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Team Rocket X-Squad de Malak



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» Auteur : Malak - Voir le profil
» Créé le 05/03/2017 à 09:16
» Dernière mise à jour le 19/12/2020 à 01:20

» Mots-clés :   Action   Fantastique   Organisation criminelle   Présence d'armes   Présence de Pokémon inventés

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Chapitre 304 : Les deux innocences
Le quartier général de la Confédération Libre avait été établi sur l’île d’Algatia après sa reconquête il y a trois mois. L’avantage de cette île, c’était qu’elle disposait de toutes les technologies les plus récentes en matière de satellite et donc de surveillance, grâce à son célèbre Centre Spatial mondialement reconnu. Le Haut Commandement de la Confédération, dont la reine Eryl elle-même, avait aménagé dans l’arène Pokemon de la ville. Comme le temps n’était plus vraiment à la conquête des badges à Hoenn, les deux champions, des jumeaux, avaient gracieusement offert leur arène à leurs libérateurs.

Pendant qu’Erend et les autres étaient au front au sud d’Hoenn, Eryl s’occupait des questions d’ordre politique et locale avec les autres membres alliés de la Confédération. Son titre de Reine de l’Innocence avait toujours été un titre fantoche et ronflant pour permettre à Erend d’engranger des soutiens, Eryl en était consciente. Mais elle ne voulait pas seulement servir de décoration. Aussi Erend, durant toute cette année, avait pris soin de la former à la politique, à l’économie, à la diplomatie. Aussi maintenant était-elle la réelle représente de la Confédération, respectée et écoutée.

Tous les mercredi se tenait un conseil des représentants de la Confédération, qu’Eryl dirigeait. Au début, elle s’était sentie intimidée d’être à cette table, entourée de Chef d’Etat, de diplomates et d’ambassadeurs, et se murait souvent dans le silence. Mais l’assurance avait pris le pas, ainsi que la maîtrise des sujets traités. Eryl n’aurait jamais songé finir dans la politique, mais faut croire que le destin était une chose bien curieuse et surtout imprévisible.

La politique était plus un art qu'une accumulation de connaissances, au final. C'était l'art de savoir dire les choses, et d'en faire ensuite d'autres. C'était d'autant plus visible en cette période, ou deux des alliés de la Confédération, Unys et Kalos, étaient en pleine campagne électorale. Evidemment, ce qui se passait chez eux touchait donc aussi la Confédération, maintenant qu'ils avaient uni leur destin. Donc Erend s'intéressait de près aux élections dans ces deux régions, même si celle de Kalos relevait pour l'instant de la farce. Tout cela parce que le député d'Illumis, un certain François Fion, qui comptait se présenter à la présidentielle, avait payé sa femme avec l'argent public pour qu'elle tricote et fasse de la confiture...

- Votre Majesté, commença Shiroe Buridji en se levant, il serait bon de mettre à l’ordre du jour la question du Sommet Mondial de Bonport.

Monsieur Buridji était le représentant de Sinnoh, et son ministre des affaires étrangères. Comme la région Sinnoh était de loin l’allié le plus sûr d’Erend, Shiroe Buridji était celui dont la parole avait le plus de poids au conseil, et qu’Eryl s’efforçait de traiter avec le plus de considération.

- Qu'il y a t'il de plus à dire, monsieur Buridji ? Demanda Eryl. Il est évident que c’est un sommet monté de toute pièce par Venamia. Sous couvert de neutralité et de discussion pacifique, ce ne sera qu’un rassemblement de ses fidèles alliés.

- Il se peut, mais Venamia a clairement invité les représentants de chaque nation du globe. La région d’Almia est neutre dans la guerre ; elle ne pourra pas se permettre de transgresser la paix de quelque moyen que ce soit. Il en va de sa réputation et de sa crédibilité. Ses alliés ne lui pardonneraient jamais si elle venait à s’en prendre à des représentants qui lui seraient hostiles lors de ce sommet.

