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» Auteur : fan-à-tics - Voir le profil
» Créé le 12/08/2011 à 23:52
» Dernière mise à jour le 12/08/2011 à 23:52

» Mots-clés :   Présence de personnages de l'animé   Présence de poké-humains   Présence de shippings

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Epilogue- La Fin de son Histoire, le Début de la Sienne...

DESTINS LIES - DENOUEMENT





FILM - Epilogue – La Fin de son Histoire, le Début de la Sienne.





« Il y a une raison pour laquelle je dis que je serais mieux seule. Ce n'est pas parce que je pensais être mieux seule, c'est parce que je pensais que si j'aimais quelqu'un, et que ça foirait, je ne le supporterais pas. C'est plus simple d'être seule. Car si vous apprenez que vous avez besoin d'amour, mais que vous n'en avez plus ensuite... ? Si vous aimiez, et que vous en aviez besoin ? Si vous construisiez votre futur autour, et qu'ensuite ça foirait ? Vous pourriez survivre à tant de peine ? Perdre l'amour c'est comme une hémorragie. C'est comme mourir. La seule différence... C'est que la mort est une fin. Mais ça ? C'est pour toujours... »




Sous le ciel bleu cyan de ses songes, Samantha, reposait pour le moment à l'abri. Elle n'avait pas peur, dans le doux refuge de ses illusions, où les nuages se laissaient porter par le vent vers un horizon aux limites si lointaines et floues, qu'il leur paraissait infini. Rien ne pouvait l'atteindre, ici, si ce n'est la bise d'Azuria, fraîche et encore embrumée par les senteurs neuves de la rosée.

Là, au milieu des herbes hautes, elle se sentait sereine et en paix. Elle ferma les paupières, une seconde, et inspira profondément, l'air empli ses poumons et inonda son être de bonheur. La simple mélodie des herbes ondulant sous le zéphyr, la chaleur du zénith caressant sa peau, tout cela était parfait. Elle entendait même les battements de son cœur, dangereusement ralentir dans sa poitrine, sans s'en soucier.

Une pulsation, après l'autre, plus faible que la précédente.

Elle se sentait dériver lentement dans la tendre quiétude du sommeil, sans frayeur. Elle espérait, au moins, que si son songe devenait éternel, il resterait aussi paisible et simple.

Un interlude, plus aucun martèlement.

Samantha sourit en s'endormant.

Puis le choc, vif, lui vrillant les tympans.

-Yosh, qu'est-ce qui te prends de faire la morte comme ça ?

Samantha ouvrit les yeux dans un sursaut, et croisa le regard d'Eléanore, interrogateur au dessus d'elle. C'était ses yeux, deux émeraudes pleines et profondes, à la lueur inexplicablement envoûtante. Mais ses traits, plus fins, s'affublaient de quelques rides toutes récentes. Sa bouille d'enfant, ronde, s'était amincie, sans pour autant se départir, de ce petit air mélangeant l'innocence de l'ange et l'espièglerie des démons.

-Tu vas me fixer encore longtemps comme ça ? Ricana-t-elle.

Elle lui sourit, avec la même intensité évanescente qu'autrefois, et d'un geste fugace, elle remit en place, une mèche rebelle qui échappait au nœud de son chignon, particulièrement lâche et décontracté. Une chevelure, encore une fois, négligée. Elle était impossible, décidément, elle n'arriverait jamais à aimer les brosses.

Samantha finit par se relever, d'un geste, naturel, et après avoir épousseté la poussière de ses vêtements, comme d'habitude constitué d'un haut sage et d'une jupe, plus longue que dans ses jeunes années, elle se tourna vers son amie. Celle-ci lui offrit à nouveau une œillade moqueuse.

-La vieille Sam que j'ai rencontrée, aurait crisé ! Tu te rends compte, tu étais étalée dans la poussière et les insectes !

Sam rigola franchement, et plaça la main sur ses hanches, avec dédain. Les mots coulèrent, sans sens pour elle, mais tellement évidents pour l'automate qu'était son corps.

-La vieille Eléa que j'ai rencontrée, ne m'aurait jamais fait attendre aussi longtemps ! Elle aurait été la première sur les lieux !

Eléa haussa des épaules, avec mauvaise foi, avant de marmonner :

-Disons, que j'ai appris à marcher au lieu de courir.

Samantha sentit son être submergé par la chaleur de la fierté et du soulagement ; et quand Eléa, fit volte-face, les bras croisés derrière la tête, pour siffloter innocemment :

-Et puis, dans mon état, il n'est pas recommandé de courir !

Elle éclata de rire, dans un déluge de bonheur, loin de la peur d'autrefois à l'entente de cette phrase.

-Encore ! Mais décidément, vous ne connaissez pas la contraception tous les deux !

Eléa leva le nez.

-J'utiliserai cette chose abjecte qu'est la pilule, quand les mecs en auront une aussi ! Je refuse d'abîmer encore mon organisme !
-Et Daniel est trop étourdi pour se protéger… ?
-Daniel veut une petite fille qui me ressemble…

Elle soupira, et eut un rictus mutin.

-Et moi je veux que des petits garçons !
-Pauvre Ed !
-Oh, Ed sait très bien que je l'adore, et que Danny l'adore.

Elles rigolèrent de bon cœur.

-Et si tu venais nous rejoindre hein ? Au lieu de faire cavalier seul !

Les sons et les bruits entourèrent Sam, comme un tumulte harmonieux. Des cris d'enfants, des rires, des discussions animées, de la musique, et le bruit des couverts s'entrechoquant sur les assiettes pleines ou vides. Elle remarqua pour la première fois, qu'en contrebas de la colline où elle somnolait, se dressait, la ferme Kazamatsuri. Un peu plus grande que dans les images qu'elle en gardait, posté sur cette même pente, aux sortir du mont Sélénite, dans son enfance.

D'immenses tables s'alignaient, dans le préau, tandis que le ciel azuré se reflétait dans le lac, habituellement de couleur onyx, qui s'attenait à la demeure. Elle voyait des points instables aller et venir, de part et d'autres du terrain, plongeant dans l'eau, dans un concert de cri, d'écumes et de perles scintillantes, tandis que d'autres s'affairaient dans les champs, Pokémons avec eux, plus occupé à se battre qu'à labourer, devant le reste de la troupe, mangeant allègrement sur les nappes, plus vraiment blanches.

Eléanore, avec un sourire bienveillant, contempla une seconde, cette ambiance frémissante, grouillante, à ses pieds.

-Chaque fois que je viens ici les Dimanches…J'ai le même coup au cœur. Pas toi Sam ?

Sam hocha du chef avec émotion.

Jamais elle n'avait espéré, ne serait-ce que contempler un tel spectacle, un jour…Et pourtant, elles le vivaient, y participaient.

-Ca valait le coup de s'accrocher.

Eléa sourit. Et un mugissement secoua l'atmosphère, alors qu'un éclair noir fondait sur elles. Ash atterrit aux pieds de sa maîtresse avec un orgueil, ses naseaux émirent un nuage de fumée et il bomba le torse. Il tenait dans sa gueule, par le t-shirt, un gamin penaud, aux grands yeux bleus et aux cheveux noirs.

Eléa fronça les sourcils, et renifla méchamment.

-Qu'est-ce que t'as encore fait toi !

Le petit, qui devait tout juste avoir deux ans, fit la moue, avant de lever les bras vers Eléa, en demandant une étreinte. Mais Eléa ne se fit pas prendre, et fronçant les sourcils, suspicieusement, elle caressa le museau d'Ash, avant de rougir de fureur.

Le gamin se recroquevilla sur lui-même.

-Dis-moi, combien de fois, Elliot-Abruti, je t'ai dit de ne pas aller jouer en forêt, tout seul ?

L'enfant fit mine de réfléchir, puis il tendit les deux mains, ouvertes, montrant en évidence, ses dix doigts.
Mais Ash laissa échapper un grondement, tel un chien de garde, et le petit, retira une chaussure, et sa chaussette, pour ajouter, 5 orteils de plus au tout.

Sam ne put s'empêcher de ricaner, ce qui déstabilisa Eléa.

-Bon, Ash, emmène ce petit fugueur auprès de son pè…Non de sa mamie. Elle lui trouvera une punition appropriée. Finit-elle par minauder. Ash hocha du chef, et s'envola dans un puissant battement d'ailes, fondant sur la ferme familiale, dans un « OUIIIII ! » ravi de son passager.
-Je te trouve mal placée pour le traiter de fugueur !
-Roh, c'est bon.

Eléa détourna les yeux, honteuse d'interdire à son propre fils, ce qu'elle-même avait fait, trop régulièrement dans ses jeunes années. Puis, dans un haussement d'épaule, elle balaya ses doutes, et se retourna vers son amie.

-La course jusqu'en bas ? Proposa-t-elle avec un air particulièrement gamin.
-Je croyais que tu ne devais surtout pas courir dans ton état ! Contesta Sam avec une moue sarcastique.
-Tu sais bien que je ne fais jamais ce qu'on me dit de faire !
-Oh je sais, Lyn et Emilyon s'en plaignent déjà assez ! D'ailleurs, je pense que l'absence d'Emilyon est en grande partie lié, à cette nouvelle grossesse chez toi !

Eléanore s'offusqua à la mention de son petit frère.

-N'importe quoi, il est en concert à Sinnoh !
-Il est en tournée quelque part dans le monde à chaque fois que tu es enceinte. Tout simplement parce qu'il dit que tu es insupportable à chaque fois que tu es enceinte !
-Le saligaud si je lui déplais tant que ça, il a qu'à vivre chez quelqu'un d'autre ! Chez Lalie par exemple !

Et sans autre forme de procès, Eléanore dévala en courant la colline, comme si son cadet, s'y tenait au pied, prêt à recevoir sa raclée. Samantha la regarda, prendre de l'avance, puis, dans un rire, elle lui envoya :

-Sale tricheuse !

Avant de la suivre, la maison des Kazamatsuri, s'agrandit, et finalement la surplomba, noyée par une foule, comme si tout Azuria y avait été invité. Les rires paraissaient y monter jusqu'aux nuages. Les enfants courraient de partout, comme fous, hilares. Ils se roulaient dans la boue, et se jetaient les uns sur les autres, avant de s'enfuir sous la menace des Pokémons, trop protecteurs. Les prénoms fusaient, sans véritable propriétaire identifiable dans la masse :

« Bérengère, June, Lilian, Roy, Kain, Faith, Juliette, Julian, Nils, Peony, Noah, Nolwenn, Hélène, Cécile, Victoria… »

Sam cherchait la silhouette d'Eléanore, dans la masse, quand on l'interpella.

-Sam !

Elle se retourna, pour faire face, à sa mère Joëlle, aux cheveux grisonnants et au métabolisme allant en s'affaissant, bien qu'elle semblât encore en forme. Quel âge pouvait-elle avoir, à présent ? Sam réalisait, qu'elle savait à peine, quel âge, elle avait elle-même dans ce songe…

Sa mère adoptive lui sourit, sans voir son trouble, elle tenait par la main, deux petits enfants, l'une, qui devait avoir dans les six ans, et un autre, beaucoup plus petit, plutôt dans les deux ans, grand maximum. Tous deux bruns aux yeux bleus argentés et à la peau pâle. Bien que Sam, reconnut bien plus ses cheveux soyeux chez le petit garçon, que chez la fillette, qui avait coiffée sa chevelure, plutôt hirsute, en deux couettes hautes. Douce ironie.

-Mirana, aimerait nager, mais son père n'aime pas trop cela. Tu peux la raisonner ?

Mirana, un prénom qui signifiait, sourire. Samantha ne put s'empêcher, de se demander, si cette petite renfrognée qui affichait une moue déçue, le portait bien…

-Papa est un trouillard avec l'eau. Maugréa la gamine.
-Ne parle pas de ton père comme ça ! La reprit Joëlle.

Sam reconnut bien là, la femme qui l'avait élevée, intransigeante sur certains points, dont l'insolence, à tous les niveaux.

-Il y a plein d'autres jeux, plutôt que de se baigner, pourquoi tu ne veux pas faire autre chose ?
-Parce qu'il fait chaud ! S'indigna la petite.

Sam ne put que concéder, après un moment de réflexion, elle finit par envoyer :

-Et bien, pourquoi ne demandes-tu pas à Papa de te prêter son Staross pour te baigner ?
-Staross est déjà avec les autres, il a dit que Staross ne pouvait pas surveiller tout le monde.
-Et Tonton ne t'a pas prêté son léviathor ?

Cette fois la gamine eut un sourire étrange, particulièrement fier.

-Tonton est occupé avec mon autre Tonton.

Joëlle soupira, et se massa les tempes, et Sam se surprit à pouffer, amusée.

-Et bien, prend donc, mon léviathor à moi, et va jouer.

Elle lui tendit une pokéball, et la petite partit en courant, avec un immense sourire, comme si on ne lui avait jamais rien refusé. Finalement, elle portait bien son prénom.

-Tu veux que je m'occupe de Noël ? S'enquît ensuite Sam, à l'intention de sa mère.
-Oh non, surtout pas ! Je garde mon petit-fils ! Hein Noël, tu veux rester avec moi ?

Noël envoya une œillade blasée à sa grand-mère, tétine dans la bouche. Un air, empli de flegme, ou plutôt, de flemme.

-Et puis, Kain adore ce gosse, il est un atout de poids !

Sam se boucha les oreilles, avec un frisson.

-Oh non pitié, parle-moi de tout, sauf de ton flirt avec ce vieux !
-D'accord, je vais donc te parler de ta culotte de cheval qui commence à apparaître, et…
-Ton histoire avance avec Kain ?

Les deux femmes ricanèrent, et le bambin Noël, crut bon d'ajouter, en enlevant sa tétine, exceptionnellement :

-La maman d'Elliot elle en a plus que ma maman à moi. Maman c'est la plus belle.

Il considéra ensuite sa mamie, avec un air professoral, et ajouta :

-C'est papa qui qui l'a dit.

Sam fondit, tout comme l'infirmière Joëlle, mais cela ne dura qu'un instant, car, une grande gigue, qui devait au moins avoir bien entamé l'âge bête de l'adolescence accourut vers eux. Grand, et fin, les bras en spagetthi, en sommes, n'ayant pas du tout la carrure d'un athlète, il avait de grands yeux bleus en amande, sombre, presque noirs, et ses longs cils pouvaient le faire aisément passer pour une fille. Si ce n'est que, dans ce cas, la fille aurait été plate comme une limande.

-Heu, je peux vous emprunter Noël ? Tonton veut faire une partie de Go, et moi, ça m'emmerde, donc…
-Tu veux lui refiler son fils histoire qu'il te fiche la paix. Devina Joëlle.

Le gamin ricana, et se frotta le crâne, pour camoufler sa gêne, ses cheveux noirs, méchés de blonds, mal en point par toutes ses décolorations, eurent un son affreux, crépitant. Le gamin avait besoin de bons soins et shampoings, mais, Sam l'avait vécu avec Eléa, à cet âge, impossible de faire entendre raison à un ado qui ne voulait pas se laver.

-Hikaru, tu es un incorrigible lâche ! Dit-donc à Akira que ça te stresse de jouer contre lui !
-Mais il dit que c'est pour m'entraîner !
-Tu n'avais qu'à pas devenir professionnel si jeune…

Hikaru persiffla mais partit tout de même avec un Noël –ravi- sous le bras, avant de disparaître dans la foule. L'infirmière secoua la tête avec exaspération.

-Il est tellement lunatique ce gamin, ses deux sœurs sont bien plus sages, tu ne trouves pas… ?

Sam haussa des épaules.

-Chacun a son propre caractère, personnellement, je le préfère dans la fratrie, il n'est pas aussi influençable qu'Akari, et pas aussi énergique et irritable que Sai.
-Je ne trouve pas.
-Vous vous rendez compte, qu'ils ont appelé leurs gosses comme les personnages de la série Hikaru no Go ? Franchement, c'est à croire qu'ils veulent les pousser à l'inceste en plus.

Sam sursauta, à la réplique de Gabriel. Les mains dans les poches, la même morgue assurée qu'enfant, il avait néanmoins particulièrement changé, mais pas dans le bon sens, il avait un visage particulièrement féminin, fin en ovale parfait, encadré par des cheveux mi-longs et soyeux, qui n'aidaient en rien les étrangers perdus face à cet androgyne. Seule son expression bourrue, laissait paraître un semblant de masculinité.

-Et toi, tu comptes appeler tes enfants comment, dit-moi ? Parce qu'il serait temps quand même, tu es avec…

Gabriel grimaça à la remarque de l'infirmière Joëlle, et renvoya, comme pour changer de sujet :

-Ce n'est pas Kain, que je vois là-bas ? Oh, mais que fait-il ? Je crois qu'il donne son porridge aux Pokémons !
-KAIN C'EST MAUVAIS POUR EUX JE TE L'AI DIT MILLES FOIS ! Tu es PEUT-ÊTRE éleveur, mais moi je suis INFIRMIERE !

L'infirmière tomba dans le panneau, et fendit la foule sans se préoccuper du reste, ni même vérifier les allégations du manipulateur. Gabriel eut un rictus victorieux, et Sam soupira.

-C'est trop facile avec eux. Commenta Gabby.
-Tu te rends compte, qu'Hikaru ne veut plus jouer au go avec Akira, depuis que tu lui as montré cet anime ?

Gabriel sourit de toutes ses dents.

-Ce n'est pas ma faute, si ses sentiments lui ont fait peur. Ou s'il est tellement superstitieux et parano que…

Sam le fit taire d'un geste de la main.

-Tu as raison, ce n'est pas de notre faute, si les gens se font des idées et sont paranos ou superstitieux.

Elle marqua une pause, et lança, faussement innocente :

-C'est Fang que je vois près d'Elza là-bas ?

Après avoir blêmi, Gabriel disparut dans la foule. Trop facile. Sam reprit donc ses recherches, à travers la ferme Kazamatsuri, et plus elle avançait, plus elle comprenait pourquoi, Lucas, lors de leur passage ici, lui avait confié, qu'il la considérait comme « son foyer ». Il dégageait de cette demeure, un sentiment de sécurité, et pas seulement, parce qu'elle était en cet instant, bondée de monde, et de familles.

Elle passa devant le lac, où les gamins jouaient à se couler les uns les autres, à jouer les enfants sauvages grâce à une corde, pendant à une branche de l'arbre centenaire, ou encore à faire des matchs aquatiques Pokémons. Sam reconnut Mirana, quand celle-ci l'interpella à l'aide de grands cris, sur le dos d'un léviathor impressionnant, cela en voyant son cousin Hikaru s'échapper du premier étage de la maison –par la fenêtre- discrètement, elle se rua vers lui. Ce qui ne manqua pas d'effrayer, le dit Hikaru, qui glissa et finit dans le lac. Akira extirpa sa tête de la dite fenêtre, tenant Noël dans ses bras, et afficha un immense sourire victorieux.

Samantha pressa donc le pas, en laissant les rires amusés derrière elle. Elle finit par arriver, sur le terrain, où les Kazamatsuri avaient fait pousser exclusivement des arbres fruitiers, et noigrumiers… Plusieurs petits, se régalaient piochant dans les récoltes de la ferme, sur les épaules de leurs papas diverses. Elle remarqua aussi, un peu plus en retrait, d'autres enfants, occupés près des baies aux gouts chocolatés, ils devaient au moins être trois, et se parlaient entre eux, en s'appelant l'un l'autre par des marques de chocolats.

Finalement, Sam déboucha, sur ce qui paraissait être un terrain improvisé, où se battaient, un homme d'âge mûr, aux cheveux orchidée, contre Sacha, Ketchum. Ils devaient tous deux avoir dans les 40 ans à présent. Pourtant, sur le dos de chacun, trônait un porte-bébé, occupé.

-Corboss ball'ombre !
-Pikachu attaque Elek…

Les deux bébés se mirent alors à pleurer, réveillés par les cris de leurs pères respectifs, qui se détournèrent aussitôt de leurs matchs pour les calmer. Sacha tenait un petit rouquin, braillant à s'en déchirer les cordes vocales, tout comme Paul.

-Fait taire ton bébé ! Beugla d'ailleurs celui-ci.
-J'y peux rien si elle est fatiguée ! Et tu n'es pas mieux toi ! Tu pourrais la refiler à sa mère pendant un match !
-Chut, chut Joan ! J'ai besoin d'un handicape contre toi, sinon je t'écrase, et de toute façon je peux pas si je la lâche elle va causer une catastrophe !
-Je peux pas non plus Ondine va me tuer j'ai promis de m'occuper de la petite !
-File-la à Kaleto !
-Il surveille les gosses près du lac !

Tout ça devant les Pokémons, atterrés. Sam ne put retenir un rire, qui fut repris de concert, par deux silhouettes derrière elle. Drew et Flora. Bien que Flora, avait du mal à rire, la bouche pleine. Ils avaient bien changé, eux aussi, bien qu'ils dussent, être, un peu plus jeunes que Sacha et Paul.

-Regarde-les, vraiment…Maugréa Drew.
-Mais tu sais, il parait que, vraiment, quand Paul lâche Joan, un accident se produit, dans les dix minutes.

Sam arqua un sourcil, peu crédule.

-C'est aussi probable qu'Aurore gay. Marmonna le coordinateur.
-Bah, justement, elle est avec une fille depuis que Kenny est avec Zoé…Ou alors ils font un plan à trois, j'avoue que je ne sais plus trop. En tout cas elle est très heureuse comme ça !

Sam et Drew écarquillèrent des yeux, et Flora ricana, avant de faire son signe, tel un caméraman, tout en commentant :

-Ici, Actions et découvertes, présentées par votre inestimable, votre irremplaçable…

Elle ne put finit, car dans la foule, un cri engendra :

-CHRISTELLE !

Qui fut rapidement suivi par un :

-PUTAIN CHRIS TU M'AS TUE LES TYMPANS !
-TA GUEULE ARMAND !

Ce qui arracha un rire au groupe.

-Le Radar de Christelle pour les médias est aussi effrayant que le gaydar des filles ! D'ailleurs, tu ne leur as pas confié Andréa et Camélia ? S'inquiéta soudainement Drew.
-Oh, non, ne t'inquiète pas, Camélia jouait tout à l'heure près de Richie et sa famille. Et Andréa jouait près du coin où sont Asbel, Max, et la troupe d'Elza.

Sam se retira, voyant bien que la conversation devenait plus personnelle. Elle décida, de chercher plus près de la maison, vu que les terres des Kazamatsuri étaient trop immenses pour être fouillée par elle seule. Elle se rapprocha donc de la bâtisse, aux allures, toujours aussi extraordinaire, comme faite de bric à brac, et conçue par un architecte myope. Sur le toit, elle put entrapercevoir Shagi, beaucoup plus musclé que dans le passé, avec la jeune sœur de Peter. Plus si jeune. Ensemble, ils discutaient passionnément avec un autre groupe, mais ils étaient si hauts, que Sam ne parvint pas à les identifier, à part peut-être, éventuellement, Makanie. Soudain, Arisa pointa du doigt l'horizon, et tous suivirent la direction indiquée, avant d'exploser de rire. Sam ne parvint pas à voir ce qui les rendaient hilares, car un ballon explosa une vitre de la maison, et plusieurs adultes sortirent pour faire la leçon aux voyous.

Néanmoins à l'étage en dessous, elle entraperçut Sunny, et son frère Blake, qui taquinaient une autre silhouette, encore dans l'ombre du couloir extérieur, bardé de colonne. Apparemment, Blake avait repris sa manie de jouer avec un Yo-yo et taquinait le nouveau avec, jusqu'à ce qu'une des sœurs de Danny, une grande rousse, nommée Alice, il lui semblait, ne l'interpelle.

Elle s'aventura dans le préau, où trônaient les tables, et encore quelques occupants, bien repus, mais restés assis par gourmandise. Elle y trouva Eléa. Assise près de Danny, qui ressemblait décidément à son père, trait pour trait, de plus en plus en grandissant. Celle-ci se tenait sur les genoux, du dit rêveur, et discutait avec entrain, avec la grand-mère, Lyn, toujours enrobée, qui avait troquée ses cheveux blonds bouclés, pour une tignasse poivre-sel, avec quelques rides en cadeau.

-La maison est vraiment sympa, les enfants passent des heures à jouer à cache-cache.
-Oui, comme ici, C'est George l'architecte de cette maison, et il s'en est donné à cœur joie, tout est conçu pour les enfants.
-On dirait même que c'est conçu par un enfant !
-Ce n'est pas faux.

Les deux femmes rigolèrent.

-Oh, tu as vu l'interview de Daniel à la télé ? C'était incroyable comme il a rembarré les journalistes !
-J'ai vu, mais pas la même chose, j'ai juste vu mon fils rougir et tourner de l'œil moi !
-Justement, l'interview a pris fin comme ça ! Qu'est-ce qu'ils me saoulent ses journalistes, blabla et la crise, blabla et votre stratégie pour l'entreprise blablabla beurk.
-C'est sûr, que tu le leur rappelle tous les jours à quel point ils t'énervent. La pauvre blondasse de la 3 te déteste encore, dès qu'elle peut dire du mal sur les Sarl en direct…
-Oh, et bien, elle n'avait qu'à pas me dire si je craignais d'être à mon poste uniquement à cause de ma famille, dans ce cas, je ne lui aurais pas demandé, si elle ne craignait pas d'avoir son poste juste à cause de ses nichons.

Daniel rit timidement en serrant Eléa contre lui, et Lyn eut une œillade attendrie.

-Oh, d'ailleurs, en parlant d'insolence…Maintenant que j'y pense, vous n'avez pas revu Thani !
-Non, ça fait longtemps maintenant, presque dix ans ! Que devient-il ? Il trouve toujours un moyen pour nous éviter !

Daniel grimaça, tout comme Lyn.

-C'est un enfant difficile. Mais cette fois, il est là…Thani ! Thani vient dire bonjour !

Un gamin d'une dizaine d'années s'avança, et Sam fut frappée de sa ressemblance avec Daniel, bien que plus grand que lui, à son âge. Il arborait des cheveux sombres, sur une peau mâte, même s'il était coiffé de manière rigoureuse, et qu'une mèche entière, cachait, ce qu'elle devinait être des yeux vairons. Une main fine et frêle se tendit et esquissa un salut timide. Un Ténéfix sur le dos l'imita.

-Salut l'autre ! Ricana Eléa avec une drôle d'expression.
-Ca va ? Ajouta Daniel.

Le dénommé Thani les regarda, avec ce qui semblait être de la rancœur, puis tourna des talons.

Lyndis parut confuse.

-Oh, laisse-lui le temps Daniel. Un jour il s'y fera, tu verras.
-En même temps, c'est difficile pour lui. Mais on compte sur toi Lyn, faut bien l'élever. Ajouta Eléa avec une expression triste, tandis que Daniel baissait la tête.

Sam eut un frisson, étrange. Daniel avait-il eu un enfant, dans le dos d'Eléa, dont Lyn s'occupait ? Elle ne comprenait pas.

-Oh, ne vous en faites pas, je l'adore, il me rappelle tellement Danny. Et j'ai toujours voulu un dernier enfant, après Jimmy.
-Que tu as eu !
-Oui, enfin, après la ménopause quoi !
-C'est à croire qu'il faut vous dénoncer comme pédophile, c'est pas possible d'aimer les enfants plus que vous !
-Ah ça non ! Sauf peut-être George.
-Mais lui c'est un cas !

Elles éclatèrent de nouveau de rire, faisant taire les doutes en Sam. Lucas entra alors dans la cours, accompagné de Cristal, Gold, et Silver. Tous n'avaient que très peu changé, si ce n'est que Silver arboraient des cheveux coupés courts, et s'habillait avec des habits un peu plus colorés. Il y avait bien quelques rides, des muscles moins performants, des visages plus élancés, fins, ou plus bouffis, par quelques kilos en trop, mais cela se remarquait si peu derrière leurs frimousses souriantes.

-Je viens de voir Thani avec Ed. Ils s'entendent bien ces deux là, non ? Envoya Lucas, en s'asseyant.
-Vite, où est mon appareil ?!

Lyn arracha un appareil photo des mains de Danny et se rua à l'intérieur, où on perçut un cri indigné.

-MAIS ARRETE STALKER !

Provenant de la part de Thani, qui sortit en trombe, tout en tirant par la main, un tout petit, aux cheveux, courts, noirs, et aux yeux, bleus et verts, portrait craché d'une Eléanore fillette.

-Mais, c'est pour ton album mon chéri !

Ce qui provoqua un nouveau rougissement chez l'interpellé, qui partit se cacher derrière un Lucas, hilare, et une Cristal, boudeuse. Finalement, il parvint à échapper à sa mamie poursuiveuse, en rampant sous la table. Laissant le dénommé Ed, dépourvu de guide.

L'enfant vint donc se nicher près de sa mère, Eléanore, mit son pouce dans sa bouche, et s'installa, la tête sur ses genoux pour s'endormir aussi sec. Daniel et elle eurent un sourire ému, et lui caressèrent les cheveux.

-Toujours pas un mot ? Demanda Gold.
-Toujours rien. Les médecins disent qu'une opération pourrait lui rendre la parole mais…Commença Danny.
-Je refuse d'infliger ça à mon enfant. Acheva Eléa, bornée. –Jamais !
-De toute façon, le pourcentage de réussite est très peu élevé. Continua Danny.
-Votre médecin veut sûrement se faire du fric sur le dos d'Eléanore ! Conclut Cristal, d'un hochement de tête.
-Oh ! Sam !

Lucas la remarqua dans la foule, et lui fit signe de s'asseoir, ce qu'elle fit, avec un sourire.

-Alors, de nouveau en couple, ou célibataire ? Rit Gold.
-Et toi, vous, quand êtes vous sortis de la chambre ? Ma fille m'a dit que vous étiez très occupés ! Rétorqua Sam.

Silver s'empourpra brutalement, contrairement à Gold qui eut un rire encore plus franc.

-D'accord, d'accord, on ne parle pas de tes sautes d'humeurs avec Akira !
-Et puis, on évitait juste ta fille, depuis qu'elle a entendu dire qu'elle allait peut-être avoir un cousin…Elle est…collante…Encore plus que d'habitude. Commença Silver.
-Oh, et ça avance donc ? Vous avez déjà des prénoms ? Comment va la mère porteuse, toujours aussi folle ? S'enquit Samantha.

Gold approuva du chef, contrairement à Silver qui s'enfonça un peu plus dans son verre, mais Cristal, le sauva de la noyade, en lançant :

-Devinez d'ailleurs, qui va ouvrir un cabinet de psy près de chez nous ?

Plusieurs sourires illuminèrent les visages.

-Ca alors, leur affaire marche super bien alors ! S'étonna Eléa.
-Qui l'eut cru. Marmonna Silver avec, néanmoins, un rictus amusé, voire même fier.

Cristal hocha du chef avec vivacité.

-Oui, oui, d'ailleurs ils s'excusent de ne pas pouvoir venir, mais avec l'ouverture à Doublonville de leur cabinet…Vous comprenez… ?
-Evidemment.
-C'est pas plus mal. Manquerait plus qu'ils rapportent encore du gui.
-Ou qu'il fasse de la magie !

Il y eut un frisson commun.


-Et sinon, le stratège pokémon, comment vont les affaires ? On n'a plus souvent l'occasion de te voir ! Envoya Eléa, au bout d'un moment.
-Tous les dimanches quand même, et même plus, puisque tu travailles à Safrania la moitié de l'année ! Rétorqua Lucas.

Lui et Daniel échangèrent une œillade complice, et à la fois un peu triste par la séparation.

-Et bien écoute, les affaires marchent bien pour lui, et moi je vais sûrement ouvrir un autre cabinet médical. Répondit Cristal.
-Tu vas bientôt partir pour ton pèlerinage ?
-Oui, avec tous mes élèves, sinon, mon entreprise n'aurait pas d'intérêt, on a déjà des centres Pokémons partout dans le monde, ce dont on a besoin, c'est définitivement des médecins sur les routes.
-Et tu tiens le coup, financièrement parlant ? S'enquit Sam.
-Et bien, comme toi avec les arènes Ambulantes, il y a des jours avec, et des jours sans. L'avantage, c'est que Lucas a un revenu totalement sûr, avec son contrat avec les Ligues.
-Même si des fois c'est un peu chaud, et que les enfants ont du mal à comprendre qu'on ne peut pas tout leur offrir…
-Vous savez que si vous avez besoin d'argent…
-On sait, Eléanore ! Mais non.
-Roh, ça va je proposais !
-Et les autres à la Ligue… ?

Lucas haussa des épaules.

-Et, bien tout est comme d'habitude, Adrien a un peu peur pour son poste, parce qu'il a des problèmes, de « couples » c'est le je t'aime moi non plus, tu sais, les triangles amoureux c'est jamais bon. Y-a Aaron, aussi, qui a des problèmes avec son fils, parce que Zéphyr refuse d'aller chez sa mère pendant l'été…Et puis Marion et Peter quoi…
-Les grands s'en sortent pas mieux que les petits finalement ! Ajouta Cristal avec ironie.

Sam rigolait gentiment, quand soudain, une petite tête blonde déboula de la maison.

