revoilà dans notre monde… Je me demande combien de temps s’est écoulé depuis notre départ.

Eryl avait en effet passé au travers d’un portail quelques mois plus tôt l’ayant mené à Sinnoh. Ne sachant pas vraiment quoi faire, elle y avait entrepris un voyage initiatique, ne connaissant pas la région. Elle avait dû en traverser un autre sans s’en rendre compte lorsqu’elle traversait la Grotte Retour.

- Ea heureuse. Nous pouvoir retrouver amis, maintenant.
- Oui, tu as raison, murmura Eryl.

Soudain son téléphone sonna. C’était un appel de Mercutio. Elle pensa qu’il devait s’inquiéter après son absence de six mois. Elle décrocha :

- Salut Eryl ! Qu’est-ce que tu fais à Lavanville ? s’exclama son ami.
- Salut, désolée pour mon absence prolongée, tu as dû t’inquiéter…
- Ea content voir ami ! lança son Pokémon. Faire longtemps !
- Qu’est-ce que vous racontez ? Ça fait même pas une journée la dernière fois qu’on s’est parlé !

Surprise ! Visiblement le temps du monde où elle trouvait se déroulait beaucoup plus vite que dans le sien. Une journée ici correspondait visiblement à six mois dans le monde de Clara.

- On s’est retrouvés dans un autre monde pendant six mois, expliqua-t-elle. J’étais à Sinnoh.
- D’accord… fit-il étonné. Tu as dû y vivre de sacrées aventures, dis-moi.

Tout en continuant à marcher – n’oubliant pas que son Tortank était blessé –, Ea et elle racontèrent une partie de ses aventures et aborda ensuite le sujet Clara :

- J’ai rencontré une Dresseuse très puissante, tu crois qu’on pourrait lui demander de combattre à nos côtés ? Peut-être qu’elle existe aussi dans ce monde !
- Si tu penses qu’on peut lui faire confiance… C’est quoi son nom déjà ?
- Clara Galano, répondit-elle.
- Ea pas confiance, elle connaître existence Ea ! s’écria l’écureuil.

Il raccrocha. Elle pensa alors qu’il devait effectuer des recherches sur elle. Elle reprit alors un rythme plus soutenu pour rejoindre le Centre Pokémon rapidement afin de faire soigner son Pokémon.

- Tu n’as pas confiance en Clara, Ea ? Elle connaît peut-être ton existence, mais ça ne veut rien dire. Je la trouve plutôt sympa, même si elle fait pas la différence entre un combat amical et officiel. Son Draco a l’air plutôt hargneux et violent par contre.

Son Pokémon secouait la tête, alors qu’elle continuait à parler. Il ne voulait pas répondre. Soudain son téléphone retentit une nouvelle fois, Mercutio la rappelait :

- Je n’ai pas trouvé de Clara Galano dans ce monde, annonça-t-il.
- Ah, dommage.
- Par contre j’ai trouvé un autre Galano, il s’appelait Xavier, mais il est décédé.
- Tant pis, peut-être si j’arrive à retourner dans son monde, je pourrai lui poser la question…
- Oublie ça. Tu ne peux pas lui faire confiance ! s’exclama-t-il.

Eryl sursauta, que son Pokémon et lui arrivassent à la même conclusion l’étonnait. Elle écouta les explications de Mercutio. Ses yeux s’arrondirent de plus en plus au fur et à mesure.

- Je comprends mieux, maintenant. Vous aviez raison tous les deux, j’ai été stupide de l’affronter, alors qu’elle connaît l’existence d’Ea.
- Tu ne pouvais pas savoir, elle cache bien son jeu.

Dommage, elle pensait avoir rencontré une personne digne de confiance, mais elle se rendit compte qu’elle s’était lourdement trompée. Elle salua son ami, raccrocha et poursuivit sa route vers Lavanville. L’important maintenant était de soigner son Pokémon et oublier cette histoire.

*_*_*_*_*_*_*_*_*
Clara rentrait de Rivamar, le visage sombre. Elle semblait énervée pour une raison inconnue. La lumière de sa Pokémontre était allumée, pour qu’elle pût se diriger dans la Grotte Retour. De nombreuses paires d’yeux fatigués s’ouvrirent à son passage et se refermèrent pour que leurs propriétaires puissent continuer à dormir.

Mais d’autres, non fatigués eux, continuèrent à la regarder passer. Elle ne fit pas attention à eux et poursuivit sa route. Une fois hors de vue, ils se détournèrent et se regardèrent les uns les autres. L’un d’eux déclara :

- Alors, cette fille venait d’une autre dimension ?
- C’est ça. Ça explique pourquoi elle avait un Ea, répondit un deuxième, calmement.
- Tant mieux, ajouta un troisième d’un ton plus énervé. Les vérifications sont donc inutiles.
- Vous en êtes certain ? Ce serait dangereux que Ea, Eï et Eü soient toujours en vie, reprit le deuxième.
- C’est lui qui les a tués, évidemment qu’on en est sûr ! répliqua le troisième, désignant un autre qui n’avait pas encore parlé.

L’un d’eux s’approcha de celui-ci. Courroucé, il répliqua violemment :

- Ne me touche pas !
- Mais… tenta-t-il de répondre.
- Laisse-le, tu sais bien comment il est, répliqua le deuxième.

Quelques instants passèrent. Le quatrième qui n’avait pas encore parlé s’exprima alors :

- Elle se doute de quelque chose ?

Les trois autres comprirent tout de suite de qui il parlait. Ils firent un non de la tête que le quatrième vit sans problème, malgré l’obscurité.

- Alors le plan continue. Aucune erreur ne sera tolérée ! affirma-t-il.

Sans aucun bruit perceptible, il s’en alla. Les trois autres se regardèrent anxieux et se couchèrent pour dormir.









Torrak


Colossinge

J’enchaînais les coups de poings contre le tronc de l'arbre. Cela faisait partie de l'entraînement que m'a donné Shaofouine. Elle suivait en contre partie l'entraînement que je lui avais concocté. Et la connaissant, elle a dû, à ce moment-là, me traiter de tous les noms. Nous étions tous les deux candidats au titre de dieu du type Combat. Le titre de dieu avait été créé par Arceus quelques temps après la création des pokémons. Il y en existait un par type de pokémon. Je ne savais pas comment se passait l'introduction d'un nouveau dieu ou d'une nouvelle déesse pour les autres types mais pour le type Combat, c'était un long processus de sélection. Dès le plus jeune, tous les pokémons Combat étaient entraînés et les plus prometteurs étaient repérés lors de tournois inter-clans. Shaofouine et moi étions les deux derniers candidats.

Nous étions rivaux mais aussi et avant tout amis. Nous avions grandi ensemble, nous nous étions entraînés ensemble. C'était le seul pokémon qui me comprenait vraiment. Nous avions traversé beaucoup d'épreuves ensemble, certaines ont presque été fatales. Je lui aurai confié ma vie. J'ai continué l'entraînement jusqu'à la fin de la journée. En arrivant dans mon abri, j'étais totalement exténué mais aussi extrêmement content. J'étais enfin arrivé à contrôler une nouvelle combinaison d'attaques. C'était la dernière étape avant de l'inclure dans mon attaque signature en tant que dieu du type Combat. Je vis alors un message laissé par Shaofouine me disant de la rejoindre près du pont de pierre. C'est là où nous nous étions rencontrés.

C'était une nuit où j'étais encore un jeune Férosinge et elle était encore une jeune Kungfouine. Je venais de finir ma journée d'entraînement avec mon maître Mackogneur. J'étais totalement épuisé. D'ordinaire, je rentrais en me balançant de branches en branches mais je n'avais tellement plus de forces dans mes bras ou même ma queue que je rentrais en marchant à travers les arbres. Le dojo se trouvait seulement dans la vallée d'à côté mais la nuit le chemin semblait plus loin à cause du manque de lumière. Quelques Lumivole et Muciole passaient ci et là mais ça ne suffisait pas pour éclairer tout le chemin.

Alors que je passais à côté du grand arbre qui marquait le début du territoire de mon clan, je vis un Mentali achever un de mes congénères. Je ne pus retenir un cri. Le Mentali se retourna et me toisa du regard. Je compris un peu tard que j'allais être sa prochaine victime. Je me tournais pour m'enfuir en courant mais je restai bloqué sur place. Une aura de la même couleur que le pelage du Mentali m’entoura. Je reconnus l'attaque Psyko. Puis il se tourna rapidement et avec Queue de fer me fit m'envoler au dessus des arbres. Je fus libéré de Psyko mais j'étais encore plus mal en point qu'il y a quelques instants. Avec ma fatigue musculaire, ma résistance était bien moins importante que si j'étais en pleine forme. J'arrivais à peine à serrer le poing.

Lorsque j'atterris, j'étais près du pont séparant le territoire de mon clan d'un autre. Le Mentali n'était pas encore arrivé près de moi mais je l'entendais fêler entre les arbres et buissons. Je me relevais difficilement et utilisai Gonflette. Malgré mon état, je me devais de me défendre contre n'importe quel adversaire. Juste au moment, où sa Vive Attaque allait me frappait de plein fouet, je plaçais une Représailles en uppercut avec mon poing. Le Mentali surpris ne fit rien d'autre que s'envoler encore plus haut pour retomber dans l'eau. J'utilisai alors Poing-éclair pour l'affaiblir encore mais je me retrouvai paralysé. J'avais oublié que ce pokémon transférait les problèmes de statut à son adversaire.

A cause de la paralysie, je ne pus l'empêcher d'utiliser Glas de Soin et Aurore. Je pressentais que j'allais mourir. Mais une ombre passa au dessus de moi et fit retomber le Mentali dans l'eau. Le pokémon était plus grand que moi mais aussi plus rapide. Je ne voyais que deux lumières, une jaune verte et une autre violette émanait de ses poings. Je reconnus les attaques Vampipiong et Direct Toxik. Le pokémon Soleil ne pouvait rien faire. Dès qu'il bougeait, son assaillant le ramenait dans une position où il était en désavantage. Finalement, le pokémon bipède lui asséna un Mitra-Poing qui le mit K.O. Je m'évanouis à ce moment et à mon réveil une Kungfouine se trouvait à mon chevet et s'occupait de soigner mes blessures. J'arrivai sur le lieu de rendez-vous convenu avec Shaofouine. Je la trouvais assise au bord du pont. Elle regardait les mouvements de l'eau et des Barloches qui remontaient la rivière qui passait en dessous.

- Tu voulais me voir ? Fis-je en m'asseyant à côté d'elle
- Colossinge ?! Je ne pensais pas que tu ferais si vite.
- Je ne suis plus le petit Férosinge que tu as sauvé.
- C'est vrai mais je suis toujours plus rapide que toi, me répondit-elle avec un clin d'oeil.
- Alors dis-moi. De quoi tu voulais me parler ?
- C'est peut être rien mais j'ai ressenti il y a quelques jours une perturbation dans le ciel.

Sur le coup, je me suis dis que ça devait encore être un truc de méditation. Les Kungfouine et Shaofouine sont réputés pour être très portés sur la chose. Shaofouine avait essayé de m'initier mais ce n'était pas mon style. Je me contentais de me concentrer pour taper le plus fort possible.

- Je sais que tu penses que c'est un délire de mon clan. Mais j'en ai parlé avec d'autres pokémons, d'autres dieux ou prétendants au titre de dieu et ils ont ressenti la même chose. Pas toi ?
- Tu sais bien, les trucs métaphysiques psychiques ou autre j'y comprends pas grand chose. Bref, ils t'ont dit quoi les autres ?
- C'est la première fois qu'une telle chose est ressentie. Même le dieu Noctunoir qui pourtant vit depuis plusieurs siècles ne sait pas ce que c'est. Il a tout de même reconnu la signature énergétique d'un portail dimensionnel mais d'un genre nouveau.
- Tu penses que c'est vraiment dangereux pour notre monde ?
- J'ai le pressentiment que quelque chose de grave va arriver.
- Alors on y va. Tu nous guides et moi je frappe, dis-je en me levant et frappant des poings l'un contre l'autre.

Shaofouine sourit.

- Tu ne changeras jamais. D'abord on frappe et après on pose les questions avec toi
- Je dirais plutôt, je frappe et tu poses les questions. Ça a toujours fonctionné comme ça toi et
moi.
- C'est vrai. Alors demain à l'aube, je te rejoins et on va voir Noctunoir.


***

Shaofouine

La nuit passa mais je ne pouvais pas dormir. Je connaissais Colossinge. Je savais qu'il cherchait à être le meilleur pour être le prochain dieu Combat. Et honnêtement il pouvait le devenir. Mais il est aussi distrait et tête brûlée. Il ne réfléchit qu'après avoir encaissé des coups. Dans la situation actuelle, cela pouvait lui être fatal. Je me mis alors à méditer pour retrouver un semblant de sérénité et peut être une piste de solution à notre problème. Le lendemain, je dus réveiller moi même Colossinge car comme à son habitude, il était parti pour faire une grasse matinée. Évidemment, il fut grognon jusqu'à ce qu'on arrive chez Noctunoir. Malgré son grand âge, il était toujours aussi habile et réactif autant physiquement que mentalement. Mais il était toujours aussi effrayant à regarder. Pourtant, il était tout le contraire quand on le connaissait.

- Noctunoir, je reviens te voir par rapport au portail dimensionnel dont on parlait la dernière
fois. As-tu plus d'informations ? Demandais-je avec respect.
- Hélas, j'ai consulté d'autres Noctunoirs mais aucun n'a su me dire exactement ce que c'était. Certains pensent comme moi que c'est une ouverture vers d'autres dimensions mais auxquelles les Noctunoirs n'ont pas accès avec leurs capacités. D'autres pensent que c'est un message d'Arceus le Créateur. Je t'avoue que la meilleure solution serait de passer à travers et de revenir pour en savoir plus.
- Cool ! On part quand ? Fit Colossinge tout à coup surexcité
- Ça peut être dangereux une fois arrivé là bas, voire même le voyage peut nous être fatal avant d'arriver de l'autre côté, lui répondis-je.
- Et alors ? On est des prétendants au titre de dieu. L'aura divine que nous avons acquis nous protégera.
- Et si ça ne suffisait pas ?
- J'avoue que je n'y ai pas pensé.
- En tant que dieu Spectre, je peux vous offrir une protection supplémentaire mais cela ne fonctionnera qu'une fois.
- Merci Noctunoir mais je pense que nous allons simplement observer pour l'instant et agir quand nous aurons plus...

Je me tus car je sentis soudainement la même pression que lors de l'ouverture du premier portail. Mais cette fois-ci, c'était beaucoup plus fort. Je sentais que mon esprit n'allait pas supporter toute cette pression. Jusqu'à ce que Noctunoir pose son énorme main dans mon dos. Son aura Spectre me protégea des effets visiblement d'une attaque psychique. Mais Colossinge ne semblait pas affecté. Certainement parce qu'il était moins sensible à la méditation. Un nouveau portail s'ouvrait derrière nous. Nous n'étions pas aspirés à l'intérieur et rien ne semblait en sortit non plus si ce n'est une énergie étrange qui donnait des haut le cœur à Noctunoir. Il semblait vouloir vomir quelque chose et en même temps ne pas le faire.

- Je crois que c'est le moment de savoir ce qui se passe de l'autre côté, Fit Colossinge en se préparant à sauter dedans.
- Non atte...

Trop tard, il avait déjà sauté dedans.