Eryl avait écouté l’allocution de Venamia à ce sujet il y a deux jours. Une allocution mondiale, dans laquelle elle appelait les différents Chefs d’Etat du globe à se rendre à Bonport, la plus grande ville de la région d’Almia, pour une réunion et une réception n’ayant pour but que de discuter des possibilités pour la paix. C’était très ironique venant d’elle qui avait réalisé son ascension grâce à la guerre. Elle voulait probablement se donner une image de femme de paix et de raison, et donner le rôle de l’agresseur à Erend. Il est vrai que c’était lui qui avait déclaré la guerre au Grand Empire en premier.

De fait donc, Erend aurait pu y envoyer un représentant de la Confédération, voir carrément se déplacer lui-même, mais quel intérêt ? Ces prétendues discussions ne seront qu’une occasion pour Venamia de réunir ses alliés et rabaisser la Confédération. Si jamais quelqu’un de l’autre camps devait se pointer à ce sommet, il se sentirait quelque peu en minorité, même s’il est vrai qu’il n’aurait rien à craindre de Venamia alors, qui serait bien mal inspirée de faire quelque chose de nuisible à son propre sommet pour la paix. Mais d’un autre coté, personne dans la Confédération n’avait oublié la Conférence du Plateau Indigo, un an plus tôt, où Venamia avait provoqué une tuerie en faisant mine qu’Erend était le responsable.

- Ce sommet est une mascarade ! Intervint le sénateur Coptaur de Bakan. Je ne peux pas croire que les autorités d’Almia aient autorisé Venamia à faire sa propagande chez elles !

- Almia est quasiment dirigée par la Fédération Ranger, fit Jean-Marc Zeraut, le représentant de Kalos. La présidente Marthe est vieille et sans doute naïve ; elle aura très bien pu gober le tout nouveau prétendu amour de Venamia pour la paix.

Eryl, qui avait rencontré la présidente Marthe, une femme effectivement âgée mais encore vigoureuse et lucide, et pour laquelle avaient travaillé ses propres parents, n’aimait pas trop que Zeraut parle d’elle en ses mots. Marthe n’était pas née de la dernière pluie. Elle devait voir clair à travers le jeu de Venamia. Si elle avait accepté sa proposition, c’était sans doute parce qu’elle n’avait pas le choix. Comment une nation qui se disait neutre aurait pu refuser la tenue d’un sommet pour la paix chez elle ?

- Almia a toujours été une région fière. Et la fierté se rapproche bien trop souvent de l’orgueil, l’un des plus terribles péchés capitaux. Peut-être la région a-t-elle déjà sombré dans la corruption…

Celui qui venait de prendre la parole était un homme paré d’un imposant manteau blanc, orné de broderies représentant une flèche et des étoiles : le symbole d’Erubin. Cet homme, Brimas Atilus, était le chef des Défenseurs de l’Innocence, un tout nouveau groupe fondé sur l’impulsion d’Eryl pour défendre les valeurs de l’innocence et combattre efficacement les péchés capitaux partout dans le monde. Surnommés les Blancs Manteaux en raison de leur habit, les Défenseurs de l’Innocence étaient censés remplacer les Gardiens de l’Innocence. Ces derniers étaient aujourd’hui quasiment moribonds, et surtout contrôlé par Vaslot Worm, « l’oncle » d’Eryl, qui avait comploté avec les Agents et qui depuis avait refusé de jurer allégeance à Eryl, prétendant qu’elle n’était pas la réincarnation d’Erubin, mais une erreur de la nature, doublure d’une des plus zélées Agents du Marquis.

Au lieu de rejoindre la Confédération Libre pour lutter contre Venamia et Horrorscor à ses cotés, Vaslot Worm avait au contraire enjoint Eryl de revenir chez les Gardiens pour le servir lui, leur Premier Apôtre légitime. Il est vrai qu’Eryl avait été une ancienne Gardienne. Elle avait des amis là-bas, comme Dame Cosmunia, une Apôtre et un Pokemon extraordinaire. Mais elle n’avait pas pu accepter de ramper devant Worm, ce traître qui avait fait son petit Coup d’Etat contre le précédent Premier Apôtre, Oswald Brenwark. C’était aussi le cas de Solaris d’ailleurs. Elle aussi était une Gardienne de l’Innocence, mais depuis que Worm avait pris les commandes, elle n’y avait jamais plus remis les pieds.