-Papa ! Papa ! Celesta elle veut pas faire le méchant dragon !

Lucas se tourna vers son fils, qui, malgré ses cheveux blonds comme les blés, digne de sa « tante » Marion, et les yeux bleus de sa mère, avait exactement la même bouille que son père. Il devait avoir 6 ans, une serviette nouée autour du cou, une pokéball à la ceinture et une épée en bois à la main.

-Flynn, ne force pas ta sœur à faire la méchante.
-Pourquoi tu ne lui fais pas jouer la princesse de temps en temps ? S'indigna Cristal.
-Mais c'est Eliel qui fait la princesse !

Cette fois ce fut Eléa qui manqua de s'étrangler, en avalant son café de travers, et Sam ne put retenir un rire.

-PTIT CON IL FAIT QUOI ?

Et le surnommé ptit con, déboula, dans une robe rose bonbon à volants, et une couronne en carton pâte sur la tête. Il avait l'air endormi de son père, les yeux verts de sa mère, et les cheveux sombres, auréolés de légers reflets verts, qu'il portait longs jusqu'aux épaules. Cette tenue lui seyait particulièrement, malgré son petit air noir, qui n'allait pas sans rappeler Gabriel. Il devait avoir six ans lui aussi.

-Celesta est mieux en méchant que moi. Argumenta-t-il.
-Oui mais quand même, tu pourrais pas…Eerr…

Eléa leva les yeux au ciel, et chercha ce que son fils pourrait bien faire, décidément à court d'idée.

-Tu ne préfères pas être un chevalier ? Vint au secours de sa femme, Danny.

Eliel, ouvrit la bouche…Puis la referma. Leva les yeux, en pleine réflexion, puis reprit sa mine blasée et suffisante, pour envoyer :

-Tu sais qu'au moyen-âge, on estime que plus de 80% des chevaliers étaient gays, il y a d'ailleurs un roi, qui avait sa troupe, de « mignons » une sorte de harem pour mecs. Donc en fait, les chevaliers, se tapaient plus souvent leurs compagnons que les princesses. D'ailleurs, les princesses ils se les tapaient pas souvent c'est un mythe.

Et patatra, il y eut un bruit de verre brisé, sûrement belle illustration sonore de l'état d'esprit de Flynn, qui écarquilla les yeux, bouche ouverte, et bafouilla :

-Papa, c'est vrai ?

Les rêves écrabouillés. Lucas eut du mal à répondre, sous l'hilarité de Gold, le rire à peine camouflé de Silver, Cristal de nouveau face à un grave traumatisme de son enfance, Eléa estomaquée, et un Daniel embêté.

--Patin Eliel passe vraiment trop de temps avec son oncle…Commenta Eléa, blasée, phrase, n'aidant aucunement le père perdu, mais vraie.
-Heu, c'est-à-dire que…tu vois…heu…Comment dire…Balbutia le stratège.
-Mais alors, quand qu'on jouait avec Celesta la semaine dernière, on était amoureux ? Interrogea soudain Flynn à Eliel.

Il y eut un blanc, durant lequel, Eliel abandonna sa mine sarcastique, une seconde. Pour s'empourprer violemment.

-Ca dépend si tu veux être comme ton tonton Gold ou pas !

Flynn marqua une pause, et observa, interloqué son dit oncle, qui d'un seul coup, ne trouva plus ça drôle du tout. Puis, au bout d'une longue, très longue période de méditation intense, pesant le pour et le contre, le blondinet finit par lancer :

-Bon tu viens jouer Eliel ?

Comme si de rien était. Ou presque, à peine eurent-ils fait quelques pas, sans avoir trouvé de réponse à leurs questions, et demandes, que le fils de Lucas s'arrêta à nouveau et bredouilla, penaud :

-Attend, ça veut dire que si je te sauve cette fois, j'aurais pas le droit à mon bisou de conte de fée ?

Nouveau bruit de verre brisé, mais cette fois, ce furent les adultes qui virent leurs présomptions brisées, tandis qu'Eliel bafouillait un « comme tu veux. » à son ami, écarlate. Cristal semblait plus pâle qu'un fantôme et répétait, tel un zombie « malédiction, malédiction… » de façon fort macabre, qui fut interrompue par Eléa, qui vociféra :

-Hey je m'en fiche de qui est qui, mais pas question qu'Eliel monte sur ton ponyta compris Flynn ?

Qui n'eut droit en réponse qu'un :

-Mamaaaaaaaaaaaan ! Dégoûté.

Sam en eut mal aux côtes. Ce fut à cet instant précis, qu'un sifflement strident leur vrilla les oreilles, et qu'une détonation retentit dans le ciel, le parsemant de paillettes colorées. Les adultes présents tournèrent la tête en direction du feu d'artifice improvisé, et grimacèrent :

-Qui a ramené des feux d'artifices ici… ?

Deuxième intonation, ce fut une belle rouge qui crépita à quelques mètres seulement du grand arbre, manquant de l'embraser, et plusieurs cris de la part des adultes furent recouvert par une troisième explosions.

Eléa, avec un sourire, s'appuya un peu plus contre Danny, et envoya :

-Ouah, on a fait fort, on va finir en taule encore plus vite que la dernière fois ! Avant même d'être saouls !

Il y eut des nouveaux ricanements, mais nerveux cette fois, surtout, quand deux minutes plus tard, ce fut, non pas le concert des feux d'artifices claironna dans l'air, mais la sirène…

-Des poulets. Constata Silver.
-Vite monsieur l'avocat prépare notre défense ! Plaisanta Gold.
-Je suis de l'accusation moi ! Et j'me barre !

Et en un coup de vent, en un réflexe toujours ancré en lui, Silver disparut, tandis que Sam posait sa tête entre ses mains, ne sachant pas si elle devait rire ou être exaspéré. Mais quand elle entendit le ton léger de tous les convives, convoqués pour leur habituelle fin de soirée au commissariat, elle sut, que, finalement, tant qu'elle était entourée…

-Si demain, y-a des journalistes, on laisse Daniel parler et on se casse ! Déclara fièrement Eléa. –Il sait s'en occuper maintenant !

Et surtout si Eléa était présente…Tout irait bien.

Samantha ferma les yeux une seconde, et inspira profondément l'air du soir, comme pour s'imprégner de ce bonheur. Elle rouvrit les paupières, et tourna la tête en direction d'Eléanore, et son sang se glaça.

Elle croisa deux iris disparates, l'une se parant de l'argenté éclatant de la lune, et l'autre, aussi incandescente que l'astre solaire, sur un teint cadavérique, auréolés de fins fils immaculés. Arcéus tourna lentement la tête dans sa direction, dans une expression neutre, et le paysage de bonheur autour d'eux se dissolut dans une brume insondable.

Samantha se retrouva, debout, les jambes tremblotantes, dans un univers aux contours disloqués et le bruit crissant de rires, qu'on entremêlait, étirait, éviscéraient l'assourdit, ne devenant que des hurlements désespérés d'agonisants. Sam plaqua ses mains sur ses oreilles et plissa des paupières, apeurée, se concentrant sur les battements de son cœur, affolés.

Boum. Boum.

Calme-toi, ce n'est qu'un cauchemar. Se répéta-t-elle.

Boum. Boum.

Elle allait rouvrir les yeux, et Eléa, sa Eléanore se pencherait au dessus d'elle, et lui demanderait ce qui n'allait pas.

Boum.

Une douleur vive lui lacéra l'estomac et son souffle se coupa. Son corps convulsa automatiquement, et se plia en deux. Sam ouvrit alors les yeux, pour admirer, avec effroi, la main d'Eléa, enfoncée dans son ventre jusqu'au coude. Un frisson lui remonta l'échine, alors que dans une expression neutre, tel un automate, son ancienne amie, tirait pour extirper son membre de la plaie. Elle sentit ses côtes se disloquer, comme si on les lui arrachait, et une forme rouge s'extirpa en son sein. Une forme rouge, gigantesque.

Elle hurla. Se recroquevilla, se courba, mais son bourreau continua de tirer, alors même qu'elle gisait au sol.

Pourquoi personne ne l'entendait ! Que quelqu'un vienne à son secours ! N'importe qui ! Il devait bien y avoir quelqu'un !

Un voile blanc s'abattit sur sa vision, et ce fut, comme un coup de massue, lui écrasant chaque parcelle de son être, une chape de plomb, la clouant au sol, froide, glaciale. Et elle sût. Elle sut, irrémédiablement, sans avoir à entendre les pulsations de son cœur s'arrêter. Elle était morte. Morte.

Morte, mais consciente. Morte, tel les décapités, qui ont encore 14 secondes, pour voir, sentir l'horreur, comprendre, puis rendre son dernier souffle.

Eléanore se redressa, et dans ses bras, elle tenait une petite silhouette informe, assoupie dans ses bras. De longs cheveux roux tombant en cascade, se mêlant à l'immaculé aveuglant des siens. Tel du sang sur la neige. Sam sentit ses prunelles, trop lourdes, rouler dans leurs orbites, et couler vers le sol.

Et, là, de nouveau, un choc, violent dans sa poitrine, le souffle salvateur inondant ses poumons. Ses doigts se crispèrent, se serrèrent, et sa vision se précisa. Sous ses paumes ouvertes, elle sentit des centaines, non, comme des milliers de fils de nylon, coupants, tranchants, emmêlés les uns aux autres, elle perçut le pourtour doux et poli de perles aux reflets noirs.

Samantha se redressa, ébahie, sans plus aucune autre douleur, que celle, psychique, du vide, et de la perte. Elle tâta son ventre, interloquée, sans sentir la boursoufflure, la blessure béante, suppurant, vomissant ses trippes, dont elle avait ressenti l'âpre douleur annonçant sa fin.

Hantée par le fantôme de la souffrance, par ce murmure de la mort, qui avait roulé, délicatement sur sa peau, lui arrachant un haut le cœur, elle ne parvenait pas à calmer les tremblements. Perdue entre fictions et réalités, elle tressaillit, quand la tendresse de la nacre, roula sous ses doigts, dans un éclat de rire perdu.

Et tel un fil d'Ariane la guidant hors de labyrinthe tortueux de sa propre folie, elle réalisa.

D'un bond, elle se redressa sur son séant, et surmonta le vacillement nauséeux qui la prit aussitôt. Le poing toujours resserré fermement sur la perle aux reflets de ses visions futurs, aux lueurs d'essences, aussi incandescentes et éphémères.

La chose qui avait pris possession d'Eléa se tenait toujours là, devant elle, indifférente à ses tourments. Muette, elle tourna la tête en sa direction, comme on observe un insecte qui rode dans une chambre, au bourdonnement dérangeant. Elle tenait encore toute sanguinolente dans ses bras, et Sam n'arrivait pas à la distinguer, cette femme, sous le méli-mélo de fils pendouillants qui la recouvraient.

Les prunelles de Sam suivirent alors les liens volants, aux embouts découpés, et comme un coup de jus, ses muscles se tendirent, alors qu'elle reconnaissait peu à peu les alentours. Déboussoulée, elle leva un pied, et constata les restes, de ce qui avait été, de fines cordelettes, suivre sa semelle, dans un tressaut illusoire de vie. Elle sursauta, et écrasa par inadvertance, une chose ronde, qui émit un Crac, sinistre. Et de nouveau, Sam eut l'affreuse sensation, qu'une part d'elle venait de mourir. Elle leva le pied, pour contempler une des perles, esseulées, éparses de part et d'autres, brisée.

-Prend garde, à ne pas piétiner ton avenir, parmi tes possibles.

Ce fut sur ce simple avertissement, qu'Arcéus sauta de la passerelle, semblable à un nid, où se tenait Sam, dans le milliard d'autres qui composaient, la dimension de Celebi.

Dans un sursaut de bon sens, Sam se précipita à sa poursuite, mais elle dut freiner, piler, car, plus aucun lien ne reliait son îlot aux autres. Pas même le plus petit fil auquel s'accrocher.

Elle contempla alors ce qui avait été Eléa, sautant, de plateforme en plateforme, pour que celles-ci se désagrègent sous ses pas, avec pertes et fracas. Un nuage de poussière commença à s'élever, parsemée de hurlements crissant des futurs perdus, et d'avenirs, encore inachevés, et déjà brisés.

-Elé…

Sam sentit les mots s'affaisser sur sa langue. Non. Ce n'était plus Eléanore. Mais alors, qui était devenue, son ancienne amie ?

Un nouveau hurlement déchirant, stria l'atmosphère, et une plateforme s'effondra, pour disparaître dans les méandres sans fonds des dimensions. La femme aux cheveux blancs, portaient à présent une autre personne dans ses bras ; couvertes de fils. Elle plia les genoux, ne pouvant plus porter quiconque, et dans un saut magistral, elle s'envola vers les cieux, vers cette lumière qui illuminait les lieux, sans provenance ou source. Sam la suivit du regard, et elle sentit ses jambes, malgré tout, avancer. Doucement, elle marcha, puis elle se mit à courir, sans se soucier sur quoi elle marchait. Les prunelles rivées vers…Eléanore…Ou qui que ce fût à présent. Et elle put continuer, les paroles sans fondements oppressaient ses oreilles, elle sentait les sensations fantômes, d'illustres inconnus, dont les perles de leurs avenirs et possibles, roulaient sous ses pieds ; tels un sol inconstants, d'eaux et de billes.

-RESTE !

La supplique lui arracha les cordes vocales. Mais Arcéus ne cilla pas, sans même la regarder, elle arriva sur un îlot, et en ressortit, mais cette fois, la personne couverte de liens, flotta derrière elle, tel un satellite autour de sa planète. Et de nouveau, le monde s'ébranla, pour se disloquer. L'envie irrémédiable de vomir retourna l'estomac de Sam.

-ARRÊTE TU DETRUIS TOUT !

Mais Arcéus l'ignora ; et encore une fois, fit son œuvres, les fils maintenant en suspensions les destins, tels des colonnes aux ramures s'élevant si hauts qu'elles en disparaissaient dans l'atmosphère, se rompirent, et se déchiquetèrent dans un bruit atroce, avant de fondre dans l'abîmes.

Elle anéantissait Destin, comme Fatalité. Elle supprimait, toutes les chances…Toutes ses chances de renverser le temps. Elle…ELLE les condamnait tous ! à Suivre qu'un seul fil, à être prisonnier de ses désirs, privé de liberté.

-STOPPPE !

Le hurlement qu'elle poussa lui arracha les poumons, mais cette fois, Arcéus s'immobilisa. Elle tourna la tête en sa direction. Et Sam, put constater, dans l'affreux silence qui suit les plus grandes tempêtes, le paysage aride du néant, apocalyptique d'une bataille passée et perdue. Ses genoux se dérobèrent sous son poids.

-Regarde ce que tu as fait ! Gémit-elle.

De la Dimension de Celebi, il ne demeurait plus qu'une terre noire, aux ruines éparpillées. Arcéus s'approcha d'elle, gracieusement, elle se posa près d'elle, tenant, toujours près d'elle, comme s'ils ne pesaient pas plus qu'une plume, deux personnes, tandis que quelques autres flottaient encore, méconnaissables, dans son sillage.

-Un Gardien m'ordonne de tout détruire, Un autre m'ordonne de préserver. Je ne peux obéir aux deux ordres à la fois.

Sam lança une œillade déboussolée à Arcéus, qui secoua la tête.

-Bien, je ne détruirai pas tous les possibles et avenirs. Mais j'obéirai tout de même au premier Gardien, en détruisant les néfastes conséquences du libre arbitre.

Puis elle fit volte-face, et dans un dernier saut, elle disparut, avec son sombre cortège.

Samantha resta seule, au milieu de ce paysage de déluge, ces restes gris et ternes, dépourvus de toutes vies. Abandonnée.

-Y-a quelqu'un ?

Pas un son, pas même, le plus petit bruissement, le plus petit mirage d'avenir.

-Eléa…. ! Lucas ! Danny !

Ses yeux discernèrent un fil rouge, contrastant dans cet océan aux nuances de nuit, pourpre, tel un fin ruisseau sanguin. Esseulé. Il lui rappela affreusement la couleur du sang de Yoann s'insinuant entre les pavés sous ce jour de pluie morbide.

-Silver ! N'importe qui ! Quelqu'un ! S'écria-t-elle, désespérée.

N'était-ce pas, pourtant, ce qu'elle avait demandé ? La solitude éternelle, en échange de la vie d'Eléanore. L'isolement, définitif, dans un monde sans bruit, atemporel, pour un châtiment infini.

« C'est ce que tu as souhaité de tout ton être, n'est-ce pas ? Un monde, sans vie ni mort, un monde où la douleur, ou même le bonheur n'aurait de prise sur toi. »

Sam refoula un hoquet désespéré.

Ses ongles ripèrent alors sur la perle, qu'elle tenait toujours fermement entre ses doigts, et les flagrances, les échos d'une autre époque, où tous riaient et baignaient dans un bonheur inaccessible parachevèrent le lourd étau qui l'emprisonna.

Alors, doucement, elle se laissa choir à terre, et se recroquevilla, serrant jusqu'à s'en blanchir les phalanges, ce songe fou, cette vision, du possible, ce réconfort, à la fois cruel et doux, qu'elle avait eu le bonheur, un jour, à porté de main. Que ce futur où tous riaient, avait existé, existait toujours, chaud et tendre, entre ses paumes.

Qu'elle l'avait simplement, loupé, un jour, à la croisée des chemins des Destins.

« « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « «

La pièce était plongée dans l'obscurité. Les rideaux de coton blanc, ondulait doucement, sous la faible brise nocturne, et seule la lune, et ses reflets d'argents, permettait de conférer cette sérénité, ce calme feutré si illusoire, à ce salon vide.

Dans le silence de la nuit, reposaient les conséquences de non-dits, de trahisons muettes, et d'une absente qui plus jamais ne prononcerait les bons mots.

Un silence, qui étouffait, et pourtant, qu'il ne désirait briser sous aucun prétexte. Parce que tout était mieux, plutôt que d'avouer. Lucas, recroquevillé sur le canapé, la tête dans les genoux, attendait simplement, le prochain « tac » de l'horloge murale.

Et qu'il la haïssait cette horloge. Qu'il le haïssait ce temps maudit. Parce qu'en 24 heures, son existence entière venait d'être balayée. En 24 heures, il avait perdu des amis, en 24 heures, il avait été abandonné, en 24 heures, ses mentors étaient tombés, en 24 heures, il avait appris qu'il n'était pas un héros, mais un lâche, un froussard incapable de protéger ceux qui lui étaient chers. En 24 heures.

La porte s'ouvrit à côté de lui. Et Cristal en sortit, le visage si rouge qu'il en paraissait tuméfié. Elle lui offrit un sourire bouffi, et vint s'asseoir à ses côtés. Lucas ne demanda pas de nouvelles. Il voyait le sang sur ses mains, il voyait la lassitude dans son regard, la fatigue.

Alors, doucement, il lui posa sa main sur la sienne. Et il la serra, il laissa leurs doigts s'entrecroiser.

Cristal trembla légèrement sous sa prise, et lentement, naturellement, elle baissa la tête, et laissa couler les larmes. En silence. Parce qu'il n'y avait rien à dire, elle souffrait des mêmes maux que lui. L'abandon, la désillusion, pour une cuisante et amère défaite.

La défaite, qui tel un vent glacial, parcourait, glaçait chaque couloir, chaque chambre du chalet et ses habitants en ce jour faste de deuil et de renouveau.

Son souffle irrégulier lui brûlait la trachée, et l'épuisement lui consumait ce qu'il lui restait d'air dans les poumons. C'était un cercle vicieux, plus il tâchait d'inspirer à un bon rythme, et plus l'appréhension lui coupait la respiration.

Il avait accouru, il avait volé, fait le plus vite possible, d'Irisia, pour venir au QG. Mais le chao de l'île l'avait entravé, les malades, perforés par un rayon inconnu venu du ciel s'étaient amoncelé dans les salles d'opérations, et le « bip » lancinant de la fin couinait encore, éternel, dans ses oreilles. Telle une menace implicite. Il en avait entendu tant, ces dernières 24 heures, il ne désirait plus le subir de nouveau. Ce martèlement sur la conscience, qui n'en est même pas un, ce sifflement strident qui vrillait tympan et entrailles, les écrasait de sa culpabilité et de leur impuissance.

La pikachu, Pilou sur son épaule, gémit, et l'encouragea d'un coup de museau dans le cou. Mais rien n'y fit. Il ne pouvait pas. Il ne pouvait pas entrer dans cette chambre qu'on lui avait désignée. Il ne pouvait pas faire face à ce qu'on lui avait présenté comme le cadavre vivant d'Eléanore. Il ne pouvait pas, après tous ses efforts, après ses années de recherches, croire aux mots, aux explications qu'on lui avait servies à son arrivée.

Régis sentit ses forces l'abandonner, alors que la main sur la poignée, les doigts crispés, il restait immobile.

Là, dans un des chalets de Twilight, à l'abri, loin des tourments du monde extérieur, loin des morts, loin de la panique des habitants, loin du surmenage, il demeurait, bien plus terrifié par un calvaire, dont son imagination avait dépeint si souvent l'âpreté. Mais, à la différence des craintes et de la douleur que son esprit lui avait fait effleurer…Celles-ci possédaient l'undulgence, de ne pas se parer de réalité, comme celle qu'il s'apprêtait à rencontrer.

La porte crissa quand il l'ouvrit, sinistrement. Et une pâle lumière se dessina sur le parquet, celle du couloir, il y vit sa silhouette ténébreuse s'y graver, lentement. Puis il leva les yeux.

D'abord, c'était le noir, complet, puis, ses rétines s'habituèrent peu à peu, et il discerna une vague forme, grosse, dominante. Allongée. Il reconnut aisément l'ombre d'Ash, sur le parquet, accompagné par le Pokémon de Daniel, le Riolu shiney. Tous deux, tenaient entre leurs griffes, leurs pokéballs respectives. Ils semblaient dormir. Mais ils ne se réveilleraient pas, malgré la respiration rauque et trompeuse sortant en volute de fumée des naseaux du dragon.

La lueur de la flamme dorsale éclairait à peine la petite commode et le lit aux draps propres. Mais elle fut suffisante, pour illuminer d'éclat la chevelure blanche d'une femme, appuyée contre le Pokémon en pleine léthargie. Là, étendue, face à des rideaux couvrant la bow-window donnant sur l'avenue principale, elle observait.

Une vague de nostalgie envahit Régis. Parce que c'était une autre femme qu'il voyait dans une position nonchalante, joue contre la vitre d'une autre maison, à une autre époque. C'était un autre visage qui se teintait de mélancolie dans ses souvenirs. Une autre expression. Il l'avait si souvent contemplé ; cette gamine, dans cette position, contemplant le monde de dehors derrière les barreaux de sa cage dorée, avec envie et désespoir à la fois.

D'un pas hésitant, il s'avança, et s'accroupit près d'Ash, dont il caressa la croupe, et le flanc, à la recherche d'une réaction. Rien, pas même le plus petit bruissement, indiquant qu'il l'avait perçu. Pilou vint se poster près de son ancien compagnon, et frotta son museau contre le sien, câlina son cou, chercha à jouer avec sa patte griffu, à lui voler sa pokéball, gardé tel un trésor. Mais Ash ne bougea pas. Pilou émit un gémissement, et se roula en boule entre ses pattes, en ronronnant tristement.

Et d'un coup, Régis l'envia, il l'envia, ce petit dragon. Il ne souffrait pas comme eux. Au moins, il accompagnait Eléanore, la vraie, au moins, il ne voyait pas à quoi elle en était réduit aujourd'hui. Il était avec elle.

Régis serra les poings avec rancune, le gosier serré. Quand il releva la tête, la mâchoire crispée sur un sanglot, son regard croisa celui disparate de l'hôte d'Arcéus. Et son cœur sembla imploser.

-Regarde-toi…Bredouilla-t-il.

Ses deux mains se posèrent sur les joues d'Eléanore, de sa Eléanore. La petite fille qu'il avait vu grandir. Qu'il avait enlacé pendant ses chagrins, dont il avait partagé le rire, la petite fille qui était devenue femme, à ses yeux, sans même qu'il ne s'en rende compte. Comme ça, dans son dos.

Elle faisait toujours tout dans son dos, et qu'à sa tête.

Pourquoi n'avait-il même pas réussi à lui apprendre à ne pas lui cacher de telles décisions ?

-Tes cheveux…Articula-t-il difficilement…

Il passa quelques doigts dans la chevelure blanche et immaculée d'Arcéus. Une chevelure dépourvue de nœud. Celle qu'il connaissait, était rêche et fourchue, elle était d'un vert sombre, elle était emmêlée et chaotique.

-Tes yeux… !

Chaque mot alourdissait sa mâchoire, et il ne savait pas comment il parvenait à surmonter sa paralysie à mi-son. Les prunelles qu'il aimait, était d'un vert soutenu, d'un vert profond, telles deux émeraudes. La couleur de l'espoir. Son espoir à lui… Disparu. Remplacé par deux billes, l'une opaline telle la lune, et l'autre d'un ardent or, solaire. Les émeraudes…avaient Volées en éclat

-Eléanore…Pourquoi t'as fait ça… ?

Arcéus n'afficha aucune expression, ne lui apporta aucune réponse. A la place, elle le fixa, longuement, de son regard neutre, comme pour le sonder. Avec ses yeux, son visage, son expression.

-Qui êtes-vous ?

La question tomba, nette, tranchante, sous une note d'innocence. Arcéus observa alors le savant vaciller, et de tout son être, frissonner, grelotter, trembler. Lutter. Alors, doucement, tendrement, elle fit un pas vers lui. Parce que cet homme souffrait. Elle lui prit la main, et leva les yeux vers cet inconnu qui avait mal, et ne hurlait, ne demandait qu'un geste.

Régis sursauta quand la main d'Arcéus lui caressa le visage maternellement.

-Chuuut…Je suis là…

Et c'était son expression concernée, sa moue malheureuse et compatissante, ses prunelles brillant désolément, sa bouche qui lui murmurait ces mots de réconforts. Mais ce n'était pas Eléanore. Elle ne le serait jamais plus.

Alors Régis s'effondra, il passa les bras autour du cou de cette entité aux traits du fantôme de ses souvenirs, et il pleura. Il serra ce petit corps si frêle qu'il avait tant souhaité protéger, cet être qu'il avait aimé, et qu'il aimait toujours. Il sanglota comme un enfant aux espoirs brisés.

Comme Eléanore avait pleuré dans ses bras le jour où on lui avait refusé la liberté, Régis pleura dans les bras de ce qui restait d'une absente le jour où on la lui retira.

Mais la vie, est faite, de rencontres, et de séparations. De Naissances, comme de Morts. Aussi dur, qu'il est de l'accepter.

Tandis qu'une regarde avec lassitude le plafond neutre d'une salle d'opération, tandis qu'une gynécologue enlève, ce qui avait été, l'espace d'un instant, un concentré d'espoirs et de rêves…Une autre se délivre d'un petit être braillant qu'on embrasse et félicite de sa venue au monde.

Il y a des injustices. Des joies, des peines. Qui vont et viennent au grès du Destin. L'humain n'a qu'à se laisser porter. Pleurer, rire, accepter l'ironie dont se pare sa fatalité.

Marion ne voulut pas entendre les propos du médecin qui l'examinait en urgence. Elle préférait se concentrer, plutôt que sur sa voix calme et sage, sur les pleurs et les sanglots du couloir. Ceux qu'on délaissait, ceux qui n'avaient pas accès aux soins, ceux dont les parents, les amis, avaient été « jugés ». Et elle fermait les yeux, y posait les creux de ses coudes et claquait la mâchoire. De honte et de regrets.

Mais elle affrontait. Elle affrontait ses erreurs. Elle écoutait chaque plainte et la retenait. Chaque sanglot se gravait en elle, dans sa chaire et son sang. Parce qu'elle en était responsable en partie.

-Ca va faire mal. Prévint l'urgentiste dépêché par Peter dès son arrivée ici, dans cet hôpital de fortune, près de la ligue.

La douleur, qu'elle ressentait. Elle la méritait. Elle la méritait. Pour avoir cru, stupidement, en cet homme. Cru en ses idéaux, cru en ses solutions, cru en son pouvoir. Elle la méritait, parce que malgré tout elle ne pouvait pas s'arrêter de l'aimer. Malgré les larmes des innocents dans le couloir, malgré les trompés et les trahis. Sa souffrance, n'était en rien comparable à la leur.

-Voilà, le fœtus est retiré. Je vais vous prescrire des médicaments, et un repos complet. Vos seins et votre ventre vont dégonfler par eux-mêmes, ne vous en faites pas.

L'infirmière sursauta, quand de l'autre côté de la cloison, les cris d'un nouveau né retentirent, et elle fit une grimace penaude en direction de l'alitée aux jambes encore écartées et sanguinolentes, sous le regard noir de sa responsable.

Leur silence, solennel, arracha un rictus à Marion, qui sentit ses lèvres s'étirer, se déchirer, alors qu'un sanglot unique roulait dans son gosier.

De l'autre côté, une femme, elle, avait son bébé.

De l'autre côté, c'était Makanie, qui après 18 heures de travail recevait les félicitations d'une bande de médecins aux airs niais et béats.

-C'est un petit garçon en parfaite santé. Affirma la sage-femme, en nettoyant le petit.

Aaron, le regard brillant, lâcha la main de sa compagne, pour s'approcher et contempler sa progéniture, tout retourné. On le lui plaça bientôt dans les bras, et il l'admira, maladroitement. Le petit couinait toujours, sa peau mâte toute luisante, et un petit duvet roux collé en paquet sur le haut de son crâne. Dans un hurlement indigné, il ouvrit de grands yeux clairs, verts, bien que proche du bleu des bambins.

-Allez mademoiselle, il faut expulser le placenta…Encouragea un autre docteur.

Makanie serra les dents, et Aaron voulut revenir auprès d'elle, pour lui montrer la petite bouille de leur fils. Leur fils. Rien qu'à cette pensée, son être entier trembla de fierté et d'appréhension. La rouquine, le visage blafard, et la respiration sifflante, jeta à peine un coup d'œil à cette chose toute enfoncé dans les langes, et qui osait pleurer dans ses oreilles après lui avoir déchiré les entrailles. Elle détourna les yeux et siffla.

Dans un dernier effort, un râle, et une chose toute sanguinolente qui tomba sur le carrelage, filant la nausée et un frisson à Aaron, Makanie s'arrêta. Sa tête dodelina, en nage, ses cheveux roux lui collant à la peau. Puis, elle se dressa, comme dans une convulsion, pour se pencher par-dessus la table. Par miracle, une infirmière avait un seau, et elle put vomir sans éclaboussure, avant de s'affaisser contre le dossier, incapable de produire un mouvement de plus.

-Vous avez eu de la chance qu'un apprenti médecin soit près de vous quand le travail s'est déclaré…Quand vous êtes arrivée j'ai bien cru qu'on y arriverait jamais !

Le médecin s'essuya le front de ses gants souillés, ce qui n'arrangea en rien sa propreté.

-Pour le prochain, venez plus tôt aux urgences ! Se moqua une infirmière.

Mais celle-ci se fit aussitôt réprimander par ses confrères et consoeurs. Makanie grimaça, de même qu'Aaron.

-Enfin, c'est une vraie bénédiction cet enfant…Après une journée si meurtrière…Une vrai bénédiction. Même si j'ai bien cru qu'il allait y passer. Heureusement que votre amie a vu que le cordon s'enroulait autour du cou de votre gosse !
-Elle y a mis les mains la pétasse, comme si le morveux me charcutait pas assez comme ça…grogna Makanie, dans un souffle.
-C'est une chance pourtant ! Elle a eu les bons gestes, et du coup, on a une naissance à fêter ! C'est tellement mieux, la pauvre femme dans l'autre salle, elle a subit une fausse couche, vous devriez peut-être faire connaissance !

La même infirmière qui avait eu le culot de dire ça, se prit une pichenette sur le front, mais elle maugréa, d'une voix mièvre :

-Maieuh ! C'est vrai, après tout, son bébé est né en même temps que le bébé de l'autre femme est mort, Ca crée des liens !

Etait-il possible d'être aussi bête ?

Le médecin fronça les sourcils, alors qu'Aaron serrait un peu plus le bébé dans ses bras.

-Vous savez, si votre amie n'avait pas fait ça, vous seriez tous les deux morts. Avec toutes les urgences en cours, impossible de faire une césarienne, et encore moins une salle.

Comme pour confirmer ses propos, un autre brancard déboula dans le couloir, un cadavre pudiquement recouvert d'un drap tâché. Un autre patient en piteux état s'engouffra aussitôt dans l'espace délaissé par le macchabé.

-Bonjours les risques d'infections…Commenta une infirmière. –C'est le 52 ème…Et encore Un Rocket…La morgue va vraiment exploser…

Les propos de l'infirmière, la même, furent de nouveau réprimandés.

-Votre amie…est un médecin très prometteur…Il faudra me la présenter. Elle vous a sauvé.