- Noctunoir, tout va bien ?
- Oui. T'en fais pas. C'est simplement que l'énergie de ce portail me rend malade. Cela ne me l'avait jamais fait avant. Tu devrais rejoindre Colossinge. Le connaissant, il va s'attirer des tas d'ennuis. Mais fais attention toi aussi. Tu es plus sage que lui mais je sens d'autres forces de l'autre côté de ce portail. Des forces inconnues ici et qui pourrait bien être très dangereuses.
- Et Colossinge y est allé. Génial. Fis je mi-blasée mi-dépitée. Bon, bah quand faut y aller.
- Shaofouine, une dernière chose.

Noctunoir ouvrit une autre brèche dans les airs et en sortit un joyau, qui ressemblait beaucoup à un diamant.

- Prends-le. Je l'ai trouvé après l'ouverture des premiers portails. Je ne sais pas à quoi ça sert mais je pense qu'il pourra vous servir à toi ou à Colossinge.
- Merci Noctunoir. On reviendra aussi vite que possible.
- On se reverra oui, répondit-il triste.

Je me tournai vers le portail et sautais dedans. J'atterris quasiment instantanément sur le dos. En touchant le sol, mes pattes se dérobèrent et je roulais sur le dos avant de me relever. Je rangeais rapidement le joyau que m'avait confié Noctunoir puis je regardais autour de moi.

Tout était différent du paysage qu'on venait de quitter. Nous étions passés d'une forêt luxuriante et verdoyante à une ville pleine de pokémons et dont l'odeur n'était pas très agréable. Je vis plein de pokémons très différents. Des Coatox, des Pandarbare, mais aussi des Migalos et des Insecateur. Je remarquais déjà qu'ils semblaient tous cohabiter sans trop de problèmes. Aucun conflit majeur n'était sur le point d'éclater. Aussi, ils avaient tous une allure étrange. Ils parlaient tous comme chez nous mais ils avaient un comportement très différent de ce qu'on connaissait dans notre forêt. Ils s'échangeaient des objets, de la nourriture contre des pierres qui brillaient et semblaient précieuses. Je regardais partout autour de moi. Tout m'était inconnu.

La foule se fit soudain plus dense et je fus coincée entre deux Groret très malodorants. Je dus utiliser Rebond pour sortir des rues et me réfugier sur un toit voisin. Je pus voir plus clairement l'étendue de la ville. Elle était visiblement séparée en trois espaces. Là où on se trouvait devait être la ville basse, plus haut derrière des emparts la ville haute avec un magnifique et ostentatoire bâtiment et un peu en retrait un quartier résidentiel avec des villas et des manoirs où aucun pokémon ne semblait aller. Je me rappelais alors pourquoi j'étais là.

Retrouver Colossinge et rentrer à la maison. J'entrais alors en méditation. Je me concentrais sur mon chi divin pour entrer en résonance avec celui de mon ami. Je ne mis pas longtemps à le trouver. Il était un peu plus loin et d'après ce que je percevais il était en train de se battre.

- Il ne changera donc jamais, pestais-je avant de m'enfoncer à nouveau dans la foule.


***

Colossinge

Je venais de mettre K.O mon dixième adversaire et pas des moindres. C'était un Lucario. Visiblement dans cette dimension, tous les pokémons étaient plus puissants que la normale mais il n'y a eu que ce Lucario pour me donner un peu chaud. Tout était parti d'un banal pari entre un autre Colossinge et moi. Il m'avait défié dans un duel de poing. Mais évidemment, il ne me connaissait pas, ni mes capacités supérieures grâce à mon entraînement pour le titre de dieu. Il s'élança vers moi pour me donner un puissant coup du droit mais je l'arrêtai d'un poing et le renvoyai d'où il venait avec une petite tape sur le front. Ses copains se rendirent vite compte qu'il était évanoui et voulurent le venger. Je dois avouer que ça m'excitait de me battre contre des pokémons comme eux. Je pouvais sentir une énergie en eux qui n'était pas due à leur espèce car tous la possédaient en infime quantité mais suffisamment pour que je la ressente. Je venais de mettre K.O un autre adversaire quand je sentis un pic d'énergie passer près de moi. C'était la même énergie que chez tous les pokémons autour de moi mais ce pokémon en possédait une bien plus grande quantité. Je lui barrais la route.

- Eh toi, dis-moi. Tu es différent des autres pokémons d'ici.
- Je fais partie des Nettoyeurs. Et si tu ne veux pas avoir de problèmes, tu devrais dégager de mon chemin.
- Tu as l'air bien arrogant pour un Scalproie. Là d'où je viens, je m'en fais dix comme toi au réveil.
- Tu es sûr de vouloir continuer la conversation ? Me répondit-il en faisant briller le bout de ses bras d'une lueur de défi.
- Si elle inclut des poings et des coups, sans aucun doute.

Malheureusement pour moi, je ne vis pas venir le premier coup qu'il me porta. Et pour cause, c'était une attaque Feinte. Pas qu'elle me fasse beaucoup mal mais elle m'avait surprise. Je répliquai par Puissance et Balayage. Pour un Scalproie, l'attaque ne ferait pas beaucoup de dommages mais elle me permettrait de préparer un puissant Mitra Poing que peu de pokémons pouvait arrêter. Et ce fut effectivement le cas. Lorsqu'il voulut bloquer mon coup, le bras du Scalproie se tordit de façon inhabituelle et on entendit de gros craquements. J'enchaînai avec Eclate-Roc et Casse Brique. Il s'évanouit lui aussi. C'est à ce moment là que Shaofouine me rejoignit.

- Je croyais que tu serais restée dans la forêt avec Noctunoir.
- Et qui serait venu pour te sauver les miches ?
- Comme si j'en avais besoin. Regarde comme ils sont faibles ici. Même celui là, fis-je en montrant le Scalproie, alors qu'il a en lui une énergie plus grande que les autres.
- Si tu avais fait plus attention, tu te serais aperçu que l'énergie qu'on ressent chez eux fait partie intégrante de leurs corps, contrairement à celui-là qui en possède aussi sur son corps. Ça signifie qu'elle ne vient pas de lui mais que quelqu'un dans son entourage en dégage tellement que des résidus se déposent tout autour de lui.
-Cool ! Partons à la recherche de ce pokémon !
-Je crois que ce n'est pas la peine. Il vient de nous trouver.

Effectivement, je pouvais voir devant nous une escouade entière de Scalproie, prête à nous charger et derrière eux, un pokémon plus grand qu'eux qui portait une sorte de casque avec une crête dorée sur le dessus. Si parmi les pokémons présents avant leur arrivée, l'énergie qu'on ressentait avec Shaofouine était présente, maintenant que ce pokémon était arrivé, elle irradiait de son corps.

- J'imagine que c'est toi le chef de ces ''Nettoyeurs'', fis-je avec arrogance.
- Effectivement, répondit le pokémon dont le métal argenté brillait. Et tu es ?
- Colossinge, prétendant au titre de dieu Combat.
- Laisse-moi rire. Même si ce titre existait, tu n'en serais certainement pas le propriétaire. Je connais quelques pokémons comme moi qui te tueraient en un claquement de doigt.
- Tu en doutes ? Alors laisse-moi te prouver ce que j'avance.
- Non Colossinge ! On n'est pas là pour se battre. Laisse tomber et rentrons.
- Tu devrais écouter ta copine. Tu vas te faire mal pour rien.
- Peut-être mais c'est comme ça que je progresse pour atteindre mon objectif. Être le plus puissant pokémon qui existe.
- Tu me ressembles un peu finalement. Je te laisse une chance de prouver ta valeur. Rendez-vous devant les portes du Palais Impérial dans une heure. Vous autres, rangez vous ce foutoir, ordonna le pokémon argenté aux pokémons qui étaient restés spectateurs.

Plutôt fier de moi, je me tournais vers Shaofouine pour recevoir une double paire de baffes.

- Pourquoi tu me gifles ? M'écriai-je
- Parce que tu es complètement stupide. Je sais que les Colossinges ne sont pas réputés pour être très intellectuels mais je pensais avoir eue une bonne influence sur toi depuis toutes ces années.
- Mais qu'est ce qui se passe à la fin ?
- Tu l'as senti comme moi. L'énergie que ce pokémon dégageait est la même que l'on sentait à travers le portail qui nous a mené ici. Noctunoir m'a mise en garde par rapport à des forces inconnues qui pourraient être très dangereuses voire fatales.
- Ce que j'ai senti, c'est rien de moins qu'une grande énergie qui ne demande qu'à être utilisée. Si effectivement, je lui ressemble un peu. Il doit en avoir assez de garder cette énergie en lui, sans jamais l'utiliser.
- C'est censé me rassurer ?
- Tu sais très bien que depuis tout petit, je fais tout ce qui pourrait me rendre plus puissant. Je suis toujours à la recherche de pouvoir, de techniques qui rendraient plus puissant. Je sens que je peux enfin me dépasser et acquérir ce qu'il me manque pour être vraiment le plus puissant, même plus puissant que toi.
- Tant que tu réfléchiras avec tes muscles, tu seras toujours deuxième derrière moi.
- C'est pas gentil ça.
- C'est pourtant la vérité. Si tu veux vraiment l'affronter, vas-y mais ne compte pas sur moi pour me battre. Ce Mentali-là, je ne suis pas sûre de pouvoir le battre, même avec toi à mes côtés.
- A ce point là ?
- C'est un euphémisme.
- Génial !

Shaofouine se tapa le front avec sa patte et fit un non dépité de la tête. Une heure plus tard, nous étions devant le Palais Impérial. Shaofouine m'avait suivi mais je savais qu'elle aurait préféré être partout ailleurs qu'ici. Je sentais une très grande pression émanant de ce bâtiment mais totalement différente de celle de l’Écorcheur argenté, comme l'avaient appelé certains pokémons témoin de notre rencontre. Un des pokémons présents nous avait dit qu'il faisait partie de la Trigarde Impériale, les trois plus puissants pokémons de l'Empire après l'Empereur. Évidemment, nous n'avions rien compris à cette histoire d'Empire et de Trigarde mais ça confortait bien mon envie de me battre contre lui.

Quelques secondes après notre arrivée, une groupe de Scalproie vint nous ouvrir la porte et nous guida jusque dans une espèce d'arène. C'était le même genre de terrain sur lesquels nous combattions avant les tournois inter-type mais il y avait des gradins nettement plus impressionnant construits en pierre très noire et un balcon d'où émanait de façon encore plus forte la pression que je ressentais depuis l'entrée du Palais Impérial. Cette pression était telle que Shaofouine et moi étions obligés de maintenir une certaine quantité d'énergie en guise de protection. L’Écorcheur argenté arriva juste après par l'entrée qui se trouvait en face de nous.

- Vous êtes venus. J'en suis ravi. Fit-il
- On te surnomme l’Écorcheur argenté dans la ville. Mais quel pokémon es-tu ? Tu ressembles beaucoup à un Scalproie mais c'est clair que tu n'en es pas un, demanda Shaofouine
- J'ai été il y a longtemps un Scalproie mais j'ai évolué et je suis devenu Scalpuraï. L’Écorcheur argenté me va bien puisque je suis passé maître dans l'art de dépecer mes victimes sans qu'elles ne meurent trop vite.
- En plus d'être puissant, tu es psychopathe. Ça sera encore plus satisfaisant de te battre. Répondis-je.
- Tu dégages malgré toi une puissance que nous n'avons jamais rencontrée. Mais sur ce balcon, une autre puissance bien plus effrayante est présente. Tu peux m'expliquer ?
- Je ne sais pas grand chose de la puissance de Sa Majesté, si ce n'est qu'elle est au dessus de tout ce que nous connaissons. En revanche, je veux bien satisfaire à ta dernière volonté. Je partage avec Sa Majesté et tous les pokémons de l'Empire, une essence qui nous donne la parole, la longévité et plus de puissance. Sa Majesté est la seule à la contrôler parfaitement et pouvoir la manifester à travers son corps entier. Les membres de la Trigarde Impériale, dont je fais partie, peuvent aussi la contrôler mais sur un membre seulement. Vous n'en serez probablement pas témoin car vous serez mort avant.
- Colossinge, finalement, j'ai changé d'avis. Je vais combattre avec toi.
- Pourquoi ça ? Fis-je surpris
- Ce Scalpuraï est bien plus puissant que ce qu'il laisse paraître. Et surtout j'ai pas envie que tu meures.
- C'est très sympa de ta part mais je n'ai pas besoin de ton aide.
- En fait, c'était pas une demande.

Puis elle se mit en garde face à notre adversaire. Il ne parut pas surpris. Il semblait même sourire.

- Que vous soyez deux ou cent ne changera pas le résultat de ce combat. Majesté, ai-je le droit de les tuer ? Fit-il en continuant de nous regarder.
- Pas avant qu'ils ne nous aient montré qui ils sont, répondit une voix caverneuse et résonnante.

La pression qui émanait du balcon était donc celle de l'Empereur. Bien après Scalpuraï, j'irai m'occuper de son cas. Mais chaque chose en son temps. Je me ruais vers mon adversaire le poing flamboyant. Je sentis Shaofouine entrer en méditation rapide grâce à Yoga qu'elle combina avec Plénitude. De façon naturelle, j'étais plus puissant que tous les Colossinge, ainsi je ne me boostai que très rarement. Aujourd'hui était l'occasion parfaite pour montrer les résultats de mon entraînement. Le premier coup que j'ai voulu porter fini dans le vent car Scalpuraï avait pivoté sur le côté deux secondes avant l'arrivée de mon poing. Il voulut en finir rapidement en me transperçant avec son bras mais je le fis reculer avec Tonnerre. Surpris, il recula et se prit de plein fouet l'attaque Forte-Paume de Shaofouine qui était arrivé à ce moment là. L'explosion d'énergie le propulsa dans le mur d'enceinte qui séparait le terrain des gradins.

- Waouh ! Je ne me rappelais pas que Forte-Paume était si puissante que ça.
- Je suis moi aussi prétendante au titre de déesse Combat, je te rappelle. Mais on parlera plus tard. Son armure est beaucoup plus résistante que celle des Scalproies. Ce coup ne l'a pas endommagé.

Effectivement, Scalpuraï ressortit du mur indemne. Des petits cailloux tombèrent de ses épaulettes mais il n'y avait aucun dommage visible sur son corps. Puis il disparut. En un instant, il s'était retrouvé derrière nous et sa main me fit rencontrer le sol à vive allure. Avec son autre bras, je le vis faire un revers pour repousser Shaofouine qui allait l'attaquer. Il me souleva du sol à hauteur de ses yeux avant de me mettre à un coup de Tête de fer qui me fit aussi rencontrer le mur d'enceinte.

Contrairement à lui, mon corps n'était pas en métal et je ressentis chaque pierre qui frappa mon dos. Heureusement que j'avais bandé mes muscles sinon certaines m'auraient transpercé la peau. Le temps que je retrouve l'usage partiel de mes membres endoloris, Shaofouine le tenait en respect. Elle était gracieuse au naturel mais quand elle se battait, cette grâce était à son paroxysme. Tout son corps semblait aller dans la même direction, avait le même objectif. Scalpuraï était extrêmement rapide pour un pokémon de sa taille et de son type. Mais Shaofouine anticipait toutes ses offensives. Plus je regardais ce combat, plus je comprenais ce qu'avait dit Shaofouine une heure plus tôt. Ce Scalpuraï n'était clairement pas un pokémon ordinaire. Si c'était bien l'évolution d'un Scalproie, il devait être très expérimenté et avisé. Tout le contraire de moi. J'étais jeune, impulsif. La seule stratégie que j'appliquais c'était frapper fort. Et si mon adversaire résistait, il fallait frapper plus fort. Alors je ne rejoignis pas le combat, pas tout de suite. Je restai sur le côté à les observer exécuter une danse dont le moindre faux pas serait mortel.