Eryl avait jugé qu’en l’état, les Gardiens de l’Innocence étaient incapables de combattre efficacement le Marquis des Ombres et ses sbires. Elle s’était donc fondée son propre groupe. Il y avait beaucoup de critiques contre les Défenseurs de l’Innocence. Les gens les assimilaient à une police de la foi, et ce n’était pas faux. Dans le but d’empêcher les péchés capitaux, et donc par extension la corruption, de gagner du terrain, les Blancs Manteaux avaient pour rôle de combattre et d’interdire tout ce qui pourrait les provoquer. Ils avaient par exemple fait fermer toutes les maisons closes - symbole du péché de la Luxure - de la partie reconquise d’Hoenn et avaient sévèrement puni les prostituées et les clients. Ils avaient aussi clairement fait baisser la vente d’alcools et des jeux d’argent, respectivement des péchés de la Gourmandise et de l’Avarice, et pris des mesures pour lutter contre l’absentéisme des fonctionnaires, symbole de la Paresse.

Ils s’adonnaient aussi à des prêches un peu partout pour modifier les mentalités des gens et les protéger de la tentation du péché. Eryl savait qu’Erend avait vu ça d’un mauvais œil, lui qui était particulièrement anti-religieux. Mais il avait fini par céder aux arguments d’Eryl. Ils ne pourraient pas gagner contre la corruption simplement par les armes. Ils devaient avant tout gagner par l’esprit. Brimas Atilus était certes un fanatique ; il considérait Eryl comme une déesse et tous péchés, même le plus infime, comme la marque des serviteurs de la Corruption. Mais c’était un fanatique utile. Eryl ferait tout pour combattre la corruption, même si pour cela elle devait recréer l’époque de l’inquisition.

- Euh… je doute que les dirigeants d’Almia soient devenus des alliés d’Horrorscor, dit Buridji pour ménager le Blanc Manteau dont il se méfiait. Le fait est, qu’on le veuille ou non, que le sommet se tiendra là-bas. La question est : doit-on laisser Venamia et les siens monopoliser le paysage médiatique, où doit-on envoyer nos propres représentants ?

- Il est vrai que l’absence de tout envoyé de la Confédération serait fâcheuse, fit pensivement le représentant de la région Rhode. Le grand public pourrait penser que monsieur Igeus se contrefiche de la paix.

- Et c’est le cas, répondit Eryl. Il ne peut y avoir de paix avec Johkan tant que Venamia y est aux commandes. Le reste du monde considère sans doute que notre histoire comme quoi elle serait possédée par un Pokemon maléfique n’est que pur mensonge, mais nous savons très bien ce qu’il en est. Céder quoi que ce soit à Venamia reviendrait à laisser Horrorscor agir à sa guise.

Seul Brimas Atilus hocha énergiquement la tête. Les autres membres restèrent silencieux, hésitants. Ils n’avaient que Venamia et son Grand Empire à l’esprit, à tel point qu’ils en avaient presque oublié le véritable responsable : Horrorscor. Eryl ne pouvait pas leur en vouloir : ils étaient des politiciens, des hommes de bon sens qui privilégiaient les faits. Une menace comme Horrorscor, un Pokemon légendaire disparu depuis des siècles qui pour survivre s’accroche à des âmes ne devait pas trop leur parler. Jugeant qu’il était temps de leur rafraîchir un peu la mémoire, Eryl se leva pour s’adresser à eux.