Arrivé par téléport grâce à Lucio, qui était apparu comme un sauveur dans cet apocalypse, Aaron aussi avait cru mourir, surtout avec un bébé à moitié sorti. Il examina les alentours, ce couloir qu'on avait rapidement vidé des occupants, et découpé un carré avec des draps, en espérant faire office de barrière contre les germes…

Il voyait la salle d'attente malgré tout, et les femmes, rassurées par le dénouement heureux de cet accouchement, à côté de leurs enfants, terrorisés.

Les lits des malades s'entassaient de ci-de-là, ils n'étaient pas les seuls, à partager leur intimité avec de parfaits inconnus et citoyens de tout âge. Au loin, il remarquait, deux sbires Rockets, aux blessures superficielles, caressant un miaouss gémissant. Un peu plus loin, encore, des blessés dans le coma, mais vivant, d'autres recevant les premiers soins. Et la porte qui s'ouvrait à la volée, le cortège des urgentistes, assis sur un corps dans un brancard roulant, essayant de ranimer une pauvre âme. En revanche, il ne voyait nulle part Chris et Angie.

Son cœur se compressa. Parce qu'il savait, qu'il n'y avait qu'un autre endroit où l'on entassait les victimes, mais celles de là-bas n'avaient plus aucune chance de s'en sortir…

Il secoua la tête.

-Notre amie…A préféré rester sur place.
-Dites lui qu'elle a fait du bon boulot.

Aaron eut un sourire amer, en songeant à Cristal, et son visage dur et sévère, alors qu'elle soignait trois personnes à la fois, les gestes rendus fébriles sous la pression et la panique environnante.

-Comment allez-vous l'appeler ? Demanda une maman, qui s'était hasardé jusqu'au drap plus vraiment blanc qui les séparait du reste du couloir.

Son air fatigué et bouffi de larmes versées fit de la peine à Aaron.

-…Je crois que…Je ne sais pas…Makanie qu'est-ce que tu en penses ?

Il approcha de nouveau le bébé de sa mère, mais celle-ci d'un geste lasse, le repoussa, l'obligeant à garder le petit dans ses bras, pendant qu'elle tournait de la tête, la respiration erratique.

-Fait comme tu veux. Marmonna-t-elle.

Aaron se pinça les lèvres. Puis, il observa le petit bébé, qui s'était assoupi, épuisé par son voyage. Le champion insecte regarda encore une fois sa compagne, indifférente, et son cœur se compressa.

-Il va s'appeler Zéphyr.

Un nom, signifiant, illustrant le vent, comme sa mère. Parce que, même si elle le refusait, même si elle ne le souhaitait pas. Elle était sa mère. La mère de ce bébé. Ils étaient ses parents, tous les deux.

Makanie ne sourcilla pas, elle ne lui offrit rien, pas même une œillade. Aaron ravala un cri désespéré.

-C'est un très joli nom.

La phrase fut reprise de concert par les médecins et les femmes des alentours. L'enfant passa de mains en mains, de bras en bras, couverts de caresses et de compliments. Bercé d'amour et source de réconfort dans cet univers éploré. Il fut aimé et dorloté, dans toutes les étreintes. Sauf celle de sa mère, qui ne daigna, pas même l'effleurer, plongé dans un mutisme buté.

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A des lieux de là, dans la petite bourgade d'Azuria, encore toute secouée par le jugement d'Arcéus, dans une des milliers de petites maisons encore allumées et chamboulées, se tenait dans la pénombre un homme courbé par la fatigue, essayant désespérément d'endormir un autre tout jeune bambin. Le vent nocturne poussait les branches crochues contre la vitre, dans un martèlement angoissant pour le petit.

Akira Yuki faisait des ronds sur la moquette couleur lavande, traînant les pieds, berçant de petits mouvements de haut en bas, le capricieux, tout en baragouinant un simili de berceuse, sans paroles exactement définies. Il passa devant le lit à barreaux, où dormait des dizaines de peluches Pokémons, elles, bien immobiles et paisibles entre les draps chauds et les doudous en pilou, regardant de leurs yeux en boutons, comme hypnotisés, le mobile tournoyant doucement au dessus d'eux. Fatigué, il chercha le biberon dans la commode de vêtement, aux couleurs jaunies, avant de se rendre compte, qu'il n'y aurait rien là dedans à part un amoncellement d'habits…Qui ne lui serviraient à rien d'autres qu'à étouffer le bambin.

Même si c'était presque tentant, Akira se ravisa, et finit par s'affaler dans le fauteuil, près du coffre de jouets, bourrés de petites babioles dont le seul but ludique était de produire un son capable de rendre fou, le bébé, et ses parents, mais à différent stades. Il tira sur la petite chainette pendouillante de la lampe et alluma.

Une douce lumière tamisée colora les murs, jaunes, et sous l'effet de l''abajour découpé, des myriades de petits motifs dansèrent autour d'eux, bienveillantes. Silencieuses. Si seulement le braillard pouvait faire de même que ces idoles muettes.

D'un geste lourd, Akira finit par sortir d'une alcôve creusée dans le mur, un petit livre rempli d'images… L'avantage avec les livres d'enfants, étaient définitivement les lettres qui creusaient le papier. Plus que le scénario en tout cas. Celui qu'il avait en main, et dont les doigts caressaient les premières lignes, racontait l'histoire d'un ours bleu qui peignait à l'aquarelle un wailord. Fascinant. Akira arqua un sourcil, et reposa l'ouvrage dans un grognement. Il avait déjà l'impression d'avoir le cerveau en bouilli, autant ne pas aggraver son état…Il piocha un autre…Qui parlait d'une humaine n'arrêtant pas de se plaindre, qui tombait amoureuse d'un vampire…Quelle idée de fourrer ça dans la chambre d'un bébé ? Remarque, vu le niveau des textes, seul un gamin de 8 mois devait pouvoir supporter tant d'inepties sans mourir d'un anévrisme. Un vampire qui brillait…N'importe quoi, quoique, le petit avait besoin d'une veilleuse, apparemment…

Entre le poussifeu qui se paumait dans sa propre basse-cours et cherchait sa mère, et l'histoire d'une gamine qui apprenait à aller sur le pot, Akira ne savait pas ce qui était le pire, et s'apprêtait à abandonner, quand enfin, il tomba sur un livre qui lui plu.

-Hikaru, tu veux que je te raconte l'histoire, du Malosse bleu ?

Le bébé ouvrit grand ses prunelles d'un bleu outremer si profond, qu'ils en paraissaient presque noir, comme pour le mettre au défi de les lui fermer, une moue décidée, très, très proche du chat buté. Et Akira perdit lamentablement, à l'entente de l'histoire d'une amitié entre une petite fille et un malosse bleu, Hikaru se mit à pleurer de plus belle. Pourtant, l'histoire était belle, l'enfant qui dont les parents ne voulaient pas de chien, changeaient d'avis à la fin, quand le dit malosse manquait de mourir en protégeant la petite d'un Ursaring.

Ah oui, non maintenant il voyait ce qui clochait.

Finalement, Yuki finit par assommer le gamin avec un manuel d'apprentissage du jeu de go, qui traînait sur l'étagère. Pas au sens strict du terme, même si l'envie le démangeait. Hikaru finit par s'assoupir dans ses bras en bavant copieusement sur un tsumégo des plus simples.

Alléluia.

C'est à cet instant, précis que le nez d'Akira se mit à le chatouiller. Sournoisement. Il tenta bien de lutter, de se retenir, mais rien n'y fit. Il éternua.

La maison s'ébranla dans un hurlement tonitruant.

Une tornade noire déboula et ouvrit la porte coulissante à va-vite. Ses cheveux de jais encore emmêlés, bien qu'attaché comme à son habitude pour la nuit, en chemise de nuit sexy et noire, Lily fit son entrée dans la chambre de son fils.

-QUI QUE QUOI DONT OU ?

Toute tremblante, à déballer ses conjonctions, sans se soucier qu'elle soit de subordination ou de coordination, ses grands yeux noirs encore tout embrumé par le sommeil. Mais ce n'était pas son fils qui pleurait de manière si bruyante. Du moins, pas que son fils.

De concert avec Hikaru, Akira pleurait à chaudes larmes.

-OUIIIIN J'EN PEUX PLUS ! J'TE JURE J'AI VRAIMENT ESSAYE ! MAIS IL DORMAIT ! IL DORMAIT ENFIN ET MOI J'AI ETERNUE ! J'AI ETERNUE ET IL S''EST REVEILEEE ET IL DORT PLUUUU-UUUHHHHH !

Lily se plaqua la main sur le front, et d'un geste expert, sortit la tétine d'un tiroir, pour la fourrer dans la bouche d'Akira et le faire taire. Ce dernier calmé, bien qu'encore secoué de hoquet, la laissa prendre le bébé, tout en suçotant la tétine, l'air accablé.

Lily berça tranquillement Hikaru, qui gazouilla de bonheur dans les bras de sa mère. Il faut dire qu'elle avait deux atouts ronds et moelleux et remplis de lait, que son tonton lui n'avait pas.

-Vraiment…Il faudra que je note cette réaction dans mon carnet…Je ne t'avais jamais vu pleurer à cause du manque de sommeil. Commenta-t-elle, épuisée. –Te voir te prendre des murs et t'endormir dessus, au bout d'une mauvaise nuit, aboyer ses quatre vérités à tout le monde au bout d'une nuit blanche…Maintenant au bout de deux nuit blanches, tu fonds en larmes. Je note. Je note.

Akira se contenta d'hocher de la tête, avec sa tétine.

Même si elle se doutait, qu'il n'y avait pas que les deux nuits blanche, comme raison à ses larmes.

Lily finit par déposer son fils dans son berceau, qui dormait comme un ange.

Le salopard hypocrite. Pourquoi avec Lily ça marchait ? Akira décida qu'il détestait son neveu, et, il ne savait pas à quel point les années allaient confirmer cette première impression, surtout après qu'il le batte autant en combat Pokémon qu'au go à l'âge de 12 ans.

-Tu es sûr que ça va ? Demanda Lily d'une voix douce.
-Mhmheùmh…Sanglota en retour le professeur.
-Akira, enlève cette tétine de ta bouche pour parler…

Son ami d'enfance s'exécuta et renifla bruyamment.

-Pourquoi tu dis ça, j'ai l'air d'aller mal ?

Pour tout dire, oui. Il était même naturel, qu'il aille mal dans une telle situation. Compatissante, Lily s'approcha de son ami et posa ses mains sur ses épaules, pour les frictionner affectueusement.

-Allez, là…Ca va aller, le pire est passé…Ca va…Akira ne met pas ta tête sur mon épaule, tu vas me mettre de la morve partout.

Le regard noir qu'elle lui servit le rabroua, capable même de percer sa cécité. Lily était trop forte. Maieuh, il avait besoin d'un support pour dormir….N'importe quoi…Il voulait juste dormir…Mais c'était impossible. Il n'y arrivait pas, quand il fermait les paupières, tout lui revenait, par flash, les sons, la panique, la sensation du sang sur les doigts, la paralysie…

-Oups, j'interromps quelqu'chose !

Kain Lag referma la porte, avec un sourire coquin, dans le dos d'Akira et Lily, mais cette pseudo pudeur et compassion n'était qu'un leurre, puisqu'ils l'entendirent marmonner dans le couloir :

-Rah D'ces jeunes d'notre temps ! Tous les mêmes et dans l'chambre du p'tiot en plus ! TS !

Etrangement, Lily le rattrapa par le col, ou plutôt par la peau du cou, car il ne portait qu'un caleçon, car comme il le disait lui-même « c'est pas d'la camelote mon corps à moi ! J'suis vachement bien conservé, et j'le montre nomdidyu ! J'l'utilise même ! » Mais la suite, ils avaient tous préféré l'occulter pour éviter des séquelles mentales irréparables.

-Vous ! Gronda Lily.
-J'sais, tu m'aimes ! J'faim, fait moi don' d'la soupe. Rétorqua le vieux chef de pension avec un sourire.

Bien évidemment avec tout ce raffut, Hikaru se réveilla de nouveau et brailla de toute la puissance de ses cordes vocales. Ce qui entraîna aussitôt, en bonne théorie des dominos, les pleurs d'Akira.

-Noooon il dooort paaaaaas ! Encoooore !

Suivi d'une Lily au bord de la crise de nerfs.

-CA SUFFIT MAINTENANT LA FERME TOUS LES DEUX !

Et alors que Lily essayait d'enfoncer la tétine d'Hikaru jusque dans le gosier d'Akira (parce que les mères tuant leurs gosses sous un excès de fatigues étaient mal vu, alors que les mères tuant les amis dans un excès de fatigue étaient pardonnables), Kain sortit son magnétophone, et appuya sur play.

Voilà plus d'une heure que j'te tiens dans mes bras,
voilà quelques jours que je suis tout à toi.
Il est très tard et tu dors pas,
je t'ai fait une berceuse, la voilà.

Et au rythme de la berceuse de Yoite, son père (Bénabar), l'ambiance se calma, lentement. Akira, finit par s'asseoir par terre, et Hikaru les yeux ronds, dubitatif, observa « papy » comme il le nommait, mimer les paroles, devant sa mère attérée.

Tes paupières sont lourdes, tu es en mon pouvoir une sensation de chaleur engourdit ton corps, tu es bien, tu n'entends plus que ma voix, je compte jusqu'à trois, et tu vas t'endormir..

D'accord, cette fois, ils avaient vraiment touchés le fond, du fond. Kain lui, semblait très fier de son petit effet.

Pourquoi tu ne veux pas dormir, pourquoi, tu dors pas?
Je te donnerais bien un somnifère,
mais y en a plus demande à ta mère,
t'es insomniaque ou quoi?
Puisque tu ne me laisses pas le choix,
voici le temps des menaces,
si tu dors pas j'te place !


Cela dura jusqu'à ce que Lily, finisse par appuyer sur stop, arrachant un « HEY ! » à un Kain indigné. Elle vivait dans un monde de fous, dans une maison de fous. Il n'y avait pas d'autres explications possibles. Elle réajusta son petit dans ses bras, qui applaudissait en riant. Voilà, c'était malin, maintenant, elle n'avait plus aucune chance de le rendormir ! Un jour, elle tuerait Kain.

-Vous croyez vraiment que c'est le moment de rigoler ?
-Ma p'tite, à mon âge, on s'doit d'rigoler même quand qu'il faut pas ! N'a plus l'temps pour s'morfondre !

Hikaru babilla, et tendit les bras vers son « papy » et en bonne vengeance, la mère le confia à ce si charmant vieil homme, qu'elle aimait de tout son cœur, en toute ironie. Kain observa la chose qu'il tenait dans ses bras, et il plissa les yeux avec perplexité :

-Quoi qu'ess'tu r'gardes morpion ? Grommela-t-il. –T'l'as pas écouté l'chanson ? Pionce !

Très efficace. Hikaru s'amusa à tirer sur la barbe blanche de son nouveau porteur, et à enfoncer ses doigts, et même sa main toute entière, dans sa bouche, goulument, avec le lot de bave qui allait de paire dans l'opération.

-Yerk. J'les préfère grands, au moins 'bavent pu ! Commenta le vieil homme.

Mais en observant Akira qui, accroupi dans un coin s'était endormi pendant la chanson, et bavait sur la moquette, il se ravisa.

-Hey…Akira, Vient-là…Allez, vient.

Lily avec tendresse, ramassa son ami d'enfance, et l'emmena dans le couloir, abandonnant Kain avec son gamin. Même si son ancien mentor menaçait de jeter le bébé par la fenêtre pour voir s'il rebondirait comme dans le dernier livre qu'il avait lu « Harry Potter », elle le savait incapable d'une telle chose. (En revanche elle se doutait que son fils ne se sortirait pas de ce face à face indemne psychiquement parlant…Ca lui ferait le caractère ! Tenta-t-elle de se convaincre).

D'un pas traînant, elle le guida dans sa demeure, celle qu'elle partageait avec Shinobu, son conjoint, et frère du concerné au stade de limace. Elle passa devant le salon du 1er, où reposait chaque Pokémon de ses invités, sous l'onde bienveillante du Métaloss d'Akira. Ils dormaient paisiblement, à l'abri, sous le champ magnétique du Pokémon acier, bien surveillés, par l'infirmière Joëlle de Jadielle, et mère de Samantha.

Lily se mordit les lèvres, quand elle se remémora, la panique qui avait résulté de l'apparition de son ami d'enfance, dans ce même salon grâce à une attaque téléport, accompagné de tous ces blessés, de cette infirmière…Demandant l'asile…politique, parce que certes sa maison prenait des allures d'asile de fous, mais pas encore à ce point, criait son égo.

Ils avaient bien ruiné son salon d'ailleurs, les fous, en débarquant.

Akira gémit sur son épaule, et elle soupira, tant à la fois de soulagement, que d'exaspération. Au moins, il était revenu indemne.

Doucement, elle passa devant sa chambre, où dormait Shin du sommeil du mort pour ne pas entendre tout le boucan. Elle donna un coup de pied au sol, dans ce qui semblait être une impasse, et une trappe s'ouvrit sur un escalier, où elle s'engagea. Passant devant « l'atelier », le piano, et autres objets artistiques en tout genre, elle arriva, dans ce qui, d'après l'architecte, aurait dût être un garage, et qui finalement avait été aménagé en salle de jeu, pour leur fils. Mais en cet instant, la pièce était encombrée de matelas, vides. Ils attendaient la famille Kazamatsuri, qu'ils appelleraient le lendemain. Elle passa devant une chambre ; où un garçon roux dormait, inconscient depuis son arrivée, avec à son chevet un brun, qui lui était apparu, en larmes. Encore une chambre, où cette fois, deux enfants de la fratrie –immense- qu'était leurs voisins. L'un avait reçu une cage-éclair, et ils prévoyaient l'arrivé du médecin appelé en urgence, pour l'aurore. Enfin, elle parvint à la dernière chambre, qui officiellement, était plus un bureau. Elle l'ouvrit, et grimaça, quand elle vit la jeune femme, l'élève d'Akira, dans la même position qu'elle l'avait laissée. Alitée et fiévreuse.

En quelques pas, elle rejoignit le lit de l'adolescente et y déposa Akira. Celui-ci gémit dans son sommeil, et d'un mouvement presque automatique, enlaça la jeune fille. Lily les observa, tous les deux, assise sur le rebord, en spectatrice, et elle remit une de ses mèches de cheveux en place, avec un sourire attendri.

-Tu es vraiment bête des fois Akira…Où est passé le génie qui nous exaspérait, Shin et moi, à l'école ?

Alors que la situation avait été prise en main, quelques heures plus tôt, ils avaient discuté, longuement. Et elle ne savait plus trop exactement comment, mais le sujet avait dérivé, jusqu'aux sentiments du professeur pour son élève.

« Tu ne comprends pas, elle est si jeune ! Pour elle, je ne serai qu'une étape de sa vie, un des hommes qu'elle rencontrera…Mais je ne serai jamais ce qu'elle est pour moi ! Il vaut mieux qu'elle m'oublie. »

A cet instant, Shinobu, le frère d'Akira, avait hurlé, et il avait empoigné son cadet, dans une rage que Lily ne lui avait jamais connu.

« Ca tu n'en sais rien ! » Avait-il scandé, rouge de fureur. « Tu as une chance de vivre le bonheur, en face de toi ! Tu as la chance de vivre un amour réciproque et au nom d'une quelconque éthique, morale, tu ne le saisirais pas ? AH ! Mais depuis quand as-tu une morale Akira ? Hein dit-moi ! Tout ca ce ne sont que des excuses ! »

Et il avait passé ses bras autour des épaules de Lily, en ajoutant :

« Ne laisse pas passer cette chance Akira. Aujourd'hui plus que jamais, tu devrais avoir compris…A quel point le bonheur est fragile. »

Mais Akira n'avait rien rétorqué. Il avait baissé les yeux, et étaient restés sur ses postions. Ses stupides positions.

Lily contempla la gamine dans ses bras, et elle grimaça. Elle se leva, et ferma le rideau de la baie vitrée, où, dehors, la neige étouffait chaque bruit, malgré la date estivale.


Ce qu'il ne réalisait pas, c'est que cette gamine, aurait besoin de soutien à son réveil. Parce que sa réalité, prendraient des allures de cauchemars. A l'instar, de la douce chaleur de leur maison, tel un cocon, leur refuge, simple abri illusoire, sous cette tempête à la morsure glaciale.

Mais ce, que Lily, ne pouvait voir, par delà le silencieux manteau immaculé, c'est que, malgré le froid, malgré les nuages, malgré la nuit, un bourgeon, perçait, doucement, pour éclore, en une radieuse plante, synonyme d'un avenir meilleur. Selon les vœux d'Arcéus.

Car Justice est relative. Bien et Mal, encore davantage. Et si le cauchemar de Sam débutait en cette réalité qui lui avait pris son amis, d'autres voyaient naître enfin, le débuts de leurs bonheurs, loin de toute illusion.

« « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « «

Une sensation glacée s'insinuait le long de son flanc. Il avait froid, affreusement froid. Ses membres lourds, tel du plomb, comme piégés dans un cercueil de glace, se remirent pourtant à bouger. Lentement, doucement. Ses paupières, qu'il avait cru soudées l'une à l'autre se séparèrent difficilement, dans un effort qui l'assomma.

Silver, groggy, s'extirpa des brumes de l'inconscience. Ses prunelles, arpentèrent la pièce, dans une lenteur douloureuse, et épuisante. Ses idées se répercutaient, anarchiquement sous son crâne, s'emberlificotant dans des souvenirs flous et des certitudes aux couleurs délavées par la fatigue.

Il se trouvait dans une chambre, ou tout du moins dans un lit. Les couleurs sombres des meubles et du papier peint se mélangeait sous ses yeux, pour ne former qu'un méandre gris, marron et kaki, informe. Une vague source de lumière pourtant, douce, tamisée offerte par une lampe à l'abajour tout en ciment et pierres colorées translucides, lui parvint. Et à ses côtés, il entraperçut Gold. Sur une chaise, une tasse entre les mains.

-Hey…

Les mots franchirent les lèvres de Silver, qui éreinté et encore perdu entre la frontière des rêves et du réel, ne fit rien pour les retenir.

Gold tourna la tête dans sa direction, mécaniquement, ses prunelles solaires, aux nuances sombres, semblèrent se raviver, à l'instar des braises sous les cendres, ranimer par le souffle vital, il eut un vague sourire, et murmura, la voix enraillée, en retour :

-Hey.

Silver sentit vaguement son métabolisme se réchauffer, bien qu'il grelotte toujours, et malgré lui, il se sentit sourire doucement. Comme ça, sans raison. Parce qu'il avait chaud, enfin, parce qu'il était bien, parce que Gold était près de lui.

Alors, enfin, il émergea, réellement. Un homme gras, à la calvitie naissante, se tenait au dessus de lui. Silver soupesa la pression que ce type exerçait sur lui, et sentit sa main, rugueuse, sous son t-shirt. Un frisson glacé lui remonta l'échine, avec le lot de souvenirs, mêlant passés enfouis, et tragiques évènements de la veille, allant de paire avec l'éveil.

Un type. Dans son lit. Au dessus de lui.

-L-Lâ-Lâchez-moi !

Un rocket ou un membre de Twilight, peu importe, la seule donnée qu'enregistra son cerveau, ce fut sa position de faiblesse.

Silver secoua la tête, essaya d'envoyer un coup de pied à son oppresseur, mais ses jambes s'embourbaient dans les draps et les couvertures qui les séparaient. Il voulut rouler sur le côté mais des mains lui menottèrent les poignets. Les images de la veille, de la mort, se mélangeant à ses cauchemars d'enfance faisait ressurgir l'effroi, qu'il avait tâché d'enfouir au plus profond de son être. Il se débattit, mais ses muscles endoloris, ses réflexes assommés, ne résistèrent pas à la prise du médecin, qui bien que surpris par le rejet du roux, garda son calme et le plaqua sur le matelas. Ce ne fut que quand la voix de Gold lui parvint, dans la cacophonie assourdissante des réminiscences où il était enfermé, que Silver réalisa qu'il hurlait.

-C'est un médecin, il ne te veut aucun mal.

Le rouquin se tût, le souffle court, les prunelles écarquillées, alors que Gold, inerte sur sa chaise, la tasse toujours en main, sans un mouvement, sans un geste, une caresse, par la simple force de sa voix, avait réussi, là où même son esprit avait échoué. Le calmer.

Ah.

Oui, maintenant qu'il le disait, voir un Rocket, ou un membre de twilight dans cette chambre, était incongru.

Le fils de Giovanni, mit plusieurs secondes à recouvrer un rythme cardiaque normal, et surtout sa sérénité. Le soi-disant médecin, ne put plus l'examiner, chaque frôlement arrachait un frisson à son patient et il reculait, acculé, méfiant, recroquevillé dans ses couvertures.

Ouais, enfin, susurrait la mauvaise foi du rouquin, ce qui était le plus incongru c'était que ce « médecin » le tripotait, dans un lit.

-Je vais devoir lui donner des calmants à lui aussi. Finit par se résigner l'homme gras et moustachu.

Gold, sans le regarder, ni lui, ni le roux, hocha simplement du chef. Le médecin reprit la tasse de ses mains, et le brun se laissa s'en faire déposséder.

-Buvez. Ordonna le médecin, en tendant le breuvage à Silver.

Un doute s'immisça en le rouquin, qui se rétracta, avant d'effleurer la hanse de porcelaine.

-S…Sa-Ah-Ahm..

Le son, cette fois, manqua de lui arracher la glotte, tant il raclait son palet amèrement. Le gros persiffla.

-Je vais l'examiner après vous. Buvez.

Il lui enfonça la tasse dans les mains, rangea ses affaires éparpillées, dont le stéthoscope, qui trainait encore, à moitié sous le t-shirt de Silver, et se retira, claquant la porte.

Un long silence s'installa, durant lequel, Silver tâcha de regrouper ses souvenirs, séparant illusions et cauchemars de la réalité, tant bien que mal, amèrement. La porcelaine, roula sous ses doigts, sans qu'il n'accepte de boire la tisane droguée. Il n'arrivait pas à se remémorer comment il était parvenu jusqu'à ce lit, un voile blanc d'inconnu brumant sa chronologie.

-Tu t'es évanoui.

La voix rocailleuse de Gold lui arracha un nouveau frisson, mais encore une fois, le brun ne le regarda pas dans les yeux. Silver mit plusieurs secondes à intégrer cet état de fait, et enfin, quand il sursauta et tourna la tête dans sa direction, le brun le prit de cours, comme devinant sa question :

-On est à l'abri, chez le frère de Yuki, Twilight ne peut plus nous repérer grâce aux puces. Sam va bien. Cela va faire…

Gold regarda son pokématos cassé autour de son cou, où une heure était figée, puis observa un radio réveil ridicule surmonté d'un dodrio.

-28 heures, 23 minutes, que l'on a quitté Twilight. Je peux te faire les secondes aussi, mais vu que le temps que je la nomme, elle se sera écoulé, c'est un peu inutile.

L'humour sonna, de manière bien trop abrupte, fausse, aux oreilles de Silver. Plus encore, quand, le brun, évita son regard, alors même qu'il lui parlait. Un frisson remonta l'échine du rouquin, pressentant le drame. A Cristal, à Daniel ? A Sam…Qui…Qui d'autre encore était mort ? Lui-même, se sentait particulièrement épuisé, las, de toutes ses fins. Peut-être, survenues, bien trop rapidement, pour que le deuil ne le rattrape encore, il conservait une avance, obtenue par la fatigue, et son inconscience. Il avait 24 heures, de répits…

Avant de finir dans l'état de Gold.

-Il…Il s'est…Pa-ah-ass…

Il serra les poings, et porta une main à sa gorge, sèche, les lèvres pincées. Bon sang, il avait l'impression d'être revenu au début de sa fuite, quand les mots s'embourbaient dans son gosier, quand aucune parole ne lui paraissait appropriée. Gold ricana nerveusement, accoudé contre le dossier de sa chaise, blême. Les doigts parcourus d'un tic nerveux, il se mordait la langue comme pour ravaler quelques abominables paroles, et par la même, la sensation d'étau qui les étouffait tous. En vain. Mais il se tût. Il ne prononça pas un mot.

Qu'est-ce qu'il y avait à dire, sincèrement ? Qu'est-ce qu'il pouvait encore avouer, qui le faucherait davantage ?

Parce qu'il ne comprenait pas. Il ne comprenait pas comment tout avait pu dégénérer à ce point. Tout comme Silver. Ils avaient tenus, dans l'anxiété du moment, cherchant juste à survivre, mais à présent, dans le silence qui suit les plus menaçants orages, à la rosée anxieuses et à l'odeur du torrent de larmes, encore fraîche, leur ignorance les saisissait. Les frigorifiait.

-Tu avais senti le truc arrivé, hein ?

Le timbre tremblant, cassé de Gold lui arracha une grimace. Mais Silver secoua la tête.

Non. Jamais. Il avait pressenti la catastrophe, les mensonges, les faux départs, mais tout avait été si…Si au de-là de ce qu'il avait pu appréhender…Sa mère, le cerveau, la mort d'Eléanore, Daniel à terre, Sa Sœur transpercée, Marion blessée, Lucas, Capumain blessé…Silver tressaillit, et son poing se ferma sur un pli de la couverture. Cette fois, les mots sortirent, vifs, inquiets, nets.

-Et Capumain ? Et Cristal ?

Et là, la chaise crissa. Gold se leva d'un bond, et sans rien ajouter il se dirigea vers la porte, la démarche raide. Silver abasourdi, eut à peine le temps de sortir du lit, les jambes encore emberlificotées dans les draps, et le corps fatigué, il trébucha lamentablement. Le bruit de la chute, dut être abominable, car Gold s'arrêta, même s'il ne se retourna pas. Les poings serrés, la tête rentrée dans les épaules, et secoué de tremblements, il tourna le dos à Silver. Qui remerciait le ciel, que ses os, n'aient pas cassé comme le pied de chaise, et ses muscles, ne se soient déchirés, comme les draps.

-Gold, qu'est-ce qui te pren…

Silver referma la bouche, et essaya de trouver, une autre façon de le dire. Moins accusatrice. Mais encore une fois, comme à chaque fois, qu'il cherchait ses mots, ceux-ci le fuyaient. Pourtant, il fallait qu'il les trouve, il fallait qu'il demande, si le malheur s'était encore abattu. Pourquoi cette pensée si claire refusait-elle de sortir ?

-Cristal ne m'a pas recontacté. Lucas non plus, mais vu que mon pokématos est cassé, il y a encore de l'espoir. Puis, ils ont suicune pour fuir.

Non justement, ils ne l'avaient pas. N'avait-il pas entendu, cette chose qui avait pris le contrôle d'Eléanore ? Tous les Pokémons légendaires, avaient été endormis. Ils étaient seuls, là-bas, démunis, au milieu de tous les membres de Twilight ; et ils ne les avaient toujours pas contactés. Toujours pas. En plus de 24 heures. Tout tournait encore mal ! Et ce n'était certainement pas Chris et Angie qui allaient les sortir de ce pétrin, ces deux énergumènes étaient à peine capable de se protéger elles-mêmes, après tout, il avait réussi à la rattraper, à lui tout seul. Ce n'était pas bon, pas bon du tout.

Le silence s'éternisait, tandis que Silver ajoutait ses déductions à la longue liste de leurs ennuis.

-Et capu…Je veux dire Capidextre ?

Cette fois, Silver vit très nettement le frisson remonter le long de la colonne de Gold et lui arracher un cri étouffé maladroitement. Mais cette fois, le roux réussit à attraper le brun par le poignet avant que celui-ci ne fuit.

-G-Gold ! Mais qu'est-ce qui te prends à la fin ?

Silver jeta un regard éperdu à son rival d'enfance, habituellement si grande gueule, et inconsciemment courageux, bien qu'il se plaisait à qualifier cette qualité, de débilité en ce qui le concernait. Il lui tournait toujours le dos, les muscles tendus.

-Ce qui me prend… ?

La voix se brisa.

-Je n'ai pas envie de paraître encore plus pitoyable à tes yeux !

Silver écarquilla des yeux, le reniflement de Gold manqua de lui arracher un sursaut, et sa prise faiblit sous la surprise.

Gold pleurait. Ô bien sûr, il l'avait déjà vu pleurer avant. Au Qg rocket, quand il l'avait cru mort. Pour la mort de Yoann également.

Nouveau hoquet en face et cri de rage, alors que le brun tâchait, de lui tourner le dos, de lui camoufler sa peine, et d'écraser les pleurs qui roulaient sur ses joues, de les essuyer grâce à sa manche, en vain.

-J'ai été con, j'ai rien put faire pour empêcher tout ça ! J'ai même rien vu du tout de ce que cachait Eléanore…J'ai rien vu et j'ai rien fait ! J'étais trop obnubilé par ma petite personne…Et…Et…

Il poussa un cri de rage, envers lui-même.

-Et j'ai abandonné ma sœur chez ces gens ! Chez des gens capables de tuer !

Sa voix monta en crescendo dans ses reproches, s'auto flagellant, s'auto blâmant sans répit, il n'arrivait même pas à endiguer le flot de ses propres sanglots, malgré ses efforts, alors qu'il hurlait toute sa souffrance.

-J'ai laissé mon Pokémon mourir !