***

Shaofouine

Je ressentais encore la présence de Colossinge. Ça me rassurait. Le coup qu'il avait pris n'était pas anodin. Malgré sa résistance, il a dû le sentir. Mais je ne devais pas me laisser distraire. Scalpuraï ne relâchait pas son attention de moi. La moindre ouverture me serait fatale. J'utilisai plus que de raison Détection pour voir arriver avec une seconde d'avance ses coups. C'était largement suffisant pour moi pour les éviter et tenter une autre offensive mais il était aussi inflexible qu'un mur. Je n'étais pas assez forte pour ne serait ce que le faire s'arrêter, alors je continuais d'esquiver. Cependant, la cadence des ses assauts accélérait. Je vis luire son corps de métal et comprit qu'il venait d'utiliser Poliroche. Il voulait encore s'amuser. Alors j'allais lui donner du divertissement. Au lieu d'esquiver son prochain coup, je le parais avec une Aurasphère qui explosa au contact du pokémon Acier. L'explosion me repoussa plus loin me laissant le temps de rejoindre Colossinge.

- Qu'est ce que tu fais ?
- J'applique tes conseils. Je réfléchis avant d'agir.
- J'espère que t'as bien réfléchi alors parce que j'ai besoin que tu l'occupes quelques minutes.
- Quoi ? Maintenant ?! Il est même pas épuisé !
- C'est maintenant ou jamais.
- Ok. Je pense avoir trouvé une stratégie pour au moins l'empêcher de bouger.

Colossinge partit comme une flèche vers notre adversaire qui l'arrêta d'une main. Je m'éloignai un peu plus du combat pour me concentrer. Yoga et Plénitude étaient des attaques basiques pour augmenter temporairement ses capacités. J'avais au fil des ans développé une technique de méditation qui me permettait d'atteindre la pleine conscience de mon corps. Je n'avais plus besoin de penser mes actions. Mon corps bougeait de lui même, réduisant à zéro le temps de réaction. C'était la base pour utiliser mon attaque signature. Une fois cet état atteint, mon corps était littéralement capable de l'impossible.

Malgré l'état de méditation que je recherchais, je ne pouvais m'empêcher de visualiser mentalement le combat de Colossinge et Scalpuraï. Je ressentais l'énergie de Colossinge mais elle était plus contrôlée moins sauvage que d'ordinaire. Il l'utilisait avec efficacité. Chaque coup avait un impact sur le corps de Scalpuraï. C'était comme si Colossinge savait où trouvait les points faibles dans l'armure argentée de son adversaire. Pourtant, il ne possédait pas Détection ou Lire-Esprit. Je devais admettre qu'il avait bien suivi mes conseils. Il anticipait comme moi les offensives de Scalpuraï mais à la différence qu'il ne se contentait pas d'esquiver mais d'attaquer aussi et de façon très frontale, des vrais coups qui faisaient réagir Scalpuraï mais malgré tous ses efforts, il ne parvenait pas à porter un coup direct à Colossinge.


***

Colossinge

Je sentais que la fureur montait dans les yeux de Scalpuraï. Je commençais alors à placer des coups plus précis pour gagner encore plus de temps pour Shaofouine. Plus je gagnais du temps, plus son attaque serait efficace. J'ai compris la façon de penser de Scalpuraï. Chacun de ses coups n'était pas à proprement parler destiné à frapper mais plutôt à découper. Il souhaitait faire souffrir avant d'achever ses adversaires. C'est pour cette raison que je plaçais des coups forts sur les lames se trouvant sur ses bras. Ainsi au bout de quelques minutes, j'avais plusieurs entailles sur mes poings mais ses lames étaient tordues et beaucoup moins efficace pour trancher. Il s'en rendit compte un peu tard car je prenais soin aussi de l'aveugler avec des coups de poings éclair juste avant de frapper ses lames.

Évidemment cette stratégie ne fonctionnerait pas éternellement. Quand j'eus assez tordu ses lames, je passai à la deuxième étape de ma stratégie : limiter ses mouvements. Ça n'allait pas être une partie de plaisir car même si j'étais plus petit que lui, je ne maîtrisais pas complètement ce que je m'apprêtais à faire. Scalpuraï tenta un dernier coup de poing visant ma tête mais il se termina planté dans le sol. Je m'étais glissé entre ses jambes et dans la glissade j'ouvris mes poings glacés et toucha ses jambes.

L'effet fut immédiat. De la glace commença à se former sur ses jambes à l'endroit où je l'avais touché. Mais ce n'était pas suffisant. Je ne pouvais pas augmenter ma Vitesse je misais donc sur la puissance de mes muscles pour me propulser plus vite vers mon adversaire et continuer à toucher ses jambes et ses bras pour que la glace prenne plus vite qu'il ne la détruisait. Je parvins avec pas mal d'effort à bloquer ses genoux et ses coudes de manière à l'empêcher d'utiliser n'importe quelle attaque incluant un mouvement de ses membres. Heureusement pour moi, il ne connaissait visiblement aucune attaque Feu pouvant le libérer de la glace.

- Qu'est ce que tu comptes faire maintenant, hein l’Écorcheur ?
- Je ne pensais pas qu'un Colossinge pouvait être futé stratégique que ça.
- Venant de toi, je prends ça comme un compliment.
- Mais tu as oublié un détail assez important. Je ne suis pas n'importe quel pokémon.

Sur ces mots, son bras droit s'illumina d'une lueur verte comme si des vers luisant transperçaient sa peau métallique. Puis d'un coup, la glace céda puis il libéra ses autres membres. Je vis alors le reflet de la lumière verte sur son corps métallique. Les lueurs vertes donnaient un air beaucoup plus effrayant et menaçant à son regard déjà glaçant et froid comme une lame.

- Je ne pensais pas avoir besoin de l'Ether pour me défaire ce combat. Mais je dois reconnaître que cela me plaît. Je n'ai eu que rarement l'occasion de me battre sans retenue. La dernière fois c'était contre un G-Man mais je doute que tu aies son niveau.
- Je ne t'ai encore rien montré de mon pouvoir, répondis-je sur le ton du défi.
- Dans ce cas, reprenons notre danse.

Cette fois-ci, Scalpuraï prit son temps avant de s'avancer, je vis les lames sur ses bras reprendre petit à petit leur forme originelle sans doute était-ce à cause de l'Ether dont il parlait quelques secondes plus tôt. Mais je n'allais pas attendre qu'elles redeviennent mortelles pour l'attaquer. Je me lançai à la force de mes jambes vers sa tête puis alors qu'il allait m'attraper avec son bras droit, j'utilisai à nouveau Tonnerre pour l'aveugler. Ensuite je le fis trébucher avec Balayage avant de le renvoyer contre le mur d'enceinte avec Casse brique.

Malheureusement pour moi, son bras droit se planta dans le sol avant qu'il n'atteigne le mur et l’Écorcheur revint à la charge ses deux bras luisant d'une lueur meurtrière. C'est à ce moment là que Shaofouine décida d'utiliser Interversion. Elle prit ma place et contra de sa patte postérieure le premier bras du Trigarde. Ensuite elle se servit de ses long poils pour encercler le bras recouvert d'Ether et le ramener vers le visage de Scalpuraï et le frapper avec puis enfin elle déchaîna son attaque ultime. Venant d'un pokémon si petit en comparaison de l’Écorcheur, on ne croirait pas que l'attaque soit si puissante. Shaofouine recouvrit son corps d'une aura similaire à la couleur de son pelage et frappa avec force et vigueur les différents points d'articulations de son adversaire. Il se retrouva rapidement bloqué, incapable de bouger ses membres. Shaofouine en profita alors pour concentrer toute cette énergie nouvelle dans ses paumes. Je vis briller entre ses mains une pierre au milieu d'une sphère d'énergie violette claire. Shaofouine tourna son regard vers moi et me sourit.

Je vis avec horreur, Scalpuraï se relever et passer son bras vert luisant à travers son corps. Il leva son bras et Shaofouine hurla de douleur. Son sang coulait lentement le long du bras argenté de notre adversaire. Mon sang ne fit qu'un tour. Je ne réfléchissais plus. Je poussais le plus fort possible sur mes jambes pour me propulser vers Scalpuraï et le frapper avec Mitra-Poing. Je mis toutes mes forces dans cette attaque, tellement que lorsqu'il reçut le coup l'Ecorcheur argenté fut repoussé à travers le mur d'enceinte. Shaofouine retomba au sol, près de moi.

- Pourquoi tu as fait ça ?
- Je l'avais senti dans le chi alors j'ai pris ta place. Je savais que je n'aurai pas le temps de finir mon attaque signature c'est pour ça que je l'ai emmagasinée dans ce joyau. Dit-elle en me mettant dans le poing la pierre que j'avais vu briller.
- C'est quoi ?
- Utilise-la. Puise en elle l'énergie et tue-le.

Je sentais que Shaofouine continuait de nourrir la pierre en énergie malgré sa blessure. Je me posai alors mon deuxième poing par dessus la pierre et je la ressentis. Toute l'énergie de Shaofouine était contenue dans cette pierre. Elle y avait placé son âme, ses souvenirs.

Scalpuraï venait de ressortir du mur d'enceinte et s'avançait lentement vers nous, le bras droit toujours luisant de vert. Les dernières forces de Shaofouine quittèrent son corps pour rejoindre le joyau. A ce moment précis, où la dernière once d'énergie eut rejoint le joyau, une colère que je n'avais jamais connue m’envahit. Je criai de rage, un cri si puissant que l'onde fissura les murs autour. Je laissai glisser le corps de Shaofouine sur le sol avant de me relever.

Je me retournai vers Scalpuraï. A sa vue, une aura apparut autour de moi mais cette fois-ci pars que sur ma peau, elle s'étendait au delà de mon corps et faisait vibrer l'air. Les poils de ma fourrure s'étaient redressés tant la pression qui sortait de mon corps était forte. De loin, j'y l'impression que Scalpuraï souriait. Il regarda son bras droit encore recouvert du sang de Shaofouine et éclata de rire. Ma colère monta encore d'un cran et le joyau dans mon poing faillit se briser tant je me retenais de lui sauter dessus dans l'instant.

- Alors comme ça, il fallait la tuer pour que tu montres ta réelle puissance. Je dois reconnaître que c'est impressionnant. Je n'ai jamais ressenti cette énergie, pas même chez les G-Man. Tu dois être vraiment spécial pour la posséder.
- Je te l'ai déjà dit. Je suis le prétendant au titre de dieu Combat.
- Si tu le dis. Je n'ai jamais affronté de dieux, ça me tente bien.

Scalpuraï s'élança vers moi son bras droit pointé dans sa direction. Je l'évitai d'un simple mouvement du corps avant de le frapper dans les flans. Il alla s'écraser sous le balcon de Sa Majesté. Je sentis une montée de puissance dans le corps de Scalpuraï. Il venait certainement d'augmenter son emprise sur sa lumière verte.

Alors je fis de même avec l'énergie contenue dans le joyau. Je laissai l'énergie entrer dans mon corps, parcourir chaque cellule, chaque tissu et l'imprégner. Je ressentais les derniers instants de vie de Shaofouine et ma colère fit encore un bond. Je laissai exploser ma rage dans un nouveau cri qui ressemblait plus à un rugissement. Cette fois-ci le mur d'enceinte se fissura totalement et les gradins commencèrent à s'écrouler aussi. Le balcon au dessus de Scalpuraï montra également des signes de fatigue. Je levai un poing et lançai une attaque Exploforce. Scalpuraï sauta alors et la découpa en deux. Les deux moitiés s'écrasèrent de chaque côté du balcon sans lui causer de dommages.

- Le combat ne concerne pas Sa Majeste l'Empereur. Tu ne voudrais pas mourir comme ta copine.
- Alors amène-toi.
- Avec plaisir.

Un combat au corps à corps commença. Aucun de nous ne bloquait les attaques de son assaillant. Nous ne faisions que frapper le plus fort possible. Et à ce jeu là, Ether ou pas, j'avais l'avantage. Mes poings étaient plus entraînés, plus rugueux que les siens à force de frapper contre des arbres, des rochers, des montagnes. Un coup répondait à un autre coup. Chacun des miens laissait sa marque sur le corps métallique de l’Écorcheur mais cela ne le dérangeait pas bien au contraire. Il semblait se délecter de cette sensation. Alors je choisis moi aussi de montrer mon attaque ultime. J'accélérai la fréquence de mes coups jusqu'à ce que les poings de Scalpuraï ne puissent plus m'atteindre. Il se rendit vite compte qu'il ne maîtrisait plus la situation. Il fit alors un pas de côté évitant ainsi un de mes coups et me coupant dans ma lancée. Il se replaça et attaqua lui aussi avec sa plus puissante attaque : Guillotine. Malheureusement pour lui, il n'aura pas le temps de la lancer qu'il lui manquera deux bras pour le faire.

Je me rapprochais de lui le plus possible et enchaînai les coups comme pour une attaque Close Combat à la seule différence que j'utilisai sans distinction aucune toutes mes attaques Casse- brique, Poing de feu, Poinglace, Éclate-roc. Avec ma puissance actuelle et ma petite taille, il ne pouvait rien faire d'autre qu'encaisser sur son torse tous mes assauts. Je finis par lui briser ses deux lames horizontales et à enfoncer dangereusement son armure au niveau du poitrail. Je chargeais alors mon poing de toute l'énergie que je possédais encore. L'aura autour de moi disparut aspirée dans mon poing ainsi que toute l'énergie qui restait dans le joyau. Je ne gardais que le strict minimum pour rester debout et frapper avec mon poing l’Écorcheur. C'est alors que je sentis un fluide chaud couler sur mon torse. C'était le bras gauche de Scalpuraï qui venait de trancher ma peau et ma fourrure si vite que je n'avais rien senti. Mes jambes se dérobèrent et dans un dernier élan je posai mon poing vibrant d'énergie contre l'armure argentée de mon adversaire. Le contact suffit à libérer toute l'énergie qui se déversa en un rayon qui plaqua le pokémon Acier et Ténèbres contre ce qu'il restait des gradins. Je m'écroulai juste après voir vu Scalpuraï détourné le rayon vers le plafond qui s'écroula.


***

Scalpuraï

C'était bien la première fois qu'un pokémon, fusse t-il de type Combat, m'infligeait de pareilles blessures. La dernière fois que j'avais ressenti cette excitation, l'adrénaline montait et parcourir mon corps métallique c'était il y a près de vingt ans contre le G-Man illégal Kashmel Irlesquo. Ce Colossinge m'avait infligé de blessures telles que mon corps en porterait les marques tant que je ne serai pas fait soigner correctement. Je levai la tête vers l'Empereur qui n'avait pas bougé depuis le début du combat. Il se leva et partit sans un mot. Certainement qu'il allait voir les Étoiles Impériales et les deux autres membres de la Trigarde pour leur rapporter ce dont il venait d'être témoin et de capturer tout pokémon qui posséderait la même essence que ces deux là.