- Comme vous le savez maintenant, je ne suis pas réellement humaine. Je suis la Pierre des Larmes, cet artefact issu du Pokemon Erubin qui a causé la destruction première du corps d’Horrorscor. Le Premier Apôtre des Gardiens, Dan Sybel, a longtemps cherché cette pierre, jusqu’à la trouver. Personne ne sait trop ce qui s’est réellement passé alors, mais la pierre, grâce aux pouvoirs de Silas Brenwark, alors l’apprenti de Dan Sybel, a pris une forme humaine : celle de la fille de Sybel, Lyre. Vous avez le résultat devant vous. Dan Sybel m’a fait passer pour sa vraie fille et m’a dissimulé pour ne pas qu’Horrorscor et ses sbires me trouvent. À présent, Sybel est mort, sa fille et son ancien apprenti sont les bras droits du Marquis, et les Gardiens sont sous la coupe de Worm. Il ne reste plus que nous, la Confédération Libre, qui savons la vérité et qui pouvons encore stopper Horrorscor, l’empêcher de retrouver assez de puissance pour revenir. Car s’il retrouve son corps d’origine, alors seul un miracle pourra empêcher la corruption de s’étendre totalement sur ce monde. Venamia n’est qu’un outil d’Horrorscor. Elle est le paratonnerre qui attire toute l’attention et qui permet au Maître de la Corruption d’agir en toute impunité. Ne vous y trompez pas, messieurs.

Les membres du conseil s’inclinèrent avec respect devant cette prise de parole, Brimas Atilus encore plus que les autres.

- Voilà qui est parlé, Majesté, dit-il avec vénération. Vos mots sont le reflet de la pureté de notre déesse Erubin !

- En ce qui concerne ce Sommet Mondial, j’en parlerai à Erend quand il rentrera, poursuivit Eryl en se rasseyant. Il décidera de lui-même quoi faire. À présent, parlons de mes directives pour chasser le péché de nos villes. Les ordres des Défenseurs de l’Innocence ont-ils bien été appliqués à Nenucrique ?

Elle s’adressa à Marc Wallace, l’ancien Maître de la Ligue Pokemon d’Hoenn, qui était le représentant des villes reconquises par la Confédération. Nenucrique, la dernière en date, devait donc désormais se plier aux décrets religieux des Défenseurs, ceci dans le but de protéger la ville des Péchés Capitaux.

- Toute la prostitution et les trafics illégaux en tout genre ont été arrêtés, répondit le bel homme à cape. Les pécheurs passés ont bien fait acte de repentance et se sont confessés aux Blancs Manteaux en place. Il en manque encore, mais nous progressons. Nous maintenons une présence policière forte pour prévenir tous crimes ou délits, et les contrevenants sont sévèrement punis.

- Des coups de fouets, comme nous l’avons préconisé ? Demanda Atilus.

Marc lui jeta un coup d’œil écœuré et répondit froidement.

- Ils sont punis selon la loi en vigueur, Monseigneur. Malgré le passage de Venamia, Hoenn reste une nation civilisée.

- C’est de la civilisation que naît le péché, rétorqua le chef des Défenseurs de l’Innocence. Nous devons être impitoyables envers ceux qui, volontairement ou non, permettent aux Démons Majeurs de devenir de plus en plus forts chaque jour. C’est en faisant disparaître totalement les actes ayant traits aux Péchés Capitaux que nous pourrons alors vaincre ces Pokemon du diable ! L’Innocence, si elle veut triompher, doit se montrer forte et intraitable !

Atilus dévisagea Eryl, quémandant son divin soutient. Cette dernière soupira, et dit à contrecœur :

- Punissez les pécheurs avec le fouet, Monsieur Wallace.

- Mais Majesté…

- Tant que l’ensemble des Démons Majeurs se trouve à Hoenn, la tentation du péché est énorme. Même si elles nous sont désagréables, nous devons prendre les mesures qui s’imposent. Qu’en est-il du chômage ? Tous les gens de Nenucrique travaillent-ils ?

De tous les fléaux conduisant aux péchés capitaux, le chômage était souvent bien placé. Il favorisait sans conteste la Paresse, et donc augmentait la puissance du Démon Majeur Belfegoth. Pour remédier à cela, les Défenseurs de l’Innocence avait fait brûler tous les Pôle Emploi de la région - inefficaces et encourageant l’indolence - et s’occupaient désormais eux-mêmes de donner du travail à ceux qui en étaient privés. Un travail obligatoire.

- Quasiment toute la ville est à reconstruire après les deux batailles successives, répondit Marc. Ce n’est donc pas le travail qui manque pour le moment.