Silver blêmit, alors que Gold continuait son laïus, de plus en plus bredouillant, et incohérent.

-L'infirmière ne pouvait plus rien pour lui, tout juste le maintenir en vie. Il aurait été alité, à jamais, même pas capable de se réveiller…Il aurait été…J'ai pas été assez fort. Je suis pas assez fort pour supporter ça une deuxième fois. Pas la machine qui aide à respirer, et ce truc, qui nous dit que son cerveau marche à peine, avec des sons… Je peux pas le voir, je peux pas le voir finir comme papa, je peux pas. Je peux pas ! Je peux pas !
-Tu l'as…

Silver se mordit la lèvre.

-J'ai refusé qu'il soit maintenu en vie comme ça ! S'indigna Gold, dont la conscience, se battait avec l'écho de ses sentiments, dans une bataille contradictoire, qui causait bien plus de tort, que de bien.

Et un ricanement, un ricanement dégouté, monta dans la chambre, bien plus révélateur, suintant bien plus de douleur que toutes les larmes du monde. La marque même, de la déchirure, de la séparation qui liait raisons et sentiments, où la logique n'est plus de ce bord, où il n'y a que souffrance et perte, où les larmes signifient la joie et le rire la peine. Où le monde est inversé et où les protégés, et les soutiens périssent avant les maîtres, et les protecteurs. Où ; tout ce qu'on peut encore faire, c'est rire de sa propre impuissance et stupidité.

-C'est pathétique hein ? Je suis même pas capable de protéger mes Pokémons…Je suis un dresseur pathétique…Je me demande comment j'ai fait pour te battre sur la route victoire…Je…Je comprends pourquoi tu me détestes, moi aussi je…

Comment, un être aussi sûr de lui, et fier de son parcours, comme Gold, en était arrivé à une telle déchéance… ?

-Moi aussi je me serai filé un coup de poing, et pire encore !

Silver eut un haut-le-cœur, alors qu'il évoquait ce sujet, et les dernières paroles d'Eléanora, lui vrillèrent les entrailles. « T'as merdé ». Oh, oui, il avait royalement merdé.

-Non, Pour ta…Tes sentiments je…
-Oh c'est Bon ! Le message a été très clair !
-NON !

Cette fois Silver, l'obligea à lui faire face, et la vision de ses joues rouges et de ses yeux gonflées, aux paupières boursoufflées par la fatigues et les pleurs, son cœur se serra. Ses mots s'engluèrent dans son gosier. Contrairement à Gold, qui lui, le rejeta de toutes ses forces.

-Mais bordel ! Tu piges pas que ça a fait assez mal la première fois ?! Tu veux quoi ? Me refiler un autre pain dans la figure ? Tu veux me répéter à quel point je suis minable ?! Je le sais que je suis minable tu me le répètes depuis notre première rencontre ! Je sais que c'est les minables qui chialent ! Je sais que je suis un GROS MINABLE ! CA y EST T'ES CONTENT ? Je suis un MINABLE ! UN MINABLE MÊME PAS CAPABLE DE PROTEGER...

Gold hoqueta.

-De protéger mes amis…

Il se laissa tomber à genoux, comme épuisé.

-De protéger ma sœur.

Et se recroquevilla sur le sol dans un sifflement étranglé.

-De protéger Capumain…

Silver, pétrifié, scruta la pièce à la recherche d'une aide quelconque, d'un secours capable d'apaiser les pleurs de son compagnon, mais rien ne vint. Personne ne vint. Il était seul spectateur et témoin de ses faiblesses. Doucement, il s'accroupit, et mâchonna, prémâcha ses mots, sans en trouver un qui lui paraisse digne et à la hauteur de la souffrance engendrée par la trahison et la vérité. Alors, hésitant, il fit, ce que Gold lui-même lui avait enseigné. Mais quand ses doigts effleurèrent l'épaule du brun celui-ci le repoussa d'un vif mouvement de bras.

-Fait pas ça ! Me donne pas des illusions ! J'en ai assez des illusions ! J'en ai assez de…

Des mensonges, des efforts vains, des échecs, de tout. Il aurait souhaité juste s'allonger au sol, et se débarrasser de tous sentiments, de toute émotion, pour ne plus rien ressentir, ni bonheur, et encore moins malheur. Est-ce que…son capidextre, lui avait droit à cette accalmie ? Avait-il droit, à ne plus dépérir sous la pluie éternelle d'un amour non partagé, à défaut d'avoir vécu une douce et tendre idylle ? Lui épargnait-on, au moins, les échos pénibles, parsemant l'existence, puisqu'il ne pourrait jamais les vivre ?

-Je suis un minable aussi.

Gold sursauta, et il leva les yeux, en direction de Silver, agenouillé face à lui, son regard d'argent fixant, penaud, la moquette grise, sans volonté.

-Tu dis n'importe quoi…Toi…toi tu a agis…toi tu as su protég…
-Parce que tu étais là !

Silver se mordit les lèvres, à tel point qu'elles en blanchirent.

-C'est grâce à toi, que j'ai pu affronter mon père ! Grâce à toi que je me suis ressaisi là-haut pour aider Sam ! Grâce…
-Je n'ai rien fait…
-Si tu étais là ! Tu étais présent, et…

Silver poussa un grognement furieux, et se passa une main dans sa frange, avec épuisement.

-Regarde-moi, bon sang…Sans toi, je n'aurais jamais aimé mes Pokémons, sans toi, j'aurais été incapable de sauver ma propre sœur…Deux fois. Je l'aurais abandonné à son sort. Et pourtant…je suis même pas capable de…Je sais pas dire ça correctement…Je sais même pas comment…

Il plissa les paupières.

-C'est moi le plus minable de nous deux, j'ai blessé ceux que j'aime tellement de fois…Trop de fois, regarde où ça a conduit ma mère…où ça a conduit Eléa…Sam…

Il secoua la tête avec véhémence.

-Et je sais même pas comment l'expliquer, j'arrive pas à…

Il se ferma, et se crispa, pendant quelques secondes, muet, devant un Gold, trop épuisé par le deuil, pour réaliser complètement.

-J'aurais peut-être du détourner les yeux ? Je…Toi…Quand j'ai pleuré, tu as regardé ailleurs, et…je…c'est ce qui fallait faire mais je…

Il s'empourpra, paniqué.

-Mais…je…

Cette fois, Gold le laissa poser sa main sur la sienne.

-Je ne veux pas te perdre…Mais je veux être là…Je veux être là p…p-…

Ses doigts ripèrent, et s'agrippèrent à la manche de Gold, comme pour lui voler un peu de force, de courage, ou tout du moins, pouvoir s'appuyer sur lui. Jamais Silver n'aurait crut, qu'il était si difficile d'avouer ses sentiments, alors qu'il les savait réciproques.

-Je veux…

Je veux rester avec toi. Je veux…Je veux…L'amour est décidément un sentiment si égoïste, et pourtant, si altruiste. Parce qu'il voulait son sourire, son bonheur, il voulait empêcher ses larmes de couler. Empêcher la peine de le toucher, le rassurer. Tout comme il l'avait fait autrefois pour lui. Mais il n'arrivait pas à l'articuler à haute voix, comme de nouveau gamin ; face à un monde trop cruel et noir.

-C'est pas ton genre…De dire je t'aime…hein, Silver ?

Le rouquin sursauta, pris en dépourvu, sur le fait. Gold soutint son regard, avec une expression indéchiffrable, alors qu'il se penchait en avant. La distance qui les séparait se combla pour un tendre contact. Mais Silver se raidit, et dans un frisson, repoussa de nouveau le brun.

Les mains plaquées sur les lèvres, comme pour les protéger, il osa un coup d'œil en direction du brun. Mais celui-ci souriait, faiblement, résigné. Encore, ce sourire de douleur.

-Il n'y a rien dans tes yeux.

Un constat, froid, direct. Silver secoua la tête.

Non, ce n'était pas ça. Il appréciait le contact, il appréciait bien plus ses lèvres à lui, que celles d'Eléanore…Mais…Mais…

Il avait peur. Non, il était terrifié. Terrifié, par l'amour, terrifié par les caresses, terrifié de ne rien pouvoir contrôler, son corps, ses sentiments, et encore moins l'autre. Parce que l'amour est un sentiment, où l'on se donne, et lui, avait déjà trop donné.

-L'amour n'existe pas chez toi. Continua simplement Gold. –Mais…c'est moi qui suis stupide, je le savais…J'ai juste, été incapable de l'accepter. Tu ne diras jamais je t'aime, ce n'est pas ton genre, les marques de tendresses non plus…Même réconforter les gens, c'est pas ton genre. J'ai été stupide de croire que…

Gold s'arrêta, Silver posa ses lèvres sur les siennes ; timidement, maladroitement, et pourtant, il lui tenaillait si fermement les bras que le tissus de ses manches, crissa. Et le geste dura. Se prolongea. S'approfondit.

-Tu es…mon unique exception.

Ce fut ses mots, bancals, quand le baiser se rompit, ce fut ses simples mots, avant qu'il ne devienne rouge écrevisse, et ne bafouille, en luttant pour soutenir, tenir, dignement, le regard abasourdi de Gold.

-Je t'aime.

Gold se tût, mais doucement, il glissa dans ses bras, et colla sa tête contre son torse. Pour laisser ses larmes couler.

Cristal, et son Capidextre…Ne lui en voudraient pas, de, se laisser aller, juste une minute, lui le minable incapable qui n'avait put les sauver, dans le doux réconfort de ses bras, pour goûter enfin, à une accalmie. A cet amour qu'il avait tant désiré. N'est-ce pas ?

Cherchant, soutien, confirmation, cette étreinte se fit plus langoureuse. Parce qu'il faisait froid dehors, parce qu'il faisait froid en son cœur, et que la chaleur, si elle dégelait ses doutes, avait au moins le mérite, de lui faire oublier l'étau de glace et de mort écrasant tout autour d'eux. L'espace d'une seconde. Juste une seconde.

Ses bras crochetèrent le dos de Silver, pour agripper désespérément son t-shirt

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Shinobu, attendait avec Akira, que le médecin arrive, pour examiner, Samantha, dans le silence oppressant de la chambre, et l'atmosphère lourde et grave, pas un d'eux n'avait proféré un seul mot, comme, redoutant, justement, ces reproches qui devaient être énoncés. Mais Shinobu, ne savait pas lequel des deux, craignait le plus les lames acérées des paroles tardant à venir, lui, ou bien Akira, qui en cet instant, se concentrait à caresser avec tendresse et inquiétude le crâne de son élève assoupie.

-Hikaru est mignon, tu ne trouves pas ? Entama-t-il, sur un ton, faussement superficiel.
-Il a du coffre. Répondit simplement son frère cadet, neutre.

A nouveau, un silence, embarrassant, où Akira se contenta de regarder dans le vide, quoi qu'il ne puisse pas faire grand-chose d'autre, avec sa mauvaise vue. Et, là, les gonds sortirent d'eux même, probablement, parce qu'avec leur arrivée impromptue, ils leurs volaient une nuit de sommeil, que le planning, shinobu de veille la semaine, et Lily le week-end s'était vu bouleversé, en tout cas, Shin fronça les sourcils, et siffla, rude :

-J'ai appelé nos parents il y a quelques mois.

Akira hocha du chef, puis, après une seconde, où l'information se fraya un chemin jusqu'à son cerveau, il sursauta.

-Tu as fait quoi ?

Shin plongea ses iris, si similaires à celles de son cadet, droit sur lui, bien qu'il sache parfaitement cet appui réprobateur inutile, les habitudes avaient la vie dure.

-J'ai appelé, nos parents. Répéta-t-il distinctement. –Et je leur ai dit la vérité. Que nous étions vivants, tous les deux.
-Tu m'as balancé, en prime ? S'insurgea Akira.
-Comme tu m'as balancé pour Lily ! Répondit Shin.

Oui, mais là, c'était bas, et mesquin, voilà ce qui était écrit sur tout le visage de son frère, indigné, et Shinobu, tâcha de l'ignorer, même si sa conscience à lui, bien plus développée que celle d'Akira, lui fit payer la note, en sentiment de culpabilité, pour rétorquer :

-Je leur ai dit, que je n'étais pas encore prêt à leur montrer leur petit-fils, que j'avais encore, trop peur d'eux et de leurs ambitions dévorantes, qui m'ont pourrie la vie. Je leur ai dit, qu'un jour, peut-être, ils le verraient, mais que jusque là, ils devraient se contenter de photos, et de lettres.
-Mais pourquoi t'as fait ça ?

La question, tomba, dans toute sa gravité. Shin sentit le poids des questions et des raisons le peser, le submerger, alors il serra les poings.

-Parce que je suis devenu Papa.

Il secoua la tête. Parce qu'il avait réalisé, que perdre Hikaru, aurait été bien pire pour lui, que sa propre mort ou celle de Lily. Parce qu'il avait, effleuré, la souffrance, qu'il avait bien put causer à ses parents, du bout des doigts, et que son ampleur l'avait horrifié. Peut-être, également, pour soulager sa conscience, alléger le poids qui encombrait ses épaules, alors, qu'à chaque nouvelle promesse, chaque rire d'Hikaru, il se rappelait, qu'il ne connaitrait jamais ses papys et mamies. Mais il donna une toute autre réponse à son jeune frère.

-Parce que, dans tous les livres pour enfants que je lis à Hikaru, on y enseigne…Que ce qui distingue les vraies héros, des gens du commun, c'est que eux, ils affrontent au lieu de fuir. C'est la lâcheté, qui sépare les humains. Et je ne voulais pas qu'Hikaru sache que son père soit un de ces lâches.
-Ah ouais tu lis ça, parce que moi, dans la pile de bouquin, j'ai surtout survolé l'histoire d'une chieuse qui se plaint et qui a pour seul ami un cactus. Temporisa Akira. –Et elle aime un vampire qui fait veilleuse en prime.
-Ca, c'est un livre que nous a offert Kain à la naissance d'Hikaru…Se lamenta Shin.
-Ouais, vaut mieux qu'il s'en tienne aux disney dans ce cas…
-C'est ce que je lui ai dit…

Après son soupir exaspéré, à l'encontre de leur vieux mentor –qui faisait parasite chez lui, près de 80% du temps – Shinobu se rendit compte, qu'Akira avait réussi à faire dériver le sujet, comme dans leur enfance, et il se morigéna intérieurement de sa propre faiblesse.

-Là n'est pas la question. Coupa-t-il.
-Si justement, toute la question est là, comment un bouquin, si chiant, a-t-il pu aussi bien réussir au point d'être comparé à l'illustre Harry Potter, quoi que j'ai décroché, au 5, parce qu'Harry tournait meilleur-ami-des-cactus lui aussi…
-Akira !

Son frère tressaillit, et rentra sa tête dans ses épaules, pris sur le fait, exactement, quand ils étaient enfants. Il n'y avait bien que Shinobu, capable de le mettre face à ses erreurs parfois. A ce genre de souvenir, Shin sentit la colère retomber, au tout du moins se teinter d'amertume et de compassion. Il détourna la tête, et fixa le sol, la moquette.

-Ce que je veux dire, Akira…C'est que tu es lâche.

Akira ferma les yeux, et se mordit la langue. Comme il s'y attendait, la remarque faisait mouche.
-Si tu fais référence à hier, quand tu as pété un câble, et le bonheur à portée de main, blabla…Tenta-t-il.
-Pas seulement, l'interrompit son aîné sans lui laisser le temps de s'expliquer.

Shin poussa à nouveau un soupir, extrêmement calme, et c'était peut-être, ça qui contrastait de leur enfance, avant, il lui criait dessus, l'houspillait pour ses devoirs, et jouait les consciences farouches, mais l'entendre lui lancer ses quatre vérités, de manière si sereine, le déstabilisait. Et parait ses paroles, d'une crédibilité, insoutenable.

-Tu m'as dit qu'elle était trop jeune pour toi, Akira, tu dis, que tu n'es qu'un chapitre de sa vie, alors que pour toi, elle en est la fin…Mais tout ça, ce ne sont que des excuses. On ne sait jamais de ce que demain sera fait ! Tu peux très bien tomber amoureux, dans la rue, d'une autre ! Tu dis ça, car tu n'es pas objectif, en cet instant. Parce que tu es lâche, et que tu tiens trop à elle. Donc tu fuis, tu fuis pour ne pas la blesser. Pour ne pas te blesser aussi. Mais au final, vous vous faites bien plus de mal comme ça.

Le voir démonter les barrières, qu'il avait vaguement dressé, fit mal, comme il s'y préparait, et il était trop fatigué, trop inquiet pour Sam, pour chercher d'autres faux semblants. D'autres excuses.

-Et tu es lâche, aussi, parce que…Tu ne prends pas…Tu ne te places pas en coupable, dans le résumé de ton histoire. C'est les parents, les fautifs, c'est Twilight…Mais, tu as ta part de responsabilités dans tous cela, on est jamais vraiment coupables ou innocents.

Il le savait ça. Il ne le savait que trop bien, mais ça lui perçait tellement le cœur, d'imaginer être un des engrenages, qui avaient mené à faire sonner d'un tel glas, l'horloge gigantesque de la Fatalité.

-Peut-être, que je suis lâche…Mais on l'est tous un peu. Finit par murmurer Akira.

Shin sourit vaguement, et il ferma les yeux, fier, comme un professeur, qui se voit dispenser d'achever sa leçon, dépassé par les déductions de son élève.

Parce qu'Eléanore, aussi, avait commis, la première lâcheté de sa vie, en se réfugiant dans la mort. C'était lâche, et stupide, de se sacrifier. Tout simplement. Elle aurait du, se battre, chercher une solution avec eux, tenter le coup, contre Arcéus, contre cet « Apocalypse » dont le dieu avait parlé…

-La lâcheté…Nous fait commettre beaucoup d'erreurs, n'est-ce pas, Shin ? Balbutia-t-il, ébranlé.

Shin secoua la tête.

-Oui, mais elle nous permet de survivre aussi. Je sais que je n'aurais pas pu survivre une seconde de plus sans fuir la maison. Et je sais, que si vous n'aviez pas fui, cet espèce d'endroit, vous seriez morts également.

Il se mit face à lui, et le toisa avec gravité.

-La lâcheté, permet de se reposer, pour un temps. Elle permet, de souffler, comme dans une partition de musique. Mais ce n'est qu'une étape, ce n'est qu'un instant, avant de reprendre la mélodie.

Il secoua la tête.

-La lâcheté, est indispensable, elle est part inaliénable de l'homme, mais elle ne doit rester, que temporaire, si l'on ne veut pas s'y empêtrer, pour vivre dans un quotidien morne, om tout nous déplait. Et c'est ça, ça, qui différencie les héros des gens du commun. Ils savent, quand reprendre la lutte.

Akira tressaillit, et Shin posa une main sur son épaule.

-Tu comprends Akira ?

Son jeune frère cadet, lui envoya un sourire maladroit, avec une voix piteuse.

-En gros, tu me demandes, de jouer les héros… ?

Et Shin sourit, ironiquement. Parce que c'était ce qu'on leur avait toujours enseigné, de ne pas faire. Et tout ce qu'il avait enseigné, aux enfants, à son tour.

-Juste une fois. Cette fois. Approuva Shin, gravement.

Akira grimaça.

Son frère, lui demandait implicitement de se bouger, de ne pas rester chez lui à se morfondre, et de répliquer. Il lui demandait de prendre sa vie en main, plutôt, que de se laisser porter par le courant. Et maintenant, Akira comprenait, pourquoi, il n'avait jamais été un bon nageur : pour nager, il faut savoir se lancer, et battre des pieds, envers et contre tout, pout remonter la rivière.

Il était, peut-être temps, qu'il apprenne, au moins, quelques mouvements de brasse.

La porte s'ouvrit, sur le médecin et sa sacoche, avec son odeur de médicament, le suivant comme un fantôme. La flagrance lui agressa les bronches, et lui souleva le cœur. Tant par sa répugnance, que par, tout ce qu'elle impliquait. Alors, doucement, Shin lui murmura :

-Cette fois, Akira, cette fois...Encore, une fois, tu peux être lâche.

Alors Akira se leva et quitta la pièce.

Pour ne pas avoir à entendre le verdict, pour ne pas avoir à payer le prix de ses erreurs, craignant, bien plus, le coût, que ma sentence qui en découlerait. Mais il savait, au fond de lui, qu'il devrait y revenir. Qu'il devrait s'asseoir, sur cette même chaise, inspirer, profondément, prendre la main de Sam, et écouter, affronter.

Ce n'était qu'un pas en arrière, pour mieux prendre son élan, et sauter dans un gouffre, dont il ne connaissait pas la hauteur.

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Gabriel huma le pyjama qu'on lui avait fourni. Grand, et doux, il le frotta contre sa peau avec lenteur. Mais rien n'y fit, il avait désespérément froid. Le confort, aussi généreux était-il, n'apaisait ni la fatigue, ni même l'effroi. Les heures de sommeils, rattrapées à la hâte durant la nuit, non plus, ne calmait pas ses nerfs, à fleur de peau. Le cadet de Kazamatsuri se sentait, épuisé, d'une lassitude mentale, bien au-delà, de celle physique. Plongé dans une espèce de torpeur, où chaque bruit se répercutait dans son crâne, puis glissait tel de l'eau, pour le geler, il tâchait de garder pied, une attache ancré à la réalité.

Il tâchait, de se forcer à ne penser, qu'au présent. Parce qu'il savait, qu'il se noierait entièrement, s'il plongeait dans les souvenirs de la veille, qu'il risquait de suffoquer en songeant à l'avenir si incertain. Alors, il songeait, au bourdonnement perpétuel que produisait le Métaloss d'Akira Yuki, tandis qu'il éliminait consciencieusement les puces pouvant trahir leur position. Il regardait la tasse de tisane que lui avait gentiment donné la dame brune –dont il avait oublié le prénom- au petit matin, quand il s'était réveillé. Et pas Daniel.

-Tu veux que je mette du Miel d'apitrini dedans ? Ta famille en a toute une ruche, près du lac, il nous en donne assez régulièrement…D'ailleurs, ils ne devraient plus tarder à arriver. Je les ai appelés tout à l'heure.

Ne pas penser au diagnostic vital que le médecin allait annoncer, à propos de son frère, juste sur le liquide limpide qui tournoyait dans la porcelaine, brûlant.

Lily s'affairait, à la cuisine, à faire une sorte de porridge, pour ce papy grincheux qui jouait à à-dada avec le bébé. Elle se tourna vers le gamin aux yeux vairons, et lui leva le bout du menton. Le gamin se laissa faire, et son regard vairon croisa, penaud, le sien.

-Allez…ne t'en fait pas. Ca va aller.

Ne pas penser qu'il allait falloir tout avouer à sa mère, dire aux autres, que Nathaniel était mort, et que Daniel était dans un état critique…Qu'ils allaient probablement devoir se cacher, car Twilight connaissait leur adresse, abandonner leur maison…Ne pas penser à tout cela.

La porte du couloir s'ouvrit, et le frère d'Akira, Shinobu, une espèce de grande tige, enroulé dans des vêtements trop larges et tâchés de peintures, arriva. Ses cheveux noirs, étrangement bien coupés, en un carré plongeant. Ses yeux bleus profond, si similaires à ceux de son sang, coulèrent vers Lily, et il grimaça, pour laisser passer le médecin dépêché le matin même, et tiré du lit aux aurores pour venir ausculter les blessés.

Gabriel sentit ses muscles se tendre douloureusement, alors que son gosier s'asséchait.

Le petit bonhomme, cliché typique du médecin de bourgade, enrobé, malgré les recommandations assommantes du ministère de la santé sur une alimentation équilibrée, petit, moustachu, binoclard, et avec une calvitie naissante – quoiqu'avec ses cheveux gras peu ragoûtants, beaucoup le préférait chauve.

Ce dernier sortit un petit mouchoir de sa poche et s'essuya le front, spongieux, ruisselant de transpiration, alors que le visage rouge – comme si faire quelques pas lui demandait les pires efforts, et il hocha de la tête. Négativement.

Gabriel en eut la nausée, et la main que posa Lily sur son épaule, loin de le rassurer, lui fit comprendre, que rien de bon ne sortirait des lèvres pincées du médecin. Des larmes refusant de couler crépitèrent sous ses paupières lourdes.

-Je ne sais pas à quoi ils ont joué, tous autant qu'ils sont, mais leur place est dans un hôpital, pas ici. Grommela le médecin.
-Nous avons essayé, d'appeler une ambulance, mais plus aucun hôpital de la région ne prend encore des patients.

Le gros persiffla, et d'un mouvement sec de poignets il fit taire Shinobu, comme si celui-ci ne racontait rien d'autres que des inepties.

-Le roux, il est en état de choc, mais s'est réveillé, ça va aller, c'était juste une petite hypothermie, et de la fatigue, il est possible aussi, que ce soit un malaise hypoclycémique, s'il n'avait pas mangé depuis plus de quatre heures. Donnez-lui de l'eau sucrée pendant quelques jours, et vérifiez qu'il mange. Je lui ai donné des calmants, à lui et au petit brun, donc vous devriez ne pas les entendre pendant un moment. Les calmants, ça donne pas tout à fait les idées claires, mais ça retient tout, donc je vous conseille, s'ils ne savent pas encore, de leur avouer ce qui risque de les choquer tout de suite ! Ca évitera les crises d'hystéries.

Le médecin s'essuya ensuite les mains et souffla :

-Les plus préoccupants restent Daniel et la Gamine.

Il enleva la poussière imaginaire de ses lunettes.

-La Gamine a besoin de passer une échographie cardiaque, je n'aime pas ce que j'entends avec mon stéthoscope. Elle a aussi une tension trop basse, d'où sa perte de connaissance, à mon avis.

Comme si cela n'était pas évident, il ajouta, gravement :

-Et à son âge, ce n'est pas bon. Pas bon du tout. La fièvre me fait assez peur, elle est haute et ne baisse pas, sa nuque est raide, mais elle ne tousse pas, donc ce n'est pas une méningite. Quand elle se réveillera, rappelez-moi.

Shinobu se tût, et fit volte-face pour disparaître dans le couloir, certainement pour tenir au courant son frère. Ou tout du moins le consoler, même si Lily, lisait l'agacement et la colère dans les yeux de son compagnon en cet instant, il savait que son frère, avait besoin d'une épaule, et pas de sa conscience incarnée.

-Pour Daniel…

Le médecin se mordit la lèvre inférieure, et posa sur Gabriel un regard sévère.

-Je ne sais pas encore dans quoi il s'est retrouvé à cause de toi…

Gabriel ne répondit rien. Parce que le médecin, était celui de sa famille, il les connaissait, tous, avait aidé à leurs naissances, avait soigné leurs rougeoles et leurs exéma… Il avait été celui qui avait soigné Daniel toute sa vie. De ses premières blessures dans la vie, comme les brûlures dont il avait écopé en aidant à éteindre un léger feu en maternelle…Ou encore les coupures profondes nécessitant des sutures, après que lui et Lucas ne soient venu au secours de Gabriel, à la recherche d'un signal étrange. Il avait été celui qui avait appelé une ambulance quand Daniel, à la suite de la fugue de Lucas, s'était mis à vomir tripes et boyaux…Il savait, mieux que quiconque… Que Daniel ne se blessait jamais pour lui-même.

-Je ne sais pas. On dirait qu'il est conscient, mais il n'a plus aucun réflexe, ni mouvement. Il s'est pris des cage-éclairs, vous dites ? Combien ?

Gabriel n'osa pas hocher de la tête, ou même lever les yeux, tandis qu'il murmurait :

-Au moins 3…

Le médecin fronça les sourcils.

-Si vous avez de la chance, ses nerfs ne subissent que le contrecoup du coup de jus. Mais vous aurez de la chance. Sinon, vous pouvez commencer à prier. 1 cas sur 5 fini paralysé à vie, après une seule cage-éclair. Deux cages éclairs, et c'est 5 cas sur 10 qui finissent en état végétatif. Tu es intelligent Gabriel, tu peux estimer toi-même les chances de ton frère. Non mais sérieusement, vous avez joué à quoi ?

Lily fit un signe négatif de la tête, mais le docteur l'ignorât, jusqu'à ce qu'elle lui lance son célèbre regard noir. Il remit ses lunettes en place, et siffla.

-Je comprends pourquoi les enfants de primaires arrivent en masse dans mon cabinet, avec une prof pareille.

Lily devait avoir appris à contrôler ses émotions et ses coups de colère, car elle ne brisa que la tasse emplie de tisane qu'elle tenait, d'une simple pression de la main, la porcelaine vola en éclat. Comme pour signifier au médecin, que cela aurait très bien put être sa nuque à lui.

Le message passa très bien, car le dénommé médecin, partit, aussitôt après avoir reçu ses honoraires, sans demander le plus petit pourboire. Aussitôt la porte fermée, Gabriel plongea la tête dans ses mains, et après un long moment, où il sentit ses yeux lui brûler, s'embuer, où il se pinça, se mordilla les lèvres, cherchant à ravaler les sanglots, il finit par siffler :

-Danny va mourir.

Et de grosses gouttes lui échappèrent, roulèrent sur ses joues librement, sans qu'il ne cherche même à les retenir à présent. Lily paniqua, s'agenouilla, et secoua la tête vivement.

-Mais non voyons, ce n'est pas ce que le médecin a dit !
-SI C'EST-CE QU'IL A DIT : VOUS CROYEZ QUE JE SUIS STUPIDE OU QUOI ? C'EST PAS PARCE QUE JE SUIS UN ENFANT QUE JE NE COMPRENDS PAS CE QUE LES ADULTES DISENT ! ET IL A…
-Il a dit, qu'il avait de grandes chances, de mourir.

La franchise de la brune coupa le souffle au petit, dont la colère retomba d'un coup. Lily en profita pour l'étreindre, tendrement, alors qu'elle répétait, sa propre voix, vibrante d'un mélange d'espoir et de désespoir.

-Il a dit, qu'il avait de grandes chances de mourir, mais pas toutes les chances. Un état critique ça ne veut pas dire fatal.

Gabriel hoqueta, et ses doigts s'accrochèrent à la chemise de nuit de cette femme, illustre inconnue ou presque, sans pudeur.

-Je ne veux pas…Articula-t-il difficilement.

Lily le pressa un peu plus contre lui, et se mordit la lèvre inférieure.

-Je ne veux pas que Daniel meure !

Et elle sentit les larmes rouler, incapable de les endiguer, impuissante face à la douleur et à la peur. Elle ne pouvait qu'offrir ses bras, qu'apporter du réconfort, son lot d'espoir, aux parures si minces et si peu visible, comparé à la crainte aveuglante qu'apportait l'incertitude. Lily ne compta pas les minutes qui s'écoulèrent, où, sans argument, ne put qu'essuyer les larmes, d'un garçon, trop petit pour vivre un tel drame. Mais quand est-on prêt à cela ? Lily elle-même, ne se sentait pas assez grande, pas assez mâture, pour supporter la perte de quiconque.

-Hey…Dis-moi, Gabriel…Comment est ton frère ? Balbutia-t-elle, doucement, quand elle sentit les haut-le-cœur, s'amoindrir, pour n'être plus que vague hoquet, à la bile, bien trop grosse, pour sortir.

Il y eut, comme un silence, et après un reniflement, une hésitation, les mots coulèrent.

-C'est le meilleur…

Lily, ignorait, combien il coûtait à ce petit bonhomme à l'orgueil trop énorme, pour l'avouer. Elle se contenta de lui caresser longuement les cheveux, dans une caresse réconfortante, le poussant à continuer. A ce rappeler, des bons moments, des rires, de leurs liens, de leurs passés, sur les choses sûres qui ancraient sa mémoire et formaient de magnifiques souvenirs, contrairement au sulfureux présent, et au brumeux avenir.

-On a la même tête…Mais on est si différents…Lui il a confiance en rien, et il a toujours été lent…Et moi…je…

Il marqua une pause, et ravala sa salive.

-Moi, je suis un égoïste qui pense qu'à lui, et un génie d'après tout le monde…

Lily grimaça.

-J'pensais, tellement que je lui étais supérieur…Mais c'est toujours lui qui me sort du pétrin, c'est lui qui m'a aidé à l'école, quand j'avais des ennuis avec le directeur…C'est lui qui m'aide, tout le temps…
-Je suis sûre que tu l'aides toi aussi, à ta manière.
-J'ai tout fait foiré…J'ai foutu tout en bazar dans sa vie…Je le prenais pour une bonne poire constamment, mais…

Il avait été aussi perdu que lui. Il avait été tout aussi mal à l'aise, sous les regards tantôt haineux, tantôt jaloux de ses frères et sœurs, qui voyaient en eux, le reflet d'un mauvais père. Lui, avait juste toujours été plus doué pour le dissimuler.

Les souvenirs défilèrent, comment Daniel avait du aller le répêcher dans le bassin des Pokémons tortues au zoo, comment il avait caché à leur mère, que Gabriel avait manqué le renvoie un jour, à son école, les doutes, les conversations le soir, dans leurs chambres, les regards condescendants, les sourires désolés d'être ce qu'il était.

Combien de temps, passèrent-ils, ainsi, à simplement évoquer, les erreurs du passé, les faux-semblants, les non-dits, drames si communs des familles ? Lily en perdit le compte.