N'ayant aucun ordre direct de l'Empereur, je choisis de faire enlever ses deux corps et de me les faire porter dans mon bureau. S'il y avait bien une personne qui pouvait comprendre l'essence que possédait ces pokémons, c'était le Directeur.








louglaciale1


La région de Safaïa, l’une des parties du monde les plus inconnues, regorgeant le plus de danger et de merveilles du monde, et pourtant, peu de monde au Conglomérat était au courant de son existence et à raison: le Conglomérat se fichait bien de savoir ce qu’il pouvait y avoir à l’autre bout du monde, ils avaient déjà tant à faire avec le Continent perdu et cette guerre contre l’essaim qui venait de débuter.

Pourtant, Akun Meyrholt, le meilleur ami du très jeune roi Elrik et membre de confiance de sa garde royale, était à bord d’un aership en direction du pays aux lacs de saphir. Le jeune homme de seize ans avait été envoyé là bas par le roi Elrik qui avait voulu demander de l’aide auprès des légendaires gardiens de Safaïa.

En effet, si cette nation était pour la plupart du monde totalement méconnue, la renommée de ces humains capables d’user de pouvoirs surnaturels avait réussi à atteindre les frontières du pays du président Fitvirol et du roi Elrik. Si ces gardiens pouvaient leur prêter leurs forces, de préférence de gros utilisateurs de lance-flammes, ça pouvait les aider face aux monstres insectoïdes de l’essaim qui menaçait le Conglomérat.

Voilà pourquoi Akun laissait le paysage défiler dans le hublot de l’avion. L’adolescent aurait aimé faire ce voyage en compagnie de son roi et ami mais Elrik se devait de rester au Conglomérat, pour rassurer le peuple. Le garde royal se surprit quand même à espérer que ce voyage soit un minimum captivant et il se sentait privilégié, fier d’être le premier natif du seul pays moderne du continent perdu à fouler une contrée lointaine et peu connue.

L’avion atterrit bien vite et le jeune homme aux cheveux verts découvrit la capitale: la mégalopole de Shukugakai. Cette immense ville devait faire trois fois la taille de Volucité et montrait tellement de couleurs et de slogans différents que pendant quelques secondes, Akun ne sut où poser son regard.

Tant de possibilités s’offraient devant lui: des karaokés, des restaurants tous différents, des arènes de combat Pokémons, des stades de sports divers, des magasins de vêtements, des supermarchés, des librairies, des salles de jeux vidéos, des musées, des parcs…

Le garde royal perdit de vue sa mission quand il vit une estrade géante montrant un dresseur portant un uniforme montrant un symbole représentant deux épées et un marteau encadrés par deux ailes blanches et son partenaire Pokémon, un qu’Akun n’avait jamais vu. Ce Pokémon ressemblait à un homme de la tête jusqu’aux hanches, recouvert d’une fourrure claire et une autre plus brune, possédant deux pattes terminées par des sabots fourchus, une queue très courte. Il portait un diadème avec deux cornes. Il ressemblait à un grand guerrier et ses pattes laissaient entrevoir une grande mobilité.

Akun fut émerveillé par cette vision inconnue et ne put s’empêcher de vouloir défier ce dresseur. Il s’avança du mieux qu’il put, bousculant plusieurs personnes au passage et s’exclama le plus fort possible.

- Je te défie en combat Pokémon!

Les yeux du dresseur croisèrent ceux d’Akun et ce dernier frissonna sans trop savoir pourquoi. Ces pupilles azurées semblaient aussi profondes qu’ un puit sous-marin d’où pouvait sortir une terrible tempête à tout instant.

La voix du jeune homme aux cheveux d’argent résonna dans l’esprit du garde royal comme une brise menaçant de se changer en tornade pour le balayer.

- Je ne suis pas ici pour vous combattre, garde royal du roi Elrik du Conglomérat. Mais pour vous amener auprès de notre directeur. Mais si vous désirez vraiment vous mesurer à moi, j’accepte votre défi. Soyez toutefois prêt à perdre.

Le jeune homme aux cheveux verts ne put retenir ses tremblements. Ce n’était pas de la peur ou de la fatigue, mais une réaction instinctive. Il se retrouvait en face de quelqu’un qui était bien plus qu’un humain. Mais le meilleur ami du jeune roi Elrik n’était pas du genre à se laisser faire ou se débiner comme un lâche.
Il redressa la tête et tint le regard du jeune gardien, qui sourit d’un air amical, laissant l’espèce de malaise se dissiper.

- On dit bien des choses sur le Conglomérat, mais en tout cas, vous en avez dans le ventre. J’espère que votre Pokémon sera à la hauteur de votre courage.

La foule commença à s’écarter, devinant ce qui allait se passer. Akun, dégaina sa Pokéball et libéra son Libégon en souriant. Le Pokémon étrange sauta de l’estrade et fit face à son adversaire en levant les poings. Son partenaire humain déclara d’un ton respectueux mais impatient:

- Mon nom est George. Je suis honoré de faire votre connaissance lord Meyrholt. Voici Satyripunch, mon partenaire mais appelle-le Dhani. Montrez tout ce que vous avez parce que vous en aurez besoin pour me vaincre.

Laissant l’excitation et l’adrénaline du combat l’envahir comme une décharge électrique, le garde royal lança sa première attaque, une Dracogriffe qui fut contrée par une attaque Coup croix. Les deux Pokémons furent repoussés sur quelques mètres mais sans s’être pris de dommages.
Le Libégon d’Akun enchaîna avec un lance-flamme redoutable et encore une fois, son adversaire pu le contrer grâce à une esquive bien placée et le Pokémon dragon du encaisser une Eco-sphère. Mais vu le peu de dégats que ce dernier avait reçu, ce Satyripunch, à l’instar de ses camarades de type combat, n’était pas un Pokémon possédant une grande puissance spéciale.
Son cerveau fonctionnait à vitesse grand V pour analyser son adversaire et le vaincre. Oui, Akun ne regrettait pas sa visite.

Après avoir fait connaissance avec ce George, le garde royal découvrit ce que la capitale avait à proposer. Il hésita grandement à capturer un Pokémon typique de la région mais s’abstint, pensant qu’un climat de guerre ne convenait pas pour entraîner un jeune Pokémon correctement.

Ils se rendirent dès le lendemain de leurs duel à l’académie des gardiens afin de rencontrer le directeur. Jamais une académie n’avait parue aussi ancienne, aussi grande et aussi prestigieuse aux yeux du jeune natif du Conglomérat. Le centre de ce pays était un modèle de richesse et de luxe, mais là, ils en étaient à un tout autre niveau. Son guide lui révéla que tout avait été construit grâce à l’aide des Pokémons en l’espace de quelques années seulement et le prestige n’avait pas le but de montrer le luxe aux yeux du monde. Après tout, à part les étudiants et autres gardiens, l’académie ne recevait que rarement des visiteurs. De plus, chaque pierres précieuses encadrant des portes, des couloirs possédaient une fonction religieuse, chaque pierre ou métal symbolisait un dieu Pokémon offrant leurs puissance aux humains pour créer magiquement des G-mans de Pokémons légendaires. George lui-même avait reçu une partie des pouvoirs de Lugia, lui octroyant le contrôle du vent et des tempêtes maritimes.
La visite se termina quand son compagnon le laissa devant la porte du directeur, non sans l’avoir prévenu que Sir Angel détestait l’impolitesse. Akun, ayant découvert le prestige, la richesse de cet ordre méconnu mais ô combien important, fut soudainement intimidé. Qu’allait-il rencontrer? George ne lui avait presque rien dit à son sujet. Comment cet entretien se déroulerait-il? Après tout, leur aide militaire aiderait beaucoup le roi Elrik.

La porte s’ouvrit sur un nid décoré avec richesse, plusieurs artefacts divers placés sous verre et mettait en valeur divers tableaux montrant de grands guerriers et leurs compagnons Pokémons. Au milieu de tout ça, un Absol sous sa forme méga évoluée regardait le jeune Akun de son oeil vermillon.

- Bienvenue à l’académie des gardiens de Safaïa, Akun Meyrholt, envoyé du Conglomérat, premier pays du continent perdu, déclara ce dernier d’une voix profonde et agée.

- Quoi? S’exclama Akun, surpris. Vous parlez?

L’Absol laissa un sourire apparaître sur son visage.

- Si un jour vous en ressentez l’envie, vous pourrez apprendre les faits d’armes de notre ordre. Peut être même que votre pays s’intéressera enfin à ce qui passe ailleurs que sur ses terres. Sachez simplement que ma forme actuelle et mes capacités m’ont été octroyées par le sacrifice de mon compagnon il y a bien longtemps auprès du grand Arceus. Et, sachez que beaucoup de Pokémons ici parlent comme vous et moi.

L’ambassadeur du Conglomérat fut impressionné et fit de gros efforts pour ne pas le paraître.

- Je suis ici au nom du roi Elrik 1e, roi du Conglomérat. Mon pays est actuellement en guerre contre des Pokémons Insectes s’appelant l’essaim. Il compte nous détruire tous et nous avons entendu certains de vos exploits contre divers adversaires très dangereux. Mon roi m’a demandé de venir vous proposer une alliance. Si vous accepteriez de nous prêter quelques uns de vos guerriers pour nous aider à exterminer des maudits insectes.

Le Pokémon écouta sans rien dire le discours d’Akun avant de répondre soigneusement.

- Je peux comprendre votre intérêt à notre égard.Nous avons remporté plusieurs guerres notre réputation n’est plus à refaire. Mais nous ne vous aiderons pas. Pour commencer, les pokémons sont égaux aux humains, voire plus sage d’ailleurs. Tant que nous pouvons l’éviter, nous n’affrontons pas les Pokémons. Et nous devons nous-même affronter de nouveaux ennemis qui menacent notre ordre. Et je suppose que si nous demandons de votre part votre technologie, ou quelques uns de vos hommes pour donner une aide complémentaire, votre gouvernement refusera en moins de quelques minutes. J’en suis navré. Mais vous serez le bienvenu ici. Que ce soit pour parcourir nos terrains d’entraînements ou encore les longs couloirs gorgés de livres de nos bibliothèques. J’ai un don pour juger les gens et je sais que vous méritez votre place ici.

- Euh… que voulez-vous dire?

Sir Angel sourit de façon énigmatique.

- Bon retour chez vous Akun Meyhrolt. J’espère que votre visite à Safaïa vous fut agréable.


Akun ne passa que quelques jours dans la région de Safaïa mais il en garda un vif souvenir. Un combat mémorable, une démonstration de pouvoirs immenses et un accès à un passé lointain et passionnant. Mais, au fur et à mesure que l’aership s’éloignait de ce pays, le jeune homme aux cheveux verts dirigea à nouveau ses pensées vers sa propre contrée, en proie à la guerre et à l’horreur. Il avait besoin de s’entraîner, de devenir plus fort, et de rejoindre son roi afin de s’assurer de sa survie prochaine.









Cyrlight


De la glace. De la glace. Encore de la glace. De la glace partout, à perte de vue. Crios aurait difficilement pu se sentir mieux à sa place, pourtant il n'était encore jamais venu jusqu'ici, dans ce territoire que les humains avaient baptisé le Glacier Infini. C'était une zone hostile pour eux, car le froid rendait toute vie ici presque impossible.

Les mains sur les hanches, Crios s'immobilisa et contempla les environs. De temps en temps, il éprouvait le besoin de s'isoler, de fuir la guerre qui faisait rage depuis plus de mille ans entre les légendaires et de se recentrer sur lui-même. Pendant ces périodes, il renonçait même à la tâche à laquelle il s'était pourtant astreint : veiller sur les mortels.

La beauté du paysage qui s'offrait à ses yeux, cette étendue blanche et glacée, le rendait mélancolique. Ce glacier lui évoquait l'inlandsis, au nord de Sinnoh, sur lequel Regice avait donné vie à sa sœur Eurybie, et où Crios l'avait regardée faiblir de jour en jour, impuissant, jusqu'à ce que la mort l'emporte.

Des siècles avaient beau s'être écoulés, sa perte lui inspirait toujours la même souffrance. Sans s'en rendre compte, il se mit à fredonner le chant mélodieux qu'Apollon avait composé à sa demande, en hommage à sa chère et regrettée Eurybie.

Crios s'approcha de la falaise qu'il longeait et admira la rivière tumultueuse qui s'écoulait en contrebas. Des blocs de glace, qui s'étaient probablement détachés de la terre ferme, flottaient à la surface, s'agitant au gré de l’eau.

L'un d'eux n'était pas comme les autres, d'une blancheur translucide. Il était imbibé d'un liquide écarlate, qui s'échappait du corps de la jeune fille étendue dessus, une excroissance métallique enfoncée dans le ventre.

— Bon sang !

Crios ne s'attendait pas à croiser des humains dans les environs, et encore moins des humains qui auraient besoin d'être secourus. Que faisait-elle ici, toute seule, dans ce milieu inhospitalier ? Et comment s'était-elle blessée ?

Ces questions devraient attendre, cependant. Crios n'avait pas le temps de se les poser, car il devait agir avant que le torrent n'éloigne trop la malheureuse et l'empêche d'intervenir. Il plongea du haut de la falaise et un froid intense parcourut ses avant-bras, tandis que de la glace jaillissait de ses paumes pour former une sorte de toboggan, le long duquel il se laissa glisser.

Il atteignit le bloc, juste assez grand pour leur permettre de tenir à deux, et se pencha pour examiner le corps de la fille. Ce qui l'avait empalée ressemblait à un membre, un bras pour être plus précis, mais n'évoquait rien du tout à Crios. Ce n'était pas la patte d'un pokémon, lui qui connaissait toutes les espèces existantes, et le métal dans lequel cette chose avait été fabriquée ne lui était pas familier non plus.

Après un rapide examen, Crios décida de la laisser en place. S'il la retirait tout de suite, sur ce morceau de glace instable, l'humaine se viderait probablement de son sang avant qu'il ait pu tenter quoi que ce soit pour la sauver.

Heureusement, ce glacier était un véritable labyrinthe de tunnels et de grottes. Alors que le bloc continuait à suivre le torrent de la rivière, Crios aperçut une cavité béante qui leur servirait de refuge. Aussi précautionneusement que possible, il souleva la fille qui, pour lui, ne pesait presque rien, et fit apparaître un pont de glace qui s'évapora une fois qu'il l'eut traversé.

La caverne était particulièrement sombre, et Crios n'avait pas de quoi faire du feu. Il ignorait comment il allait sauver cette humaine avec si peu de moyens à sa disposition. Il n'était pas Circé, mais il connaissait un peu les plantes et les baies, néanmoins un tel savoir ne lui servirait à rien dans cette contrée où rien ne poussait.

À travers le lien qui les unissait, il contacta Regice, qui se trouvait à des dizaines, peut-être même à des centaines de kilomètres de lui, savourant pleinement le contact avec son élément. Si Crios serait heureux d'avoir son légendaire à ses côtés, celui-ci ne lui serait toutefois d'aucune aide. D'ordinaire, il évitait de déranger ses amis pour si peu, eux qui avaient déjà tant à faire en s'interposant constamment entre Arceus et les Renégats, mais s'il voulait que cette fille vive, il n'avait pas le choix.

Il frappa deux coups secs dans ses paumes, le code convenu autrefois avec Athéna pour permettre à ses partisans de faire appel aux Zarbi et de lui transmettre par leur biais les messages importants. Les créatures se matérialisèrent aussitôt autour de lui en flottant doucement, presque avec paresse.

- Dites à votre maîtresse que j’ai besoin d’aide. Cette jeune personne que vous voyez mourra si elle n'est pas soignée.