- Bien, conclut Eryl en se levant. Vous tous ici pensez peut-être que je vais trop loin, et que j’encourage le fanatisme. Mais je vous l’assure : l’Innocence ne peut pas combattre la Corruption si elle reste passive et bloquée dans ses idéaux de pacifisme. J’ai vu ce que ça a donné avec les Gardiens. Tant pis si je suis détestée ; j’arrêterai la corruption à tous prix. Car c’est mon rôle. C’est ce que je suis.


***


Au Manoir Brenwark, base des Gardiens de l’Innocence, l’Apôtre Silvestre Wasdens ruminait de sombres pensées. En fait, cela faisait un an maintenant qu’il ruminait de sombres pensées, depuis ce jour où Vaslot Worm avait raconté toute la vérité au sujet de Lyre Sybel, de Silas Brenwark et des secrets du Premier Apôtre Oswald. Silvestre avait toujours cru en Oswald Brenwark ; un homme droit, franc et juste. À contrario, il avait toujours vu ce serpent de Vaslot Worm comme un comploteur cupide et roublard. Au final, c’était Oswald qui leur avait caché des choses très graves et avait pris des décisions tout seul, et c’était Vaslot qui avait révélé au grand jour cette conspiration, après avoir fait mine de s’allier aux Agents de la Corruption.

Désormais, Vaslot Worm était le Premier Apôtre, le chef des Gardiens, tandis qu’Oswald était prisonnier de son propre manoir, et interdit de se mêler des affaires de l’organisation qu’il a dirigé lui-même plusieurs années durant. Un sort cruel, mais le vieil homme ne s’était pas plaint de ce traitement. Il restait la plupart du temps enfermé dans son bureau ou dans la bibliothèque, le visage émacié, défait. Il y avait de quoi ; il avait été rejeté par ses propres pairs quand ses secrets et mensonges avaient été révélés au grand jour. De très lourds secrets, qu’il avait montés avec son ami de l’époque Dan Sybel, et qui avaient eu aujourd’hui de terribles conséquences.

Brenwark avait déjà menti sur sa paternité : il n’était pas le vrai père de Silas, ce dernier étant le fils d’un précédent Marquis, Funerol, un ancien compagnon d’Oswald. On aurait pu excuser ce mensonge en songeant au bien-être de Silas, mais il s’est révélé que le jeune homme était un traître travaillant pour le Marquis des Ombres, et sans nul doute que sa parenté avec un ancien Marquis y était pour quelque chose. Mais ça, c’était loin d’être le pire. Ça, Silvestre aurait pu lui pardonner.

Mais Oswald avait aussi menti sur l’identité du Marquis des Ombres de l’époque. Lui et Sybel savaient parfaitement que leur ancien ami Funerol avait péri, et que c’était Marine Sybel, la femme de Dan, qui avait pris sa place en abritant un morceau d’âme d’Horrorscor. Dans l’espoir de pouvoir sauver sa femme et son enfant à naître, Dan n’avait rien dit aux Gardiens. Au final, l’enfant qui était né, Lyre, était donc un Enfant de la Corruption, ces humains engendrés par quelqu’un ayant un morceau d’Horrorscor en lui, et qui de fait possédaient donc à la naissance une partie de son ADN, et une mutation de ses pouvoirs. C’était la raison pour laquelle Lyre Sybel pouvait tuer d’un simple toucher ou encore contrôler les cadavres comme des marionnettes.

Si Oswald et Dan Sybel avaient été honnêtes, s’ils avaient fait passer les Gardiens avant leurs sentiments personnels, Silas n’aurait peut-être pas basculé du coté de la Corruption, Lyre n’existerait pas, et Horrorscor aurait été amputé d’un tiers de son âme à la mort de Marine Sybel. Mais à la place, désormais, Lyre et Silas mettaient leurs incroyables pouvoirs à disposition du Marquis, dont on ignorait encore l’identité. Selon la version officielle, Dan Sybel serait parvenu à vaincre le Marquis ( donc sa propre femme ) avant de trouver la mort. Qui se cachait donc sous le masque du Marquis actuellement ? Personne ne savait trop le dire, même Vaslot.