Alors, quand la main de Shinobu se nicha sur son épaule, lui arrachant un frisson, elle eut un pauvre sourire. Le frère aîné des Yuki le lui renvoya, compatissant, son regard coulant, dans le salon, où L'infirmière Joëlle de Jadielle, aidait Kain à s'occuper du petit Hikaru ; pleurant encore à chaudes larmes, comme pour se concentrer, sur une autre douleur, que la leur.

Le tintement clair de la sonnette, les tira de leurs rêveries, hagardes et floues, et Lily sentit Gabriel se raidir dans ses bras, et comme s'affaisser, quelques secondes plus tard, quand pénétra dans la cuisine, la ronde Lyndis. La voisine, la mère Kazamatsuri, en tablier, prête à aller travailler aux champs, suivie, par, et cette fois, Lily fut certaine que Gabriel vacilla, une grande rousse à la coupe au carrée, l'aînée des filles de la fratrie, Alice.

-Alors, ils sont où les morveux qu'ont encore merdé ? Lança d'ailleurs cette dernière, main sur les hanches, scrutant la pièce, à la recherche de l'ombre de ses frères, un sourire, mi-figue, mi-raisin, à la fois exaspéré par la corvée « ramassage » et ravie de bientôt à assister à la scène, de sa mère furieuse, corrigeant comme il se devait, Gabriel, et en bonus, l'intouchable Daniel.

-Ce n'est pas trop grave, n'est-ce pas ? J'ai du m'occuper de réveiller les petits et de leur faire leur petit déjeuner avant…Ils sont avec leur oncle, pour qu'il les emmène à l'école… Il y en a pour longtemps ? Ajouta Lyn, qui essuyait ses grosses mains rugueuses de fermière, contre un chiffon, beaucoup moins sûre d'elle que sa fille.

Lily esquissa un mouvement pour se lever, et Lyn fut la première à remarquer la silhouette frêle de son fils, aux yeux boursoufflés par le chagrin. Elle blêmit.

-Oh Arcéus, Gabriel, qu'est-ce qui...
-C'est-à-dire, Lyn, commença maladroitement Shin, mal à l'aise.
-C'est compliquée, madame, vous devriez peut-être vous asseoir, ajouta Lily, précautionneuse.

Cette fois, Lyn blanchit furieusement, et Alice décroisa les bras, fébrilement, arquant un sourcil, perplexe, et fronçant l'autre, avec appréhension.

-Ne m'appelle pas Madame Lily ! Au cas où tu l'aurais oublié je garde Hikaru tous les mardi soir pour votre sortie en amoureux ! Alors, ne m'appelle pas Madame !

Elle se pinça les lèvres, et à la rage, se substitua la peur.

-Madame, c'est comme ça qu'on s'adresse à quelqu'un avant de lui annoncer une mauvaise nouvelle…

Cette fois, Alice se tourna, droit vers Gabriel, et avec un regard accusateur, elle siffla :

-Qu'est-ce que tu as ENCORE fait toi ?

Cette fois, Gabriel se leva, la tête basse, penaud, et avant que Lily n'ait put reprendre Alice, -bien que la brune commençait à se demander sincèrement qui elle protégeait, pour que tout le monde l'accuse de la sorte, de manière quasi instantanée- qu'il balbutia faiblement :

-Maman...

La concernée, posa la main à sa bouche, et se précipita vers son fils, qu'elle palpa de partout, inquiète :

-Qu'est-ce qu'il y a mon bébé ? Tu as mal quelque part ? Montre-moi ça, qu'est-ce qu'il y a mon petit diablotin ? Dis-moi, tu as un problème ?

L'utilisation de ce petit surnom, fit de nouveau céder les barrières de Gabriel, qui écrasa une nouvelle larme du creux de sa paume, avant de bredouiller d'une voix brisée.

-C'est papa…

Ce qui entraîna un sifflement dédaigneux chez Alice, plus du tout concernée.

-Encore cet abruti…
-Alice, ne parle pas comme ça de Nath. Lança clairement Lyn, dont le visage, s'était lui aussi adouci, à la mention de ce nom.

Elle sourit tendrement, et prit son fils dans ses bras.

-Allons, allons, je ne te croyais pas du genre à pleurer pour un mot dur de la part de ton père Gabriel. Allez, raconte-moi donc…Qu'est-ce qu'il a dit pour te vexer à ce point ?

Elle était tellement, à côté de la vérité, sa plus grande crainte, en ce qui concernait Nathaniel, son compagnon pendant plus de 10 ans, était qu'il ait proféré quelques paroles traumatisantes à ses enfants. Comment, comment la réalité qu'il avait connu, avait-elle put basculer à ce point ?

-Et Daniel aussi…Et Lucas…Parvint-il à articuler, la mâchoire si lourde, si enraillée, comme une articulation, rouillée, dont chaque mouvement, arrachait un crissement odieux et douloureux, dans une poudre rousse, témoignant de ses gonds malmenés.

Cette fois, Lyndis afficha une mine, déboussolée, et ses prunelles oscillèrent légèrement, dans le doute, dans la réflexion, avant qu'elle n'hasarde :

-Il a dit quelque chose qui a réussi à les vexer, tous les deux ?

Et un éclair de compréhension passa devant ses prunelles, elle frappa du poing sa paume ouverte, comme pour confirmer cette illumination.

-Il leur a dit qu'ils étaient sûrement gays !

Avant de poser la main devant sa bouche, et de lever les yeux, avec un embarras pudique.

-Moi aussi, je t'avoue, que je le crois…j'ai même un album tout prêt rien que pour eux et leur histoire dans la bibliothèque de la famille…

Et elle secoua la tête.
-Si c'est ça, ne t'en fais pas, ils se rabibocheront, Daniel et Lucas, ça a toujours été comme les deux doigts de la main, ce n'est pas une réflexion de Nath qui va y changer grand-chose, au mieux, ils se réconcilieront sur l'oreiller !
-Yerk. Commenta Alice, platonique. –Je croyais que Daniel avait une petite-amie maintenant ?
-La petite brunette mignonne comme tout ?
-Non celle pas mignonne mais rigolote.
-ils sont ensemble ?
-Je sais pas, tu sais…Daniel…pf !

Shin et Lily, mortifiés derrière Gabriel, se serrèrent la main, se demandant, si eux aussi, en parents, auraient put faire endurer un tel calvaire à leur enfant, tout embrumé par leur ignorance…

-Non c'est pas ça ! Ragea Gabriel, rouge de larmes et de colère, contre lui-même, incapable de leur dire la vérité, et contre eux, incapable de la deviner, allant jusqu'à le forcer, à revenir sur ces évènements affreux.

Lyn et Alice le fixèrent, avec incompréhension, ébahies.

-Ce qu'il essaye de vous dire, c'est que Papa est mort.

Il y eut un blanc, durant lequel, tous les regards obliquèrent vers le seuil de la porte, dans un frisson général. Daniel, les cheveux emmêlés, dans un pyjama trop grand pour lui, se tenait droit, sur le carrelage, le regard indéchiffrable.

Lyndis, n'eut aucune réaction, elle ne sembla pas comprendre l'information, tandis qu'Alice, elle, blanchit dangereusement.

-Qu…

La dame opulente ne put finir sa phrase, Gabriel se jeta sur son frère aîné dans un cri de soulagement. Celui-ci le reçut dans ses bras, mécaniquement, et bafouilla simplement :

-Désolé de t'avoir inquiété. J'étais conscient tout du long, juste, mes muscles n'obéissaient plus…Et le médecin m'a donné des médicaments pour détendre les muscles tout à l'heure, alors…

Gabriel secoua la tête avec négation, ne voulant pas entendre un mot de plus, il se contenta d'étreindre son frère de toutes ses forces, comme pour lui imager, la puissance de la peur de le perdre qui l'avait paralysé, lui, d'une toute autre manière.

-Quel médecin ? Qu'est-ce que ? Paniqua Lyn, blême.
-Pa…Nath est mort ? Bafouilla à la suite, Alice, toute raide.

Gabriel sentit Daniel hocher du chef à l'interrogation d'Alice, froidement, son visage ne révélant aucune émotion. Une frimousse détachée et indifférente, qui arracha un frisson à son cadet. D'ailleurs, le sœur aînée plaqua aussitôt sa main sur ses lèvres, et dans un gémissement, refoula à grandes peines des larmes choquées.

-Qu'est-ce que tu racontes, Danny… ? Finit par bredouiller leur mère, avec difficulté, devant l'état respectif de ses enfants, et un monde, une époque, certes révolue, mais dont les dernières traces venaient de s'effacer avec Nath.
-Lucas aussi, il est resté en arrière…Je sais pas ce qu'il est devenu. Continua simplement le gamin d'un ton monocorde.

Gabriel, secoua la tête, n'arrivant pas à croire, que son frère, annonçait cela, comme une liste de course, sans émotion, sans un haut-le-coeur, alors que lui, avait cru vomir simplement nommant leur père. C'est alors, qu'il perçut, la tétanie encore évidente, de la main de son frère, ses doigts, rêches et durs, tendus, incapables de se replier sur les siens.

Lyndis, elle-même, du sentir le malaise, car elle se redressa, les genoux tremblotants, et balbutia, avec anxiété :

-Daniel, ça va mon cœur ?

Le concerné, vacilla, trépigna, changeant de jambe, et pencha la tête sur le côté, un sourire affreux étira ses lèvres.

-Ca va. Je crois que…

Il porta, fébrilement, quelques doigts à ses oreilles.

-Y-a comme un bourdonnement dans ma tête…Et tout est silencieux…Mais ça va.

Le silence le plus total, si ce n'était, cet abominable bourdonnement, qui l'assommait, rendait chaque geste, chaque inspiration difficile, qui, faisait, que, le simple fait de rester éveillé, de ne pas céder au poids de ses paupières tombantes, devenait le plus insurmontable effort. Mais, à part ce petit désagrément, il goutait à un silence familier, pas agréable, mais également, non désagréable. Pas de voix, pas de chanson coincée dans le crâne. Tout comme quand il sombrait dans l'abyme de la mer.

Comme si, Arcéus, en haut des colonnes, avaient accédé à sa requête folle. On lui avait pris Eléanore, et avec elle…

Daniel sentit un étau lui broyer le cœur, alors qu'il réalisait, doucement...

-Il faut s'occuper de Gabriel et d'Alice, ils sont malheureux. Et toi, maman, comment tu vas ? Avec Papa, c'était fini mais…Reprit-il, se rendant compte de l'état des autres, autour de lui, derrière le voile qui les séparait.
-Putain enlève ce regard compatissant de ta face !

Le cri d'Alice, sonna, et Danny afficha une œillade surprise, en sa direction tandis qu'elle le pointait accusatrice, en larmes.

-Sérieux, tu te rends compte de ce que tu dis bon sang ?! T'as vu ta tête ! T'as entendu ce que tu dis ?! C'est une farce c'est ça ! Bah elle est pas drôle ! Et t'es un acteur pourri ! Personne peut annoncer ça, pour de vrai, avec une tête comme la tienne !

Daniel ne réagit pas. Il ne savait pas quoi répondre. Il ne pouvait pas prétendre, savoir ce qu'elle ressentait en cet instant. Il ne ressentait rien. Il ne percevait rien, d'autre que ce bourdonnement. C'était étrange, de n'avoir même pas à se réfugier dans son monde imaginaire, pour éviter de pleurer.

Si Eléanore avait été là, elle lui aurait susurré, que ne pas savoir ce que l'on ressentait, était différent de ne rien ressentir du tout. Elle lui aurait dit, que même si elle ignorait ce qu'il traversait, il pouvait venir dans ses bras, parler ou se taire, mais rester auprès d'elle, malgré ses épaules si peu larges, si alourdies par ses propres chagrins. Elle lui aurait dit, qu'elle avait besoin de son contact, elle aurait fait semblant, d'avoir besoin de son réconfort, alors qu'en vérité, c'était tout l'inverse. Il s'était juré de la protéger, et au fil des années, elle avait finalement endossé ce rôle à sa place.

C'était, bizarre, de ce dire…Qu'elle ne le ferait plus jamais.

-Ne lui parle pas comme ça !

Le cri indigné de Gabriel lui arracha à peine un frisson, et il tourna la tête, en sa direction, étonné. Tout comme Alice.

-On a tous des réactions différentes ! Tu n'as pas…Tu n'y étais pas ! Tu ne sais pas ce qui s'est passé ! Tu ne sais pas…Tu ne sais jamais…Et…

Gabriel hoqueta.

-Eléanore…Sa petite amie est morte aussi…Tu as pas le droit de…

Lyn tressaillit et reposa un regard paniqué sur son premier fils de son second mariage.

-Tout ça c'est que des mythos ! Et de toute façon, ce gamin sait même pas ce que c'est une petite amie ! Il sait même pas ce que ça veut dire, aimer ! Il doit juste trouver le mot joli et il l'utilise à tort et à travers ! Regarde-le enfin ! Il pleure même pas ! Répliqua Alice, venimeuse.
-ALICE !

Au cri de sa mère, la rousse se ravisa aussitôt, craignant son courroux, et elle se mordit la lèvre inférieure, en contempla l'expression de Daniel. Neutre. Mais Shinobu et Lily s'étaient placés dans son dos, comme pour l'empêcher de chuter en arrière, pour choisir leur camp.

-Je suis désolé. Murmura ce dernier la voix tremblante.

Il serra les poings, et hasarda un sourire maladroit.

-Vraiment désolé. Je sais que c'est douloureux pour maman de voir mon visage quand on parle de papa. Je vais m'en aller. Je sais que ça te fait du mal aussi, je m'en vais, ne pleure pas Alice.
-Daniel ! S'offusqua Lyn immédiatement, et dans un élan, parfaitement humain, perdue, ne sachant pas par où commencer, par quel mot passer pour soigner, elle céda à la colère. –Qui t'a raconté ça enfin ?

Alice tressaillit, mais Daniel ignora la question.

- Ne t'inquiète pas Maman, je ne pleurerai pas. Ca va, Alice a raison, ça va te faire de la peine de me voir pleurer, et toi tu es déjà malheureuse, à cause de Papa qui t'a quitté…
-Mais c'est MOI qui ai quitté votre père !

Il y eut un silence, durant lequel, Alice écarquilla tellement des yeux, qu'ils parurent lui ronger le front et les joues. Lyn, remit une mèche bouclée, parsemée de cheveux blancs parmi les blonds, derrière son oreille, rouge de fureur.

-C'est moi qui ai quitté votre père ! Je ne supportais plus qu'il vous traite de la sorte, j'avais peur, il était trop irresponsable, trop instable, pour vous éduquer, il ne risquait que de vous blesser !
-Oh maman je…

Alice bafouilla, prise au dépourvue, et se tourna d'un coup vers Daniel, dont aucun trait n'avait cillé à cette révélation, contrairement à Gabriel, scandalisé. Mais son aîné, continua, comme n'ayant rien entendu :

-Et puis, c'est vrai, que je ne sais pas si j'aimais vraiment Eléa…c'est vrai que je trouve le mot joli, j'ai peut-être juste voulu être normal…Mais Alice…

La concernée observa son frère avec appréhension.

-Toi non plus tu ne sais pas ce que ça veut dire, donc…C'est pas grave, hein ?

Il y eut un silence grave.

-C'est pas grave, hein, si je sais pas…Si je sais pas si j'ai mal là…Si je sais pas…Si je sais pas ce que je dois faire ? Si je sais pas comment réagir…c'est pas grave si…Si…

Lyn s'adoucit, et, réalisant, soudain, que son fils était sans nouvelle de son meilleur ami, avait perdu un père, et un premier amour, avant tout, sa voix s'adoucit, alors qu'elle murmurait, compatissante :

-Pleure, Daniel, ça te fera du bien.

Daniel tressaillit, sursauta, et une larme roula sur sa joue. Une unique larme, durant laquelle, il ouvrit la bouche, puis se pinça les lèvres, émit un gémissement, chercha, scruta le plancher, déboussolé, à la recherche de ce qu'il avait bien put faire tomber, ainsi, par terre, qu'il avait senti sur ses pommettes…Puis il ses doigts se perdirent dans sa frange, alors qu'il relevait simplement des yeux, les traits déformés.

-Maman…

Alice vit, avec stupéfaction, sa mère s'avancer vers son petit frère, et l'enlacer, avec tant de précaution, tant de douceur, comme si elle avait cru le briser au moindre contact, tandis que ce gamin, qu'elle avait toujours traité d'insensible, éclatait en sanglot. Et elle vit Lyn le bercer avec tristesse, lui caresser les cheveux, le presser contre elle, l'abriter de ses bras, comme pour le protéger de la douleur, quand les sanglots se firent plus violents, déchirèrent sa gorge.

Parce que Daniel, s'était réveillé, tout seul dans cette chambre, parce qu'il n'arrivait pas lui-même à réaliser, combien il avait mal, parce qu'il ne comprenait pas, comment, il pouvait souffrir à ce point, sans que son corps n'ait subit le moindre dommage. Il aurait dû, saigner jusqu'à finir exsangue, il aurait dû, souffrir d'une plaie infectée, suppurante de pus, il aurait dû être victime, d'une maladie particulièrement horrible, incurable, le genre de pandémie, dont on meure par masse, dont on ne se relève pas. Mais il était debout, et il était indemne, il était, horriblement sain. Son cœur, aussi brisé était-il, pulsait dans sa poitrine, et chaque battement, retentissait en lui, dans ce nouveau silence, ce vide tout neuf, qu'avait imposé la perte et le deuil.

Parce que la souffrance qui le scindait de part en part, n'avait rien de physique, et pourtant, elle allait au-delà de tout ce qu'il n'avait jamais pu imaginer infliger à un homme.

Alors, c'était ça ? De ça, que se constituait son futur à lui à présent ? Il ne parvenait pas à l'imaginer, il ne parvenait pas, à se convaincre, qu'il devrait, se coucher, et n'espérer rien d'autre que cette blessure à laquelle aucun remède ne ferait le moindre bien, chaque matin. Cette déchirure invisible et impalpable, qui lui semblait, bien plus létale qu'un coup de poignard.

-Danny…

La voix de sa mère, perça les méandres flous, de son monde intérieur, où submergé par les larmes, il ne percevait plus le paysage que par delà un brouillard acide, lui piquant les yeux, et lui encombrant le nez et à la gorge au point de l'empêcher de respirer.

-Danny, tu vas respirer un grand coup, maintenant…

Mais il se pressa contre elle, parce qu'il ne voulait pas. Il ne voulait plus respirer. Il voulait juste pleurer, il voulait hurler sans penser à se remettre, sans penser au lendemain, ne penser à plus rien du tout. La tête commençait à lui tourner, à écraser son être de migraine, et d'hoquets, rendant de chaque inspiration à la fois une victoire et une défaite.

-Danny, mon grand…Essaya de nouveau Lyn, dont la voix, se parait de trémolo également, désespérée de voir son fils, son tout petit, et en même temps, son plus grand, son plus fort, son plus courageux, dans un tel état.

Elle s'agenouilla à son niveau, le libérant de son étreinte. Daniel vit le monde tourner, danser dans le brouillard qui obscurcissait ses yeux, il voyait, Gabriel, au corps déformé sous un rideau de larmes, et il voyait Alice, inerte, dont l'expression oscillait dans le flou. Mais il voyait surtout, leurs mines, concernées, consternées, inquiètes, désolées, emplies de pitié à son égard. Et il voyait les deux grands yeux verts de sa mère, vissés sur lui.

Des yeux verts, comme ceux de Lucas. Des yeux verts, posés sur lui, qui ne seraient plus jamais ceux d'Eléanore. Comment en était-il venu, à chercher un peu d'Eléa, en sa mère ? Surtout, qu'il savait…Il savait que sa mère avait des yeux bleus. Des yeux bleus, pas verts. Des yeux bleus.

Pas verts.

Lyn lui prit délicatement le visage entre les mains, ses grosses mains, à la peau rendue rêche par le travail manuel. Eléa lui avait dit un jour qu'elle aimait bien, ce genre de mains, ses mains à lui. Qu'est-ce que c'était donc, que cet endroit, où tout lui rappelait impitoyablement ce qu'il venait de perdre à jamais.

-Chut, mon Danny, chut…Danny…Daniel…Mon ange…
Il ne désirait pas de ces mots là. Eléa, elle, prononçait son prénom différemment, de cette intonation unique. La peau d'Eléa, son contact, ses caresses, à elles seules, suffisaient à l'apaiser. Ce n'était pas ces surnoms, pas son contact…Pourquoi ce monde lui rappelait-il à chaque instant, une disparue, pour mieux souligner encore, les différences ? Souhait-il à ce point le voir perdre pied, le voir céder, face à l'implacable réalité, qu'il ne la reverrait plus ?

-Maman…Gémit-il.

Lyndis lui envoya une moue désolée, face à sa peine, et Daniel, sût, que s'il avait été en son pouvoir de l'y soustraire, de lui enlever pour l'endosser à sa place, elle l'aurait déjà fait.

-Maman, comment tu as fait, comment tu as fait après la mort de George, quand ton amour est mort, comment t'as fait pour te relever ?

Et il avala de travers, tandis, que son timbre s'écrasait, s'éteignait, devant la question, qui lui brûlait réellement de poser :

- Est-ce que ça fera toujours aussi mal, est-ce que ça va un jour s'arrêter ?

Parce qu'il ne pouvait pas envisager, de s'endormir avec cette même peine, pour se réveiller le lendemain, avec elle pour première pensée, chaque nouveau jour, encore, et encore. Sans répit.

-La peine va te poursuivre Daniel, elle va te faire mal, chaque jour un peu plus…Puis un jour, tu vas l'oublier. Un jour tu te lèveras sans avoir. La peine s'arrêtera, et finalement, c'est ça qui sera plus dur que tout le reste : voir la douleur s'estomper.

Les prunelles disparates de Danny, croisèrent celles embuées de sa mère, et elles scintillèrent, d'une même douleur, d'une blessure, dont on ne voyait pas l'infection, dont eux seul, connaissaient les déboires, et à laquelle, pourtant, on s'attache, et vit avec. Aussi, insupportable qu'elle soit.

Face à sa mère, et son frère, agenouillés dans la cuisine, partageant un lien, de douleur dont elle ne saurait jamais rien, Alice ne sut pas quoi répondre. Elle chercha du réconfort, un soutien invisible dans la foule, ou tout du moins, quelqu'un, avec qui pleurer, celui qu'elle avait autrefois considéré comme son père, dans toutes ses joies, et ses déceptions…

Son regard tomba sur Gabriel et les mots, lui échappèrent, dans la franchise, et parfois même, la cruauté que confère peine :

-Gabriel, et toi, est-ce que ça va ? Tu…Tu n'es pas trop, déçu, triste, d'avoir échoué…De ne pas avoir pu…Protéger les autres ?

Parce qu'elle savait, qu'il ne tentait jamais rien, sans être sûr de réussir, parce qu'il détestait l'échec, détestait échouer, détestait se voir oublié, bouleversé, détestait, tout ce qui se jouait en cet instant.
Et à sa question, le petit s'empourpra brutalement, et se retourna, tous les muscles raides.

-Non mais tu me prends pourquoi au juste ? J'ai treize ans bordel ! j'ai juste treize ans, tu crois sincèrement que j'avais le pouvoir de faire quelque chose ?! Je suis qu'un gamin et on me demande de sauver le monde ? De protéger les autres ? Mais j'en suis bien incapable merde !

Et il secoua la tête, avec véhémence.

- C'est vous les adultes, c'était lui l'adulte ! Et il a encore rien fait ! Il…C'est un inutile jusqu'au bout ! Un gros merdeux qu'est mort en ayant rien foutu et en nous laissant tout sur le dos comme d'habitude !

Alice lui pressa les mains, et grimaça.

-C'est si simple de lire en toi…
-Je suis pas déçu, je suis même pas triste, ça se voit pas merde ?! Il est enfin parti de nos vies et…et…

Alors, Alice, le prit dans ses bras, alors qu'elle murmurait, simplement :

-Menteur…

Elle ferma les yeux, bercée par les sanglots, des uns et des autres, et par ses propres larmes.

Ils l'étaient tous ici. Mais, sous-entendre, dans les étreintes réconfortantes qu'ils se prodiguaient, qu'un jour leur famille se remettrait d'une telle tragédie, était certainement, le plus gros mensonge de tous.

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D'autres mensonges, eux, s'empilaient, jusqu'à les noyer complètement, au Qg de Twilight, sans que personne ne puisse vraiment, dire, lequel était le plus gros, et quel était celui qui causerait leur perte. Ils se contentaient de subir, piteusement, sans force ni volonté.

Peter ferma les yeux, et inspira profondément, face à la grotte de Cristal. La lumière incandescente des lieux, auréolant mystérieusement la place, sans véritable source, lui donnait mal à la tête. Il jeta un rapide coup d'œil à l'ombre se profilant sous ses pieds, et aux vagues formes, qui s'y dessinaient peu à peu, plus distinctement.


-Que fais-tu ?

La voix de Salomée se répercuta en lui, à l'image de l'écho, la transmettant tout autour de lui.

-Je réfléchis. Répondit-il simplement.

Aussi, difficile, que lui était devenu cet exercice, inexplicablement. A chaque fois, sa conscience semblait se buter contre un mur, et s'accrochait à une idée, une pensée parasite, pour se laisser entraîner. Comme si on lui interdisait, une part même de son être. C'était une sensation désagréable, dont il n'arrivait plus à se remémorer, l'origine.

La silhouette de Salomée apparut dans un recoin de la grotte, assise sur un cristal, et elle arqua un sourcil, tout en retenant un pouffement, face à cette réponse. Comme si elle lui était absurde. Peter voyait le sang sur son cou, mais encore une fois, une occupation le rattrapa avant qu'il ne se demande, quand, le collier qui bridait les pouvoirs de la Gijinka avait disparu.

-Nous avons déjà tous les deux réfléchis, à la marche à suivre à présent Peter. N'est-ce pas ?

Le maître Dragon ne répondit pas. Il songeait, à ce qui leur avait échappé, ce qui ne préoccupait pas Salomée. Il pensait à Régis, dont le chagrin incommensurable lui avait fait mal au cœur, il pensait, à Marion, qui tardait à revenir avec Lucio, il pensait aux blessés, du Qg…Il pensait à ce nouvel être, qui était né de la fusion d'Eléanore, et d'Arcéus, et qu'il jugeait cruel, d'appeler toujours par le prénom de la défunte, ou celle du Dieu.

Bien que les évènements, entourant la naissance de la martyr d'Arcéus, se voilait de confusion dans sa tête, un mauvais goût lui envahissait le palais à chaque fois qu'il tentait de se souvenir. Il sentait, plus qu'il ne savait, que les évènements avaient été tragiques.

-Je pensais l'appeler Thémis.

Salomée sursauta, et leva les yeux vers la voûte de pierre, devinant, ou plutôt, lisant en lui.

-Arcéus ?

Peter grimaça à cette appellation, mais il hocha du chef.

-Tu aimes beaucoup l'antiquité, Peter. Après le plan Artémis, voici donc, le dernier recours de Twilight, Thémis…Je suppose, que ce qu'elle forme en ce moment sur tes ordres, formera, ta « Légion ».

Oui, ça sonnait bien, mieux, que garde-du-corps, ou encore son « armée ». Il préférait.

-Tu souhaites, peut-être, en reprenant les termes de l'antiquité, former une seconde « Renaissance » ? Comme dans le passé…

La suggestion de Salomée sonna familièrement en lui. Oui, c'était peut-être ça. Car après tout, c'était bien ce qui se produisait, non ? Le monde après le Jugement d'Arcéus, purgé de son mal, prenait un nouveau départ, dont il ne tenait qu'à lui, qu'à eux, de maintenir la paix et la prospérité.

-Régis, pourrait, s'occuper de Thémis… ?

Salomé balaya cette information de la main.

-Si ça te chante, mais il lui faudra d'autres gardes, qui sauront mieux se battre que ce savant !

Peter approuva du chef, automatiquement sans remettre en question ou réfléchir. C'était évident.

-Et toi, que vas-tu faire ? Maintenant ? S'exclama-t-il soudain.

Une part de lui, venait de lui imposer brutalement l'image d'Holly. Mais Salomée, bien qu'étonnée, de cette question, sourit.

-Moi ? Une fois Arcéus revenue…
-Thémis.

La gijinka d'Holly sursauta, et se pinça les lèvres, sous le ton réprobateur de Peter, vexée, mais continua, tâchant de réfréner son égo.

-Je resterai ici. A l'abri. Il faut, une nouvelle gardienne du Temps, pendant qu'Arcéus officie, l'âme de Sahara, a du quitter ce monde en même temps que celle de sa Sœur Eléanora. Il faut quelqu'un pour veiller sur l'ordre Temporel. C'était le destin d'Holly, à la base, je ne fais que l'endosser, après tant de retard.

Elle sauta, et se plaça sur la coque de Cristal, qui avait autrefois été le cercueil de la première martyre.

-Je suppose, qu'Eléanora, aura déjà trouvée son successeur pour veiller sur l'ordre des Dimensions.

Elle croisa les bras.

-Arcéus sera occupé avec toi, à former un nouveau monde. Les Pokémons gardiens censés nous soutenir dans la tâche, sont endormis, il faudra donc que je me concentre toute entière sur ce rôle. Je resterai ici. Je m'enfermerai dans ce cristal, pour que mon corps ne puisse pas se fatiguer, et donc se détourner de son objectif.

Elle serait invincible, hors d'atteinte de toute offensive, invisible aux yeux de l'ennemi. La femme, la mère de Silver et Sam, Holly, également, s'endormirait de ce fait. A défaut de la bride du collier, elle devait trouver un autre moyen de l'empêcher de se manifester, pour que plus jamais, ce qui c'était produit aux ruines ne se réitère.

Salomée sourit, sournoisement, puis, elle remarqua l'air perdu de Peter. D'une démarche féline, elle s'avança vers lui, et lui prit les mains, dans une caresse, emplie de fausseté.

-Ne t'en fais pas Peter, je resterai près de tes pensées, toujours. Je serai, toujours là, en cas de besoin. Si tu as besoin de mon aide.

Ou si son esprit reprenait le dessus.

Le visage de Peter s'illumina, bien qu'un brin d'hésitation subsistât, comme un dernier relent de méfiance, le hurlement muet de sa conscience enfermée. Salomée se détacha de lui, et en trois pas, elle se plaça au centre du cristal, pour s'y enfoncer, comme marchant sur de l'eau. Gracieusement. L'ombre ondoya, puis s'écarta, pour offrir une petite place à la nouvelle venue.

Peter se pencha, par-dessus cette vitrine, et il eut un drôle de coup au cœur. Là, Salomée, paraissait dormir profondément, innocemment, serrant la main, d'une ombre à la chevelure blonde et emmêlée, qui lui rappelait vaguement quelqu'un de sa connaissance. En position fœtale, elles semblaient toutes deux veiller, sur les silhouettes grandissantes, s'épanouissantes, au milieu des fleurs de lunes, fraîchement écloses.

-Il faudra donner des noms, à ceux-là, aussi…Ils ne sont plus ce qu'ils étaient, il leur faut d'autres noms. Sinon, ce n'est pas une renaissance…

Son regard se posa, sur les formes qui s'éveillaient, tels des bambins, et il remarqua alors, quelques précieux trésors, brillants dans l'oubli. Il ramassa donc, ce qu'avait abandonné 24 heures auparavant, Eléanore. La précieuse boucle d'oreille, reconvertie en pendentif, qu'avait offerte Lyon à sa sœur sans le savoir, et dont cette même sœur, avait donné le double à Danny. Avec une grimace, sa main se referma sur le bien. Il savait, parfaitement, à qui il confierait ce bijou.

Mais pour le moment, il avait encore le temps. Ils devaient grandir, leur organisme devait s'éveiller et s'habituer à l'air de cette dimension. Revenir, à l'état originel, dans lequel, ils avaient pris la main de Thémis.

Peter, se leva donc, et d'un pas plus ou moins confiant, se retira de la grotte. Il devait rejoindre les membres de Twilight, prendre de leur nouvelles, voir Marion…Commencer à mettre en place le nouveau monde. Et il ne pouvait y arriver seul.

Il descendit, lentement, presque trop lentement, les escaliers, sous la cascade, et envoya, une simple œillade vers l'au dessus. Il grimaça, en songeant à Cynthia, mal en point, qui les avait réveillé, au milieu des ruines. Il eut, une vague pensée pour Nathaniel, dont Salomée avait fait disparaître le corps d'un claquement de doigts. La vision d'un corps, se décomposant à une vitesse folle, pour tomber en poussière, lui souleva le cœur et il accéléra. Salomée avait fait de même avec les cadavres de Gilles et Méfistos, dont la protection de la grotte de Cristal, n'avait pas su résister au jugement d'Arcéus.

Evidemment, les membres de Twilight, l'attendaient, éperdus, attendant un discours, des explications. Il vit même dans la masse le visage de Trax, déboussolé, et ceux plus réprobateurs, d'Adrien et quelques autres des différents conseils. Mais Peter leur tourna la tête, en arguant simplement, qu'il convoquerait des journalistes pour une conférence de presse le lendemain.