Sitôt les instructions reçues, les Zarbi s'évanouirent aussi vite qu'ils étaient apparus, laissant Crios seul dans la pénombre de la caverne. Il ne resta pas les bras ballants bien longtemps, car il avait à faire. Qui savait combien de temps mettrait Athéna ou n'importe quel autre légendaire pour le rejoindre ici ? Sûrement plus que cette fille n'en avait devant elle.

Le seul moyen qu'il avait pour qu'elle résiste jusque-là, c'était de la placer en stase dans de la glace, comme il l'avait fait avec Eurybie pour que les années n'étiolent pas la splendeur de son corps. Cela lui permettrait de gagner un bref répit en attendant l'arrivée des secours.

Environ trois heures après qu'il eut enfermé l'humaine dans une coque de glace, fabriquée à partir de ses pouvoirs, Regice le rejoignit. Il n'avait pas emprunté la rivière, comme Crios, car il aurait coulé tout au fond, mais le réseau de galeries qui parcourait le glacier. À la surprise du dieu, son pokémon n'était pas seul.

Une femme marchait dans son sillage. Grande et mince, avec une silhouette galbée, elle était vêtue d'une simple robe blanche et de petits souliers assortis, qui contrastaient avec la noirceur de sa chevelure, nouée sur l'arrière de son crâne. Elle avait des prunelles grises encadrées par de longs cils, un teint de porcelaine et une bouche fine, légèrement pincée.

— Athéna, la salua Crios avec déférence. Je ne m'attendais pas à ce que vous soyez si rapide, mais je suis heureux de vous voir.
— Tu le seras beaucoup moins lorsque tu apprendras la raison de ma présence ici. En réalité, j'étais déjà en chemin quand les Zarbi m'ont fait parvenir ton message. Il y a quelque chose en ce lieu qui trouble leur vision, une force maléfique qui présente un danger. Je suis venue sur place pour tenter de comprendre de quoi il en retourne.
— Vous avez entrepris ce voyage seule ? Est-ce bien prudent quand on sait que...

Athéna le fit taire d'un geste. Elle n'aimait pas aborder le sujet de ses pouvoirs lorsqu'elle pouvait l'éviter.

— Je savais qu'une fois ici, je pourrais compter sur toi, déclara-t-elle en coupant court à la conversation. Où est cette mortelle qui a besoin d’être secourue ?
— Juste là, mais c'est surtout du matériel qu'il me faut si je veux la soigner. Si vous étiez déjà en route, vous n'avez sûrement pas de baies, ni de...

Crios s'interrompit en voyant Regice déposer presque à ses pieds un sac qui semblait peser très lourd. Il était de fabrication humaine et quelqu'un l'avait rempli à ras bord de différents médicaments, plantes et compresses, tout ce qui lui serait nécessaire pour sauver cette fille.

— Où vous êtes-vous procuré tout cela ?
— À une trentaine de kilomètres au nord, il y a une base humaine, révéla Athéna. Avait, plutôt. J'ignore ce qui s'est passé, mais elle a été complètement détruite. Sans doute n'est-ce pas sans lien avec la menace contre laquelle les Zarbi m'ont mise en garde.
— Nous tâcherons de nous occuper de cette affaire dès que nous en aurons terminé avec l'humaine. Vous voulez bien m'assister ? Sa blessure est très grave, et malgré mes connaissances médicales, j'ignore si je pourrais empêcher cette pauvrette de succomber.

Athéna acquiesça et s'agenouilla près du cocon qui maintenait la jeune fille en stase. Crios fit disparaître le bloc de glace. Le sang, gelé, ne se remit pas immédiatement à couler, mais ce n'était qu'une question de secondes avant que cela se produise.

— Qu'est-ce que cette chose ? s'enquit Athéna en désignant la patte qui saillait hors du buste.
— L'un des membres de la créature qui l'a blessée. L'alliage qui le constitue m'est̀ totalement inconnu. Pensez-vous que Vulcain pourrait l'identifier ?
— Possible. Cette situation me déplaît, Crios. Au plus haut point. Plus vite nous en saurons davantage et mieux ce sera.
— Vous avez raison. Maintenant, je voudrais que vous placiez vos mains de part et d'autre de la plaie. Voilà, comme cela, c'est parfait. Je vais tirer d'un coup sec pour enlever le corps étranger, et dès qu'il sera sorti, vous devrez comprimer de toutes vos forces pour contenir l'hémorragie. Vous êtes prête ?
— Allez-y.

Crios n'eut aucun mal à arracher la patte, grâce à la force surhumaine dont disposaient tous les humains légendaires. Les doigts d'Athéna prirent une couleur rougeâtre, tandis qu'elle empêchait le sang de quitter ce corps presque déjà exsangue.

— Regice, apporte-moi le baume qui est dans le sac. La petite boîte mauve, de forme ovale.

Le Golem saisit l'objet du mieux qu'il put entre ses doigts peu manœuvrables et le tendit à Crios, qui s'empressa de l'ouvrir. Apparemment, les humains de la base évoquée par Athéna étaient souvent confrontés aux interventions d'urgence. Cet onguent, il l’avait déjà utilisé dans les hôpitaux. Il permettait aux tissus organiques de se refermer, mais son usage était très controversé. Non seulement il arrivait que les blessures se rouvrent d'elles-mêmes, sans raison, et que le patient finisse par mourir tôt ou tard d'une hémorragie, mais de surcroît, la pommade causait parfois des effets secondaires capables d’entraîner eux aussi la mort.

Ce serait cependant le sort de cette fille si Crios n'employait pas cette méthode. Il n'avait ni le temps ni les moyens de pratiquer une opération chirurgicale, et il ne pouvait pas non plus la perfuser pour compenser tout le fluide vital qu'elle continuait à perdre. Avec un peu de chance, cela tiendrait assez longtemps pour qu'ils puissent la rapatrier dans une zone civilisée, où Crios pourrait lui administrer des soins plus efficaces.

— Croisons les doigts pour que cela fonctionne, marmonna-t-il une fois qu'il eut terminé. Il va falloir qu'elle reprenne des forces avant d'envisager de la déplacer, mais dès que ce sera le cas, je la conduirai à la ville la plus proche.
— Permets-tu que Regice m’assiste dans mon enquête pendant que tu demeures ici ? demanda Athéna.
— Bien sûr, mais ne feriez-vous pas mieux d'appeler du renfort ? Avec Ho-Oh, Prométhée pourrait nous rejoindre en l'espace d’une heure, sans parler d'Horus et de Rayquaza. En plus de cela, les dons de votre filleul permettraient de guérir cette humaine avec plus d’efficacité que...
— Je suis désolée, Crios, mais je ne peux pas le faire venir. En mon absence, c'est lui qui dirige mon Ordre et qui se charge d'interférer dans la guerre entre Arcésiens et Renégats. Depuis que ces humains qui se font appeler Team Galaxie ont décidé de rassembler les Cré's pour rouvrir les portails vers les dimensions, les deux camps sont sur le qui-vive. Je ne peux pas tenir mes alliés éloignés du conflit, encore moins le plus puissant. Quant à Prométhée... J'envisagerai de faire appel à lui si je n'ai pas d'autre choix. En attendant, je suis encore en mesure d'affronter le danger, surtout avec ton Golem à mes côtés.
— Bien... Mais je vous en conjure, ma dame. Soyez prudente.
— M'as-tu déjà vue prendre des risques inutiles, Crios ?

L'intéressé secoua la tête. Athéna était la voix de la raison et de la sagesse, tout le contraire des divinités de la trempe d'Aphrodite ou de Scathach, dont la témérité était le maître mot. Ce qui inquiétait Crios, en revanche, était les problèmes de perception des Zarbi. Si elle ne pouvait pas se reposer sur leurs visions, elle serait vulnérable.

Après son départ, escortée par Regice, le dieu resta seul en compagnie de la jeune mortelle, sur qui l'onguent commençait à faire effet. Le trou béant dans sa poitrine se refermait progressivement et l'hémorragie s'était interrompue. Dès qu'elle reprendrait conscience, Crios l'alimenterait avec des baies, afin qu'elle regagne de l'énergie. Avec un peu de chance, elle pourrait également leur en apprendre plus sur cette mystérieuse menace qu'Athéna était venue traquer.

Des heures s'écoulèrent, ou peut-être était-ce des jours. Les légendaires, éternels, n'avaient pas la même notion du temps que les humains, et puisqu'il ne pouvait percevoir la course du soleil depuis sa grotte de glace, Crios ignorait depuis combien de temps ses amis étaient partis. Tout ce qu'il savait, c'était qu'ils n'avaient encore rencontré aucun danger, sans quoi le dieu l'aurait perçu à travers sa connexion avec Regice.

Malgré le grondement féroce du torrent, la finesse de son ouïe lui permit d'entendre le gémissement que poussa sa protégée. Il se tourna aussitôt vers elle pour la voir remuer faiblement les cils. Crios rapprocha le sac de soin et lui prit la main. Elle serait probablement paniquée à son réveil.

Elle ouvrit les yeux, dévoilant des prunelles d'un bleu magnifique. Cela, couplé avec ses cheveux dorés, accentuait sa ressemblance avec Eurybie. Crios secoua la tête. Il devait vraiment arrêter de voir sa sœur partout.

— Bonjour, fit-il doucement. Comment te sens-tu ?
— Qui êtes-vous ? répliqua-t-elle d'un ton étonnamment sec pour quelqu'un d'aussi faible. Et de quel droit me touchez-vous ? Je suis Nirina Haldar. Je suis de sang royal !

Quel tempérament ! C'était le moins que le légendaire puisse dire. Elle venait de réchapper à la mort et elle était déjà prête à mordre. Aphrodite aurait-elle une fille cachée à demi-humaine ?

— Votre Altesse, vous avez été grièvement blessée. Je vous ai retrouvée flottant sur un bloc de glace et je vous ai soignée du mieux que j'ai pu, mais pour maximiser vos chances de survie, il va falloir que nous regagnions la civilisation pour que vous receviez de meilleurs soins. Tenez, mangez ceci. Rien de tel qu'une baie oran pour se régénérer.

Crios lui tendit le fruit, dont la pulpe avait presque été congelée par la fraîcheur ambiante. La dénommée Nirina paraissait avoir si faim, cependant, qu'elle la mordit au risque de s'y briser les dents. Son sauveur attendit qu'elle ait terminé et enchaîné avec une baie sitrus pour l'interroger :

— Pourriez-vous me dire ce qu'est ceci, Altesse ?

Nirina frémit lorsqu'il désigna la patte métallique encore souillée de son sang, et Crios crut voir de la peur passer dans son regard jusqu'alors plein de défi et d'arrogance. Ce qu'elle avait vécu semblait l'avoir traumatisée.

— C'était un monstre... Un monstre horrible, gigantesque et quasiment indestructible. Je n'avais jamais rien vu de tel auparavant. Il a essayé de nous tuer et... C'est un miracle si j'ai survécu.
— C'était à la base, n'est-ce pas ? Celle située à quelques kilomètres d'ici ?
— En fait, c'était en dessous. Il y avait des dizaines de créatures de ce genre, enfouies dans des cavernes souterraines, à ceci près qu'elles semblaient désactivées. Que sont devenus les autres ? Ceux qui ont Triséïdon ? Et qu'en est-il de la chose ? L'avez-vous détruite ?

Crios n'était pas sûr de comprendre tout ce qu'elle disait. Il n'avait jamais entendu parler de ce Triséïdon, et Athéna n'avait pas fait mention d'une autre présence humaine dans les environs. À mesure qu'elle s'exprimait, Nirina semblait de plus en plus affolée, oubliant son insolence des premiers instants.

— Ne vous inquiétez pas, Altesse. Vous êtes en sécurité avec moi.
— Si vous aviez vu cette chose, vous ne diriez pas ça. Même les pokémon ne font pas le poids face à elle.

Crios ouvrit la bouche, mais la referma aussitôt. Il n'avait aucune intention de lui révéler qui il était, même si se savoir en présence d'un légendaire aurait peut-être pu rassurer la jeune fille.

— Ce monstre... demanda-t-il après un bref silence. Pourriez-vous me le décrire ?

Nirina acquiesça, puis évoqua la créature avec autant de détails que possible. Elle commença par sa face d'oiseau, puis s'attarda longuement sur son corps d'insecte, entièrement constitué de métal, ce qui formait autour de lui une carapace presque indestructible. Elle mentionna aussi ses ailes, qui lui permettaient de voler, ses pattes puissantes et les scies circulaires qu'il utilisait comme arme...

Cette description laissait Crios perplexe, car il ne parvenait toujours pas à se faire une idée précise de la chose qui avait attaqué Nirina. Il espérait qu'Athéna aurait des informations à son retour, et surtout qu'elle ne tarderait pas, car il s'inquiétait pour elle. Même avec Regice à ses côtés, il était préférable qu'elle n'ait pas à se retrouver au cœur d'un combat.

Crios écouta attentivement le récit que lui fit l'humaine. Elle lui expliqua les raisons de sa présence ici, évoqua l'arme, Triséïdon, que son groupe et elle étaient venus chercher dans ce désert de glace et, une fois qu'elle eut terminé, l'interrogea à son tour :

— Et vous, qui êtes-vous ? Que faites-vous ici ?
— Je me nomme Christophe, répondit le dieu en usant du pseudonyme dont il employait parmi les mortels. Je suis en compagnie d'une amie qui effectue des recherches dans les environs. Elle a établi son camp de base à quelques kilomètres d'ici, mais comme vous perdiez beaucoup de sang, j'ai jugé trop dangereux de vous déplacer jusque là-bas, alors c'est elle qui m'a apporté du matériel pour vous soigner.
— Vous n'auriez pas un pokémon feu, par hasard ? Je meurs de froid.
— J'ai bien peur de ne posséder qu'un Lokhlass.

Instinctivement, la main de Crios frôla la pokéball de glace qu'il transportait toujours avec lui. Ce pokémon était bien plus puissant que ses semblables, car au fil des siècles passés aux côtés d'un légendaire, il avait acquis un peu de son pouvoir, et partageait son immortalité.

Dans les affaires rapportées par Athéna, Crios dénicha une couverture dans laquelle Nirina s'emmitoufla. Elle ne cessait de le dévisager, mais elle avait arrêté de parler. La fatigue et le froid avaient probablement consommé le sursaut d'énergie qu'elle avait eu en revenant à elle.

Elle ne tarda d’ailleurs pas à s’endormir. Le silence qui régnait dans la grotte n'était troublé que par le grondement du torrent voisin, par lequel Crios se laissait bercer. Bien qu'il ne puisse pas s'assoupir, ce son le détendait. Il l'aidait à ne pas s'inquiéter plus que de raison pour Athéna et Regice.

Crios était assis auprès de Nirina, la tête penchée vers l'arrière et calée contre la paroi de glace, quand il entendit un bruit étrange, comme un cliquetis. Ses amis ne pouvaient en être à l'origine, car son pokémon l'aurait averti de leur retour, or il percevait toujours le Golem à nette distance de son emplacement.

Tout en tâchant de ne pas céder à l'anxiété, Crios se leva. Il n'y avait peut-être aucune raison de paniquer, mais il préférait être sur ses gardes plutôt que vulnérable. Il avait un très mauvais pressentiment, qui n’avait de cesse s’accroître depuis qu'Athéna lui avait fait part de la menace qu'elle croyait distinguer dans les environs.