Le fait est que depuis l’éviction d’Oswald, les Gardiens de l’Innocence avaient beaucoup changé. L’attaque de Lyre contre leur QG, la chute des Piliers de l’Innocence et le commencement de la Guerre Mondiale : tout cela avait considérablement réduit les effectifs et surtout la motivation des Gardiens. Vaslot avait tout recommencé à zéro, en recrutant de nouveaux membres et en modifiant leur façon de fonctionner. Assassinat, déstabilisation, trafic en tout genre… voilà désormais les missions des Gardiens, pour venir à bout des Agents de la Corruption. Ils employaient désormais les mêmes méthodes que leurs ennemis. Les Gardiens de l’Innocence n’avaient plus rien d’innocents !

Silvestre regrettait d’avoir été si prompt à accuser Wasdens et à se ranger du coté de Worm. Il commençait même à se demander si tout cela n’avait pas été orchestré par Worm depuis le début, et qu’il était réellement un fidèle du Marquis, cherchant à corrompre les Gardiens pour en faire devenir des Agents. Ce qu’il avait dit ce jour là était vrai : Cosmunia l’avait certifié grâce à son talent spécial Vérité. Mais il n’en restait pas moins que Silvestre ne faisait pas confiance à Worm. Il n’avait jamais nié être en relation avec le Marquis. Il avait aidé Lyre Sybel à s’introduire dans le manoir, ce qui avait eu pour conséquence plusieurs Gardiens morts. Silvestre ignorait ce que pensait cette homme, et ça le rendait fou.

C’était pourquoi, aujourd’hui, il avait décidé que c’en était assez. Il allait démissionner de son poste d’Apôtre, et même carrément quitter les Gardiens. L’organisation n’avait plus rien de ce qui avait fait tout son charme quand Silvestre l’avait intégrée. Quitte à combattre Horrorscor, il préférait le faire aux cotés d’Eryl, la Pierre des Larmes, et d’Erend Igeus, un ancien confrère Dignitaire dont il louait la probité et la force. Silvestre allait rejoindre la Confédération Libre. Il retrouverait ainsi son ancienne apprentie Solaris, qui se battait actuellement pour la X-Squad.

Mais Silvestre ne voulait pas y aller seul. Le trajet jusqu’à Hoenn serait long et périlleux, surtout qu’en tant qu’ancien Dignitaire, il était assez connu. Il avait donc proposé à Dame Cosmunia, une autre Apôtre qui avait la particularité d’être un Pokemon, de l’accompagner. Comme elle était la seule qui n’avait pas voté pour Worm lors du renversement d’Oswald, et comme elle avait été assez proche d’Eryl, il avait pensé qu’elle allait sauter sur l’occasion. Mais, à sa grande surprise et déception, elle lui avait opposé un refus.

- J’ai toujours été une Gardienne et une Apôtre, jeune Silvestre, lui avait-elle répondu d’un ton las. Je ne peux pas causer encore un peu plus leur division. Je n’ai pas voté pour Vaslot, effectivement, mais il a été élu légitimement, et mon devoir d’Apôtre est de lui obéir.

Cosmunia étant la noblesse incarnée, Silvestre n’avait pas insisté. Tout bien réfléchi, ça le rassurait même un peu qu’elle reste fidèle au poste ici, comme elle l’avait toujours été depuis des centaines d’années, à conseiller les chefs des Gardiens successifs. Si Worm ne faisait ne serait-ce que faire mine d’affaiblir les Gardiens de l’Innocence, il allait le sentir passer. Cosmunia était un Pokemon redoutable.

Silvestre n’avait pas demandé à Izizi. En tant qu’ancien assassin, son collègue Apôtre adepte des théories du complot ne pouvait qu’approuver la direction dans laquelle Worm avait lancé les Gardiens. En revanche, Silvestre comptait bien aller tenter sa chance avec la comtesse Divalina, sa dernière collègue Apôtre d’origine. Ils étaient devenus Apôtres plus ou moins en même temps, il y a huit ans. Enfin, pas de la même façon bien sûr. Silvestre l’était devenu après trois ans de bons et loyaux service rendus aux Gardiens grâce à sa position de Dignitaire. Divalina, elle, l’était devenue d’un coup d’un seul, à l’âge de dix-sept ans, après avoir succédé à sa tante.