A la place, il se dirigea vers Spectra Phoebe, et Lucio.

-Des nouvelles de Steven ?

La championne spectre d'Hoenn secoua la tête négativement.

-Lui et Marc sont partis, apparemment son père est mort. Cynthia vient également de partir pour le siège de Devon, au cas où…

Elle parut sincèrement peinée, et bien plus chamboulée par ce qui était arrivée à son ancien champion, que par les récents évènements, mais elle faisait parti des rares, qui dans la confusion et la panique du jugement d'Arcéus avait aidé les blessés à accéder aux soins.

-Et…les Autres ?

Il dévisagea Lucio, qui exaspéré, replaça ses lunettes sur son nez.

-Ils sont encore à l'hôpital, ordre des médecins, je n'ai ramené que Marion. Elle ne supportait pas de rester là-bas.


L'inquiétude monta en Peter, qui se résolut immédiatement.

-Je vais la voir.
-Impossible, Lucas a sauté sur elle, dès que nous sommes arrivés et lui a demandé un combat.
-Dans son état ? C'est pas…

Le maître psy de Sinnoh lui attrapa le bras, alors qu'il s'élançait vers le terrain d'entraînement. La lune, éclaira ses verres de lunettes d'un argent, grave.

-Non Peter…Ils ont beaucoup de choses à se dire. Des choses importantes.
-Qui nécessite un combat mettant en jeu la santé de Marion ? s'offusqua le champion dragon.

Bien que Lucio parut déstabilisée une seconde par la réalité, il raffermit sa prise, et finit par hocher du chef, sérieux.

-Ils ont besoin de ce combat.

Et c'était vrai, même si Peter refusait de l'accepter. Car Lucas et Marion, n'avaient jamais eu de relation fraternelle harmonieuse, ils avaient grandis dans la dualité, la jalousie. C'était à qui ferait mieux que l'autre, qui vaincrait, et qui perdrait. Ils ne savaient pas agir autrement, ils ne se parlaient pas autrement. Ils ne savaient plus.

Le rêve de Lucas avait toujours été d'aller à la ligue et d'affronter sa cousine en un combat fratricide, pour en sortir victorieux, et plein de gloire, pour trouver en les yeux de ses parents, l'éclat de fierté dont ceux-ci vouaient plus volontiers à la blonde.


Mais cette fois, Lucas ne se battait pas pour l'amour de ses parents. Il ne se battait pas pour le regard des autres. Il se battait pour lui. Pour lui, et Cristal. Pour leur Liberté.

Le châtain serra les poings, alors, qu'il cherchait frénétiquement une stratégie pour déjouer le mur que formait sa cousine, dans cette bataille décisif. Et ses jambes tremblaient, son corps entier frissonnait de frustration et de rancune.

Car plus jamais, il ne voulait rester inerte, plus jamais il ne voulait rester derrière, admirant ses amis et son monde, s'effondrer, un à un. Il allait gagner ce combat, et Marion, Cristal et lui, partiraient, loin de Twilight.

Si sa cousine, avait accepté immédiatement de s'enfuir, ils seraient déjà loin , mais à son retour, la blonde avait refusé, et lui avait ordonné, sans concession, à lui ainsi qu'à la cadette Heart, de ne même pas essayer de s'évader.

« Trop dangereux »

C'était ses mots.

Il était trop dangereux de se substituer à l'organisation de lui désobéir. Mais il était trop dangereux d'y rester également. Ne le comprenait-elle ? Voulait-elle vraiment rester, au milieu de ces gens ; sous les ordres, de cet homme, qui n'avait pas sourcillé, avant de les abattre dans le dos ?

Lucas, savait, bien que cela le répugnait, qu'il ne pourrait pas partir de front, la terreur qu'il avait ressenti là-haut, battait encore à ses tempes de manière bien trop assourdissante.

Il fallait qu'il gagne, maintenant, qu'ils partent. Vite.

-Camerupt attaque déflagration !

Il sentit Cristal se tendre dans son dos, bien qu'il ignore vraiment la raison. Ses idées étaient bien trop embrouillées pour qu'il n'envisage véritablement une tactique, autre que celle d'heurter les Pokémons de sa sœur, autrement que dans leur faiblesse. Il avait au moins eut la présence d'esprit de demander un combat double, style auquel il excellait.

Marion ne bougea pas, elle se contenta, d'une voix à peine plus forte qu'un murmure, pâle comme la mort, d'annoncer à sa momartik :

-Laser Glace.

Et comme une routine bien huilée, la Momartik envoya son rayon gelé, droit sur le sol, au lieu de viser son ennemi. Camerupt avait l'avantage, d'un type, bien qu'il souffrât de la glace avec son affinité avec le sol, mais il était affreusement lent et pataud. Aussi, glissa-t-il sur le terrain givré, et envoya sa décharge embrasée droit dans les airs.

-Yang Psyko ! Ordonna Lucas.

L'agile renard mauve, bondit, prenant appuie sur son camarade à terre, et sa pierre brilla, tandis qu'il reprenait le contrôle de l'offensive feu. Mentali se cambra, mais Marion, dans un soupir, se contenta de répliquer.

-Oniglali, mâchouille.

Le Pokémon semblable à une boule de neige, se rua sur le mentali et l'attrapa entre ses mâchoires de toutes ses forces, sans se soucier de la morsure embrasée de l'attaque, comme si, un si petit tort, ne lui posait aucun problème. Comme si Marion, jugeait chacune de ses attaques, comme à peine plus dangereuse, qu'une petite éclaboussure.

Alors que son mentali s'éclatait par terre, durement touchée, Momartik venait de lancer une attaque grêle, salvatrice pour son coéquipier, qui récupéra un peu de force, entouré de son élément, et surtout, grâce à sa capacité spéciale.

-Camerupt attaque séisme ! Lança Lucas, en désespoir de cause, espérant au moins, briser cette surface glaciale, qui empêchait le mastodonte de se mouvoir.

Encore une fois, les Pokémons de Marion émirent à peine un rictus, en essuyant l'attaque, sans même tenter de l'éviter. Lucas comprit alors, pourquoi, on surnommait sa cousine, la reine des glaces. Aucune expression ne la marquait pendant l'affrontement, pas une émotion. Elle était un mur, un mur gigantesque, qui n'avait cure de chaque offensive, et rendait au centuple.

-Glaciation. Conclut Marion.

Il n'y avait aucun moyen d'éviter, le rideau de neige accentuait leur précision, et Mentali, glissa sur la glace en ayant tout de même un vague mouvement d'esquive. Elle s'effondra K.O, le coup suivant, ce fut au tour de Camerupt. Devant un Lucas tétanisé.

Il avait perdu.
Il avait été aplati, anéanti, sans même qu'un pli soucieux ne barre la frimousse de sa cousine.
Il se sentait comme un insecte qu'une main gigantesque venait de balayer sans effort.

-Lucas…

Le brun sursauta, et un frisson lui remonta l'échine, alors que Marion le surplombait. Elle n'était pourtant, pas grande, il la dépassait largement physiquement, mais il se retrouvait comme le petit garçon de son enfance, face à sa « grande sœur » si inégalable. Et la rage, monta en lui, la colère, une colère d'enfant, une frustration aux saveurs d'autrefois, et une incompréhension puérile.

-Pourquoi tu ne veux pas partir ! Tu es stupide ou quoi ?! Tu n'as pas vu ? Tu n'as pas vu ce qui c'est passé là haut ? Et tu veux rester avec eux ?!

Elle n'avait pas vu ? Elle n'avait pas vu Peter s'acharner sur Daniel jusqu'à ce qu'il ne soit plus qu'une loque ? Elle n'avait pas vu Samantha baigner dans son sang ? Etait-elle aveugle ou quoi ? Peter n'avait même tressailli, alors qu'il les avait tous les deux abattus. Il n'avait pas plus de considération à leur égard, qu'il n'en avait pour de la poussière !

- C'est toi le plus idiot.

Le timbre de Marion, froid, autoritaire, le pétrifia, comme quand ils étaient gamins. Et il lui envoya une œillade déboussolée. Mais il ne croisa que les yeux cacao, limpide et sûr d'eux, alors qu'elle annonçait clairement :

-A quelques centimètres près tu n'avais pas une cicatrice sur la joue, tu n'avais plus de tête.

Il le savait ça. Il l'avait senti ! Lucas passa quelques doigts sur la balafre sur sa joue, et déglutît, l'effroi remontant encore en lui tel un serpent.

-Les autres ont voulu affronter Twilight, ils se sont rebellés, et ils ont été tués Lucas ! Tués, ni plus ni moins. Les autres ont essayé de fuir, et Peter les a pris de nouveau pour cible !

Elle secoua vivement du chef.

-Et ils t'ont laissé tout seul là haut ! TOUT SEUL ! Ils ne se sont MEME PAS RETOURNE ! ILS T'ONT LAISSE LA HAUT DANS CE NID DE SEVIPERE !

Lucas n'eut même pas le temps de réaliser l'ampleur du vide qui remplaça son cœur, à cette phrase, elle le saisit par les épaules.

-Mais si on fuit, où veux-tu aller ? HEIN ? Ils connaissent nos adresses, ils savent où sont papa et maman ! Nos Pokémons ont des puces, ils sauront nous trouver n'importe où !

Tout ce qu'ils avaient mis en place au cours des années pour se protéger, les piégeait à présent. Marion raffermit sa prise en tremblant furieusement, de grosses larmes d'impuissance roulant sur ses joues.

- JE ME FICHE QUE TU ME HAISSES ! Tu auras beau me détester, tu auras beau me hair, moi, ça ne changera rien, je t'aime, tu es comme mon frère ! et je refuse de te perdre ! Je ferai tout ! TOUT ! Mais Peter ne te touchera PLUS JAMAIS !

Le cœur de Lucas rata un battement, alors que Marion, se tournait vers Cristal, imperturbable.

-Petite, si tu veux fuir, je n'ai pas le pouvoir, ni le droit de t'en empêcher…Mais si tu restes, je te promets de te protéger toi aussi…

Cristal ne cilla pas, mais lentement, lentement, elle prit la main de Lucas dans la sienne, et celle de Marion, avant de souffler, dans un murmure brisé, à peine audible :

-Je reste avec vous…Je ne vous abandonne pas.

Parce qu'elle avait senti, ce que percevait l'opprimé, quand il voit son monde et ses certitudes lui tourner le dos. Elle avait senti l'âpreté de la solitude, dans la panique et l'injustice, le poids des responsabilités et de la vie.

Son frère, pouvait comprendre cela.

Elle ne pouvait pas abandonner qui que ce soit derrière elle.

C'était ensemble, ou pas du tout.

Tout ce qu'elle avait espéré qu'on lui dise, dans ces instants troubles, quand elle s'était retrouvée les mains badigeonnées du sang des êtres aimés.

Marion, eut un rictus malheureux, et doucement, elle étreignit les deux enfants. Avec la force du désespoir ; une étreinte, que Lucas lui rendit, le visage baigné de larmes. Parce qu'il était tout seul. Parce que Danny, Danny et Samantha, lui avaient tournés le dos, et s'étaient enfuis, sans un regard en arrière. Parce qu'il était, redevenu le petit garçon insignifiant dont même les propres parents ne s'en encombraient pas. Dans cette fuite, dans ces dernières 24 heures, il était redevenu l'enfant misérable et insignifiant dont personne ne voulait pas même ses propres amis.

Quand Peter accourut dans leur direction, Marion les lâcha, pour se diriger d'un pas vers le champion, tel un condamner s'avance sur l'échafaud.

-Marion…j'ai eu peur…Tu…tu vas bien ? Ce n'est pas conseillé de se battre comme ça…Après…Tu sais…

C'était, le Peter penaud et attentionné qu'elle avait aimé. Qu'elle aimait encore, pourtant…Quand elle se nicha dans le creux de ses coudes, elle ne put réprimer les battements de son cœur, fous de terreur. Elle n'était plus en sécurité dans ses bras, sa confiance aveugle en lui, s'était volatilisée.

-C'est…C'est réglé, vos histoires de famille, alors ? Devina le champion, attendri par ce geste de sa petite amie.

Marion se contenta d'opiner du chef sans un bruit, et Peter resserra ses bras autour d'elle pour savourer l'étreinte. Comme si de rien n'était, comme si jamais rien ne s'était produit aux ruines.

Elle ne comprenait pas, elle ne comprenait plus. Qu'est-ce qui lui arrivait au juste ? Où était l'homme dont elle était tombée amoureuse ? Elle ne savait pas, elle ne savait plus, et cela n'avait plus d'importance, ce qu'elle ressentait. Tout ce qui comptait, c'était leur protection.

Elle coula une dernière œillade sur Lucas et Cristal, avant de se laisser emmener par un Peter doux et concerné par sa santé. Sans rien y laisser paraitre.

Tandis qu'elle s'éloignait, avec l'ennemi, pour leur bien, Lucas, pressa un peu plus fortement la main de Cristal dans la sienne, et la voix emprunte de douleur, il souffla :

-Merci d'être resté…

Mais Cristal réfuta ses remerciements, contrite, parce qu'elle savait, qu'elle n'aurait jamais pu faire autrement, et quand il lui donna un timide baiser sur la joue, son cœur lui confirma son choix.

Maintenant, elle espérait juste, qu'il était le bon.

« « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « «

Il était extrêmement tard, quand Sam ouvrit les yeux. Deux jours avaient passé, depuis les évènements de la veille, et la lune bien haute, éclairait la neige recouvrant Azuria, de la même lueur argenté que celle illuminant ses prunelles.

Silver, avait juste, après avoir raconté maintes et maintes fois, les évènements, à la famille Kazamatsuri, aux Yuki, à la mère Joëlle, à Kain, était simplement rentré dans sa chambre, entouré de Gold et Akira. Et il avait simplement pris sa main dans les siennes.

Ce contact avait suffi, alors qu'elle sombrait dans les vicissitudes de la solitude dans une dimension dont il ne restait plus que ruines et échos lointains. Samantha ouvrit les yeux, sous les regards soulagés des uns et des autres. Elle papillonna plusieurs fois des paupières, perdue, comme peinant à réaliser, qu'elle se trouvait véritablement si entourée, puis son regard se voila de larmes, alors qu'elle murmurait, à la fois hagarde, et emplie de certitudes douloureuses :

-Elle est morte, n'est-ce pas ?

Elle n'eut pas besoin d'une réponse, leurs mines, leurs regards, lui suffirent. Alors, elle posa ses doigts sur ses yeux, pour cacher les larmes qui lui échappaient. Et eux, laissèrent sa mâchoire se crisper sur un cri, sur un sanglot, pudiquement.

Et alors, qu'elle luttait contre la peine, Sam sentit une chose rouler entre ses doigts, dure, polie, dont le reflet scintilla sous ses larmes. Elle se redressa, et contempla avec perplexité, la perle, noire, et douce de son rêve. Elle ne chercha pas à comprendre, comme un charme, comme elle l'avait fait, piégée dans son propre cauchemar, elle le serra tout contre son cœur, et se laisser bercer par les rires insouciants d'un avenir usurpé.

Juste le temps, qu'au moins, les pleurs se tarissent, à défaut de la douleur.

Les heures qui suivirent, resteraient à jamais flous dans son esprit, toute détachée qu'elle était. On lui parlait, d'elle, de leurs avenirs, de leurs projets, de leurs solutions et leurs problèmes, mais elle ne se sentait pas concernée. C'était peut-être, la perte, qui causait, cette distance, cette rupture entre elle, ce qu'elle avait été, et ce qui en restait.

On l'obligea à se lever, à rester près de son frère, on lui avait dit, que son cœur était faible, qu'il fallait qu'elle demeure à ses côtés, car apparemment elle dépendait de lui maintenant, son cœur ne battait plus correctement. Et elle le comprenait.

Comment son cœur aurait-il put pulser de la même manière dans sa poitrine, après la mort d'Eléanore ?

Elle resta, longuement, encadrée de Brasegali, et Silver, et fit le tour du propriétaire. Elle croisa toute la famille de Daniel, et Gabriel, s'installant provisoirement dans la maison. Elle rencontra le frère d'Akira Yuki, sans même s'en apercevoir. Mais elle ne put pas voir Daniel. Daniel s'était enfermé dans un coin de la demeure, et changeait d'emplacement à chaque fois que quelqu'un le dénichait. Kain racontait qu'il l'avait vu errer avec un évoli dans les bras, son flobio et son ramoloss, tel un fantôme.

L'infirmière de Jadielle, elle, inquiète sûrement, qu'elle n'agisse de la même sorte, l'étreignit comme elle ne l'avait que rarement fait, et la cajola, la recouvrit de mots tendres et de réconforts, qui glissèrent sur elle, indifférente, comme la bise hivernale.

Finalement, voyant, qu'elle ne prononçait pas un mot, depuis son réveil, qu'elle se contentait de serrer, convulsivement, nerveusement, sa perle, chacun se déstinteressa de son cas, on lui conseilla d'aller dormir, que tout serait plus clair le lendemain, et on l'emmena jusqu'à un lit, pour l'y abandonner.

Tous, étaient plein de sollicitudes, et de tendresse à son égard. A tel point que cela se confondait presque avec une pitié insupportable. Elle comprenait que Daniel ne fuit, cette atmosphère, où ils devenaient, une sorte de monstre infâme, dont tous craignaient la réaction disproportionnée. Où ils avaient les regards rivés sur eux, et évaluaient, jugeaient ce qui devait être leur peine, sans savoir. Ils conseillaient, s'apitoyaient, parfois, s'agaçaient, sans savoir.

On est seul dans la douleur.

Mais Sam ne leur en voulait pas. Ils essayaient au moins, elle n'aurait souhaité à personne, de sentir, un tel gouffre en son sein. C'était bien, qu'ils ignorent, que leur imagination ne les porte pas si loin. Que la douleur, reste imagination pour eux. Car ce qu'il y avait de magnifique avec l'imagination, c'est qu'horriblement prolifique en manière de souffrance et de sadisme, elle ne se parait pas de réalité.

Elle observait la lune lentement décliner, là où elle était, près de la baie vitrée, sur un lit de fortune, elle ne comptait plus les heures, ni les secondes. Contrairement à Daniel, qui, perdu dans la même bâtisse et le même deuil, haïssait la pendule et son tic-tac, qui lui rappelaient à chaque à-coup, cette seconde de plus, qu'il vivait, sans Eléa.

Non, elle dérivait, pataugeait, dans une temporalité, déformée, détraquée, faisant tourner la perle entre ses doigts, pensivement. Aussi, ne sut-elle pas vraiment, vers quelle heure, Akira Yuki s'assit dans son dos, sur son lit.

-Sam… ?

Elle se tourna vers lui, mécaniquement. Il ne sourit pas, il ne posa pas sur elle, une œillade emprunte de compassion et de pitié. Il conserva son regard neutre et morne, dû à sa cécité. Et cela lui suffit, c'était ce dont elle avait besoin, un visage, dénué de tout jugement.

-Je croyais avoir grandi. Balbutia-t-elle.

Akira secoua patiemment de la tête.

-Tu as grandi Sam. Tu as compris la leçon. Quand je t'ai connu, tu rêvais ta vie, sans oser la prendre en main, tu repoussais toujours tes décisions, tu te plongeais dans les études, les livres, la solitude, le dressage, tout était bon pour t'enfermer. Et tu espérais que ça change, tu y croyais, tu t'attendais à voir un prince charmant sortir du tiroir et d'un seul rendre ta vie toute rose. Mais pendant ce voyage tu as grandie, plus que je ne l'aurais moi-même imaginé. Tu t'es ouverte aux autres, tu as su prendre en main ton destin et faire des choix.

Il lui prit la main, et elle ricana ironiquement.

-J'ai compris la leçon de manière bien cruelle.

Et elle secoua la tête.

-Si c'est pour qu'elle ne soit plus avec moi… A quoi ont servi mes choix ?

Elle lui envoya une œillade désemparée, qu'il ne vit pas, mais dont il sentit la détresse au déraillement de sa voix.

-J'aurais mieux faire de rester au fond de mon trou, en bonne fille naïve et stupide, en cendrillon cloche. Siffla finalement, la jeune adulte, en pressant la perle entre ses doigts, écrasée par les remords.

Akira opina négativement du chef, avec tristesse, et doucement, il lui prit le visage entre ses grandes mains. Ses mains d'instituteurs, qui ne touchaient pas assez la craie pour s'imprégner de cette odeur studieuse, mais qui en avait la douceur et les mêmes bienfaits. Elle sentait sa marque, sur sa peau, tel le sillon blanc illuminant le tableau noir, telle une ligne directive, une lumière dans l'obscurité, se dévoilant peu à peu.

-Ne dis jamais ça. Je n'aimais pas la Sam du passé, elle me faisait de la peine. Ce serait une insulte envers Eléanore, de renier ce que tu es à présent, ce que tu as réussi à devenir. Parce que c'est grâce à elle, que tu en es là.

Sam se tût, honteuse. Honteuse, parce qu'elle savait déjà tout cela, parce qu'il usait de ses mots à elle…Et Aussi parce qu'elle était, ce que Yuki aimait en elle, elle le devait à une autre.

-N'oublie jamais ça Sam. Ce que tu es aujourd'hui, tu le dois à Eléanore, et en cela…En cela elle ne mourra jamais, si tu ne l'avais jamais connu…

Samantha l'interrompit, sèchement, mettant fin à cette litanie aussi insupportable que le chant d'Eléanora.

-Elle serait encore en vie.

Son professeur eut un mouvement de recul, presque imperceptible, mais elle sentit bien le contact de ses doigts, hésiter à se prolonger, sous l'exaspération, avant de revenir vers elle avec bienveillance et patience, alors qu'il expliquait d'une voix douce et sévère à la fois :

- C'est faux et tu le sais, elle était condamnée, quoi que tu fasses. Et…irais-tu jusqu'à désirer ne l'avoir jamais rencontrée… ?

Mais elle l'avait déjà demandé, elle l'avait déjà priée de toutes ses forces sans se voir exaucer. Néanmoins…ses doigts caressèrent le nacre de sa perle, alors que l'amertume et ses cris autre réponse que l'écho de sa propre détresse, revenaient la hanter.

-Si ça avait put lui sauver la vie…S'entendit-elle néanmoins murmurer.
-Non, je ne crois pas.

Le ton sur lequel il prononça ses mots, la foudroya, le vrilla le cœur de part en part.

- Je ne crois pas du tout.

Akira, aussi aveugle était-il, perçait sans effort, les mensonges avec lesquels elle se protégeait, l'indignation lui brûla la gorge.

-Et bien vous croyez mal ! J'aurais tout fait pour Eléa ! Absolument TOUT ! Même si ça doit me rendre malheureuse, même si…Du moment qu'elle vivait ! Et maintenant, maintenant c'est trop tard !

Elle ne réalisa qu'elle criait que quand sa gorge épuisée, éreintée, étreignit dans une octave fausse ses derniers mots.

-Tu l'aimais beaucoup. Constata simplement Akira, sans s'offusquer de la saute d'humeur de son élève.

A vrai dire, il préférait largement la voir sortir de ses gonds plutôt que de la contempler dans cette quiétude apathique qui l'avait entravée jusqu'à maintenant. Comme un sort qu'on lève, Samantha reprit son calme, libérée, elle bafouilla :

-Elle…Elle a changé ma vie…Et encore avant le drame, elle continuait de m'encourager, de me pousser, d'essayer à tout prix de me rendre heureuse.

Parce que ça soulageait, de parler du disparu. C'était humain, de vouloir se placer en unique, et à la fois, de chercher dans les souvenirs, les confirmations, les mêmes symboles et preuves que les autres, d'un bonheur, qu'on savait passé, et dont on ne parvenait pas à recouvrer la saveur.

-Et moi j'ai échoué, elle, elle a toujours réussi à me consoler, me remonter le moral, et moi, moi j'ai échoué sans arrêt…

La fille de Giovanni, ferma les paupières, gravement, refusant de voir, ce qu'elle avait été, même en songe.

- Elle ne m'a rien confié ! Elle allait mourir, elle allait faire une chose stupide, et elle ne m'a rien dit, elle a continué de m'encourager et j'ai rien vu du tout ! Quel genre d'amie je suis, pour ne rien avoir vu du tout ?

Akira eut une expression chagrinée.

-Tu es le genre d'amie, qui a essayé.

Mais son élève secoua la tête avec impertinence.

- Pas assez fort !

Akira se sentit vaciller, tituber dans sa motivation, et alors qu'il allait abandonner face au mal, il se remémora les mots de son frère. Il inspira, profondément, recula, pour son élan, son élan lâche, pour mieux rétorquer :

-Tu as voulu la rendre heureuse.

Mais Samantha refusa avec véhémence, ses mèches de cheveux battant l'air frénétiquement sous son refus.

-Pas assez fort !

Et cette fois, Yuki céda :

- Arrête de chercher la perfection dans tout ce que tu fais bon sang !

Le cri retentit dans la pièce, et Sam rouvrit les yeux, pour le dévisager, tétanisée par la surprise. Akira, dans un élan sage, continua, paisiblement, les mots, coulant d'eux même, durs, et francs à la fois. Emprunt d'une vérité douloureuse, mais vitale.

-C'est pour ça que tu échoues. Crois-tu qu'Eléa espérait te rendre complètement heureuse ? Crois-tu qu'en agissant de la sorte, elle pensait y trouver le bonheur parfait ? Non ! Eléa agissait petit à petit, pas à pas, à son rythme et à son niveau. Elle voulait te rendre heureuse Sam, tout autant que toi tu le souhaitais pour elle. Mais, elle…

Il y eut un silence, durant lequel il vit son élève baisser les bras et la tête, penaude et peinée.

-Tout ne doit pas être parfait, pour être efficace. Conclut finalement Akira, doctement.

Il s'écoula un temps infini, où Sam ne prononça pas un mot, mâchonnant cette leçon de vie amèrement, avant que finalement, elle n'avoue dans un soupir :

-Vous avez raison.

Akira ne s'attendait pas à ce qu'elle rende les armes si facilement, et encore moins qu'elle ne comprenne un défaut si inhérent à son être en quelques secondes, aussi fut-il déstabilisé.

- j'ai toujours cherché la perfection, partout. Avant je refusais d'avoir des amis à cause de leurs défauts respectifs…Ca a changé avec Eléa. Je voulais toujours la meilleure note...Ca aussi, ça a changé avec Eléa, être à son niveau me suffisait amplement…Mais même après, je voulais changer plus encore : devenir parfaite ; pour arrêter la course du temps, je voulais vraiment…

Il sentit les larmes échapper à son élève, et rouler entre ses doigts.

- Sam…

Y-aurait-il seulement un jour, où la peine cesserait de la tourmenter ? Lui-même, ignorait comment il gérait la sienne, mais s'il avait, s'il avait sut le secret, alors il le lui aurait donné, sans compter. Pour qu'enfin, il la sache, heureuse. C'était ce qu'il avait toujours voulu, dès le premier regard.

Avant même l'amour.

Il avait vu une gamine esseulée et dont, il avait espéré être son soutien pour parvenir à la félicité.

- Encore là, ces derniers jours, au lieu de veiller sur Eléa, j'ai été obnubilé par mes propres sentiments…Par mon souci de la perfection. Elle m'encourageait à le faire, donc je ne me suis pas méfié… j'ai cherché, je voulais vraiment que tout soit parfait, je voulais vraiment tout vous dire, la vérité...mais...mais rien ne vient, tout me parait tellement stupide et crétin, mal venu...Tout me semblait si pathétique, praliné !

Cette fois, par contre, Akira ne suivait plus, il arqua un sourcil, et regretta de ne pas pouvoir l'observer, chercher de l'aide dans la douce expression de son visage, sur lequel, il aurait certainement sut lire ce qui lui manquait. Mais la fillette qu'il avait connue, n'en était plus une, et le visage dont il gardait le souvenir avait bien changé depuis, il s'était affinée, affermie de volonté.

Sam posa ses mains sur celles de son professeur, toujours sur ses joues. Yuki tressaillit, rougit brutalement, comme un adolescent.

-Sam ? Hasarda-t-il, en proie à un doute.

-C'est la dernière chose qu'Eléa m'a dit avant de partir, c'est la dernière chose qu'elle voulait que je fasse…Elle voulait que j'avoue la vérité, que j'essaye vraiment…vraiment d'être heureuse…Et maintenant…Et maintenant…Elle ne verra jamais que j'ai réussi, petit à petit…

Un frisson lui remonta l'échine. Oh, non, pas ça, il n'était pas prêt à entendre cela.

-Pourtant, c'est tout bête ! Continua Sam, sans voir le malaise de son professeur. -Au final, est-ce que j'ai vraiment besoin de dire autre chose que je vous aime, est-ce que ça changera quoi que ce soit ? est-ce que c'est trop franc, trop banal ? Trop peu poétique ? Mais je vois pas d'autres mots, je vois pas ce que je pourrais rajouter d'autres ! Est-ce que ça changera quoi que ce soit à ce que je ressens ? Est-ce que mes mots changeront quoi que ce soit à votre réponse ?

Elle venait de le dire. La gamine qu'il avait vu grandir, lui avouait ses sentiments. Et il se sentait répugnant, de leur réciprocité. Un adulte n'est pas censé aimer une enfant dont il a mouché le nez. Quel genre d'homme devenait ceux qui succombaient à cela ? Ce n'était pas seulement une question de lâcheté.

Non.

En vérité, tout était une question de lâcheté. Mais pas parce qu'il redoutait la douleur, qui naitrait de leurs sentiments communs. Pas parce qu'il se voulait d'illusion. Mais parce qu'il craignait de ce qu'il pourrait lui faire. Elle était jeune, elle ignorait tout. Il ne se souvenait même plus de la façon dont pensait un jeune adulte de son âge, si seulement, un jour, il avait pensé comme un jeune adulte normal. Si ses caresses la gênaient, si leurs attentes se blessaient l'une l'autre ?

Et sans se soucier de son désarroi, Samantha continuait son laïus.

-Je sais que je suis trop jeune, et que vous n'avez pas le droit…

Oh oui, elle était trop jeune, oh oui, il ne devait surtout pas avoir le droit.

-Je sais que c'est déplacé avec les circonstances.
Son amie était morte, elle était désespérée, vulnérable, il était infâme, qu'il puisse en tirer avantage, même lui, un être ayant si peu de conscience morale, qu'il lui suffisait d'ouvrir sans les lire ses cahiers de classes avant un contrôle pour la faire taire, le savait.

-Je sais que je suis trop jeune pour vous, que vous préférez une femme de votre âge, et vous aurez sûrement raison ! Elles, elles auront de l'expérience !

Elles, elles ne seraient jamais la petite qui savait l'émouvoir d'un seul sourire, d'une parole, d'un simple geste.

- Elles, elles ne pleurnicheront pas comme des bébés !

Elles, elles ne lui livreraient jamais avec une telle sincérité l'entièreté de leur peine, jamais elles ne s'abandonneraient à lui avec tant de confiance.

-Mais…mais…Je promets que je changerai, que je ne pleurerai plus autant, que j'essaierai de murir, que j'irai petit à petit…

Il ne voulait pas qu'elle change…

-Alors choisissez moi, aimez-moi !

Et comment ne pas la choisir…Comment pouvait-elle songer, que son cœur en aille à une autre, en cet instant ? Mais il ne bougea pas, il se contenta de fermer les yeux, dans un symbolisme ironique, lui frappé de cécité. Peut-être, avait-il perdu tout sens commun en même temps que la vue ce jour fatidique à Jadielle. La petite fille de ses souvenirs, était devenue une femme, sans qu'il n'ait put le voir. Il ne pouvait admirer ses traits devenus murs, il ne pouvait la contempler, elle, et son visage rougis par le sang séchés, aux cheveux rendus pourpres par ses propres blessures, aux vêtements imbibés et rêches. Pourtant, elle était là. Et même s'il ne la voyait pas, elle avait grandi.

-Oui.

C'est tout ce qu'il dit. Dans une pression au gout de sel, leurs lèvres se joignirent. C'était tout ce qu'il y avait à dire.

Oui.

« « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « « «

Dans la pâle lueur de l'aube, un garçon marchait le long de la route sinueuse sur les berges d'Azuria. Les herbes folles écrasées sous le poids de la neige, et les plaques de givre, ne le freinaient pas dans sa balade. Un simple sac de voyage dans le dos, si léger qu'on se demandait bien ce qu'il avait put y mettre, d'où pendouillait vaguement, ce qui paraissait être un appareil photo, et un carnet à croquis, il errait, sans destination. Sa chevelure noire oscillait à peine sous le vent, qui, encourageant, lui caressait le flanc, comme pour le pousser en avant.

Un vrombissement résonna derrière lui, et sans même regarder en arrière, il tendit le bras en avant, pouce levé. Il ne se demanda pas, qui pourrait bien l'accepter dans sa voiture, lui, habillé comme un clochard, dans des vêtements aux couleurs jurant affreusement les unes avec les autres. Collants, mitaines, écharpe, châle, tout était bon pour camoufler chaque parcelle de peau impromptue, et s'il avait pu, il aurait probablement mis un masque. Mais, sa frimousse révélée, le séparait de l'image de l'assassin dans les consciences communes. Il avait l'air d'un drogué, mais pas d'un tueur.