Alors que le dieu s'approchait de l'ouverture béante qui donnait sur les flots tumultueux de la rivière, la créature surgit. Elle était grande, plus que lui, et son corps métallique était de couleur havane. Cela lui conférait un air rouillé, mais il ne s’agissait que d’une apparence, car tout en elle ne semblait être que force et robustesse. Ses bras étaient longs, acérés. Ils paraissaient pouvoir déchiqueter un homme d'un seul geste.

Sa morphologie s'apparentait à celle d'un insecte, à l'exception de la face, qui tenait plus du volatile, à cause d'une excroissance pareille à un bec d'oiseau. Le pire, cependant, n'était pas son allure repoussante, mais l'aura malfaisante qui émanait de cette monstruosité.

— Je sens que vous n'êtes pas l'un de ces misérables humains, déclara-t-elle d'une voix à la fois profonde et robotisée.
— Les humains ne sont pas misérables, répliqua Crios, mais en effet, je ne suis pas l'un des leurs. Je suis un légendaire. Et vous ? Qu'êtes-vous ?
— Je suis un Akyr, l'un des serviteurs du seigneur Menmark, le Grand Forgeron.

Le dieu fronça les sourcils. Il n'était pas particulièrement proche de Vulcain, bien que leurs rapports aient toujours été courtois, mais en cet instant, il aurait donné n'importe quoi pour l'avoir à ses côtés. Peut-être aurait-il su démêler cette situation à laquelle Crios ne comprenait goutte.

— Livrez-moi la fille et je vous épargnerai, ordonna l'Akyr.
— La fille ? Qu'avez-vous l'intention de lui faire ?
— Mon seigneur et maître la convoite. Il a perçu sa détermination, dont il pense pouvoir se servir pour créer une arme redoutable, peut-être même l'Akyr ultime. Ce sera une renaissance pour elle, une évolution qui lui permettra de s'affranchir de sa pitoyable condition.
— Vous ne la toucherez pas ! riposta Crios.
— Si telle est votre réponse, alors vous ne me laissez pas le choix.

Le monstre passa à l'action. Il fondit sur sa cible, qui réagit au quart de tour. Un épais mur de glace se dressa entre Crios et l'Akyr. Celui-ci entreprit aussitôt de le découper à l'aide des lames qui lui faisaient office de pattes, pendant que le légendaire se précipitait vers Nirina.

— Altesse ! Altesse, debout, vous ne devez pas rester là !
— Que se... commença-t-elle, encore somnolente, en entrouvrant les paupières. Ah !

Son hurlement se répercuta en écho sur les murs de la caverne lorsqu'elle entendit le bruit de la scie et distingua la silhouette de l'Akyr derrière la paroi translucide. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, elle avait bondi sur ses pieds, oubliant le froid, sa faiblesse et ses blessures.

— Courez, ordonna Crios. Je vais essayer de le retenir aussi longtemps que possible.

Nirina ne se le fit pas répéter. Elle s'élança aussi vite que le lui permettaient ses jambes dans le boyau qui conduisait dans les entrailles du glacier. Crios pivota sur lui-même, prêt à recevoir l'Akyr comme il le méritait sitôt qu'il aurait franchi sa barrière, ce qui n'était plus qu'une question de secondes.

Le mur de glace vola en éclats et l’une des redoutables scies circulaires de la créature fondit sur Crios, qui la dévia de justesse à l’aide de ses pouvoirs. Il fit ensuite apparaître un glaçon pointu dans sa paume, pareil à un javelot, et le jeta sur le monstre. L’arme de fortune se brisa sur sa cuirasse dans lui causer la moindre égratignure.

« Regice ! » appela-t-il intérieurement. « Regice, reviens tout de suite ! Nous sommes attaqués. Athéna doit impérativement se mettre à l’abri. » Cette précision était nécessaire, car même si la déesse était prudente, elle était également assoiffée de connaissances et risquait de vouloir voir ce monstre métallique de plus près.

À travers leur lien, Crios eut la confirmation que Regice avait reçu son message et se recentra sur le combat. Ses attaques polaires semblaient toutefois inefficaces sur son adversaire. La glace réussissait tout au plus à l’entraver, mais jamais bien longtemps, étant donné qu’il pouvait la trancher.

Le dieu jaugea la distance qui séparait l’Akyr du bout du tunnel. Comme elle était moindre, cela lui donna une idée. Puisqu’il ne pouvait que le ralentir, il s’en contenterait, dans l’espoir que cela lui permette de tenir jusqu’à l’arrivée de son pokémon.

Il rassembla son énergie pour projeter une vague glacée sur la créature, qui recula légèrement. Elle n’était plus qu’à un mètre de la rivière tumultueuse quand les parois du boyau se mirent à trembler. L’Akyr était peut-être fort, mais Crios était dans son élément, ce qui lui offrait un avantage non négligeable.

La voûte s’affaissa brutalement sur le monstre, avant que le sol se brise sous ses horribles pattes, le précipitant dans les flots. Crios réagit promptement et l’emprisonna dans un solide bloc de glace. Cette fois, l’Akyr mettrait bien plusieurs minutes à se libérer, et quand il y parviendrait, le courant l’aurait considérablement éloigné de la caverne. Qui plus est, rien ne prouvait que ces choses savaient nager.

Crios ne perdit pas une seconde pour faire volte-face et se lancer à la poursuite de Nirina. Lui suggérer de fuir avait été une précaution nécessaire, mais si le dieu ne la retrouvait pas très vite dans ce labyrinthe, elle risquait de mourir de froid ou d’épuisement, sans compter que le danger était loin d’être complètement écarté.

— Nirina ! appela-t-il en oubliant d’utiliser son titre. Nirina, où êtes-vous ?

Seul l’écho de sa propre voix lui parvint. Crios cessa de courir lorsqu’il atteignit une bifurcation et s’agenouilla sur le sol, au contact duquel il posa ses paumes. Il n’avait jamais employé ses pouvoirs à pareille fin, mais avec un peu de chance, la glace lui indiquerait le chemin à suivre pour rejoindre la jeune fille.

Il se concentra, tâchant de repérer une trace qu’elle aurait laissée et que sa magie serait susceptible de ressentir, mais un hurlement sonore s’éleva du boyau à sa gauche avant qu’il y soit parvenu. Se redressant en hâte, il reprit sa progression. Au bout d’une centaine de mètres, quelque chose le heurta de plein fouet. Une cascade de cheveux blonds s’agrippa à lui en tressautant.

— Il y en a un autre ! s’exclama Nirina, les yeux révulsés par la terreur. Là-bas !

Elle tendit la main pour indiquer la direction, bien que cela soit inutile, d’une part parce que le tunnel n’avait qu’une issue, de l’autre parce que l’Akyr surgit au même moment. Il était quasiment identique à celui que Crios avait affronté quelques minutes plus tôt, et cette fois, il ne pourrait plus compter sur l’aide inconsciente de la rivière.

« Regice, le temps presse ! » gronda-t-il mentalement. Il sentait que son pokémon se rapprochait, mais du fait de sa masse, il était relativement lent, et Crios redoutait qu’il n’arrive pas à temps.

— Qu’est-ce que vous attendez ? Faites quelque chose ! intima Nirina. Comment est-ce que vous vous êtes débarrassé de l’autre, d’abord ?

Le légendaire soupira. Tant pis, il allait devoir éventer son secret. C’était le seul moyen s’il voulait avoir une chance de sortir d’ici indemne avec la jeune fille. Il la repoussa dans son dos, puis leva les mains vers l’Akyr. Sa cuirasse se recouvrit aussitôt d’une épaisse couche de givre, sans que cela le ralentisse pour autant.

— Comment avez-vous fait ça ? s’étonna Nirina.
— Les explications devront attendre, si vous le voulez bien.

Le regard de Crios passa du monstre, qu’il maintenait à une distance sécuritaire à l’aide de ses attaques, au plafond du boyau. Abattre des quintaux de glace sur l’Akyr ne serait probablement pas sans effet, mais cette fois, ils étaient trop enfoncés dans les profondeurs du glacier pour que le dieu puisse se le permettre sans risquer d’endommager toute la structure. Lui survivrait certainement à un ensevelissement, mais Nirina...

— Attention !

Concentré sur la stratégie à appliquer, il ne remarqua qu’au dernier moment la scie qui fondait sur lui. Le temps qu’il se courbe, Nirina l’avait déjà empoigné par le col pour le forcer à baisser la tête.

— Vous êtes censé me sortir d’ici, alors évitez de vous faire tuer stupidement, aboya la jeune fille.

La lame, qui s’était fixée dans la paroi derrière eux, manqua de les faucher une seconde fois, en sens inverse, tandis qu’elle revenait vers son propriétaire. L’Akyr avança d’un pas menaçant dans leur direction, mais ne put aller plus loin. Crios venait d’emprisonner ses pattes dans des blocs cristallins.

— Venez, vite !

Il saisit le bras de Nirina et l’entraîna à sa suite, en dépit de ses protestations. Comme elle avait du mal à suivre son rythme, autant à cause de sa faiblesse que parce que Crios était bien plus rapide qu’un humain ordinaire, il la portait plus qu’il la guidait. De retour à la bifurcation, il allait s’engager dans le seul tunnel qu’il n’avait pas encore exploré, mais un Akyr en jaillit au même instant, dans un cliquetis sinistre.

— Bon sang, combien est-ce qu’il y en a, en tout ? s’époumona-t-il.
— Comment voulez-vous que je le sache ? Je n’ai pas l’intention de donner une réception pour les compter.

Crios et Nirina prirent à droite dans une glissade, le dieu ne cessant de se retourner pour retarder l’Akyr en multipliant les vagues de givre. Alors qu’ils avaient presque atteint la rivière, leur seule issue, il saisit la pokéball translucide attachée à sa ceinture et la jeta devant lui.

— Quoi qu’il arrive, ne me lâchez pas, conseilla-t-il à Nirina.
— Pourq...

Elle n’acheva pas sa question. Crios sauta dans le vide et elle fut emportée par son élan pour atterrir sur le dos d’un Lokhlass, fraîchement matérialisé dans l’eau. Tandis que le légendaire se redressait, elle porta une main à son ventre. Avec tout cela, sa blessure s’était rouverte et elle recommençait à saigner. Évidemment, le sac contenant les médicaments était resté dans la caverne.

— Compressez, ordonna Crios. Je m’occuperai de vous dès que nous serons hors de danger.
— Et ce sera quand ?

Malgré son état, Nirina ne se départait pas de son cynisme. L’Akyr surgit de la caverne, prêt à bondir sur eux, mais Crios l’attendait. D’un geste, il creusa une crevasse dans le glacier, tandis que Lokhlass propulsait leur ennemi à l’intérieur à l’aide d’un Hydrocanon. Sitôt qu’il s’y fut enfoncé, le dieu referma la cavité.

— Ce n’est pas ça qui va l’arrêter, commenta Nirina. Vous n’avez pas une idée pour le détruire ?
— Je suis désolé, je ne contrôle que la glace. C’est toujours mieux que rien.

Le second Akyr, celui que Crios avait entravé dans le tunnel, apparut à son tour, et subit le même sort que son semblable. Le dieu était sur le point de s’autoriser un soupir de soulagement quand Nirina tira sur ses vêtements. D’un doigt tremblant, elle lui montra la troisième créature, celle qu’il avait plongée dans les flots tumultueux.

Il l’avait sous-estimée. Elle nageait bien, et même mieux que bien, puisqu’elle parvenait à remonter le courant à contresens pour fondre droit sur eux. Ils ne pouvaient pas rester là. Ils devaient regagner la surface, plane et dégagée, qui offrirait à Crios un meilleur champ de bataille.

— Lokhlass, repousse-le avec Surf. Et toi, viens par ici.

Nirina ouvrit la bouche pour s’offusquer qu’il se soit brusquement mis à la tutoyer, mais sa main rougie par le sang qu’elle perdait et le coup d’œil qu’elle jeta en coin à l’Akyr la dissuadèrent d’aller plus loin. À la place, elle laissa le dieu la prendre par le coude, tandis qu’un escalier se matérialisait contre la paroi du glacier.

— Tu pourras grimper ? demanda-t-il.
— Je vais essayer.
— Alors passe devant.

Il la souleva sans difficulté pour l’aider à atteindre la première marche, puis s’y hissa à son tour. Les degrés disparaissaient au fur et à mesure qu’ils s’élevaient, et lorsqu’ils furent suffisamment haut, Crios rappela Lokhlass dans sa pokéball. À présent que plus rien ne retenait l’Akyr, il planta ses pattes dans le glacier et s’en servit pour le gravir.

— N’y pense même pas, maudite créature.

Un bloc se détacha pour provoquer la chute du monstre. Loin d’avoir dit son dernier mot, il se dégagea des fragments de glace et de l’eau pour retenter l’ascension. Nirina, hors d’haleine, se laissa tomber dans une traînée sanguinolente au sommet du l’étendue blanche, mais Crios ne lui accorda aucun répit. Il la porta entre ses bras, pressé de s’éloigner de la falaise.

Il n’avait pas creusé la distance autant qu’il l’aurait souhaité quand l’Akyr les rattrapa. Ses scies émirent un crissement mortel lorsqu’il les lança en direction de Crios, mais le dieu les esquiva grâce à ses réflexes. Il bondit sur le côté, ce qui lui valut un grognement de protestation de la part de Nirina, dont il ne tint pas compte.

— Vous perdez votre temps à protéger cette humaine, affirma l’Akyr. Et si vous vous obstinez, vous perdrez également votre vie, car je viendrai l’arracher aux bras de votre cadavre. Il n’est pas encore trop tard, renoncez à cette folie et inclinez-vous devant la toute-puissance du seigneur Menmark.
— Si j’ai tourné le dos à Arceus, ce n’est certainement pas pour me soumettre à un autre tyran, quel qu’il soit.
— Bientôt, mon maître s’élèvera au-dessus de votre dieu, et vous regretterez alors vos paroles.
— Dans ce cas, c’est à moi qu’il aura affaire.

Crios fut partagé entre le soulagement et l’inquiétude en entendant la voix d’Athéna retentir dans son dos. Il avait bien dit à Regice qu’elle devait se mettre à l’abri, mais visiblement, elle n’avait pu se résoudre à les laisser affronter seuls la menace. Un frisson parcourut l’échine de Crios lorsqu’il songea à ce qui s’était produit la dernière fois qu’elle avait voulu se dresser face à une entité plus puissante qu’Arceus. C’était d’ailleurs depuis ce jour qu’elle vivait dans la peur constante de ses pouvoirs.

— Regice, Vent Glace ! ordonna la déesse au Golem qui se tenait à ses côtés.

Il s’exécuta aussitôt, et une bourrasque polaire repoussa l’Akyr dans le vide. Crios, toujours chargé de Nirina, s’empressa de rejoindre ses amis. Athéna l’aida à étendre la jeune fille sur le sol. Elle perdait ses forces au même rythme que son sang et ne serait bientôt plus en état de contenir l’hémorragie par elle-même.

— Que sont ces créatures ? interrogea Athéna. Tu le sais ? Et qui est ce maître qu’elle a évoqué ?
— Elles sont là pour l’humaine, et elles sont redoutablement puissantes. La glace n’a strictement aucun effet sur elles, elle parvient tout au plus à les ralentir, mais...

Comme pour illustrer les propres de Crios, l’Akyr réapparut brusquement, et pas seul. Ses deux congénères, qu’il avait entravés dans le glacier, avaient réussi à se libérer. À l’aide de ses attaques, Regice dévia les scies mortelles qu’ils lancèrent de concert dans leur direction.