La famille Divalina, de Sinnoh, descendait d’une longue lignée de nobles, et possédait un patrimoine hallucinant. Silvestre, en tant que Dignitaire et homme d’affaire, n’avait jamais manqué d’argent, mais ce qu’il possédait n’était rien comparé à la fortune des Divalina. Il y a près de deux cent ans, un ancêtre de l’actuelle Divalina avait rejoint les Gardiens de l’Innocence et leur avait offert une importante somme d’argent. Du fait de ce don, le titre d’Apôtre se transférait entre chaque nouvelle comtesse. En gros, on pouvait dire qu’ils avaient acheté la place. Mais ça n’avait jamais dérangé personne ; Silvestre encore moins. Les Divalina ont toujours été de grands partisans d’Erubin, et aussi, ils avaient une petite particularité familiale qui était bien utile en combat…

Silvestre chercha longtemps la jeune comtesse dans le manoir. Elle avait l’habitude de se balader partout et n’importe où, toujours plongée dans ses pensées impénétrables. Il la trouva assise sur le rebord d’une des véranda du premier étage, à contempler les nuages et à essayer d’y voir des formes. Divalina avait toujours été un peu bizarre, à tel point que des gens qui ne la connaissaient pas pouvaient de prime abord douter de sa santé mentale. Son look excentrique n’y était pas non plus pour rien. Avec son look de lolita et son gros ruban noir, elle s’était teinte ses mèches de cheveux blancs des différentes couleurs de l’arc en ciel, ce qui rendait sa chevelure carrément surnaturelle. Son regard aussi n’était pas anodin ; elle avait de grands yeux mauves qui vous fixaient sans ciller.

- Comtesse, j’aimerai vous parler… commença Silvestre.

Divalina ne dévia pas son regard du ciel, comme si elle ne l’avait pas entendu. C’était chose courante avec elle ; il fallait parfois répéter souvent, et plus fort.

- Comtesse ?

- Dis, Silvestre… les humains sont-ils incomplets de base, ou est-ce qu’ils le deviennent ?

Silvestre demeura perplexe face à cette question. Ça aussi, c’était une chose courante chez Divalina ; on avait parfois du mal à la comprendre.

- Je ne saisi pas bien, avoua-t-il.

- Ou peut-être que tu es complet, toi ? Poursuivit la comtesse. Peut-être que je l’étais autrefois. Mais je ne me souviens plus de ce que ça fait. Si j’ai oublié, est-ce que c’était donc si important ?

Silvestre commença à cerner où elle voulait en venir. Il était vrai que Divalina avait des raisons de se qualifier « d’incomplète ». La famille Divalina avait toujours possédé un étrange pouvoir ; peut-être d’origine Pokemon, peut-être qui provenait d’autre chose, qui savait ? En tout cas, ils se transmettaient le don, de génération en génération, d’invoquer un double d’eux-mêmes. Ce n’était pas une attaque Clonage comme chez les Pokemon ; ce double ressemblait à une ombre vivante, et possédait une sauvagerie sans pareille.

Plus encore ; il semblait posséder sa propre conscience, indépendante de celle de son maître. Les Divalina appelaient ces doubles d’ombre les Doppelganger. Ils étaient devenus indissociables de leur corps d’origine, comme si deux consciences se trouvaient dans un seul et même corps, et cohabitaient en parfaite harmonie. Celui de la comtesse lui avait hélas été arraché il y a quelque années. Elle ne pouvait plus l’utiliser, ni lui parler ou le ressentir. Pour un membre de cette famille, c’était comme si on lui avait coupé un bras. D’ordinaire, Divalina supportait très bien cette perte, mais certains jours, parfois, comme aujourd’hui, elle était d’humeur nostalgique.