Etonnamment, il y eut comme un crissement, et les pneus râpèrent la neige, en la projetant de par et d'autres du sentier, déversant donc sur les bas côtés, une espèce de mixture maronnasse. Le jeune homme contempla ceux qui l'accueillaient, neutre, presque désintéressé.

Il s'agissait d'un pick-up autrefois blanc, mais sales, couvertes de boues et d'insectes écrasées sous le zéphyr des voyages. Sa carrosserie s'effilochait et tombait par plaque entière sur la chaussée. Il se fichait éperdument de la cargaison situé dans le coffre ouvert aux intempéries dont le chargement recouvert par une bâche mal fixée, qui voletait sous les pétarades du pot d'échappement.

-En voilà encore un qui a l'air cuit ! Rigola un garçon, à la blondeur candide.

Il se pencha vers lui, dehors, emmitouflé comme jamais il ne devait l'avoir été, si on en jugeait pas le nombre de manteaux et pulls enfilés les uns sur les autres qu'il arborait, il jaugea l'inconnu du regard. Ses grands yeux marron pétillaient de malice et de curiosité. Il avait la peau mal en point, parsemée de tâches de rousseurs, se mêlant aux cicatrices, de ce qui témoignaient, une crise d'acné virulente durant l'adolescence. Enfin, ce qui l'évaluait de la sorte, se redressa, sceptique, se mordillant la lèvre, avant de rendre son verdict. Il devait à peine avoir 15 ans.

-Bon, il m'a l'air conscient celui-là ! Finit-il par lâcher, dans un autre rire innocent.

Le camion s'ébranla, et la fenêtre qui menait au coffre à partir de la case qui abritait les conducteurs, s'ouvrit. Une femme aux muscles luisants s'en extirpa avec l'agilité d'une contorsionniste. Enfin, elle arriva dehors, peu vêtue, elle avait un simple gilet en guise de protection contre la bise hivernale. Un bandeau sur le front, pour retenir ses mèches noires de lui ronger sa visibilité, le reste de ses cheveux reliés en une queue de cheval usée, elle arborait une mâchoire carrée et des traits plutôt durs. Sa tenue, un pantalon de cuir, des bottes de rockeuse cloutée, et un débardeur moulant, contrastait fortement avec celle du jeune garçon, plutôt ridicule.

Elle mâchonnait une allumette et le bois craquait sous ses dents jaunies, et pourtant émoussées.

-Ouais, bof bof quand même. Il a pas l'air bien sur terre !

Elle planta son pied sur la carrosserie, avec force, qui fit émettre un couinement affreux à la voiture malmenée, comme pour signifier, qu'elle, les avait bien cloués sur cette foutue planète. Elle croisa les bras, et le garçon remarqua alors, son bracelet, en corail jauni, sûrement une imitation d'une roche royale.

-Dit-moi gamin…

Commença-t-elle, avant de cracher à terre son allumette usagée, pour en sortir une autre, comme on sort une clope.

-Tu vas où comme ça ?

L'étranger ne s'offusqua pas de se faire traiter comme un enfant, alors qu'il n'était assurément pas vraiment plus jeune que cette dame, elle-même malgré sa peau tirée et mis à mal par le soleil d'une autre contrée, comme le dénonçait son hâle, avait l'air d'avoir à peine 25 ans, il penchait, pour moins, même, à cause de ses yeux. Ses yeux gris pétillaient de joie dans le rôle qu'elle endossait face à lui, ils témoignaient encore d'une jeunesse confiante en l'avenir et en le genre humain. L'étranger, se demanda, une seconde, à quoi devait ressembler ses prunelles, à lui…A présent. Il doutait y rencontrer la même lueur d'espoir u'il lisait chez cette femme. Il se décida finalement à répondre, mais mit plusieurs secondes, hésitant, à trouver les mots, puis, il ouvrit la bouche, pour annoncer :

-N'importe où sauf ici.

Sa voix était tiraillée, rauque, mais assurée, et cela plut à la camionneuse, dont le flanc bascula en arrière, sous un rire bruyant.

-Ahaha ! Ca tombe bien gamin, nous on va à Rhodes ! Et y-a rien de plus n'importe où que Rhodes ! Si t'as rien contre les trucs pas tout à fait approuvés par les poulets, et que tu sais bricoler, t'es le bienvenu !

Le jeune homme n'afficha aucune expression quand elle éclata de nouveau de rire. Il n'avait pas sourcillé en entendant le nom du continent tant redouté pour ses brigands, et encore moins, vacillé, sur le sujet des « petites illégalités » de ce groupe.

-Maman, maman, il a pas l'air très capable de bricoler ! Prévint tout de même le blondinet, sans se départir de son sourire, alors qu'il pointait du doigt, les bras fins en spagetthi de leur auto-stoppeur.
-Je sais me débrouiller.

L'étranger avait annoncé ça, de but en blanc, sans faiblir, certes, de manière un peu lente, comme s'il avait pris le temps de réfléchir avant de parler, de s'évaluer objectivement, et elle appréciait cette qualité. La femme hocha du chef avec approbation, et lui tendit la main.

- De toute façon si tu sais pas, t'apprendra ! Allez, grimpe ! Mais j'te préviens, ici, on bosse pour payer son voyage. Pas de parasite !
-Sauf les poux, ça on a un peu de mal à se débarrasser des poux…Précisa le blondinet, toujours en riant.

L'inconnu saisit la main qu'on lui tendait, et se hissa dans le coffre, sans effort. La patronne bomba le torse, affichant sans pudeur, une poitrine bien ferme et oppulente, largement dévoilée par son décolleté.

-Moi, c'est Shezza ! C'est moi qui commande ici, et si on me désobéit, j'accroche l'insolent à la voiture avec une chaine, et je lui fais voir si la boue a bon goût à 100 km/h.
-Elle plaisante pas, je l'ai vu faire !

L'inconnu haussa des épaules, ça lui était égal.

-Lui c'est Sho ! Continua Shezza en pointant le blondinet. –Il a un air un peu bêbête, mais il ne l'est pas, il parle juste à tort et à travers. D'ailleurs…

Elle lui fracassa le crâne d'un coup de poing bien placé, avant de darder une œillade noire sur lui.

-Ca c'est pour m'avoir appelé Maman !
-Patiiiin ! Ricana le dénommé Sho, les dents serrés, et l'œil larmoyant.
-Tu veux dire putain, non ? Le reprit l'auto-stoppeur, décontenancé.
-Non, je veux dire patin, pourquoi, intéressé ? Je peux faire les deux, si tu veux, te rouler un patin et te…

Shezza l'assomma à nouveau, et il rigola, mesquin.

-L'autre dans la case, là-bas, c'est Bernie !

Une vague main potelée et grasse le salua à travers la vitre.

-Il parle pas, il bouffe derrière son volant, dort derrière son volant, et personne veut savoir où il va chier. Mais à part ça, c't'un bon gars.

La main derrière la vitre, fit un bref signe du pouce, pour remercier de ces « compliments ».

-Et toi, c'est quoi ton nom ?

Cette fois, le jeune adulte resta muet comme une tombe, et Shezza, après avoir attendu un peu, haussa des épaules.

-Bien, j'te demanderai pas ça, on a tous nos petits secrets hein j'respecte ça. Viens t'asseoir.

L'étranger obéit, mais elle lui pointa une chose rose sur le bord de la route, au loin.

-Il est à toi ce Pokémon ?

L'étranger tourna la tête, et après une longue réflexion, hocha simplement du chef, muet.

-Va le chercher. On l'embarque. On a tous besoin d'un ami, peu importe à combien de sous-sol on en est…

Elle sourit, et dans un rayon solaire perçant l'horizon, quelques tâches colorées, semblable à du vitrail passèrent furtivement sur sa frimousse, aussi fugace qu'un battement d'aile. Sho, dans un bond, descendit du véhicule pour aller chercher le Pokémon de l'étranger, et, alors, que l'inconnu s'installait entre les caisses de bois de la cargaison, la main de Bernie, lui tendit un paquet de clopes.

Après une hésitation l'auto-stoppeur en porta une à ses lèvres, et Shezza lui fournit l'allumette. Enfin, une fois Sho de retour avec le Pokémon, il y eut un cahot, et le pick-up se mot en branle, alors que l'aube perçait enfin.

Nichée dans les poils d'Arcanin, un Hope gémissante de la perte de sa dresseuse tant chérie, Sam observait le spectacle. Elle n'arrivait pas vraiment à dormir, lorsqu'elle fermait les paupières, il lui semblait entendre les battements de son cœur décroitre dangereusement, et la peur de s'endormir pour ne jamais se réveiller, la tirait de l'état semi-conscience, prélude avant le repos, où elle sombrait.

Le spectacle était beau, contrairement au crépuscule, l'aube teintait le ciel d'un délicieux rose, aux lueurs mauves magiques. Elle était bien plus douce, et à la fois bien plus froide. Doucement, Sam caressa la perle polie et noire, la faisant rouler dans ses doigts. Hope jappa dans son dos, et renifla le précieux trésor, comme percevant la présence d'Eléa, dans ce vestige sauvé de la ruine des Dimensions.

Sam lui flatta le flanc, avec tristesse et mélancolie, et Hope, se recoucha, les prunelles brillantes. Il ne voulait que les caresses de sa maîtresse. Il ne réalisait pas, qu'elle ne rentrerait pas auprès de lui, qui l'avait porté sur son dos, si longtemps. Que faisait-elle en cet instant, est-ce que ses jambes la soutenaient ? L'Arcanin couina, en songeant, que peut-être, sa maîtresse et amie, se trouvait, affalée au sol, terrifiée, sans pouvoir marcher. Mais il avait beau humer l'air, il ne percevait sa trace nulle part, il ne savait pas où la chercher.

Un tumulte sortit Sam de la torpeur contemplative qu'elle avait substitué au sommeil. Elle eut à peine le temps de se redresser, qu'elle vit Gabriel descendre à toute vitesse les escaliers de ciment menant à l'entrée de la maison. Il était encore en pyjama, et tenait entre ses doigts, une enveloppe décachetée. A sa suite, émergea la totalité de la fratrie Kazamatsuri, un à un.

Elle revit les triplés, Gaetan, Aaron, Alice, l'éternelle maladroite, Fred, puis Les jumeaux, Frank et Marc, Rebecca la timide, les petites jumelles blondes, Harmony et Victoria…Et le bambin Jimmy. Comme ils avaient grandi depuis la dernière fois. Maintenant qu'elle le voyait, Rebecca avait 10 ans…Jimmy en avait 7…Avait-il seulement souvenir de son frère Daniel, qui ne revenait, auprès de sa famille, que rarement à cause de Twilight…

-DANNY ! DANNY !

Le cri de Lyndis, la mère de l'immense fratrie, la fit sursauter, et quand l'oncle de la famille, répéta ce même cri, une vague d'angoisse s'empara d'elle. Elle se précipita vers Gabriel.

-Qu'est-ce qui se passe ?

Déjà, la lumière s'illuminait derrière toutes les vitres de la maison des Yuki, et elle vit Silver et Gold se pencher, par la même fenêtre, Kain grommeler, et monter le son d'une chanson, qui hurlait « Just to be QUIET ». Message explicite.

Mais Gabriel n'en avait cure.

-On ne trouve pas Danny…On pensait qu'il avait besoin d'être un peu tout seul…Donc on s'inquiétait pas…mais…mais…

Shin, Lily, et Akira –portant le petit Hikaru- sortirent à leur tour, suivi par l'infirmière Joëlle, qui hurla à Kain :

-HEY LE VIEUX TU VOIS PAS QUE C'EST UNE SITUATION DE CRISE ! ETEINS TOUT DE SUITE CETTE MUSIQUE DE SAUVAGE !
-SI J'VEUX ! Beugla en retour le dit « vieux » digne d'un adolescent.

Pendant la panique, Gabriel avait tout de moins tendu, difficilement, les membres tremblants, l'enveloppe qu'il tenait. Samantha sentit le poids des pokéball rouler dans le fond de la missive, elle en extirpa un simple bout de papier, sur lequel elle reconnut l'écriture fine de Daniel.

« Désolé, mais j'ai besoin d'être seul. Je sais que vous voulez juste me réconforter et m'aider, mais je ne me sens pas le courage, d'être l'objet de toutes vos attentions, chaque jour. Je ne ferai que vous plomber l'humeur, comme un boulet. Avancez sans moi. Je vous donnerai des nouvelles bientôt, j'ai juste, besoin de m'isoler quelques temps. Gabriel, s'il te plait, prend soin d'Evoli et Flobio. A bientôt. Je vous aime. Daniel. »

Elle ne le comprenait que trop bien. Mais Apparemment ses proches, ne pouvaient supporter, de le savoir loin d'eux, dans un tel état.

-Je vais chercher la voiture ! Il n'a pas pu aller bien loin ! Scanda Gaëtan.
-Il a peut-être fait du stop !
-Je lui ai TOUJOURS interdit d'en faire ! Gronda Lyn, blanche.
-Et comment qu'on va faire, il a plus ses Pokémons !
-Maman, Daniel, il ne nous aime plus ? Demanda un des jumeaux, larmoyant.

Gabriel continuait de scruter frénétiquement l'orée du sous-bois.

-Oh, non chéri, ce n'est pas ça…La voiture elle vient ?!

Mais le dénommé Gaêtan c'était figé devant son trousseau de clef.

-Mais qu'est-ce que tu fous au juste ! Bouge-toi ! Lui hurla son double, Aaron, tandis qu'Alice lui prenait l'objet des mains.
-Désolé…C'est juste que…Que…

Gaëtan se mordit les lèvres.

-Que Daniel a payé un quart de la voiture avec nous alors je…

L'information fit mouche, et la fratrie Kazamatsuri eut un hoquet, de peur, de peine, de mélancolie, alors qu'Alice, s'empourprait.

-ET BIEN ALORS UTILISONS-LA POUR LE SAUVER DE SA BÊTISE ! NON MAIS VRAIMENT !

Sam les vit s'affairer, entendit les portières claquer, et les pneus crisser sous le démarrage en trombe, tandis que le reste de la famille, se divisait en petits groupes pour fouiller le village. Elle contempla Gabriel partir à la recherche de son aîné, désespéré. Mais une voix en lui, lui susurrait qu'ils ne le trouveraient pas. Plus.

Daniel, avait enfin coupé le cordon, avec cette famille qu'il aimait sans commune mesure, et qui pourtant l'étouffait. Il ne reviendrait pas. Parfois petite, Sam, s'était demandée, pourquoi les humains, êtres si égoïstes, cherchaient toujours à se réunir, alors qu'ils se causaient toujours du tort les uns les autres, même bien involontairement…Aujourd'hui, plus sage, elle connaissait la réponse. Mais la question de l'enfant qu'elle avait été subsistait, ressurgissait par moment.

Particulièrement quand une famille, telle que celle de Daniel, se voyait imploser à cause de cet amour trop éprouvant qu'ils disséminaient entre eux.

Silver apparut à ses côtés, et Sam, eut un regard triste, alors qu'il lui conseillait :

-Rentre, il fait froid dehors…

Il grimaça.

-Et ils ne le retrouveront pas.

Lui aussi il savait. Qu'une fois le lien brisé, il était impossible de le réparer à l'identique. Est-ce que Sam et lui, se doutaient, au fond d'eux, que jamais Daniel ne retrouveraient les siens, et son foyer, de son vivant ? Les mystères et méandres ironiques des Destins, étaient parfois si rudes à déchiffrer, et souvent, si cruels, qu'il vaut mieux demeurer dans l'ignorance, quitte à se baigner dans un espoir illusoire.

Alors qu'elle laissait Silver la pousser vers l'entrée, les mots lui échappèrent, malgré elle.

-C'était notre mère, la femme là-bas, n'est-ce pas ?

Gold qui se dirigeait vers le rouquin, s'arrêta, et les laissa finalement entre eux, après une œillade fatiguée échangée. LE fils du boss, le laissa s'éloigner, retourner dans le salon, puis eut un rictus. Ses iris coulants vers le sol, chagriné.

-Oui…

Sam se mordit les lèvres.

-Je croyais…je croyais qu'elle était morte… Je…je croyais qu'elle était gentille, qu'elle au moins, elle était aimante et…

Son frère, fronça les sourcils, et elle sentit, à la pression de ses doigts sur son épaule, combien la trahison et ses croyances brisées le blessaient lui aussi, bien plus qu'elle ne l'était. Car, après tout, qu'avait-elle perdue, elle, en la personne d'Holly ? La baby-sitter de son enfance, une gentille dame malheureuse, tout au plus. Silver, lui, avait vu l'emblème de son enfance s'effondrer, ce qui avait été la sa force et son courage.

Le regard de Sam, coula, en même temps que celui de son frère, sur Gold.

Et il, avait du, le retrouver, en une autre incarnation.

Leurs mains se serrèrent, et les doigts de Silver effleurèrent la perle noire, alors qu'il ricanait, doucement, fatalement :

-Que sais-je vraiment d'elle au juste ? Elle a réussi à me faire oublier que j'avais une sœur…Dans mes souvenirs, d'elle, lesquels sont véritables… ?

Il ferma les yeux, résigné, il suintait de lui, la tristesse et la douleur, de ce renoncement amer.

-Il faut se faire une raison…On ne sera jamais normaux. Entre Giovanni, et elle qui a perdu la raison…

Puis il réalisa, dans un vague frisson, ce qu'il venait de dire, et rompit le contact avec sa sœur, comme brûlé.

-Enfin, non, pas toi. Toi…Tu n'es pas ma sœur.

Il lui tourna la tête, dans une moue de colère, si peu crédible, dans les derniers restes, d'une dispute puérile. Elle le voyait maintenant. Parce que, tout cela, n'avait plus d'importance, ces mensonges, ses vœux, tout cela n'écraseraient jamais la dure réalité. Il fallait juste vivre avec, l'accepter.

Et comment ne pas le faire ? Leurs parents n'étaient pas des êtres recommandables, mais elle l'avait dit à Gold, on ne choisissait pas ses parents, on ne choisissait pas son héritage. Silver, lui avait montré à bien des égards, combien c'était vrai. Même s'il lui avait menti toutes ces années…Samantha ne sentait plus, le poids de ses tromperies, la peser aussi lourdement qu'auparavant. Peut-être, parce que son cœur, connaissait bien pire douleur, à présent, que celle de son petit orgueil bafoué.

-Je suis désolée Silver.

Le rouquin tressaillit, à des mots, aussi étranges dans la bouche de sa sœur, que dans la sienne, et il se retourna, déboussolé, alors que Sam lui saisissait le poignet. Gauchement, il se laissa entraîner, les yeux ronds, bafouillant :

-M-mais qu'est-ce que tu fais ?!

Elle faisait, ce qu'elle aurait du faire le premier jour. La vie était trop courte, trop fragile, pour remettre que ce genre de conflits minimes la bafoue. En quelques pas, elle se planta devant l'infirmière Joëlle, toujours aux prises avec Kain, le grondant, lui et ses manières de rustres, comme elle l'aurait fait avec un ado.

Sam, observa ce manège, celui de sa mère adoptive, avec cet adulte, qui devait avoir 20 ans de plus, au moins. Bourru, malpoli…Et la vision de sa mère, si amusée dans la perle, avec lui, déferla en elle. Quelle importance, qui était l'heureux élu, tant qu'il rendait sa mère heureuse, tant qu'il ne lui causait pas de tort…Elle en avait si souvent rêvé, dans son enfance, que l'infirmière, puisse vivre sa vie, sans qu'elle ne l'entrave.

-Sam ?

La médecin se redressa, face à sa fille.

-Maman, je voulais te présenter quelqu'un.

En deux pas, elle les rapprocha, et prit la main de sa mère, dans la sienne, pour la poser sur celle de Silver. Joëlle, qui avait déjà rencontré le rouquin, ne comprit pas la scène, de même que le principal concerné. Mais Gold, se leva dans le fond, un pressentiment montant en lui, tandis que Sam, annonçait, avec calme.

-C'est mon frère.

Elle regarda Silver, qui cette fois, avait l'air d'un magicarpe hors de l'eau. Elle lui envoya une œillade mal assurée, et avisa la silhouette de Yuki, accoudé contre le seuil de la porte, écoutant avec bienveillance la scène qui se jouait. La certitude, de prendre la bonne décision, pour une fois, s'imposa à elle.

-Il est con, borné, et grincheux, et pour couronner le tout, gay.

Kain qui avait été assis à côté de Gold jusqu'à maintenant, s'écarta d'un mètre, en marmonnant :

-Tombe pas amoureux d'moi, toi !

Qui déclencha un soupir exaspéré chez Gold. Comme si.

-Mais je l'aime. Reprit Sam.

Cette fois, Silver devint aussi rouge qu'un écrapince, mais elle sut, à la façon dont ses yeux bleu-argentés se détournèrent avec pudeur, combien l'attention le touchait. Elle s'approcha de lui, et serra un peu plus fermement, les deux mains posées l'une sur l'autre, de son frère et sa mère.

- Silver, je te présente ma maman…

Elle aurait voulu le mettre en garde, contre sa froideur, sa mauvaise humeur, et son intolérance pour l'insolence et toute forme de rébellion, mais elle savait, que dire ça devant l'infirmière, lui aurait valu une paire de claque, aussi, se contenta-t-elle de répéter.

-Et j'aimerai que ce soit aussi la tienne.

Il y eut un silence embarrassé, durant lequel, l'infirmière Joëlle et Silver, regardèrent Sam, puis l'un l'autre, sans trop savoir que dire, en ponchiots de faïence. Il devait pourtant dire, quelque chose, la situation l'exigeait. Silver paniqua. Il n'avait aucune expérience dans les présentations, pour ne pas dire, qu'il était nul. Il lui semblait, qu'il fallait tendre la main en signe de bienvenue, mais là, cette dame lui serrait déjà la paume. Dans ce cas il devait faire quoi ? Quoi ?

-Bah, je…hey…hum…

Silver arborait une couleur aussi prononcée que celle de ses cheveux, et aussi jouissif que cela était, de le voir patauger ainsi, l'inifrmière mit fin à son calvaire.

-Enchantée Silver.

Et elle les enlaça. Ses deux enfants, Sam et Silver. Ses bras étaient bien assez grands pour les accueillir tous les deux. Le rouquin, d'abord abasourdi par ce geste tendre, finit, petit à petit, par se laisser aller. Le cœur battant, ses muscles se détendirent, en se remémorant, le sentiment familier, qu'était d'avoir une mère.

Est-ce que c'était cette odeur, qu'avait connu Sam, dans son enfance, ce sentiment, de sécurité, au creux de les bras de cette femme, qui l'aimait sans rien demander en échange, sans autre forme de procès, ou jugement ?

Doucement, il camoufla un sourire, et serra la main de sa sœur dans la sienne. Leurs doigts touchèrent la perle noire à l'avenir perdu, mais cette fois, l'écho de leurs rires, sonnaient, bien plus accessibles près de leurs cœurs.

-Maman, j'aimerai que tu me coupes les cheveux.

La demande de Sam, arracha un sursaut, à plusieurs d'entre eux, et l'infirmière Joëlle, dévisagea longuement sa fille, étonnée.

Mais Sam n'avait pas honte. Elle prenait un nouveau départ, tout comme le jour, où elle avait quitté ces deux années de solitudes, durant sa scolarité. Elle abandonnait derrière elle, la tristesse, et ses échecs. Cette abominable défaite, où elle avait perdu Eléanore.

Néanmoins, cette fois…Sam se promit de ne plus fuir. Elle regarda Akira Yuki, cherchant du réconfort, et du courage.

Elle prenait juste, un peu d'élan, avant de sauter.

L'infirmière lui montra une chaise, où elle s'installa, paisible, alors que Kain, donnait à l'infirmière, l'horrible menace qu'incarnaient les ciseaux. Petite, elle avait toujours craint ce moment, où sa mère lui coupait les cheveux en plein milieu du hall du centre de Pokémon, à la vue et su de tous. Cela avait été une humiliation, à chaque mèche, la preuve, que sa mère, ne croyait même pas en elle et ses histoires, ne la protégeait pas. Mais cette fois, c'était différent. Cette scène, les regards posés sur elle, ne lui faisaient plus peur. Non, elle en était même plutôt, douloureusement fière. Elle grandissait.

Ses doigts se crispèrent sur la perle.

Eléanore, aurait été fière d'elle, n'est-ce pas ?

Silver s'assit à côté d'elle, et timidement, lui donna une petite accolade pour l'encourager. Ce fut sans compter l'intervention de l'infirmière, qui lui coupa nette sans queue de cheval à lui aussi.

-Q-Qu-qu'est-ce que vous faites ? S'outra Silver, livide, en se levant d'un bond.
-Je te coupe les cheveux, puisque tu es là aussi ! Rétorqua La femme, en montrant les ciseaux, comme si c'était une évidence.

Le rouquin recula de plusieurs pas, pour s'éloigner un maximum de l'objet coupant, et Gold ne put que difficilement contenir, un « je le savais il a peur des objets pointus ! » d'un cri, pour la première fois, plus victorieux que morne et entaché par le deuil.

- M-Mais j'ai rien demandé ! Continuait de s'offusquer le rouquin, sous les rires grandissants de la foule.

Joelle plaqua les mains sur ses hanches, et, avec mauvaise humeur, ne se laissa pas malmener :

-Trop tard, c'est déjà commencé ! et puis les hommes ont les cheveux courts ! Ou alors ce sont les voyous !
-Alors ça, c'est vraiment un point de vue dépassé, c'est comme dire que les filles doivent ne porter que des jupes !
-Tu traites ta mère de plouc là ? Encore un mot et je te fais la boule à zéro !

Akira céda le premier, puis ce fut Gold, dont le ricanement explosa, et tour à tour, la rumeur du rire, monta dans le salon, tandis que Silver se plaçait sur le banc, tel un condamner, laissant sa mère lui couper la tignasse. Bougons, tous les deux, subissant les premiers affronts mère-fils, déjà.

-Ne lève pas les yeux au ciel quand je te parle !
- AIE ! Ne me tire pas les cheveux !

Sam observa ses mèches bleus, tomber sur la moquette, et se mélanger à celles rousses de son frère, caressant silencieusement la perle dans ses doigts. Une larme lui échappa. Mais elle-même, n'aurait su déterminer si elle était, heureuse, ou malheureuse, la mélancolie et l'émotion embrumant son jugement, se réunissant, à l'image de leurs deux chevelures éparses à leurs pieds.

-Sam… ?

La voix, inquiète, de sa mère, la ramena à la réalité, et elle croisa le regard soucieux de Silver, puis Gold…Et Akira fit un pas en avant. Elle essuya prestement ses joues. Non, elle ne voulait pas être la responsable, la meurtrière, du retour, d'un tant soit peu de bonne humeur. Elle ne désirait pas…Comme Daniel finalement, être la convergence de toutes les craintes.

-C'est…C'est…R-Rien, c'est juste, que…

Ses paroles s'embourbèrent dans son gosier.

Elle réalisait, que peut-être, l'avenir qu'elle avait vu, lui était possible, que, malgré l'absence d'Eléanore, les rires, la joie, pouvait encore exister. Ses doigts ripèrent sur la perle, qu'elle serrait nerveusement. Néanmoins…

-Je me disais, qu'elle aurait aimé voir ça…Voir que finalement…Que…Que je me suis réconciliée à avec Silver…Que…Que tu as enfin une famille. Et…

Akira posa une main sur son épaule, de même que l'infirmière Joëlle.

-Sam, tu n'as pas à jouer les braves Sam, si tu as envie de pleurer, pleure, ça te fera du bien. Parfois, pleurer ça fait du bien.

Mais cela ne réglais pas les choses, cela ne réglait rien, elle ne put cependant pas retenir un hoquet. Pour ses cheveux coupés, pour Daniel disparu, pour son frère qui avait enfin une famille…

-C'est juste que…j-je-je n'arrête pas de penser, que, que ce qu'il me manque pour aller mieux, ce qu'il me manque pour me consoler, pour que tout se termine bien…

Et les effectivement, pleurer la soulagea, brisa le barrage qui lui bloquait la respiration et lui écrasait le ventre d'une bile venimeuse.

-C'est Eléa !

L'Eléa qu'elle avait connue, au début de son voyage. Pas la Eléanore Sarl, malade et condamnée, mais son amie. Juste Eléa Lars, sa rivale.

Et elle détestait ça, voir tout s'accorder parfaitement, voir les sourires, la bonne humeur revenir. Elle détestait réaliser, que le monde continuait de tourner, sans elle, que le quotidien reprenait le dessus, et que la vie l'oubliait. Elle détestait cette situation. Elle se détestait elle pour ne pas avoir réussi à la sauver. Elle détestait que les plans de son amie, aient fonctionné et non les siens. Elle détestait, que tout s'arrange, seulement une fois celle-ci décédée, alors qu'elle avait tant participée, tant aidée, à la concrétisation de leur bonheur. Tout avait été conséquence de ses actes.

Alors était-ce prétentieux…Etait-ce stupide, de simplement, vouloir la voir ? La voir rire avec eux, participer à l'hilarité, l'entendre dire, de sa bouche « Hey, finalement tout finit bien, grâce à qui ? Grâce à moi ! ». Etait-ce, de l'idiotie, de refuser, ce futur, là ? Simplement parce qu'elle ne pouvait supporter son absence ?

Elle avant entendu la conversation des Yuki à son chevet, celle sur la lâcheté. Les vraies, héros, n'étaient-ils pas ceux qui refusaient la facilité, ceux qui luttaient, pour ce en quoi ils croyaient ? Et bien, elle refusait une existence où elle se serait laissé entraîner par le courant du quotidien, pour s'y noyer lentement.

Ses doigts se compressèrent contre la perle noire. Noire, comme éteinte, morte, noire, comme Ash. Elle convenait si parfaitement, à la gamine. Elle mêlait pessimisme, et optimisme. Cette perle…C'était la preuve, qu'elle était morte, et à la fois, sa présence, tout contre sa paume, lui susurrait, que cette possibilité, cette unique chance de vivre cet avenir, était encore à sa portée.

Elle voulait juste la revoir.

Un écho, surgit dans leur dos, leur arrachant un sursaut, et Kain, bourru, marmonna, télécommande de la télé en main :

-Oh, d'solé, la niaiserie feux d'l'amour m'a saoulé, alors j'zappe pour les infos !

Le petit écran au coin de la pièce, afficha alors le visage de Peter, en grand. Il était entouré de micros, il paraissait impassible et sûr de lui.

« Les récents évènements sont de notre faits. » Annonça-t-il simplement.

Les visages obliquèrent, se ruèrent, droit sur lui, et Gold, manqua de s'étrangler, quand il vit, camouflé par la cohue de journalistes, sa sœur, en compagnie de Lucas et Marion. Ils ne montraient aucun signe de résistance et attendait simplement, résigné, que la conférence s'achève. Comme un message implicite, aux autres, à ceux partis devant, à ceux qu'ils aimaient, si loin d'eux à présent, à ceux qui les avait abandonnés, oubliés. Ils restaient sur place. Ils se battaient pour Twilight.

« Des informations certaines, nous affirmaient, qu'une Team espérait invoquer Arcéus grâce à la flûte Temporelle. Nous avons donc pris les devant, et un de nos membres, s'est sacrifié, pour chanter la mélodie jouée par la Flûte »

Les propos de Peter entraînèrent une surprise générale chez les journalistes qui se répercutèrent chez chaque spectateur, derrière leurs écrans, de part le monde.

« Une fois Arcéus invoqué, nous lui avons demandé, de faire le nécessaire, pour empêcher une telle catastrophe. Il a alors endormis les Pokémons légendaires, et leurs clones, qui causaient tous ses dérèglements météorologiques. Nos membres ont été envoyés, et en ce moment même, sont en train de récupérer chacun d'eux pour les mettre à l'abri, pendant leur léthargie. Certaines personnes ont put s'endormir en même temps que les Pokémons légendaire, cela est dû, à leur grande sensibilité, aussi, nous leur demandons, à leur réveil, de se déclarer pour que nous puissions leur offrir un abri en guise d'excuse. »

Aux confins de Rhodes, une jeune femme fut réveillée par la voix grésillante, transmise sur toutes les ondes, et se répercutant dans les boyaux de la ville. La tête lourde, comâteuse, elle se redressa, en plein milieu de la place, et comme elle s'en doutait, personne ne lui accorda la moindre attention. Debout comme affalée à même le bitume. Ici, on se mêlait chacun de ses affaires, et les cadavres qui jonchaient les rues, seraient forcément ramasser au crépuscule. La brunette, leva alors les yeux vers le ciel, ses grands yeux bleus azures, aux reflets électriques, semblèrent se perdre dans les confins d'une conversation intérieure, alors que Peter, continuait de déclarer, impassible :

« Arcéus, a alors procédé, sur notre demande, au Jugement de l'humanité. Il est entré en le cœur de chaque être humain, et a décidé, qui, méritait de rester. Je m'excuse sincèrement envers la population, et tous ceux qui ont perdu un proche, lors de cette étape. Mais Arcéus ne peut s'être trompé, et je vous prie, de comprendre, que les victimes du jugement, n'était peut-être pas ce qu'ils avouaient être. Arcéus, a permis, à quelques uns de réchapper à son attaque, seuls ceux qui étaient entourés, et aimés, aussi, j'espère, qu'il n'y a pas de personne, trop touchées par mon message précédent. »

Sunny siffla avec rage, à l'entente de ses mots, assise sur une chaise, au chevet de son frère, dont l'électrocardiogramme bipait à un rythme constant. Lalie endormie, blottie tout contre Blake, ne se réveilla pas, quand celui-ci se redressa, contrit.