— Je vous en conjure, appelez Prométhée. Je ne suis pas en mesure de les vaincre et vous ne pouvez pas les affronter. Tout ce que nous sommes capables de faire, c’est résister jusqu’à ce qu’il nous rejoigne. Avec Ho-Oh, il devrait en venir facilement à bout.

Crios craignait de voir Athéna hésiter, mais son devoir passant avant son orgueil, elle consentit à frapper dans ses mains pour invoquer ses Zarbi et leur confier le message qu’ils devraient délivrer à Prométhée. Sitôt qu’ils se furent volatilisés, elle ramena son attention sur Nirina.

— Est-ce qu’elle va tenir jusque-là ? Même pour Ho-Oh, c’est un long voyage. Il risque de lui falloir un peu de temps avant de nous rejoindre.
— Je n’ai pas l’intention de mourir sur ce stupide glacier, fulmina la jeune fille malgré son état précaire. Je résisterai tant qu’il le faudra.

Athéna arqua un sourcil, frappée par un caractère aussi déterminé, mais ne releva pas. Crios, à présent rassuré par la perspective de recevoir du secours, se joignit à Regice pour consolider la barrière de glace que le Golem venait d’ériger autour d’eux afin de maintenir les Akyr à distance.

— Et si tu en profitais pour me dire tout ce que tu as appris à propos de ces choses ? suggéra Athéna en repoussant les mains ensanglantées de Nirina pour comprimer elle-même le trou béant de son ventre.

Crios se lança dans une description aussi détaillée que possible des évènements qui s’étaient succédé avant leur retour. Il lui rapporta notamment la conversation qu’il avait eue avec le premier Akyr, en insistant sur le nom de Menmark, ce Grand Forgeron que la créature considérait comme son seigneur.

— Décidément..., marmonna Athéna. Il faut vraiment que je m’entretienne de tout cela avec Vulcain dans les plus brefs délais. Il n’y a que lui qui... Crios ! Là-haut !

Par réflexe, la déesse désigna l’Akyr qui venait de gravir le mur de Regice, lâchant la blessure de Nirina dont le sang se répandit sur le sol. Dès qu’elle prit conscience de sa bévue, et surtout qu’elle fut rappelée à l’ordre par le ton sec de la jeune fille, elle recommença à endiguer l’hémorragie.

D’un jet de glace, Crios repoussa la créature de l’autre côté de la paroi, qui formait désormais un cercle protecteur autour d’eux. Les Akyrs ne se démoralisèrent pas pour autant et entreprirent de la traverser à l’aide de leurs scies acérées. Avec effroi, le légendaire constata qu’ils n’étaient non plus trois, mais cinq. Combien y en avait-il en tout ?

— Crios, ils sont trop nombreux ! indiqua Regice. À ce rythme, je ne tiendrai pas très longtemps.
— Si j’arrive à en éloigner certains, est-ce que tu pourras résister ?
— Qu’est-ce que tu comptes faire ?
— Retourner dans la grotte et essayer de remettre la main sur l’onguent cicatrisant, expliqua Crios, car en dépit des attentions d’Athéna et de l’opiniâtreté de Nirina, il était de plus en plus pessimiste quant à ses chances de survivre jusqu’à l’arrivée de Prométhée.
— Si les cinq te prennent en chasse, tu risques de ne pas en réchapper, souligne la déesse.
— Vous avez entendu mon récit, non ? Ce n’est pas moi, leur cible, mais l’humaine. C’est sur elles qu’ils vont rester focalisés. J’espère simplement qu’il y en aura quand même un ou deux pour m’emboîter le pas, sans quoi...
— Sans quoi c’est nous qui serions submergés, compléta Athéna. Très bien, vas-y vite, mais fais attention à toi.

Crios acquiesça, pendant que Regice consolidait une portion de la barrière qu’un Akyr avait presque réussi à transpercer, puis fit apparaître un escalier de glace qui le mena au-dessus du mur. Là, il repoussa l’un des monstres à l’aide de ses pouvoirs et se dirigea vers la falaise. Un seul le suivit, à son grand dam, un sentiment qui s’intensifia lorsqu’il le vit faire demi-tour au moment de sauter dans le vide.

— Non ! Non ! fulmina Crios tout en se réceptionnant sur un toboggan de glace, qui le mena à ce qu’il restait de l’entrée de la caverne.

Heureusement, le sac contenant le matériel de soin était toujours là. Les Akyrs auraient pu le détruire ou le jeter dans l’eau, mais ils ne semblaient pas y avoir prêté attention. Crios s’empressa de le charger sur son épaule et de regagner le sommet du glacier. Deux scies manquèrent de le faucher en chemin.

Bien qu’il se soit absenté moins de trois minutes, la barrière avait été sérieusement ébranlée par les assauts incessants des Akyrs. Il en emprisonna un dans un bloc cristallin, qui fut aussitôt détruit par ses congénères. Dans un fracas assourdissant, une partie de la paroi s’effondra en cascade sur l’une des créatures, sans la ralentir.

Le premier plan qui traversa l’esprit de Crios fut d’inciter Athéna à fuir avec Nirina, mais c’était du suicide. Puisque deux nouveaux Akyrs s’étaient joints aux trois autres, il y en avait peut-être davantage, tapis dans les différents tunnels du glacier, qui risqueraient de tendre une embuscade à la déesse.

La seconde idée qui lui vint était plus kamikaze encore, pourtant ce fut celle-ci qu’il décida de présenter à Athéna, tout en se frayant un passage au milieu des éclats translucides et des monstres déchaînés.

— Vous devez partir avec Regice, intima-t-il tout en multipliant les jets de glace dans toutes les directions où les Akyrs tentaient d’attaquer. Si vous restez, vous...
— Tu me demandes de t’abandonner ici, face à une horde de créatures inconnues, avec une humaine agonisante ? Il n’en est pas question. C’est ma faute si nous en sommes là. Tu m’as conseillé d’appeler Prométhée quand nous étions dans la grotte, et je ne l’ai pas fait. Ma fierté ne te coûtera pas la vie.
— Quant à moi, j’ai déjà perdu Eurybie, ajouta Regice. Je ne tiens pas à ce que tu subisses le même sort.
— Dans ce cas, j’ai bien peur que notre sort à tous soit entre vos mains.

Crios prononça ces mots à l’intention d’Athéna avec la plus grande solennité. Si elle avait pu blêmir, son teint serait sûrement devenu livide, au lieu de quoi son regard se contenta de se revêtir d’un voile d’inquiétude.

— Crios, tu... tu as conscience de ce que cela implique ?
— Vous n’avez pas à avoir peur. Il n’y a pas âme qui vive à des kilomètres à la ronde, hormis nous quatre, et si vous ne tentez rien, c’est comme si vous nous condamniez de toute manière. Vous savez très bien que je ne vous y encouragerais pas s’il y avait une autre solution, et puisque vous ne voulez pas fuir, il ne vous reste plus qu’à agir.

Les prunelles d’Athéna passèrent de Crios à Nirina, qui avait fini par perdre connaissance. Regice dressa un Abri autour d’eux, plus rapide mais moins solide que sa barrière de glace, afin de leur faire gagner quelques secondes supplémentaires, que son humain mit à profit pour étaler l’onguent qu’il était retourné chercher au péril de sa vie sur la blessure de la reine de Cinhol.

— Ma dame, c’est le moment de vous décider, insista-t-il quand la protection de Regice vola en éclats.
— Je...

Athéna ferma les paupières. Crios savait à quel point ce qu’il exigeait d’elle la perturbait et lui évoquait surtout de terribles souvenirs, mais c’était cela ou accepter de mourir. Autant tenter le tout pour le tout.

Soudain, la déesse se redressa. La peur était perceptible sous son masque de détermination, mais au moins, elle avait fait son choix. Les Akyrs durent percevoir un brusque changement autour d’eux, car ils s’immobilisèrent aussitôt pour l’observer avec curiosité.

— Cette puissance... commenta l’un d’eux. Elle est...
— ... Nettement supérieure à celle du seigneur Menmark, mais comment... renchérit un second.
— Emmène-la, ordonna Athéna. Tout de suite !

Crios ne se le fit pas répéter et chargea Nirina sur son épaule sans aucune délicatesse. Tandis qu’il s’élançait, il jeta un regard dans son dos, en direction de Regice qui avait décidé de ne pas bouger. Il savait à quoi il s’exposait, mais malgré cela, il préférait rester.

Le glacier se mit à trembler, de plus en plus intensément à mesure que Crios s’éloignait. Même avec son sens de l’équilibre, il peinait à se maintenir debout tant les vibrations étaient violentes. Alors qu’il s’apprêtait à jeter un nouveau coup d’œil derrière lui, un craquement qui ne laissait rien présager de bon retentit.

Il devina ce qui se passait à l’instant même où une fissure apparut sous ses pieds, l’obligeant à changer de trajectoire pour ne pas basculer dans les entrailles du glacier. Nirina était tellement cahotée qu’en dépit de son inconscience, elle poussa un gémissement.

— Pardon, marmonna instinctivement Crios.

Il fit volte-face et s’immobilisa pour contempler la scène avec effroi. Des blocs de glace entiers s’étaient détachés de la falaise, et nombreux étaient ceux qui s’apprêtaient à les rejoindre. À ce rythme, dans moins de trois minutes, toute la zone où ils se tenaient serait emportée par le torrent.

Un Akyr avait été pulvérisé en mille morceaux par une attaque dévastatrice d’Athéna, mais la force qu’elle dégageait et qu’elle ne contrôlait pas était aussi dangereuse pour ses ennemis que pour elle-même. Crios remarqua que Regice, en dépit de sa volonté première, avait fini par reculer.

Un autre monstre ne tarda pas à être détruit, en même temps qu’un nouveau pan du glacier s’effondrait. Les secousses qui le parcouraient devinrent plus virulentes encore, obligeant l’humain légendaire à reprendre sa route. Il fallait qu’il se dépêche s’il voulait mettre Nirina en sûreté avant que...

Le sol s’affaissa brusquement sous lui, déchiré en deux. Les fissures se multipliaient de façon exponentielle à chaque seconde, et Crios perdit l’équilibre. Il bascula dans une faille, lâchant le corps inconscient de la jeune fille qui glissa dans une autre. Après s’être réceptionné dans une cavité, plusieurs dizaines de mètres en contrebas, le dieu se mit aussitôt en quête de Nirina.

Le grondement assourdissant de la plateforme en train de s’écrouler était encore plus impressionnant sous la surface. Les tunnels n’étaient plus qu’un ramassis de cristaux translucides, quasiment impraticables. Sans ses capacités de légendaire, jamais Crios ne parviendrait à se frayer un chemin.

Il marcha pendant un temps qui lui parut considérable, même pour lui qui n’en avait pourtant pas la notion. Il devait sans cesse s’arrêter pour se protéger des stalactites qui se décrochaient du plafond ou changer de direction, car les boyaux qu’il suivait finissaient par être totalement obstrués.

Il supposa qu’il était sur la bonne voie lorsqu’il repéra des gouttes de sang sur le sol branlant. Puisque Nirina n’était nulle part dans les environs, cela signifiait probablement qu’elle avait repris conscience et qu’elle cherchait un moyen de quitter cet endroit avant qu’il ne devienne son tombeau. Crios cria son nom, au cas où elle ne soit pas très loin, mais il n’obtint aucune réponse.

Le tunnel dans lequel il progressait, s’enfonçant toujours plus profondément dans les entrailles du glacier, se mit à pencher dangereusement. Le dieu, déstabilisé, glissa vers l’arrière sur avant de s’agripper à une fissure dans la paroi. Il s’interdisait de songer à ce qui se passait à la surface, où Athéna continuait vraisemblablement à déchaîner ses pouvoirs.

Crios percevait toujours Regice à travers leur connexion, preuve que le Golem était indemne, néanmoins il ne laissait filtrer aucune information concernant la fille de Zeus. Sans doute ne voulait-il pas l’inquiéter plus que de raison.

L’humain légendaire poursuivait ses recherches quand un hurlement strident lui parvint. Aucune erreur possible, c’était Nirina. Crios se précipita aussitôt dans la direction d’où semblait provenir la voix, même si l’écho pouvait être trompeur. Le moindre son résonnait, en plus de se mêler à ceux provoqués par l’effondrement.

Ce fut ce qui sauva Nirina. Lorsque Crios la rejoignit enfin, elle avait pu échapper à l’Akyr dont elle avait eu le malheur de croiser le chemin grâce à un boyau qui s’était à moitié affaissé sur lui. Elle-même ne s’en était sortie que par miracle, en se jetant dans une fissure qui l’avait protégée de l’ensevelissement.

Crios lui rendit la main pour l’aider à se dégager, à l’instant même où les scies, dont le grincement mortel commençait à devenir trop familier, se mirent en mouvement. Si des Akyrs avaient échappé à Athéna pour investir les tunnels, il était impératif de regagner au plus vite la surface.

— Grimpe sur mes épaules, vite.

Nirina, oubliant toute dignité, s’empressa de s’exécuter, pendant que Crios s’élançait en quête d’un chemin qui les ramènerait au sommet du glacier. Ils semblaient avoir gagné un peu de hauteur quand le monstre les rattrapa. Il lança ses lames circulaires sur eux, que le dieu esquiva en plongeant dans une crevasse, qu’il referma derrière lui pour empêcher l’Akyr de les suivre.

« Crios... Nous avons un gros problème. »

Nirina dut sentir tous les muscles du légendaire se contracter lorsque le message mental de Regice lui parvint. Tâchant de garder son calme, ce qui n’était pas facile, même pour lui, à la vue de la situation, il demanda :

« C’est Athéna ? »
« Elle allait vaincre la dernière créature quand la falaise a fini de s’effondrer dans la rivière en l’emportant avec elle. Je suis aux prises avec le monstre et je ne peux pas la chercher. »

Crios s’apprêtait à songer que la nouvelle n’était pas si critique que cela, étant donné qu’il fallait bien plus qu’un ensevelissement pour tuer un légendaire, quand quelque chose l’interpella dans les propos de Regice. Si le Golem était en train d’affronter le cinquième Akyr, alors celui qui les traquait ne faisait pas partie du groupe. Il comprit avec horreur que ce glacier fourmillait bel et bien de ces êtres de métal.

— Oh ! s’exclama Nirina en lui infligeant un coup de genou dans les côtes. Qu’est-ce que vous attendez pour avancer ? Que l’autre nous ait rattrapés ?

Perturbé, Crios s’était arrêté sans même en avoir conscience. Il se remit à courir, mais il n’avait pas la tête à ce qu’il faisait. Ses pensées étaient tournées vers Athéna. Il n’était pas simple d’ôter la vie d’un dieu, effectivement, mais un bloc de glace de plusieurs tonnes suffisait à les assommer, or si elle était inconsciente et que d’autres Akyrs rôdaient autour d’elle, cela pouvait lui être fatal.

— Il faut que j’aille la chercher, marmonna Crios.

Il savait qu’en renonçant à fuir, il exposait la vie de Nirina, mais Athéna devait survivre. C’était elle qui incarnait l’équilibre au sein de la Confrérie, la seule qui empêchait le monde de basculer dans le chaos qu’engendrerait une guerre totale entre Arcésiens et Renégats.