- Je crois que tous les chemins sont destinés à se recroiser, fit prudemment Silvestre. Et qu’un individu n’est complet que s’il le décide lui-même.

Divalina le réagit pas à cette réponse évasive, aussi Silvestre lui fit savoir l’objet de sa visite.

- Comtesse, rien ne va plus ici. J’ignore ce que Worm a en tête, mais je doute sincèrement que ça nous aide à triompher des Agents. La Confédération grandi de jours en jours, et a déjà remporté d’importantes batailles contre le Grand Empire. Nous ne pourrons pas vaincre Horrorscor sans passer d’abord par Venamia. Et Eryl est, je le crois, notre meilleure arme, celle derrière qui tous les Gardiens devraient se regrouper. Qu’en pensez-vous ? Voulez vous rallier la Confédération Libre avec moi ?

Après une minute de non-réaction, Divalina consenti enfin à croiser son regard.

- Tu veux prendre la fuite alors ?

- Non, répliqua Silvestre, vexé qu’elle le voit de cette façon. Je compte continuer le combat au contraire, mais d’une façon que j’estime plus juste, et en cohérence avec mes valeurs. Vous ne pouvez pas sérieusement croire que Worm œuvre pour le bien de l’Innocence ?! Ou alors, il est totalement hors jeu.

Divalina ricana.

- Vaslot ? Pour qui il œuvre, ça j’en sais rien. Mais je sais une chose : il empeste.

- Il empeste… quoi ? S’étonna Silvestre.

- La corruption.

Silvestre ne chercha pas à comprendre comment elle pouvait savoir cela. Divalina avait souvent des certitudes que pas grand monde ne pouvait comprendre.

- Vous suggérez donc qu’il soit un ennemi ? Un vrai sbire d’Horrorscor ?

- Ça, ou pire. Il pourrait être lui-même le Marquis. Mais il pourrait aussi utiliser la corruption pour combattre la corruption. Je ne peux pas juger sa sincérité. C’est un homme très mystérieux et indiscernable. C’est pourquoi j’aime le servir. Il est bien plus imprévisible, et donc bien plus intéressant que ne l’était le chef Oswald.

- Ce n’est pas un jeu, comtesse, la réprimanda Silvestre. Jamais depuis des siècles Horrorscor n’a été si puissant et si prêt de retrouver son corps originel. Nous devons agir.

- Mais nous ferions quoi, Silvestre ? Même si nous rejoignons Igeus et sa Confédération, à quoi va-t-on bien pouvoir lui servir ? Nous n’avons aucun pouvoir, et notre ancienne renommée ne nous servira à rien contre Venamia.

Silvestre ne répondit pas à ça, car il n’avait aucune réponse justement. C’était vrai. Ils seraient quelque peu inutile à Erend. Sinnoh était déjà l’allié de la Confédération, donc que Divalina le soutienne ne changerait rien. Quant à Silvestre, il avait perdu son titre de Dignitaire et était recherché partout dans Johkan. Et comme l’avait dit Divalina, aucun d’entre eux ne serait en mesure de lui apporter un quelconque avantage sur le champ de bataille.

- Malgré tout, je veux être à leur côté, insista Silvestre. On les aidera comme on peu, mais je suis sûr que c’est là qu’est notre place.

Divalina soupira.

- Si seulement j’avais mon Doppelganger… là ce serait différent. Nous pourrions nous rendre sans problème à Hoenn, et je pourrais être un gros plus pour la Confédération.

- C’est donc de cela qu’il s’agit ?

- J’ai attendu toutes ces années ici, dans ce manoir, l’occasion de recroiser un jour son chemin et de la refaire mienne. Si je dois le quitter, ce sera donc pour retrouver mon Doppelganger. Tu m’y aides, Silvestre, et je pars dans la Confédération avec toi.

Silvestre grimaça. C’était bien plus risqué et dangereux de recherche le Doppelganger de Divalina que d’essayer de se rendre à Hoenn. Car le Doppelganger en question, il avait quitté sa maîtresse de son plein gré. Désormais, il servait un nouveau maître, et s’était même donné un nom : l’Agent de la Corruption Jivalumi.