-Au moins, ça veut dire, que tu m'aimes énormément…Constata-t-il.
-Pas seulement moi, Pierre et Charline, et les parents aussi, ils ont appelé l'ambulance ! Et Lalie, tu l'aurais vu mordre le médecin pour te prendre en premier en opération ! C'est pour toi, et pour tous ceux là que je t'ai donné un rein ! Il est hors de question que tu clamses !

Elle rigola, et eut un sourire affreusement sarcastique.

-Remercie plutôt Arcéus, qui a fait que nous soyons compatibles toi et moi.

Blake grimaça, et caressa la manche vide, qui pendait au bras fantôme de sa sœur.

-Quel imbécile je fais…Tu n' as déjà plus qu'un bras…Maintenant plus qu'un rein…
-Mais j'ai toujours mon frère.

Sunny lui prit la main, et la serra avec tendresse et désespoir. C'était, bien, tout ce qui importait en cet instant. Qu'il soit toujours auprès d'elle. Blake se détourna, et serra la petite fille dans ses bras, tout en remarquant la présence de leurs parents adoptifs, assoupis dans la pièce, avec Pierre et Charline. Il eut une moue embarrassée.

-Mais…Avec une telle blessure, on sera vraiment très en retard pour voir Yoyo…

Sunny secoua la tête, avec patience, la patience qui faisait d'elle un magnifique shiney hunter, même si elle avait beaucoup de mal à en user, face à d'autres êtres humains, que son frère.

- Ce n'est pas grave. Les morts peuvent attendre, ils ont toute l'éternité…Et puis…

Elle ferma les yeux, comme libéré d'un poids.

-C'est bizarre…Mais…j'ai l'impression, qu'il nous en voudra pas. Comme, s'il était là, près de nous, tu vois… ?

Elle eut une drôle d'expression, et se laissa tomber sur le flanc de son frère, qui passa un bras réconfortant autour de ses épaules, sans véritable attention, le discours de Peter, diffusé par la télé de leur chambre, les entoura.

« Evidemment, il ne tient qu'à nous, pour que cette tragédie, ne se reproduise pas. En ma fonction de champion de Kanto, et Jotho, et après délibération avec le conseil des 4 de ces régions, et leurs politiciens respectifs, de nouvelles lois vont entrer en vigueur. »

Ce que possédait Peter, était la pire des menaces, et une pression sans doute, insupportable, qui poussait ses ennemis à courber l'échine devant lui. Car l'omniscience Arcéus, ne permettait à personne de se cacher de son jugement.

Shagi, assis sur le parvis de l'arène d'Ebenelle, se taisait, il fixait toujours, avec indifférence, le cadavre, de cette femme. Ses derniers mots tournant et se retournant sous son crâne. Hasardeux, il passa une main sur sa joue, encore couverte de sang, le sang de cette femme, qui avait gaspillé son dernier geste pour lui caresser la joue, et lui sourire. Son Altaria, gémit à ses pieds, et se pressa contre lui pour le réchauffer, il devait sûrement le croire, blessé et déboussolé. Peut-être même déprimé.

L'irisien observa encore une fois, cette femme, qui dans un dernier soupir, c'était illuminé, pour retrouver des cheveux bruns. Comme les siens. Une peau brune. Comme la sienne. Et des yeux sombres aux reflets violacés. Exactement comme lui. Le corps gisant d'un Altaria, femelle, bien plus vieux, à côté d'elle, comme si elle s'en était séparée. Qu'ils n'avaient formée qu'une seule unité dans la vie, et que la mort, avaient fait recouvrer leurs états d'origines.

Shagi n'avait pas envie de tirer des déductions de tout cela. Il n'avait pas envie de repenser, à la voix de cette inconnue, qui avait, dans un dernier râle, soufflé un « Tu as tellement grandi… » Emprunt d'émotion.

Arisa, lui passa une main dans le dos, en guise d'encouragement, mais il ne réagit pas. Il n'était pas mal. Il n'y avait aucune raison qu'elle ait ce genre de geste à son égard.

-Il faut l'enterrer…Constata-t-il vaguement.

C'est vrai, elle gênait le passage, qui voudrait défier le défi d'une arène, où un cadavre pourrissait sur le seuil ? D'un autre côté, il était certain que Sandra aurait trouvé ça très amusant d'effrayer les gamins de la sorte, mais l'odeur allait finir par l'incommoder.

-Quelqu'un va venir la chercher. Tu veux rentrer… ?

Shagi secoua la tête. Altaria se mit à pépier la berceuse de son enfance, seul vestige qu'il possédait de sa mère et de son pays natal, quand Sandra déboula, comme une furie, et accourut vers eux.

-Il faut que vous écoutiez ça !

Et elle pressa le bouton de son pokématos, pour que la radio transmette le discours, de Peter.

« Il est dorénavant interdit de se réunir en communauté, qui ressemblerait éventuellement aux Teams. Nous allons mettre en place, une système de religion, voué au culte d'Arcéus. Evidemment, chacun est libre d'y adhérer s'il le souhaite. Néanmoins, les croyants qui nous rejoindrons, recevront tous, une plaque. Une plaque, crée par Arcéus, et qui contera l'avenir de cet individu. Il est évident, que chaque avenir, sera crée et façonné de façon à ce qu'il soit le meilleur possible pour la société. Ces plaques, seront lu en partie, au concerné, à chaque anniversaire, qui pourra se préparer au fur et à mesure à son destin. »

Shagi sentit Arisa lui serrer la main, alors, que blême, elle balbutiait, perdue :

-Mais qu'est-ce qu'il raconte ?

« Ainsi, nous espérons, éviter les malheureux accidents, et toutes les morts non nécessaire ; pour qu'enfin une véritable paix s'installe. »

Shagi secoua, la tête, réfractaire à l'idée. Peter, semblait avoir oublié un détail important : En ce monde, il n'y avait pas de Blancs et de Noirs. Ni même de Justice. Il y a juste, des humains. Qui tentent désespérément de coexister.

« Nous ne pouvons forcer les gens d'adhérer à notre façon de penser, et encore moins les autres régions. Cependant, nous leur demanderons de tolérer, une certaine ingérence de notre part, afin que les peuples d'Hoenn, Sinnoh, Unys et plus encore, puissent accéder, s'ils le souhaitent, au culte d'Arcéus. Evidemment cette religion, sera menée par Twilight et uniquement par elle. Nous protègerons nous-même les plaques, et l'incarnation d'Arcéus. »

Peter s'écarta, pour offrir aux journalistes, la vue de Thémis, à la chevelure immaculée et aux yeux disparates, inspirant le jour et la nuit. Elle se tût, sous la nuée de journalistes, tels des insectes attirés par la lumière. Régis, à côté d'elle, se contenta de poser une main sur son épaule, mais bien évidemment, si ce geste aurait fait la joie d'Eléanore, celle qui avait hérité de son corps, n'afficha aucune émotion.

Devant son poste de Télé, le petit Emilyon dit Lyon, resta perplexe, se demandant ce que faisait son parrain Régis avec cette femme. Il avala sa cuillère de céréale, et pencha la tête sur le côté, tandis que le visage, de cet « Arcéus » lui rappelaient quelque chose. Quelqu'un dont l'émotion, était figé, uniquement sur papier glacé. Sa mère et son père, passèrent dans son dos, et jetèrent un coup d'œil à l'image, avant de se figer.

Marina et Charles Sarl, le cœur serrés, croyaient, qu'au bout des années, ils cesseraient de voir le reflet du visage de leur défunte fille partout, et, résignés, tant à la douleur qu'au choc, ils détournèrent les yeux pour reprendre leurs activités respectives.

« Il y aura de grands changements dans les années à venir… »

Peter annonçait cela, tel un prophète, et sa voix, avait quelque chose de rassurant. Car elle promettait, un régime, qui se voulait plus juste, un régime, où l'on pouvait être certain de faire le bon, ou le mauvais choix.

Chris et Angie, alités, devant leur télévision murale, dans une chambre reconvertie en dortoir, y croyaient. Malgré la douleur qui se gravait dans leur chaire. Ils avaient l'agréable sensation, d'avoir été jugée pour leurs crimes, et d'en avoir été acquitté. Confiants, ils se prirent la main, tandis que l'infirmière, s'avançait vers eux :

-Vous avez de la chance, une de vos amies, vous a maintenu en vie, juste assez longtemps, quand vous êtes arrivés, vous aviez besoin d'une greffe en urgence…Et c'est un miracle qu'on ait put trouver des compatibles avec vous immédiatement ! Remarque avec tous ces morts…

Chris observa leurs compagnons de chance, dont un homme d'âge mur, qui ressemblait à une momie.

-Lui ? Ca fait longtemps qu'il est là, il est amnésique, mais c'est un gentil papy. Il attend une greffe de peau et une reconstruction faciale. Avec un peu de chance, il y aura le droit, dans pas longtemps, on a enfin de la matière !

Angie eut une grimace, face à la façon de parler de la doctoresse, mais elle ne s'autorisa pas de remarque. Car après tout, ils étaient vivants. Tous les deux. Dans les prémisses de la mort, dans cette torpeur qu'est l'agonie, elle s'était faite la réflexion, que ce qui avait commencé avec eux, allaient finir avec eux, en toute logique.

C'était par eux, et leurs erreurs, qu'avait débuté ce récit. Il aurait été logique qu'il s'achève dans leurs morts.

Chris lui envoya une œillade complice et malheureuse, quand la martyre d'Arcéus passa de nouveau à l'écran.

Mais peut-être, se fourvoyait-elle. Peut-être, que ce n'était pas encore l'heure, de la fin de l'histoire.

« Nous priions, les gouvernements annexes aux nôtres, d'accéder à nos requêtes, et de régler tout conflit dans la paix. Mais nous savons que tous cela ne dépendent, que du choix de leurs politiciens, et membres de leur conseil des 4 respectifs. »

Steven, devant le cercueil qui transportait son père vers le caveau familiale, écouta sans véritablement l'entendre, le discours de Peter, transmis dans toute la ville, par radio. Cerné par les journalistes, rapaces, qui avaient été délégués à ce petit évènement people, plutôt qu'envoyé sur ce sujet bouillant, ne rateraient jamais la moindre erreur de sa part. Aussi, malgré la tristesse qui le submergeait, à la perte de son père, il resta à distance conséquente de Marc.

Cynthia, à côté de lui, lui murmura, tristement :

-Nous avons encore le temps de choisir, Steven…Prend ton temps, fait tes adieux à ton père. Nous aurons tous le temps de penser aux conséquences, et aux décisions, après…

Alors, Steven lui prit la main et dans une supplique à peine voilée, et tellement emplie de sous-entendu, il balbutia :

-S'il te plait reste avec moi.

Et Cynthia, après un moment de surprise, ferma les yeux et hocha simplement du chef.

« Le monde va changer, mais il ne tient qu'à nous, qu'il ne replonge pas encore dans l'obscurité. Aussi, je demande de la compréhension, aux autres pays, et de la part de leurs populations. »

Asbel Irving, se réveilla en sursaut, sur les genoux d'Iris, entouré de Nico, et Sacha. Ceux-ci les visages crispés, regardaient la télévision, saisissant tant bien que mal, qu'un tournant important se jouait sous leurs yeux.

Sacha s'en alla aussitôt appeler ses amis, Drew, Flora, Max, Aurore, Kenny, tous encore chez Ondine. Et Asbel, sentit, au fond de lui, qu'il devait faire de même avec sa famille. Ses parents, à peine réveillés, à l'hôpital, ne reçurent pas l'appel inquiet de leur fils…Quant au pokématos d'Ambre, il sonna de nombreuses fois dans le vide, dans le sac abandonné de la blonde, porté par Paul, devant un Richie effondré sur un banc. Barbara à côté de lui, muette, ne trouvait pas les mots.

Parce que contrairement à Eliza Irving et Salem Irving, Ambre ne répondrait plus jamais à son téléphone.

« Nous nous retrouverons bientôt, pour transmettre de nouvelles informations quant à la gestion du nouveau système. »

Une jeune adulte aux cheveux carmin ouvrit les yeux en sursaut, dévoilant des prunelles d'un or pur. Sary, regarda tout autour d'elle, perdue, à la recherche de ce qui produisait ces paroles, et son regard coula sur Sarah, son amie d'enfance, elle aussi dans un lit d'hôpital, en train de lire, près de leur professeur d'université. Armand.

-Oui, je sais Christelle, je sais que tu es dégoûtée de ne pas pouvoir interviewer Peter toi aussi…Mais franchement je sais pas si c'est vraiment, si bien que ça, son discours…Maugréait leur enseignant.

Sarah, sembla remarquer que son amie était réveillée, et lui sourit.

-Ils nous ont transportés à l'hosto de nénucrique.

Mais un frisson remonta la colonne de Sary, bien loin de si triviales préoccupations. Une voix, en elle le grondait, l'hurlait. L'harmonie des mondes, du temps et des dimensions, venait d'être bouleversée par un flot de haine incommensurable.

Avec rancœur, elle se mordit la lèvre inférieure, jusqu'au sang, et le cœur battant à ses tempes de colère et de tristesse à la fois, elle murmura :

« Je suis désolée Mia, mais je vais devoir intervenir…Je ne pourrais pas te rejoindre tout de suite…Encore une fois. »

Et elle ferma les yeux, tandis que les paroles de Peter, sonnait le glas, de ses espoirs, encore une fois, remis à plus tard, comme il était le devoir des gijinka, en période sombre…Elle allait devoir intervenir.

« Mesdames et Messieurs, je vous remercie de m'avoir écouté, et je l'espère, de votre coopération. »

Samantha éteignit le poste de télévision, devant l'assemblée coite, et secouée par une telle annonce. Gold tremblait de tous ses membres, lui aussi, avait-il sûrement réalisé, déjà.

Doucement, Sam ramassa quelques fils qui avaient autrefois été, sa chevelure, et, plaça la perle de cet avenir perdu, dans un petit sachet de tissu, qu'elle noua à l'aide du lien. Alors, elle s'approcha d'Hope, et noua ce simili de collier autour de l'Arcanin.
Ils savaient, tous, à présent, d'une façon ou d'une autre, qu'ils étaient face à un choix. Celui de suivre, ou de se rebeller, celui d'obéir, ou de refuser ce joug qui leur avait tant coûté.

Voilà, à quoi ils en étaient tous réduits, eux, qui avaient battus la route ensemble, ris des mêmes blagues, pleurer des mêmes douleurs. Leurs routes s'étaient séparées, ils avaient grandis, et choisi.

Sa décision à elle, était prise. Ses doigts se resserèrent autour du coup d'Arcanin, de la perle. Elle allait se battre. Se battre, pour son espoir. Son vœu, de voir un jour, l'avenir perdu dans la bille noir, se réaliser. Mais à présent…Pour ce qui était des autres…

Ils devraient prendre la décision de se battre contre leur ancien mentor, leurs anciens alliés, leurs sœurs, et leurs amis, et accepter, toutes les conséquences, qui découleraient de ce verdict. Parce, que, c'était la guerre, qui débutait à présent. La Guerre contre Twilight, la guerre contre leurs anciens alliés, la guerre contre des convictions, tout simplement opposées, et non mauvaises.

Ils allaient devoir choisir un camp.

Le regard de Sam, fut attirée par une lueur à la fenêtre, le soleil à l'horizon, était montée, et colorait le ciel, d'une teinte crépusculaire trompeuse, et un nom surgit dans le crâne de la jeune adulte. Le nom de cette résistance, le nom de ceux qui se battraient à ses côtés, contre ce qu'ils avaient eux même aidés à créer.

Aube.

Une Aube, qui percerait les ténèbres de la nuit qui avait succéder au Crépuscule. Une organisation, si semblable, et pourtant si différente de la dernière. Deux factions opposées en tout point, au titre si ironique. Deux camps. Deux Moment Symboliques. L'un Achève ce que l'autre Commence dans une étreinte aux nuances d'aquarelles identiques.

Quand Jours et Nuits s'entremêlent : Aube et Crépuscule.

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Deux mois s'étaient écoulés, depuis ce que l'on nommait à présent le jour du « Jugement ».

Comme l'avait prédit Peter, beaucoup de choses avaient changés, Hoenn, et Sinnoh, se pliaient assez bien aux exigences de Twilight, sans protester. Unys, beaucoup moins, et restaient encore Almia, Rhodes, qui restaient de territoires, hors d'atteinte. Néanmoins, le « culte » d'Arcéus, était très populaire.

Quoi de plus normal ? On offrait à la population, ce que l'humanité avait toujours voulu, et n'avait jamais pu obtenir. La certitude sur l'avenir.

Lucas traînait dans les chalets du Qg de Twilight, planifiant déjà ce qu'il avait à faire dans les prochains mois. Steven, s'était résigné, à céder sous la pression des journalistes, et son mariage, -totalement factice- avec Cynthia, allait être célébré dans quelques jours. Il devait également aller voir Chris et Angie, pour qu'ils lui cousent son uniforme officiel de Twiligtht, puis, faire un check-up de son équipe auprès de Régis, médecin officiel de l'organisation.

Bientôt, la deuxième cargaison de plaques d'Arcéus, allait être distribuée à la population, et Thémis serait exhibée comme une idole. La première était partie ce matin dans le secret, sans escorte, dans un premier coup d'essai. Il devait être prêt à l'accompagner et veiller à sa sécurité avec les autres, pour le lancement « officiel ».

Une ombre passa tout de même sur son visage. Il ne savait toujours pas ce qu'il était advenu des autres, depuis cette date fatidique, et il espérait, qu'en même temps que sa liberté surveillée, il obtiendrait quelques possibilités de retrouver, Daniel et Samantha, sans cause de tort à Marion.

Et aussi Gold.

Cristal était peut-être partie suivre son internat à Hoenn, mais si Lucas pouvait dénicher le frère de la Heart, il le ferait. Lentement le jeune adulte descendit l'escalier, qui menait au garage, là, où sommeillait, son tout nouveau bébé.

Une magnifique moto noire.

Lucas l'astiquait tous les jours, sans grand espoir de l'utiliser, Peter lui avait bien fait comprendre, qu'il préférait le voir, dans les cérémonies avec les différents politiciens du monde, à leur cirer les godasses et flatter leurs filles. Un réseau d'information devait s'établir entre les dirigeants du pays.

Alors que Mentali lui ramenait toute fière, un seau d'eau, la porte de la pièce claqua.

-Réunion.

Il n'eut même pas le temps de saluer la personne qui l'avait ainsi convoqué. Déçu, il abandonna son labeur, et rappeler Yang dans sa pokéball. Ses idées de fuite s'étaient envolée depuis des jours déjà, depuis qu'il avait compris, que la puce implantée dans ses Pokémons le dénonceraient où qu'il se cache. Aussi, se pliait-il docilement aux ordres, qui pour l'instant, n'avait rien d'astreignant. Juste, la vision de Thémis, qui vaquait, telle une ombre dans le Qg, lui arrachait toujours un frisson triste. Comme tous ceux qui avaient un jour connu la si enjouée Eléanore Sarl.

Lucas finit par arriver sur l'artère principale du quartier général, où une foule se pressait. Depuis le jugement, il était beaucoup plus rare de voir des champions et des membres du conseil des 4 dans les rues, cependant, le brun vit nettement Adrien bougon, entre un Trax blasé, et un Paul, toujours inexpressif.

Sûrement une autre déception amoureuse liée à Tanguy et Jasmine. A chaque fois que le blond rompait avec la championne d'Oliville le maître du feu se faisait des illusions. Lucas avait cessé de croire en l'amour et la galanterie, depuis les évènements sur le mont Argenté. C'était plus sage, et moins douloureux.

Peter monta sur l'estrade improvisée. Toujours en contact avec ses amis, Steven et Marc, il était néanmoins, le chef incontesté de l'organisation. Thémis le suivait, sans expression, toujours avec Régis à sa suite.

Il était triste, de voir comme le savant, s'accrochait à ce qui restait de son amie d'enfance, s'assurant à la moindre de ses visites, qu'elle ne manquait de rien, alors que la gijinka d'arcéus, n'avait besoin de rien pour vivre, pas même de boire.

-Bonjour si je suis ici, c'est pour vous annoncer, plusieurs nouvelles de grandes importances.

Ca, ils s'en doutaient tous.

-Tout d'abord, je vous rappelle qu'il est important que vous ayez tous un costume de l'organisation, pour vos prochaines missions, allez voir Chris et Angie, si vous n'en avez pas encore un.

Les deux énergumènes, remis de leurs blessures, saluèrent la foule timidement. Lucas ignorait pourquoi ils étaient revenus à Twilight, alors qu'ils avaient manqués de mourir à cause d'elle, mais son intuition lui murmurait, que leur choix était lié à celui de Cristal et du sien.

-Ensuite, j'aimerai vous présenter de nouveaux membres…

Alors que plusieurs silhouettes montaient sur l'estrade, quelqu'un tapota l'épaule de Lucas, qui se retourna. Il fit face, à un garçon d'au moins vingt centimètres de moins que lui, mais avec son mètre 90, il voyait rarement plus grand que lui. Il avait une chevelure noire, plutôt ordonnée, une peau assez sombre, mais pas vraiment basanée, et était tout de noir vêtu. Lucas ne put voir ses yeux, car il arborait des lunettes. En revanche, il vit distinctement une petite barre d'or pendouillant à ses oreilles, aussi, crut-il un instant avoir affaire à une fillette.

-Tu es Lucas ?

Il ne lui laissa pas le temps de répondre, et lui tendit une lettre.

-Un Charmillon vient de l'apporter, il y a ton prénom sur l'enveloppe.

Et il s'en alla, aussi vite qu'il était venu. Lucas, vit, qu'il portait un masque dans le dos, prêt à l'emploi, un masque avec le sigle de l'organisation, le haut d'une pokéball au dessus du V de la victoire. Curieux, il avisa la missive qu'on venait de lui donner, et son cœur rata un battement en reconnaissant l'écriture fine qui imbibait le papier.

C'était l'écriture de Daniel.

Enfin, des nouvelles de sa part ? Comment allait-il ? Déjà, il vivait. Mais, et son état de santé, est-ce qu'il mangeait bien ? Il faisait de l'exercice ? Se couvrait, malgré le retour à la normal des saisons, il faisait encore frais, comme si l'été, si longtemps retardé, rechignait à remplacer le printemps, alors que le temps de l'automne se profilait à l'horizon, déjà…

Une multitude de questions assaillit Lucas.

-Je vous présente, la Légion qui vous aidera tout au long de vos missions. Déclara Peter d'une voix forte, ce qui tira Lucas de ses songes, et des souvenirs de son ex-meilleur ami.

Plusieurs silhouettes se postèrent à côté du maître dragon. Tous de différentes tailles, et horizon. Il reconnut le garçon de tout à l'heure.

-Je vous présente…

Une première silhouette se présenta, elle avait les cheveux, plutôt pourpre, comme tous les autres, elle arborait des lunettes empêchant de voir ses yeux, mais elle était livide comme la mort, et s'affublait d'un kimono plutôt moderne, aux motifs azurée. Fine et élancée, elle n'avait aucune poitrine ou forme.

-Clotho, elle a 15 ans, et aidera, tout ce qui concerne les plaques et la gestion des prédictions.

La concernée fit un bref salut, avant de laisser place à une autre jeune femme. Celle-ci, avait les cheveux courts et châtain, dont deux perles roses encadraient le visage, elle portait une tenue plutôt légère, faites de voiles et de tissus fins, dans des nuances de roses et de mauve. Sa peau, était hâlée, comme souvent exposée au soleil. Elle en revanche, possédait des atouts féminins non négligeables.

-Voici Lachesis, elle a également 15 ans.

Lucas fit la grimace, encore des noms tarabiscotés, il n'était pas sûr de les retenir, s'ils se nommaient tous de la sorte. Le temps qu'il se répète le nom des deux premières, la troisième s'invita. Elle avait les cheveux aussi rouges que Silver, et la peau tout aussi claire, comme la première, sa silhouette était frêle, et avait encore des courbes de fillette. Elle était tout en noir et rouge.

-Ici, c'est Atropos, 15 ans comme les deux autres…

Ces trois prénoms, rappelaient furieusement quelque chose à Lucas, mais il n'arrivait pas à se remémorer quoi. .. Ce fut au tour des garçons de se présenter, et un gamin, à la chevelure cyan s'approcha de Peter, qui lui sourit tendrement.

-Voici Phénix, il a 17 ans.

Ils étaient tous jeunes décidément. Le concerné, s'affublait d'un chapeau rapiécé, et paraissait plutôt mal à l'aise devant tous les regards tourné vers lui, son look, avait quelque chose de débraillé, qui rappelait le style de Daniel à Lucas. Sa peau avait un teint quelque peu olivâtre, mais cela était sûrement à mettre sur le compte du trac. Le nom, quant à lui, fit mouche chez Lucas. La légende du phénix, qui renait de ses cendres ? Pourquoi pas, mais alors, tous les prénoms étaient en réalité des pseudonymes jusqu'à maintenant ?

-Maintenant Odin, 15 ans.

Cette fois, ce fut un tout jeune, aux boucles chataines, l'air mal assuré et rabougri. Il portait du blanc et du rouge, ce qui laissait présager qu'il s'entendrait sûrement très bien avec Chris et Angie, et donc, ne devait pas être un mauvais bougre. Ou alors c'était un psychopathe maniaque de la propreté, une possibilité à ne pas exclure. Peter gratifia le nouveau d'une main sur l'épaule, comme ému.

-Moros, et Hypnos…28 et 41 ans.
Les deux adultes du groupe, l'un arborait une rousseur candide tandis que l'autre avait des cheveux aussi sombres que la nuit. L'un blanc, au visage parsemé de tâches de rousseur, l'autre à la peau basanée. L'un tout souriant, l'autre renfrogné. L'un mince, et l'autre plutôt athlétique, l'un en habits jaunes et francs, l'autre en gris et ses nuances. On n'aurait pas put trouver plus différents l'un de l'autre, et pourtant Moros plaça son bras autour du cou du second, qui ronchonna, mais se laissa faire avec un sourire.

-Et voici Thanatos. 14 ans.

Le garçon de tout à l'heure se dirigea vers le reste du groupe. Il n'affichait aucune expression particulière.
Il était beaucoup plus jeune que ce que Lucas avait cru, lui, l'avait vu, d'un ou deux ans son cadet, au maximum. Il avait le corps déjà formé, musclé et ferme, sans en faire trop. Une drôle d'impression le traversa, comme une pulsation faiblarde au milieu d'une dizaines d'autres, affolées. Laissant Lucas perplexe.

Les nouveaux descendirent de l'estrade, conscient de leur nouvelle autorité, si Peter les avait présentés, eux, parmi les centaines de nouveaux qui affluaient chaque mois, pour s'engager, c'était pour une bonne raison.

Doucement, on dressa un écran derrière Peter, et des images défilèrent, pour changer de sujet. Marion arriva près de Lucas, et tous deux, frissonnèrent d'effroi, quand ils virent le train, qui contenait les plaques d'Arcéus, leur première cargaison, renversé sur la voie. Fumant, les roues encore battant l'air, en vain.

-Ses images, ont été postées sur internet il y a une heure. Déclara Peter, froid. –Je ne sais pas comment des gens ont su pour notre cargaison, mais les faits sont là.

Non, les faits n'étaient pas là, il sous-entendait, qu'il y avait des taupes parmi eux. Lucas sentit son sang se glacer, sachant parfaitement, qu'il était bien haut dans la liste des premiers suspects, avec Cristal.

« Ici Christelle, en direct devant les voies ferroviaires faisant la liaison, Jadielle-Safrania… » Déclara une voix off, sur la vidéo.

Lucas frémit, et plus encore, quand il revit le visage carrés, aux cheveux plutôt roux, bien que brunissant au fil des années, de la Christelle qu'il avait connu. Ses tâches de rousseurs encerclaient joliment ses yeux marrons fardés et aux cils surnaturellement longs. Elle portait des couettes hautes, qui lui tombaient en une cascade de boucles. Ses tenues, toujours aussi excentriques, et pleines de dentelles, noires ou blanches, n'avaient pas changé en revanche, si ce n'est de support.

« Ceci, est la cargaison de Twilght transportant les plaques attendues par la population et comme vous le constatez, il a été attaqué ! »

Une silhouette surgit alors des ruines du train, provoquant un cri de surprise de Christelle, qui soit était devenue très bonne actrice, soit était vraiment surprise.

La femme sur le train, Lucas l'aurait reconnu entre mille, malgré le masque de tissus sur ses yeux. C'était Samantha. Elle était vivante. Elle allait bien. Ses cheveux aux reflets bleus flottaient dans le vent, et ses prunelles argentées, brillaient, de toute leur beauté.

Le cœur de Lucas palpita de soulagement.

Alors que derrière son dos, toute une troupe se jetait et détruisait les plaques d'Arcéus, Lucas reconnut tout de même, une silhouette qui tranchait des autres, car elle emportait les biens, plutôt que ne les détruisait, et avait un drôle de costume, différent, bleu et rouge. Cachant bien mieux son identité, il ne voyait que ses cheveux noirs coupés au carré dépasser d'un chapeau étrange, des écouteurs sur les oreilles, un masque sur les yeux, une large cape camouflant le reste.

« PETER ! »

La femme de la vidéo, Sam, pointa la caméra du doigt, et lança avec défi :

« Ceci n'est que le début ! »

La vidéo coupa, et Peter se tourna vers l'assemblée, les mains dans le dos.

-Dorénavant, toutes nos cargaisons seront escortées.

Il ferma les paupières, et poussa un soupir résigné, avant de déclarer :

-Cela me désole, mais…

Il rouvrit les yeux.

« Si c'est ce qu'elle veut, très bien. C'est la guerre. »

Personne ne répondit, c'était un ordre, et Lucas, sentit son monde s'effondrer. Parce que c'était trop bête. Ils avaient marchés ensembles, vécus ensembles, grandis ensembles, partagés, joie comme peine, et se trouvaient aujourd'hui, confrontés les uns et les autres. Les Destins cruels, avaient fait croiser leurs chemins, puis se séparer, et aujourd'hui, devant leurs liens rompus, gisants ne s'étendait qu'un avenir destructeur. La guerre ? La guerre contre Samantha ? La guerre contre ceux qu'ils avaient un jour chéris ? C'était absurde.
Le regard de Lucas coula vers ce qui avait été Eléanore, et se mordit les lèvres. Parce qu'il savait la vérité, il savait le véritable motif de cette bataille dont les premiers coups de canons venaient de sonner.
C'était une guerre, pour une seule et unique personne.

Celle, qui avait lié toutes leurs Destinées.





« At this moment, there are six billion, four hundred seventy million, eight hundred eighteen thousand, six hundred seventy one people in the world. Some are running scared. Some are coming home. Some tell lies to make it through the day. Others are just not facing the truth. Some are evil men, at war with good. And some are good, struggling with evil. Six billion people in the world, six billion souls. And sometimes, all you need is one. »

PEYTON SAWYER

« À ce moment précis, il y a 6 470 818 671 personnes dans le monde. Certains prennent peur, certains rentrent chez eux, certains racontent des mensonges pour s'en sortir, d'autres font simplement face à la vérité. Certains sont des êtres maléfiques en guerre avec le bien et certains sont bons et luttent contre le mal. Six milliards de personnes, six milliards d'âmes, et parfois, il ne vous en faut qu'une seule... »

















Coucou c'est moi, l'auteur, alors, que suis-je censée dire au terme de cet épilogue ? Je n'en sais rien à vrai dire, je suis un peu choquée, de voir enfin le bout de cette histoire. Aussi, vais-je vous laisser me faire part de vos impressions, aux termes de l'histoire d'Eléanore et Samantha. Bientôt, quelques bonus, pour prolonger leurs aventures, et le trailer de la saison 2, qui ne viendra pas tout de suite malheureusement. J'ai quelques projets à achever et tout à mettre en ordre bien que j'ai toutes les idées et la fin. Vous l'aurez deviné, la prochaine saison se nommera Destins-Liés-Aube. Plus d'informations, dans les prochains jours, je ferai un poste, rien que pour vous dévoiler les « coulisses » de cette fiction !

A très bientôt donc, et merci à tous ceux qui m'ont suivie, et encouragée, entre autres, Kanon, Mixylia, Deviko, Bleuts, Dragonna, Cat, Sterem, Evolie-princesse, Lenaix, Domi'leaf, et encore bien d'autres dont les pseudos peuplent leurs commentaires, si gentils.

-Merci encore d'avoir suivi Destins-Liés-Crépuscule-