— Quoi ? Non ! Non ! protesta Nirina. Tant pis pour les autres, on doit se sauver.
— L’altruisme, c’est une notion qui t’est étrangère, n’est-ce pas ? devina Crios. Je suis désolé, mais il y a parfois des sacrifices qui sont nécessaires. Cette femme qui nous a aidés... Tu n’as pas idée de tout ce qui repose sur ses épaules.
— Je m’en moque. J’ai fait ma bonne action, j’ai donné Triséïdon à cette bande d’abrutis, et puisque j’ai une chance de m’en sortir moi aussi, je ne vois pas pourquoi je devrais la laisser passer.
— Parce que sans moi, tu aurais continué à dériver au fil de la rivière en te vidant de ton sang. Voilà pourquoi.
— Vous sauvez la vie des gens pour qu’ils vous soient redevables, c’est ça ?
— Non, je les sauve parce qu’il y a suffisamment d’injustices dans le monde, et il y en aura davantage si Athéna ne quitte pas ce glacier indemne.

Sur ces mots, Crios rajusta les bras de Nirina autour de son cou et reprit son ascension. Lorsqu’ils émergèrent enfin des tunnels dévastés, il leur fallut un moment pour se repérer. Les environs ne ressemblaient plus à ceux qu’ils avaient laissés derrière eux, car presque tout s’était écroulé, et la rivière elle-même avait disparu, obstruée par d’épaisses masses d’une blancheur translucide.

Crios finit par apercevoir Regice, qui luttait toujours contre l’Akyr. Lorsque son pokémon le remarqua également, il lui conseilla de ne pas se soucier de lui et de se lancer directement à la recherche d’Athéna. Le dieu ne se le fit pas répéter. En dépit des protestations farouches de Nirina, il bondit au milieu des restes de la falaise, en quête de la légendaire.

— Si on était à Cinhol, je vous aurais déjà fait exécuter, grommela la jeune femme.
— J’ose espérer qu’à Cinhol, vous n’avez pas de monstres de ce genre.
— Il y a bien mon oncle, le duc Isgon, mais... Bah, laissez tomber.

Crios fut soulagé de l’entendre capituler, car il ne pouvait pas à la fois se disputer avec Nirina et se concentrer sur la tâche qu’il avait à accomplir. La localisation d’Athéna devait être sa seule préoccupation. C’était du moins sans compter sur la mauvaise nouvelle que Regice lui transmit.

« Trouve-la vite. Deux autres Akyrs viennent de surgir d’une crevasse, et j’ignore combien de temps je pourrais résister, seul face à eux. »

La pression n’allait pas simplifier la mission de Crios, mais il n’avait pas d’autre choix que celui de s’y plier. Accélérant le pas, au grand dam de Nirina qui était balloté sans cesse, Crios entreprit d’explorer les interstices qui séparaient les blocs de glace. Il n’y avait cependant aucune trace d’Athéna ni d’aucun Akyr. Il ignorait s’il devait en éprouver du réconfort ou s’inquiéter encore plus.

— Vous avez songé que votre copine est peut-être tombée dans l’eau ? lâcha soudain Nirina. J’espère qu’elle sait nager, même si à mon avis, le plongeon aura suffi à la geler sur place.
— Elle est insensible aux températures, indiqua Crios. Et elle peut tenir un long moment sans respirer.
— Vous êtes quoi, au juste ? Des mutants ? Des super-héros ?
— Pas exactement.

Crios se garda d’entrer dans les détails, mais dut concéder à Nirina que sa théorie se tenait. Athéna n’était visiblement nulle part, ce que signifiait qu’elle avait probablement été emportée par le torrent. La retrouver s’annoncer encore plus délicat qu’il le redoutait.

Il allait cependant devoir faire un choix, car la détresse de Regice était de plus en plus perceptible. Le Golem était mal en point face à ses trois assaillants, et si Crios ne lui portait pas très vite secours, c’en serait fini de lui. Néanmoins, Athéna était peut-être en danger de mort, elle aussi.

Que faisait Prométhée ? Crios n’avait aucune idée du temps qui s’était écoulé depuis que les Zarbi lui avaient transmis leur appel au secours. La route était longue jusqu’au Glacier Infini, mais il chevauchait Ho-Oh, tout de même !

Crios secoua la tête. Il ne devait pas se laisser emporter par ses émotions. Prométhée arriverait quand il arriverait. En attendant, il allait devoir s’organiser sans lui. Le dieu ne pouvait pas se démultiplier, mais il pouvait quand même solliciter de l’aide.

— Cherche Athéna, ordonna-t-il à son Lokhlass une fois qu’il l’eut matérialisé dans une portion de rivière où l’eau circulait encore. Et ramène-la ici.

Le pokémon poussa un cri affirmatif pour montrer qu’il avait bien saisi les instructions, puis s’éloigna. Crios en fit de même, regagnant la partie du glacier qui tenait toujours et sur laquelle Regice affronter les trois Akyrs. L’un d’eux se libéra du bloc dans lequel le Golem l’avait entravé au moment où son humain le rejoignit.

— C’est une très, très mauvaise idée, ne cessait de marmonner Nirina.

Crios ignora sa remarque et leva les bras pour dévier les scies des monstres qui volaient dans toutes les directions. L’une d’elles érafla malgré tout Regice, qui guérit presque aussitôt. Une chance qu’il puisse compter sur ses exceptionnelles facultés de régénération.

— Est-ce que tu penses pouvoir créer une faille dans laquelle les ensevelir tous les trois ? interrogea le Golem.

Crios grimaça. Les légendaires avaient beau être très endurants, il avait tellement utilisé ses pouvoirs pour combattre les Akyrs qu’il commençait à manquer d’énergie. Fendre une fois de plus le glacier, et ce en dépit du fait qu’il avait déjà été fragilisé par les assauts d’Athéna, risquait de nécessiter un effort conséquent.

— Certes, mais ça t’épuisera autant de les repousser indéfiniment, souligna Regice, et Crios dut concéder qu’il avait raison.

Les bras de Nirina se crispèrent autour de son cou, si sèchement qu’elle pourrait presque l’étouffer, tandis qu’il s’accroupissait pour plaquer ses paumes sur le sol gelé. Aussitôt, celui-ci se mit à trembler, quoique moins violemment qu’il ne l’avait fait sous les assauts déchaînés d’Athéna.

Il se craquela, d’abord superficiellement, avant que la fissure s’agrandisse suffisamment pour permettre à un Akyr de basculer dans ses profondeurs. Ce fut d’ailleurs ce qui se produisit. Un second ne tarda pas à le rejoindre, projeté par l’Ultralaser de Regice, mais le troisième parvint à leur échapper. Rapide, il se faufila dans leur dos.

Crios, affaibli par l’énergie dont il venait d’user, mit quelques secondes à se redresser. Le temps pour lui de se retourner, Nirina poussa un hurlement et le dieu sentit son dos s’alléger. La créature avait saisi l’humaine dans son horrible gueule, et il enchaîna en enfonçant sa scie dans le ventre de Crios.

Regice réagit immédiatement. Son Laser-Glace percuta l’Akyr, pendant que le légendaire s’effondrait à plat ventre, souillant la neige de son sang sombre et épais. La blessure n’était pas mortelle, pas pour un être tel que lui, mais elle était tout de même assez grave pour nécessiter plusieurs heures de guérison.

L’impact obligea le monstre à lâcher Nirina, qui fut propulsée plus loin et glissa encore sur plusieurs mètres, jusqu’aux restes du glacier dévasté. Elle disparut entre deux blocs de glace, vers lesquels l’Akyr se précipita. Regice, qui avait conscience de sa lenteur, ne songea même pas à le prendre en chasse. Il tenta de l’immobiliser à distance, ou au moins de le ralentir, mais la créature slaloma habilement, évitant ses attaques.

Elle avait presque atteint la faille qui venait d’engloutir Nirina quand une gerbe de flammes s’abattit sur elle depuis le ciel. Lorsque le feu se dissipa, il ne restait de l’Akyr plus qu’une carcasse incandescente, incapable de nuire encore à qui que ce soit.

— Crios... Crios, il est là !

Le dieu, malgré sa blessure, trouva la force de basculer sur le dos pour contempler le firmament, où se découpait l’immense silhouette d’un oiseau majestueux. Il esquissa un sourire, rassuré. Prométhée était enfin arrivé, ce qui signifiait que leurs ennuis étaient terminés.

Ho-Oh se rapprocha du sol et son humain sauta à terre, où il se réceptionna lourdement. À côté de Crios, qui avait une carrure plutôt frêle, il avait l’air d’un véritable mastodonte, avec ses épaules carrées, sa musculature saillante et ses deux mètres de hauteur. Son visage broussailleux, des sourcils à la barbe, en passant par ses cheveux ondulés, trahissait une vive inquiétude.

— A... théna, articula péniblement Crios, dont la bouche fut envahie par le goût du sang.
— Ton Lokhlass l’a retrouvée. Il la ramenait ici quand je les ai croisés, mais j’ai réussi à les convaincre d’aller se mettre en lieu sûr. Athéna venait à peine de reprendre connaissance.
— Tu as... bien fait.
— Je suppose que les questions attendront. Qu’est-ce qu’il faut que je fasse ?
— Il y a une humaine, là-bas, indiqua Regice en désignant l’endroit où Nirina a disparu. Retrouve-la. Et toi, Ho-Oh, reste avec moi. Ce monstre que tu as détruit n’était pas le seul. Il y en a d’autres, et ma glace est inefficace contre eux.

Comme pour illustrer ses propos, les deux Akyrs ensevelis par Crios transpercèrent la surface, leurs scies pointées vers le haut. Ho-Oh les accueillit aussitôt avec son Feu Sacré, mais Regice parvint à l’arrêter avant qu’il n’ait complètement détruit les deux. Ils avaient besoin de garder un fragment de leur corps intact, afin que Vulcain puisse l’examiner.

L’oiseau arc-en-ciel se chargea donc de déchiqueter entre ses serres acérées l’anatomie difforme de l’une des créatures, pendant que Prométhée se précipitait à la rescousse de Nirina. Crios, tout en compressant sa plaie béante et en grinçant des dents, se redressa. Ce ne fut qu’une fois en position assise qu’il se souvient. L’onguent.

Il l’avait glissé dans sa poche après en avoir étalé une seconde fois sur la blessure de Nirina. Il n’en restait plus beaucoup, mais puisque ses tissus cicatrisaient bien plus vite que la moyenne, cela suffirait. Il en appliqua une couche sur son torse perforé, qui commença aussitôt à guérir.

Il se sentait toujours faible, en raison de la quantité de sang considérable qu’il avait perdu, mais au moins, l’hémorragie s’était arrêtée, et son corps ne tarderait pas à renouveler son fluide vital.

— Crios, intervint Regice en le voyant chanceler. Laisse faire Prométhée, il peut très bien s’en sortir seul. Tu n’es pas en état de...
— Je vais bien. Ou plutôt, j’irais mieux d’ici quelques minutes. Ne t’inquiète pas pour moi.

Le Golem, quoique moyennement convaincu, n’insista pas. Crios se dirigea, d’abord lentement, puis de plus en plus vite, vers la falaise détruite, et se faufila à l’intérieur de la crevasse par laquelle Nirina avait disparu. Des bruits de pas parvinrent presque aussitôt à ses oreilles, probablement ceux de Prométhée.

— Tu l’as trouvée ? lança Crios.
— Pas encore.

La voix grave et puissante du légendaire était encore plus impressionnante, démultipliée par l’écho. En dépit de son apparence intimidante, il avait un cœur en or et, à l’instar de Crios, avait décidé de consacrer son existence à aider les humains, ce qui leur valait le mépris ou les railleries de la plupart de leurs semblables.

Le dieu était en train de s’enfoncer un peu plus dans les profondeurs de l’amas de glace lorsqu’il remarqua quelque chose qui retint aussitôt son attention. La faille dans laquelle il progressait s’élargissait tout à coup. De chaque côté, il aperçut de fines traces, qui avaient dû être provoquées par des objets tranchants. Comme des scies, par exemple.

— Prométhée ! appela-t-il. Tu peux me rejoindre ?

Le temps que l’humain de Ho-Oh s’exécute, Crios examina plus attentivement la paroi. Aucun doute, un Akyr était passé par là. Et la voie creusée se poursuivait jusqu’au glacier, où elle ralliait un autre tunnel. Cela ne pouvait signifier qu’une chose :

— Ils nous ont devancés, expliqua-t-il à Prométhée. Ils ont enlevé Nirina et se sont enfuis par là.
— Tu veux que j’essaye de les rattraper ?

Crios secoua la tête. C’était trop tard. Les légendaires étaient rapides, mais il avait pu constater, durant leur affrontement, que les Akyrs l’étaient tout autant. Il avait trop d’avance pour que Prométhée puisse les retrouver, d’autant qu’il ne restait plus sous la surface qu’un labyrinthe de galeries à moitié effondrées.

— Et évidemment, à moins de faire fondre toute cette glace, Ho-Oh ne peut pas non plus les repérer depuis le ciel, fulmina le colosse. Je suis sincèrement désolé, Crios. Si j’étais arrivé un peu plus tôt, peut-être que...
— Ils étaient déterminés à l’avoir, coupa le dieu. Et ils auraient continué jusqu’à parvenir à leurs fins, d’une manière ou d’une autre.

Malgré ses paroles, il avait le cœur lourd. Il avait essayé de protéger Nirina, et il avait échoué. Elle l’avait pourtant prévenue de ce qui risquait de se passer, mais il ne l’avait pas écoutée. De toute façon, même s’il était parti avec elle au lieu de revenir aider Athéna, les Akyrs les auraient traqués. Ce qui venait de se produire prouvait qu’ils étaient partout dans le glacier, et que la jeune femme n’avait aucune chance de leur échapper, quoi que Crios ait pu tenter.

Tout ce qu’il avait fait, c’était lui offrir un sursis, ce qui n’avait absolument rien de réconfortant. Sans doute aurait-il même été préférable qu’il la laisse se vider de son sang au rythme de la rivière, au lieu de la sauver, car ces créatures lui réservaient probablement un sort pire que la mort.

— Qu’est-ce qu’on fait, maintenant ? interrogea Prométhée.
— On remonte.

Sans échanger un mot de plus, ils regagnèrent la surface, où Ho-Oh et Regice les attendaient. Le Golem avait à ses pieds un fragment d’Akyr intact, qui contrastait avec toutes les carcasses carbonisées qui gisaient autour d’eux. Crios le ramassa pour le tendre à Prométhée.

— Retrouve Athéna, et portez ça à Vulcain pour qu’il l’examine, conseilla-t-il.
— Et toi ? Où vas-tu aller ?
— Nirina a fait mention d’humains avec qui elle s’est aventurée dans ce glacier, à la recherche d’une arme qu’elle appelle Triséïdon. Je vais essayer de les retrouver et tâcher d’en apprendre davantage. Je n’ai pas réussi la sauver, mais si je peux faire en sorte que ces monstres ne s’en prennent plus jamais à personne, j’en retirerai au moins un certain réconfort.

Prométhée ouvrit la bouche, sans doute pour tenter de dissuader Crios de s’exposer seul au péril, mais il se ravisa. Le dieu avait pris sa décision, et quoi qu’il dise, il savait qu’il ne parviendrait pas à le faire changer d’avis.

— Bonne chance, mon ami.

Crios serra la main que le géant venait de lui tendre, après quoi Prométhée se hissa avec aisance sur le dos de Ho-Oh. Regice et son humain regardèrent l’oiseau arc-en-ciel s’élever dans les airs, puis disparaître. Une fois qu’il fut hors de vue, ils tournèrent les talons et s’éloignèrent en direction de leur nouvelle mission.